[Précédent]

Introduction

      Le but de la thèse est une présentation des alvéoloplasties secondaires et une comparaison de deux techniques de couverture chirurgicale. Elle s'appuie sur une étude rétrospective de 41 cas opérés dans l'unité de Chirurgie Maxillo-Faciale de l'Hôpital Cantonal Universitaire de Genève.

      Ce travail donne l'opportunité d'expliquer comment s'intègrent les alvéoloplasties dans le cadre de la prise en charge des fentes labio-maxillo-palatines.


1. Rappel anatomique


Ostéologie

      Le palais osseux est formé horizontalement essentiellement par les apophyses palatines de l'os maxillaire qui se rejoignent sur la ligne médiane au niveau de la suture palatine médiane terminant entre les incisives centrales. Le trou palatin antérieur est également poursuivi par la suture incisive, qui se termine vers les incisives latérales.

      Postérieurement, les lames postérieures de l'os palatin terminent le palais dur. La suture palatine transverse assure le joint entre l'os maxillaire et l'os palatin.

      La voûte palatine est ceinturée par l'arcade alvéolodentaire, ou processus alvéolaire de l'os maxillaire.

      Les trous palatins principaux suivis vers l'avant des gouttières palatines et latéralement des épines palatines appartiennent à l'os palatin. Ils peuvent être accompagnés de trous palatins accessoires.


Muqueuses et tissus gingival

      Le palais dur et l'arcade alvéolodentaire sont recouverts d'une gencive attachée kératinisée a périoste adhérent, épaisse à la voûte palatine. Celle-ci devient libre non kératinisée au niveau du palais mou et dans le vestibule.


Musculature

      La musculature du palais mou, ou voile du palais, est constituée vers le haut des muscles élévateurs du voile et tenseurs du voile. Le muscle palato-pharyngé assure un arc musculaire vers le bas. Le muscle uvulaire est intrinsèque à la luette.


Vascularisation

      Les branches de l'artère maxillaire vascularisent toute la région palatine: les artères grandes et petites palatines, branches de l'artère palatine descendante, passent par les foramens palatins postérieurs. L'artère palatine antérieure est une terminaison de la sphénopalatine. Les artères alvéolaires supérieures et postérieures vascularisent l'arcade alvéolodentaire ainsi que la gencive alvéolaire, en anastomose antérieurement avec l'artère sous-orbitaire.


Innervation

      Le nerf maxillaire, ou 2e branche du nerf Trijumeau, assure l'innervation sensitive par ses rameaux terminaux: nerfs alvéolaires supérieurs antérieurs, moyens et postérieurs, nerf infraorbitaire pour la gencive antérieure et nerfs ptérygo-palatins pour le voile du palais et le palais dur.

      Le plexus pharyngé formé par le nerf Vague et le nerf Glossopaharyngien assure l'innervation motrice du voile du palais.


Organes dentaires

      La dentition déciduale comprend 10 dents maxillaires: 2 centrales, une canine et 2 molaires. Leur apparition moyenne commence vers le 6e mois, se complète vers 3 ans et se remplace par la dentition définitive dès la 7e année.

      La dentition définitive comprend 16 dents au maxillaire: 2 incisives, 1 canine, 2 prémolaires, 3 molaires. Elle est généralement complète vers 14 ans, hormis pour la 3e molaire qui peut apparaître jusqu'à la 30e année.


2. Embryologie

      Le développement facial est organisé autour de la bouche primitive, ou Stomodeum, apparu vers la 3è semaine. En effet, vers la 4e semaine, des cellules ectodermiques de la crête neurale vont migrer dans le tissus mésodermique intraembryonnaire et former les arcs pharyngiens, eux-mêmes à l'origine de tout le massif facial.

      Le tissus à l'origine de la face est donc un tissus ecto-mésenchymateux .

      Durant les 5e et 6e semaines, le premier arc pharyngien va se différentier en 5 bourgeons faciaux: 1 bourgeon frontal, 2 bourgeons maxillaires et 2 bourgeons mandibulaires.

      De chaque côté apparaissent alors le bourgeon nasal interne et le bourgeon nasal externe organisés autour des placodes olfactives qui deviennent gouttières olfactives (fig 1).

      La fusion des bourgeons maxillaires et nasaux (fig 2) va déterminer ensuite l'architecture du massif naso-maxillaire et l'absence de fusion va entraîner les différentes fentes labio-maxillo-palatines.

      Palais primaire : se forme à la 6e semaine par fusion du bourgeon maxillaire et du bourgeon nasal interne, verticalement. En avant, cette fusion correspond au futur emplacement des incisives latérales, et en arrière à celui du trou palatin antérieur.

      Palais secondaire: en arrière du palais primaire, les bourgeons maxillaires poursuivent leur fusion sur la ligne médiane par la croissance des lames palatines dès la 7e semaine (fig 3, fig 4, fig 5). Elles rencontrent verticalement le septum primaire issu du bourgeon nasofrontal.

      Les organes dentaires issus de cellules de la crête neurale se différentient dès la 7e semaine et tous les germes sont présents à la 10e semaine.

      

Fig. 1 : 5-6e semaine. Formation des bourgeons de la face

D'après Moore & Persaud, Chap.11, pp.219-238

      

Fig. 2 : 7-10semaine. Fusion des bourgeons nasaux interne et nasaux externes

D'après Moore & Persaud, Chap.11, pp.219-238

      

Fig. 3 : 7e semaine. Après formation du palais primaire, formation du palais secondaire

D'après Moore & Persaud, Chap.11, pp.219-238

      

Fig. 4 : Fusion des lames palatines et formation du palais secondaire

D'après Moore & Persaud, Chap.11, pp.219-238

      

Fig. 5 : 10e semaine. Fin de formation formation du palais secondaire

D'après Moore & Persaud, Chap.11, pp.219-238

3. Epidémiologie et étiologies des fentes labio-maxillo-palatines


Epidémiologie

      L'épidémiologie et l'étiologie des fentes labiales avec ou sans division maxillo-palatine sont distinctes de celles des fentes palatines isolées. Ainsi la présence d'une fente labiale avec ou sans division palatine chez un membre d'une famille augmente le risque de cette même pathologie pour un autre membre de la famille, mais pas le risque de division palatine isolée. La situation est similaire pour une famille présentant un cas de fente palatine isolée , qui par conséquent a plus de risque d'avoir un autre membre avec fente palatine mais sans fente labio-maxillaire.

