Campus n°96

Dossier/La révolution verte

Le logement propre fait son chemin

Relativement ancien, le parc immobilier genevois est gourmand en énergie. Pour inverser la tendance, plusieurs projets de bâtiments propres dans lesquels l’Université est directement impliquée sont sur le point de voir le jour

Près de la moitié de l’énergie utilisée aujourd’hui à Genève est destinée au chauffage des bâtiments. C’est que le parc immobilier du canton demeure relativement ancien: 73% des bâtiments ont en effet été construits avant 1980 et 32% avant 1945. Le rythme des rénovations est par ailleurs assez lent, puisqu’il oscille entre 1 et 2% par année. Quant à la part d’énergie renouvelable, elle reste encore faible avec un taux de 1,6% environ. Autant dire que le potentiel d’économie dans ce domaine est considérable.

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A l’heure où les expériences de «logements propres» se multiplient aux quatre coins de l’Europe), l’Université est directement impliquée dans la construction de trois bâtiments répondant aux toutes dernières normes écologiques: la cité solaire de Satigny, l’extension du Centre médical universitaire (CMU) et un immeuble de logements pour étudiants situé dans le quartier de Plainpalais.

Destiné à accueillir une quarantaine d’étudiants d’ici au mois d’octobre, le bâtiment de la rue des Pavillons respecte les labels Minergie P et Minergie Eco, qui sont les plus exigeants en la matière, ce qui constitue une première à Genève. Conçu en collaboration avec la Coopérative de logement pour personnes en formation (Ciguë), il est composé d’appartements en duplex. Sur un étage se trouvent les salons et cuisines, sur l’autre, les chambres. Afin de minimiser l’impact écologique du bâtiment, les architectes du projet (le bureau Face à face) ont apporté un soin particulier au choix des matériaux utilisés, ainsi qu’à l’énergie nécessaire pour les construire et les transporter. Equipé d’une chaufferie à bois de la taille de celle d’une villa, mais qui est très performante, l’immeuble est l’un des premiers bâtiments genevois doté d’une isolation thermique en fibre de bois insufflée. Le dispositif est complété par de grandes fenêtres à triple vitrage, des panneaux solaires et du matériel de cuisine peu gourmand en électricité.

Toujours au centre-ville, mais du côté de Champel cette fois, le chantier de la 5e étape du CMU, dont la première pierre a été posée le 9 septembre dernier, repose également sur un concept énergétique respectant les normes du développement durable.

D’une surface de 36 000 m2, répartie sur cinq sous-sol, un rez-de-chaussée, neuf niveaux et un attique, ce nouvel édifice bénéficiera en effet d’une enveloppe énergétiquement performante. L’eau chaude sanitaire sera fournie par des panneaux solaires et la lumière naturelle constituera la principale source d’éclairage du bâtiment, qui est destiné à accueillir l’Ecole de pharmacie Genève-Lausanne, la Section de médecine dentaire, l’animalerie, l’unité de développement et de recherche en éducation médicale, ainsi qu’une crèche.

Afin de limiter l’utilisation d’eau potable, le captage des eaux de pluie sur la toiture est prévu, ainsi que l’installation d’un système permettant la réutilisation de l’eau pour les sanitaires et l’arrosage du parc. Pour le chauffage, c’est une méthode permettant d’optimiser les possibilités de récupération d’énergie qui a été retenue. Enfin, la terrasse du 3e étage sera végétalisée selon le principe des toits verts, ce qui permettra notamment de mieux fixer les pollens et autres poussières atmosphériques, de réduire les émanations de CO2, de rafraîchir le bâtiment et de favoriser la biodiversité.

L’Université est également impliquée dans la réalisation de la cité solaire de Satigny par le biais de Floriane Mermoud, maître-assistante à l’Institut des sciences de l’environnement, qui assurera le suivi énergétique du projet durant deux ans.

«L’objectif est de vérifier si ce qui est annoncé sur le papier se vérifiera dans la pratique, explique la chercheuse. De précédentes expériences, notamment avec l’ensemble des Pommiers au Grand-Saconnex, ont montré qu’il y a souvent une panoplie de problèmes qui surgissent de manière inattendue dans ce type de projets. Il s’agira donc d’effectuer un suivi au jour le jour, notamment à l’aide de simulations informatiques, afin de détecter les éventuels dysfonctionnements et de pouvoir proposer des solutions permettant de corriger le tir.»

Baptisé «Les Cépages», en guise de clin d’œil à la plus grande commune viticole de Suisse, ce chantier donnera le jour, entre juillet et novembre 2010, à ce qui constituera la plus importante cité solaire de Suisse et l’une des plus grandes à l’échelle européenne. Constitués de quatre immeubles garantis zéro émission de CO2, «Les Cépages» regroupent 78 appartements dont le chauffage est alimenté à 80% par de l’énergie solaire grâce à l’installation de 1160 m2 de panneaux thermiques sur les toits. Les 20% restants seront fournis par l’énergie électrique verte des Services industriels genevois (SIG) et serviront essentiellement à alimenter un système de pompes à chaleur novateur mis au point par un bureau carougeois. «C’est la combinaison de ces deux techniques qui rend le projet particulièrement intéressant, note Floriane Mermoud. Les pompes à chaleur permettent en effet de pallier le manque de soleil, notamment en hiver. Et si les résultats sont à la hauteur, c’est un modèle qui pourrait facilement être généralisé, du moins pour les bâtiments neufs.»

Afin de pouvoir partir en vacances l’esprit léger, les habitants des Cépages auront par ailleurs la possibilité de régler la température de leur logement par Internet. Si tout fonctionne comme prévu, le surplus d’énergie qui sera produit en période estivale pourra même servir à alimenter les immeubles voisins.