      L'incidence a des variations raciales : pour les fentes labiales avec ou sans fente maxillo-palatine, elle est de 1 cas sur 650-1300 naissances chez le type Caucasien. La fréquence la plus élevée est retrouvée chez les populations Amérindiennes (3.6/1000) et la plus basse chez les populations Noires (0.3/1000). Les populations Orientales présentent une incidence 2 fois plus élevée que les populations Caucasiennes (Japon 2.1/1000, Chine 1,7/1000) (table 1).

      Les fentes labiales avec ou sans fente maxillo-palatine sont plus fréquentes chez les mâles : environ 2 garçons pour une fille. Les cas sévères sont souvent de sexe masculin (Cohen 2000, Piette 1991).

      Dans sa forme unilatérale, la fente labiale avec ou sans division maxillo-palatine est 2 fois plus fréquente à gauche qu'à droite (Gorlin2).

      La fréquence des fentes palatines isolées est en moyenne de 0,4/1000 naissances chez des populations Caucasiennes et Noires. A l'inverse des fentes labiales avec ou sans fente palatine associée, le sexe féminin est atteint 2 fois plus souvent que le sexe masculin.

      Tous collectifs confondus, 25% présentent une fente labiale isolée, 45% une fente labiale associée à une fente maxillo-palatine et 30% une fente palatine isolée.

      

Tableau 1

D'après Oka S.W., Epidemiology and genetics of clefting: with implications for etiology, d'après, Cooper H.K. and al., Cleft palate and cleft lip: a team approach to clinical management and rehabilitation of the patient, Ed Saunders, chap 3, 110-143, 1979

Pathogénèse et Etiologies

      Bien que de nombreux cas de fentes oro-faciales soient certainement des cas sporadiques, il est établi que des facteurs génétiques sont souvent associés à cette pathologie. Par exemple, la concordance d'une fente labiale est bien supérieure chez des jumeaux monozygotiques (40%) que chez des jumeaux dizygotiques (4.2%). Le même fait a été reporté pour les fentes palatines isolées (Wyszinski 1996).

      En fait, l'origine multifactorielle est le plus souvent retenue:

      

Tableau 2

D'après Cohen M.M Jr., Etiology and pathogenesis of orofacial clefting, Oral and Maxillofacial surgery Clinics of North America, 12:3, 379-397, 2000

      En conclusion, la plupart des auteurs s'accordent sur le fait que les fentes oro-faciales ont une origine multifactorielle, avec une interaction complexe entre des facteurs génétiques à pénétrance et seuils d'expression variable, modulés par des facteurs environnementaux. Ce caractère multifactoriel rend par ailleurs le conseil génétique aux parents difficile et empirique. Un modèle d'estimation du risque familial de récurrence de la malformation a été proposé par Tolarova (table 3): il ne reste qu'indicatif et doit être modulé par des variables telles que le sexe, la race, la sévérité de l'atteinte et les facteurs environnementaux.

      

Tableau 3

D'après Tolarova M., Empirical recurrence risk figures for genetic counseling of clefts. Acta Chir Plast (Praha), 14:234-235, 1972

Syndromes et Malformations associées

      Selon les auteurs et le groupe de patients étudiés, de 44% à 95% des cas de fentes oro-faciales sont accompagnées d'une malformation mineure (CohenJr 1978, CohenJr 2000, Gorlin2, Hagberg 1997, KällenB 1996, Shprinzen 1985, Myrianthopoulos 1974 ). Parmis celles-ci, on retrouve des hernies ombilicales, des anomalies des membres (en particulier des doigts et orteils), des anomalies des oreilles, des malformations cardiaques et un retard mental.

      Les fentes oro-faciales accompagnent fréquemment des syndromes génétiques vrais: parmis ceux-ci (plus de 340 ont été décrits), citons le syndrome de Van der Woude, le syndrome de Treacher Collins (ou dysostose mandibulo-faciale, ou syndrome de Franceschetti-Zwahlen-Klein), le syndrome del(22q11.2) (ou syndrome de DiGeorge).

      Le syndrome de Robin malformatif défini par Pierre Robin en 1923 comprend une tétrade sémiologique obligatoire: une micromandibulie, une glossoptose, une division palatine et un syndrome apnéique du nouveau-né ( Robin 1923).

      Devant la grande variété des formes cliniques, on parle actuellement plus de 'séquence de Robin', où la fente palatine est secondaire à une mandibule hypoplasique et à une ptose de la langue positionnée postérieurement prévenant la fusion des lames palatines (fig 6 ).

      Une séquence de Robin est retrouvée dans de nombreuses affections génétiques: citons l'arthro-ophtalmoplégie héréditaire (syndrome de Stickler), le syndrome campomélique, le syndrome cérébro-costo-mandibulaire, le syndrome de persistance de la veine cave supérieure gauche, la dysplasie spondylo-épiphysaire congénitale (Reychler 1991).

      L'hypoplasie mandibulaire dans le cadre de la séquence de Robin peut être une micromandibulie, comme dans le syndrome de Treacher-Collins, ou une rétromandibulie avec mandibule de taille normale mais à angle basal ouvert, comme par exemple dans le syndrome de DiGeorge.

      

Fig. 6


4. Croissance et développement

      (Berkowitz 1977,1996(2), Delaire 1973, 1974, 1977, Moss 1962, 1964, 1969,1968, Stricker 1993, Piette 1991 chap.1-17)


a) Croissance normale du massif facial

      La croissance du massif facial débute par définition dès la 8e semaine de développement in utéro, après les processus d'histogénèse et d'organogénèse.

      La croissance du maxillaire, comme la croissance de tout le splanchnocrâne en général, est régie par des phénomènes complexes qui impliquent divers facteurs:


Les croissances suturales et l'ossification

      Après apparition de points d'ossification, l'os maxillaire, tout comme 14 os de la face, va suivre un mode d'ossification de type membraneux. Delaire et Moss parlent du concept 'd'unités squelettiques maxillaires' indépendantes, dont les plus importantes sont le prémaxillaire et l'arcade alvéolo-dentaire. Ce développement multiloculaire des os de la face (maxillaire, les zygomatiques, les os propres du nez, les os palatins, l'unguis, les cornets inférieurs et le vomer) va permettre un développement complexe en 3 dimensions par l'intermédiaire des sutures syndesmotiques les reliant entre eux .

      De façon indirecte , la croissance synchondrotique de la base crânienne entraînera une poussée de tout le massif facial vers l'avant et le bas, par l'intermédiaire en particulier des buttoirs sphéno-prérygoidiens. Cette croissance est cruciale pour le développement facial, comme en témoignent les rétromaxillies sévères retrouvées dans les syndromes achondroplasiques.

      Le septum nasal, osseux et cartilagineux, est déterminant pour la mésialisation et l'abaissement du maxillaire.

      La croissance transversale du maxillaire est notamment assurée par les sutures palatine sagittale, sagittales internasales, intermaxillaires et interpalatines.


Le remodelage

      Les phénomènes d'apposition/résorbtion périostée jouent certainement un rôle important dans la croissance maxillaire, en particulier pour sa croissance transversale et celle des processus alvéolaires ainsi que pour l'abaissement de la voûte palatine et du plancher des fosses nasales.

      Ces phénomènes sont influencés par des facteurs biodynamiques provenant des tissus mous, notamment musculaires.


Les tissus mous et les facteurs biodynamiques

      Le développement des tissus mous joue un rôle biodynamique certain sur la croissance osseuse. Berkowitz estime que ce rôle est le facteur principal, bien avant les facteurs génétiques de croissance osseuse, les croissances suturales ou les facteurs mécaniques.

      Ainsi, le développement facial suit la croissance des organes tels que la musculature, les nerfs, les glandes, etc... L'orbite et le développement de son contenu détermine une poussée du massif facial vers le bas et vers l'extérieur. L'accroissement volumétrique du cerveau entraine un mouvement antérieur et vers le bas. Le développement des cavités nasales par la fonction respiratoire tout comme la pneumatisation des sinus jouent un rôle sur l'expansion tridimensionnelle du maxillaire. La voûte palatine subit l'action propulsive et expansive de la fonction linguale.

      Finalement, le muscle et son développement semblent être les facteurs principaux, notamment toute la musculature masticatoire et l'ensemble des pauciers de la face.


Génétique et environnement

      S'agissant non seulement de la croissance du massif facial mais du squelette en général, la programmation génétique du développement joue un rôle indiscutable, comme en témoigne une transmission héréditaire de certaines dysmorphoses faciales ou de sydromes malformatifs plus sévères.

      De même, des facteurs endocrinologiques sont impliqués dans la croissance normale ou pathologique: citons comme exemple le nanisme ou gigantisme hypophysaire.

      Des facteurs environnementaux peuvent être invoqués: troubles nutritionnels, tératogènes, attitudes posturales, troubles ventilatoires et parafonctions (déglutition infantile, succion, etc...).

      Les traitements d'orthopédie dento-faciale sont des facteurs environnementaux particuliers. Leurs effets sur la croissance faciale dépasse le cadre de cet exposé.


b) Croissance maxillaire chez le sujet porteur d'une fente

      (Berkowitz 1996(2), Prudzanski (1953), Delaire (1977), Kriens (1991), Bishara (1987)

      Ce chapitre présente les trouble de la croissance maxillaire dans les formes uni et bilatérales des fentes labio-maxillo-palatines complètes. La croissance des formes incomplètes, des formes palatines isolées ou labiales pures ne seront pas abordées.


Etiopathogénie des trouble de la croissance chez les sujets porteurs d'une FLMP

      La croissance du maxillaire chez le sujet porteur d'une FLMP non opérée résulte de l'interaction de divers facteurs qui permettent d'expliquer le positionnement sagittal, transversal et vertical perturbé des segments maxillaires :


Croissance d'une FLMP unilatérale dès la naissance


Le type de fente :

      Les segments maxillaires n'auront pas le même schéma développemental s'il s'agit par exemple d'une fente maxillaire unilatérale, bilatérale, palatine isolée ou labiale pure.


La sévérité de la fente :

      La croissance des segments maxillaires sera différente selon qu'il s'agisse d'une fente complète ou incomplète ou qu'il y ait persistance d'un pont osseux.


Le déséquilibre musculaire :

      Pour la plupart des auteurs, le déséquilibre anatomique de la musculature oro-faciale joue un rôle essentiel dans la pathogénie du développement des FLMP. En particulier la sangle naso-labiale et sa discontinuité entrainent affaissements et tractions asymétriques, la langue, avec son rôle de poussée expansive transversale du maxillaire et son interposition effective dans la brêche palatine.


La croissance squelettique :

      En plus de l'hypoplasie intrinsèque des segments maxillaires, tout le squelette facial influence leur développement (voir chapitre précédent). En particulier le septum nasal qui influence la migration antéro-latérale du grand segment dans les FLMP unilatérales et la poussée antérieure du prémaxillaire dans les formes bilatérales.

      Comme cité précédemment, les troubles développementaux des segments maxillaires sont la résultante d'anomalies osseuses et musculaires. Débuté in utero, le trouble de la croissance va s'aggraver rapidement au cours des premiers mois de la vie. On retrouve alors 2 segments maxillaires, le petit segment (du côté de la fente) et le grand segment (du côté opposé).

      Le petit segment : hypoplasique car séparé du septum nasal et ne subissant pas sa poussée antérieure, il n'est toutefois que peu déplaçé : la résultante entre la pression linguale et l'insertion labiale anormale entraine un déplacement de la tubérosité en dehors et un recul de sa partie antérieure.

      Le grand segment : solidaire du prémaxillaire et de la cloison nasale, la résultante de la poussée septale, linguale et de la bride musculaire orbiculaire va entrainer un mouvement global en dehors, la tubérosité restant généralement en place. Les structures médianes suivent cette déviation latérale.

      Ces déplacements entrainent un décrochement des 2 segments l'un par rapport à l'autre.

      Par voie de conséquence, l'étage nasal est également concerné :

      La pyramide nasale, sa pointe, la columelle et la cloison antérieure sonts déviées du côté sain.l'hypoplasie de la région canine et de l'orifice pyriforme entraine un affaissement de l'aile narinaire et du cartilage alaire du côté de la fente, avec une insertion trop en dehors et trop basse.

      O. Kriens a étudié la situation sur moulage de 298 enfants non opérés de 7 à 133 jours de vie, avec un groupe témoin de 47 sujets (fig 7). Il relève les malpositions mentionnées ci-dessus, avec notamment :

  • Une latéralisation des tubérosités maxillaires avec augmentation du diamètre transversal postérieur.
  • Une augmentation du diamètre transversal antérieur.
  • Une rotation externe de la région canine du grand segment.
  • Une rotation interne de la région canine du petit segment.
  • Une diminution du diamètre antéro-postérieur.

      

Fig. 7 : Comparaison de la croissance de FLMP uni et bilatérales chez l'enfant non opéré entre 7 jours et 4 mois de vie.

D'après Kriens O., Data objective diagnosis of infant cleft lip, alveolus and palate. Morphologic data guiding understanding and treatment concepts,Cleft Palate Craniofac J, 28(2):157-68, 1991

Croissance d'une FLMP unilatérale non traitée chez l'adulte

      L'articulé dentaire au niveau des blocs postérieurs est souvent normal à l'âge adulte. Toutefois, en fonction de l'hypoplasie des segments et de sévérité de l'insuffisance osseuse au niveau de la fente, on retrouve fréquemment (Bishara) :

  • Une inclinaison antéro-latérale du prémaxillaire vers le côté sain (grand segment) avec augmentation du surplomb incisif.
  • Une bascule médiane du petit segment, avec occlusion croisée canine et souvent prémolaire.
  • Une version vers la fente des dents adjacentes à celle-ci ainsi qu'une tendance à l'infraclusie incisivo-canine.
  • A l'analyse téléradiographique, une rétrusion maxillaire et une rotation horaire (en avant et vers le bas) du plan mandibulaire avec insuffisance verticale postérieure.

Croissance d'une FLMP bilatérale dès la naissance

      Contrairement à la forme unilatérale, les segments latéraux, bien que courts, ne présentent pas de déviation axiale et sont placés latéralement et parallèlement à la position d'une arcade normale (fig 7). Les diamètres transversaux antérieurs et postérieurs sont augmentés.

      Le prémaxillaire est projeté vers l'avant par l'action vomérienne et linguale. Le diamètre antéro-postérieur est donc augmenté.


Croissance d'une FLMP bilatérale non opérée à l'âge adulte

      L'évolution non traitée d'une forme bilatérale va montrer :

  • Une endomaxillie sur les segments latéraux avec diminution du diamètre intercanin plus important qu'au niveau molaire
  • Une procidence du bourgeon median
  • Une palatoversion incisive.

Anomalies dentoalvéolaires dans les FLMP

      Quelque soit le type de fente, on peut reconnaître plusieurs types d'anomalies dentoalvéolaires :

      1. Les agénésies :

      Elles concernent essentiellement l'incisive latérale du côté de la fente, parfois du côté sain. Les incisives centrales et les prémolaires sont rarement agénétiques.

      2. Les malformations dentaires :

      Les incisives centrales et latérales sont fréquemment hypoplasiques, avec morphologie anormale. L'incisive latérale du côté de la fente est le plus souvent hypoplasique lorsqu'elle n'est pas agénétique. Les prémolaires sont plus rarement concernées.

      3. Les dents surnuméraires :

      Le plus souvent les canines ou les incisives latérales.

      4. Les malpositions dentaires :

      Les incisives centrales sont souvent palato et distoversées, avec une rotation mésio-palatine. L'éruption de l'incisive latérale se produit fréquemment dans la fente et du côté palatin. La canine montre souvent une angulation mésio-palatine, avec un retard d'éruption.

      5. Inclusion :

      Concerne essentiellement les canines. Un geste iatrogène sur le germe dentaire lors de l'alvéoloplastie peut être responsable de la rétention canine.

      6. Pertes dentaires prématurées :

      Dans la région de la fente, le support osseux alvéolaire est pauvre : cette situation sera progressivement péjorée chez l'adulte, avec un parodonte compromis pour les dents adjacentes à la fente. Les pertes dentaires peuvent être également consécutives à une chirurgie iatrogène ou au traitement orthodontique (rhizalyses).

      7. Les troubles occlusaux :

      Comme cité plus haut, les troubles occlusaux dépendent du type de fente. De façon générale, on note :

  • Une tendance à la classe III dentaire
  • Un articulé croisé en région incisive, canine et prémolaire
  • Une palatoversion incisive.

c) Rôle de la chirurgie sur les troubles de la croissance faciale

      De nombreux auteurs se sont penchés sur le rôle joué par la chirurgie sur la croissance du massif facial, qu'il s'agisse du type de geste chirurgical ou de l'âge auquel il est effectué. Différentes opinions sont encore largement débattues, notamment entre les adeptes de l'alvéoloplastie primaire et secondaire.

      Sur la base d'une large étude multicentrique portant sur 538 cas de FLMP unilatérales, Ross (1972, 1987) précise les effets de la cheiloplastie, de la palatoplastie, de l'alvéoloplastie et du traitement orthopédique sur la croissance faciale.


Rôle de la palatoplastie

      La palatoplastie du palais mou et dur semble être le facteur chirurgical majeur qui empêche une croissance normale. En théorie, on l'explique par une relation causale entre les cicatrices fibreuses après chirurgie et une croissance maxillaire insuffisante, qu'il s'agisse de cicatrices dans la région ptérygo-palatine (empêchant la propulsion maxillaire), dans la région de la ligne médiane (empêchant l'expansion transversale), ou au niveau parodontal (retenant l'éruption dentaire palatinement).

      Toutes techniques confondues comparé au groupe non-opéré, Ross relève une hauteur maxillaire postérieure et une projection antérieure nettement diminuées dans le groupe ayant bénéficié d'une palatoplastie. La longueur du maxillaire n'est par contre pas affectée.

      Une palatoplastie en deux temps (palais mou précoce et palais dur tardif) a été proposée par Gillies & Fry en 1921, suggérant un effet iatrogène moindre sur la croissance maxillaire si l'on s'abstient d'intervenir sur le palais osseux les premières années. L'idée a été reprise plus récemment (Schwenckendieks 1978, Hotz 1975). Dans son étude, Ross conclut à l'inverse que la palatoplastie précoce (avant 20 mois) perturbe sensiblement moins la croissance antéropostérieure maxillaire que la palatoplastie tardive (entre 21 et 33 mois) ou très tardive (de 4 à 9 ans), bien que la différence soit statistiquement peu significative. Par contre la hauteur postérieure maxillaire est plus faible pour les cas traités par palatoplastie précoce.

      Dans cette même étude, l'auteur ne relève pas de différence entre les deux techniques de palatoplasties les plus utilisées, techniques de Von Langenbeck ou de 'Pushback', quant à leur effet sur la croissance.


Rôle de la cheiloplastie

      L'effet de la chéiloplastie sur la croissance maxillaire demeure encore mal connu. En théorie, il est aisé d'imaginer qu'une sangle cicatricielle après chéiloplastie limite la progression antéropostérieure du maxillaire ou la croissance verticale de l'os alvéolaire prémaxillaire. Dans la réalité, il semble que cette chirurgie ait un effet minime sur la croissance (Ross 1987, Ross & Jonhston 1972).

      Par contre, Ross conclut que si la chéiloplastie est associée à une alvéoloplastie primaire ou à une périostéoplastie, le développement maxillaire est nettement perturbé. La même réflexion s'applique aux chéiloplasties associées à une palatoplastie du palais dur.

      L'étude montre également que quelque soit le type de technique chirurgicale utilisé (Millard, Tennison, Skoog, Le Mesurier, Schwekendiek), l'effet sur la croissance est identique.

      Concernant le temps de la chéiloplastie, Ross compare 3 protocoles différents: chéiloplastie précoce (avant 2 mois), moyenne (à 3 mois), et tardive (après 4 mois). Bien que la chéiloplastie tardive semble être sensiblement plus favorable pour la croissance, il n'existe pas de vraie différence statistique entre ces trois attitudes thérapeutiques.


Rôle de l'alvéoloplastie

      D'innombrables auteurs ont signalé de longue date le rôle causal de l'alvéoloplastie primaire sur les troubles de la croissance (Rehrmann 1970,1971, Friede 1974, 1980, 1982, Enemark 1984, 1985, Robertson 1983, Johanson 1961, Brattström 1991, Semb 1988). Parallèlement, plusieurs auteurs sont restés fidèles à cette technique (Rosenstein 1982, 1997, Nordin 1983, Nylen 1974, Dado 1993, Steinhauser 1987, Schwenzen 1987), publiant des résultats contredisant ceux qui soutiennent l'alvéoloplastie secondaire. Ce débat sera détaillé plus bas.

      Dans son étude multicentrique, Ross à analysé 4 groupes

  1. alvéoloplastie primaire avec greffe osseuse
  2. alvéoloplastie secondaire avec greffe osseuse
  3. alvéoloplastie des tissus mous avec en général lambeau vomérien
  4. sans alvéoloplastie (groupe témoin)

      Il relève un trouble de la croissance nettement plus important pour les alvéoloplasties primaires, avec une diminution de la longueur maxillaire et de sa hauteur (surtout antérieure).

      Probablement par adaptation mandibulaire, mais également par l'action musculaire (la langue ne 'trouve pas sa place' dans la cavité buccale réduite), il note une fréquence élevée de rotation horaire de la mandibule, avec hauteur faciale inférieure augmentée.

      Les alvéoloplasties secondaires précoces (dès 4 ans) montrent une perturbation de la croissance plus faible par rapport aux alvéoloplasties primaires.

      Comme pour tous les auteurs favorisant l'alvéoloplastie secondaire, Ross conclut et conseille la greffe osseuse en dentition mixte, vers l'âge de 9 ans, permettant ainsi, après analyse des 4 groupes sus-cités, d'avoir une perturbation la plus faible possible de la croissance maxillaire.


Rôle du traitement orthopédique précoce

      Le rôle des traitements tels que la plaque palatine précoce ou les systèmes de traction extraorale dépasse le cadre de cet exposé.


d) Conclusion

      Comparant des groupes témoins de FLMP non traitées, plusieurs travaux ont démontré le rôle certain de la chirurgie sur les troubles de la croissance du massif facial.Toutefois, la part précise de responsabilité de chaque geste chirurgical reste encore difficile à préciser, notamment en comparant les résultats contradictoires de certaines études.

      Rapellons que si la chirurgie joue un rôle sur la croissance maxillaire, des facteurs intrinsèques à la malformation ou des facteurs fonctionnels (troubles des voies aériennes supérieures, dynamique musculaire...) sont également impliqués.

      Dans les choix de traitements des FLMP, les désavantages des traitements chirurgicaux sont à mettre en balance avec d'autres paramètres non moins importants : l'impact psycho-social de la chirurgie primaire versus différée, les répercussions fonctionnelles en particulier sur la respiration et la déglutition, et l'amélioration des troubles phoniatriques. C'est seulement en intégrant ces nombreux paramètres qu'un plan de traitement multidisciplinaire adapté peu être proposé dès la naissance.


5. Les concepts d'alvéoloplastie primaire et secondaire : Historique et conflits de deux techniques chirurgicales

      Bien que Von Langenbeck (1861) procédait déjà à des fermetures de FLMP au 19e siècle, les pionniers de l'alvéoloplastie ont été Von Eiselsberg (1901), Lexer (1908) et Drachter (1914). Beck et Jesser (1921) utilisent un lambeau pédiculé de cornet inférieur. Veau (1931) connaît les premiers échecs avec des chips de greffon tibial.

      Après les premiers essais chirurgicaux de la première moitié du 20e siècle, et, sous l'impulsion d'Axhausen (1952), les années 50 connaissent une génération de chirurgiens qui systématisent mieux la procédure : Schmid (1954, 1955, 1958), Nordin & Johansson (1955) protocolent l'emploi de la crête iliaque comme greffon. Les premiers traitements orthodontiques combinés à la chirurgie font leur apparition à cette même époque.

      Le concept d'alvéoloplastie primaire est clairement introduit par Schrudde & Stellmach (1958, 1959), suivis par de nombreux auteurs : Schuchardt & Pfeifer (1960, 1966, 1967), Johansson & Ohlson (1961),Schultz (1964), Pickrell & Quinn (1964)Thilander (1966), Stricker & Dautrey (1966).

      Le postulat initial de l'alvéoloplastie primaire était :

      L'alvéoloplastie primaire était combinée à la chéiloplastie, évitant ainsi une intervention ultérieure.

      La controverse sur l'alvéoloplastie primaire s'impose progressivement dès le début des années 60. Ritter doute déjà en 1959 qu'un greffon inerte puisse stimuler la croissance. Hollmann (1964), Gabka (1964) et Grob (1964) s'inquiètent de la mobilisation extensive et précoce des tissus mous et s'alarment du manque de recul des cas présentés à l'époque et des troubles de la croissance iatrogènes potentiels.

      Prudzanski durcit le ton (1964): sur une étude de 1000 FLMP, il critique ouvertement l'alvéoloplastie primaire qui n'apporte aucun bénéfice de croissance. Il la décrit comme procédure 'inutile et barbare'.

      Dès lors, de nombreux auteurs s'interrogent et reportent de mauvais résultats: Kling (1964,66),Derichsweiler (1964), Longacre (1966), Pickrell & Quinn (1968), Robertson & Jolley (1968, 1972), Davis (1970).

      Sur la base de séries cliniques et d'expérimentations animales (Stenström & Thilander), tous arrivent à la même conclusion que Koberg (1970) et Johansson (1969, 1970): l'alvéoloplastie primaire est délétère pour la croissance maxillaire, elle ne prévient pas le collapsus maxillaire, l'éruption dentaire y est difficile. Ces auteurs abandonnent cette technique au profit de l'alvéoloplastie secondaire. D'autres se

      joignent à cette décision et dénoncent les résultats décevants de l'alvéoloplastie primaire ( Hollmann 1964,1965, Perko 1966, Hogemann & Jacobson 1972).

      La terminologie actuelle des alvéoloplasties à été introduite clairement par Nylen (1966) et Pickrell & Quinn (1968).

  1. L'Alvéoplastie primaire : Effectuée dans l'enfance, généralement avant 1 an, combinant la greffe osseuse à la fermeture des tissus mous (lèvre et palais).
  2. Alvéoloplastie secondaire précoce (early secondary alvéoloplasty): Effectuée après l'éruption de toutes les dents déciduales. Le terme précoce maintient une certaine confusion à la fin des années 60, l'âge précis étant rarement notifié. Boyne & Sands abandonnent le terme précoce (early) pour ne parler que d'alvéolo-plastie secondaire effectuée avant l'éruption canine, vers 8 à 9 ans. Cette terminologie est par définition maintenue jusqu'à nos jours.
  3. Alvéoloplastie secondaire tardive (late secondary alveoloplasty): Effectuée après l'éruption des dents définitives.

      Le terme d'alvéoloplastie tertiaire (Pickrell & Quinn 1967) est utilisé lorsque l'alvéoloplastie secondaire à échoué.

      Plus récemment, un cinquième groupe est distingué: l'alvéoloplastie au cours d'une ostéotomie du 1/3 moyen de la face.

      Par leur expérience clinique et expérimentale, Boyne et Sands (1972, 1973, 1976) éclaircissent définitivement une terminologie confuse qui persiste au début des années 70: l'alvéoloplastie secondaire est idéalement faite en denture mixte, avant l'éruption des canines.

      La plupart des centres sont actuellement fidèles à cette procédure,

      bien qu'en 1976 Boyne & Sands évoquent la possibilité de greffer un peu plus tôt (avant l'éruption des incisives latérales).

      L'alvéoloplastie secondaire présente les avantages suivants:

      Les désavantages sont:

      Malgré les critiques formulées, quelques chirurgiens ont continué d'utiliser la greffe primaire (Nylen 1974, Rosenstein 1982, Nordin 1983, Steinhauser 1987, Schwenzen 1987, Dado 1993).

      Selon ces chirurgiens , la greffe primaire permet:

      En conclusion, le débat, parfois passionnel, entre les défenseurs de l'une ou l'autre des attitudes chirurgicales reste d'actualité. Toutefois, depuis les travaux de Boyne & Sands, la grande majorité des chirurgiens ont choisi l'alvéoloplastie secondaire et ont permi, par de grandes séries, de comparer des résultats à long terme et d'améliorer progressivement l'efficacité de la procédure chirurgicale.


6. Traitements orthopédiques et orthodontiques des fentes labio-maxillo-palatines

      (Friede 1998, Long 2000, Vlachos 1996)


Introduction

      L'orthodontie fait partie intégrante de l'approche multidisciplinaire du traitement des FLMP. Dès l'enfance, voire dès la naissance, l'orthodontiste est inclus dans l'équipe soignante et collabore étroitement avec le pédiatre, le logopédiste, le chirurgien et, plus tard, avec le dentiste généraliste du patient.

      Les approches orthodontiques du traitement des FLMP sont extrêmement variables et dépendent des écoles et des centres universitaires. Ces différentes approches ont été et sont soumises à controverses. Il n'appartient pas à l'auteur de présenter une conception universelle du traitement orthopédique/dontique des FLMP mais, par le biais des controverses, de montrer qu'un protocole unique n'existe pas.

      Finalement, le protocole choisi par l'équipe de Genève sera exposé.


Traitement orthopédique chez le nourisson

      Le traitement interceptif orthopédique dès la 3e-6e semaine de vie a été initié par Mc Neil (Mc Neil 1956) puis proposé par plusieurs centres (Hotz 1978,Hotz 1984, Giorgiade/Latham 1975, Sandy 1998,Stricker 2001). Il vise plusieurs buts:

      Pour les FLMP unilatérales, la chirurgie primaire serait facilitée par le resserrement et l'alignement orthopédique des segments maxillaires.

      En l'absence d'évaluation à long terme, la variabilité des résultats a été largement critiquée et de nombreux auteurs ont montré le peu de bénéfice de ces traitements interceptifs: la chirurgie de la lèvre et du nez ne s'en trouve pas facilitée et les segments montrent une mésialisation et un resserrement souvent comparables en l'absence d'orthopédie précoce, le coût/bénéfice et la lourdeur des traitements n'est pas justifiable (Ross & McNamara 1994, Severens 1996, Prahl 1996, Winters 1995).

      Pour les FLMP bilatérales, le but essentiel de l'orthopédie préchirurgicale est de rétracter le prémaxillaire protrusif (Figueroa 1996, Kramer 1994, Giorgiade 1975).

      A terme, aucune différence sur la qualité esthétique et fonctionnelle de la lèvre n'a cependant pu être démontrée par rapport aux traitements plus conservateurs (Ross & McNamara 1994).

      Certains auteurs ont montré l'intérêt de l'orthopédie dento-faciale peu après la chirurgie primaire afin de prévenir le collapsus maxillaire (Mishima 1996,

      Kramer 1994, Ball 1995). Toutefois, ce bénéfice semble temporaire, en particulier après la palatoplastie où un collapsus est présent même chez l'enfant traité orthopédiquement (Heidbüchel 1997).

      Ross (Ross 1987) n'a pas relevé de bénéfice d'une orthopédie précoce sur la croissance à long terme du massif facial dans une série de 97 patients masculins avec FLMP unilatérale.

      La plupart des centres proposent une plaque palatine obturatrice dès les premières semaines de vie. Les but de celle-ci sont :

      Bien que toute plaque palatine soit reconnue comme facilitant l'alimentation du nourisson porteur d'une FLMP, une différence de prise de poids avec ou sans plaque obturatrice n'a pas pu être objectivée (Ball 1995, Winters 1995).

      Une étude multicentrique néerlandaise (Prahl 1996) n'a pas montré de différence pour la durée, la quantité et la vitesse d'alimentation pour les groupes avec ou sans plaque palatine.

      Le même centre n'a montré aucune influence significative de la plaque sur les paramètres d'élocution au cours des premiers 12-18 mois de vie (Konst 1996).

      Les difficultés d'alimentation peuvent être mises en relation avec des ulcérations du septum nasal postérieur et des cornets. Ces ulcérations sont présentes, selon Bacher(1996), chez 94% des nouveaux-nés porteurs d'une FLMP unilatérale. Néanmoins, Winters (1995) a montré que ces ulcérations disparaissent spontanément en 7 à 10 jours avec ou sans plaque palatine.


Traitement orthopédique chez l'enfant

      Comme en pratique orthodontique en dehors du cadre des FLMP, l'orthodontiste a à sa disposition les moyens orthopédiques classiques du traitement des discrépances maxillo-mandibulaires.

      Face à un défaut de projection postéro-antérieur et un défaut d'expansion du maxillaire, les principales techniques employées sont les tractions intra-orales

      (maxillo-mandibulaires, plaques palatines d'expansion) et extraorales (masque de Delaire) (Delaire 1983,1988, Buschang 1994).

      Une fronde mentonnière est à envisager dans le cas exeptionnel d'une promandibulie vraie associée.

      Actuellement, face à l'importance des rétro/endo-maxillies retrouvées lors de séquelles de FLMP, une décision d'abstention de traitement orthopédique est souvent prise. On lui préfère une chirurgie orthognathique après l'adolescence. Cette option thérapeutique est justifiée par la situation anatomique particulière des FLMP (manque d'ancrage), la lourdeur des traitements orthopédiques, le risque important de récidive et la performance toujours meilleure de la chirurgie.

      Les techniques d'ostéogénèse par distraction à l'aide d'appareillages intra ou extra-buccaux ouvrent de nouvelles perspectives (Molina 1998, Figueroa 1999).

      Les cas traités de cette façon sont actuellement sporadiques et le pronostic ainsi que les bénéfices à long terme sont encore à préciser.


Traitement orthodontique en dentition déciduale

      Dès l'éruption des dents déciduales, des troubles occlusaux liés à la malformation et aux séquelles de la chirurgie primaire vont faire leur apparition avec divers degrés de sévérité: essentiellement occlusion croisée postérieure et antérieure, rotations et inclinaisons dentaires anormales (surtout les incisives centrales), asymétrie des arcades et déviation des lignes médianes.

      Quelques auteurs ont proposé des mesures orthodontiques en dentition de lait, postulant un dévérouillage de l'occlusion et par conséquent de la croissance maxillaire.

      Aucun bénéfice de ces traitements n'a toutefois pu être démontré, en particulier sur les besoins ultérieurs de traitements orthodontiques en dentition mixte. A l'heure actuelle, la plupart des centres s'accordent pour considérer l'orthodontie en dentition déciduale comme inutile (Vig 1985, 1996, Semb 2000), ou tout au plus réservée a certains cas sévères (Olin 1990, Aduss 1990).


Traitement orthodontique en dentition mixte

      L'intervention de l'orthodontiste en dentition mixte est actuellement universellement reconnue, même chez les enfants qui ont bénéficié d'une orthopédie précoce.

      Les buts de ces traitements sont de préparer les arcades pour recevoir la greffe alvéolaire par :

      Après l'alvéoloplastie, l'orthodontie s'efforce:

      L'expansion maxillaire est obtenue par des appareillages tels que Quadhelix ou une plaque palatine à vérin (év. asymétrique). Elle est effectuée quelques semaines avant l'alvéoloplastie. L'ouverture de la fente va permettre au chirurgien d'avoir une meilleure visibilité opératoire, en particulier sur la suture du plan nasal, et de permettre la mise en place d'un maximum de greffon. Dans certaines situations où la couverture du greffon peut s'avérer très difficile en raison du remaniement des tissus mous, une expansion peut compromettre le pronostic de la greffe (Long 2000) : dans ces cas, on renoncera à celle-ci ou l'on se limitera à une expansion modérée. Finalement, une expansion préchirurgicale permet dans certains cas de mettre en évidence l'extension de la fistule, qu'il est parfois difficile d'estimer cliniquement.

      L'alignement dentaire avant alvéoloplastie est controversé. Certains auteurs argumentent sur l'aspect esthétique des malpositions dentaires sévères chez l'enfant, et sur le dévérouillage de l'occlusion croisée antérieure pour libérer la croissance du prémaxillaire (Vagervik 1981, Subtelny 1990).

      Le plus grand danger d'une mobilisation dentaire avant la greffe (particulièrement de l'incisive centrale) est une perte irrécupérable de la fine membrane d'os alvéolaire qui recouvre les dents adjacentes à la fente (Vig 1985,1996). Pour cette raison, nous évitons dans la plupart des cas toute mobilisation orthodontique des dents adjacentes à la fente. Après la greffe, l'augmentation du support parodontal permet une mobilisation de celles-ci bien moins risquée.

      Finalement, l'impact psychologique des malpositions dentaires dues à la malformation chez des enfants dont l'âge est naturellement concerné par une dentition irrégulière et en cours d'éruption ne nous paraît pas un facteur décisif.

      L'extraction de dents malformées souvent surnuméraires qui ont fait éruption dans la fente est souhaitable 2 à 3 mois avant l'alvéoloplastie, facilitant ainsi l'étanchéité de la couverture muqueuse lors de la chirurgie.

      Dès la systématisation de la greffe alvéolaire secondaire (voir chapitre 5), les avantages et les succès d'une fermeture orthodontique de l'espace résiduel à la FLMP ont été largement reconnus (Nordquist 1975, Turvey 1884, Bergland 1986a) :

      D'un point de vue esthétique, la forme et la couleur de la canine qui diffèrent d'une incisive latérale sont à l'heure actuelle facilement adaptés par un remodelage coronaire conservateur simple. D'autre part, le tissus gingival amené par la migration canine présente des qualités esthétiques indéniables.

      Les implants dentaires permettent des solutions de plus en plus élégantes notamment dans les cas de fente résiduelle large lorsqu'une fermeture orthodontique seule n'est pas possible. Néanmoins, compte tenu des impératifs osseux et gingivaux de l'implantologie (voir chap. « implantologie »), face à des fentes d'un élément, nous préférons la fermeture orthodontique.

      Depuis les travaux de Boyne & Sands (1972) et la généralisation de l'alvéoloplastie secondaire, la capacité de la canine de traverser le greffon a été largement constatée. Divers auteurs ont cependant relevé la prévalence de canines retenues après alvéoloplastie secondaire qui nécessitent une assistance orthodontique de 7% à 56%, (voir chapitre 14).

      Les principaux facteurs influençant la rétention de la canine associent sa position et son angulation initiale. La technique chirurgicale doit respecter le sac péricoronaire et utiliser un greffon spongieux non cortical.

      Après la greffe et après l'alignement des arcades, il existe un risque de récidive de diminution du diamètre transversal qui impose souvent un moyen de contention à long terme. Son indication dépend de la sévérité de la fente, des antécédents chirurgicaux, de la stabilité de l'occlusion en fin de traitement orthodontique et du type de restauration prothétique prévu. On utilise à cet effet un arc palatin de contention, ou une plaque palatine amovible, généralement nocturne.


Protocole orthodontique de prise en charge des FLMP à l'Hôpital Cantonal Universitaire de Genève

      Hormis les différentes conceptions académiques du traitement orthodontique exposées plus haut, d'autres facteurs influencent les choix thérapeutiques : la compliance de l'enfant, la disponibilité de l'enfant et de la famille ainsi que leurs désirs, les compétences de l'orthodontiste, les aspects psychologiques, les aspects assécurologiques et financiers.

      Les traitements, qui interviennent de la naissance à l'âge adulte, doivent donc être adaptés et personnalisés à chaque patient. Cette personnalisation respecte néanmoins un protocole orthodontique standardisé qui est le plus souvent appliqué ( p.55).

      Ce protocole orthodontique est étroitement lié au calendrier chirurgical principal:

      A Genève, la collaboration entre l'orthodontiste, le chirurgien pédiatre (chirurgie primaire) et le chirurgien maxillo-facial (chirurgie secondaire) est la règle.


Protocole orthodontique

  • Plaque de tétée dans les premiers jours de vie, refaite à 4 mois.
  • Exeptionellement, plaque obturatrice déconfort après la palatoplastie, jusqu'en dentitionmixte (1).
  • Expansion maxillaire 2 mois avantl'alvéoloplastie secondaire (2) et confection d'une gouttière thermoformée portée 10 jours avant lagreffe.
  • Entre6 semaines et 3 mois après la greffe début de l'alignement des arcades: lafermeture orthodontique de la fente estprivilégiée.
  • Aprèsla fin de la croissance, préparation orthodontique pré-chirurgicale dans les casqui nécessitent une chirurgie orthognatique (3).
  • Contention à long terme.

      (1)Dans les très rares cas présentant une fistule bucco-nasale symptomatique après palatoplastie, l'enfant peut bénéficier d'une plaque obturatrice de confort. Contrairement à la plaque proposée par Hotz, qui prétend effectuer une orthopédie active par meulages itératifs, une plaque lisse permettant une orthopédie passive un développement maxillaire libre est proposée : son rapport coût/ bénéfice paraît plus adéquat, tant du point de vue des résultats thérapeutiques que du point de vue de la contrainte du traitement et de la compliance du patient.

      (2)Hormis dans les cas très sévères, aucun alignement dentaire orthodontique n'est effectué avant l'alvéoloplastie. Les contraintes du traitement en dentition mixte, l'absence de bénéfice prouvé et les risques sur les dents adjacentes à la fente contre-indiquent à notre point de vue ce type d'approche.

      (3)Avec l'introduction récente de techniques par distraction osseuse (maxillaire ou mandibulaires), des corrections orthognatiques du massif facial peuvent être effectuées avant la fin de la croissance.


7. Objectifs de l'alvéoloplastie secondaire

      (Johanson 1961, Boyne & Sands 1972, 1973, 1976, Abyholm 1981, Pederson 1985, Bergland 1986a-b, Paulin 1988, Amanat 1991, Cohen M 1993)


Fermeture de la communication bucco-nasale et bucco-sinusienne

      L'alvéoloplastie permet la restauration de la barrière anatomique entre les cavités orale et naso-sinusienne. La régurgitation du bolus alimentaire, l'irritation chronique de la muqueuse nasale et les infections sinusiennes récidivantes sont traitées par la fermeture de la brèche.

      L'alvéoloplastie améliore la phonation en supprimant la fuite d'air par la fente. Le port d'un obturateur devient inutile.


Stabilisation des segments maxillaires

      Par la création d'un pont osseux, l'alvéoloplastie stabilise les segments maxillaires et prévient leur collapsus après expansion orthodontique. Ceci est particulièrement vrai pour le prémaxillaire dans les FLMP bilatérales, qui est fréquemment mobile. En l'absence de stabilité des segments, toute restauration dentaire fixe est vouée à l'échec par descellement itératif de la prothèse. La stabilisation maxillaire permet également d'abandonner ou de réduire les appareillages de contention orthodontique.


Création d'un support parodontal suffisant pour les dents adjacentes

      L'incisive latérale, la canine et l'incisive centrale, lorsque présentes, ont souvent un pronostic réservé à moyen terme, de par leur support parodontal insuffisant. La greffe alvéolaire, combinée ou non à l'orthodontie ou à chirurgie implantaire, crée un soutien osseux favorable à ces dents, qui jouent un rôle clef pour la future restoration prothétique.


Favoriser l'éruption dentaire à travers la greffe et la migration orthodontique

      Lorsque la greffe est effectuée avant l'éruption de la canine, la dent doit pouvoir passer à travers celle-ci et induire ou amener sur son trajet un os alvéolaire de qualité. L'alvéoloplastie permet alors une fermeture orthodontique de la fente en apportant le support osseux nécessaire aux mouvements orthodontiques.


Prévenir les rétentions alimentaires

      Qu'elles soient au niveau de la brèche ou de brides muqueuses, les rétentions alimentaires entrainent une gingivite chronique par hygiène insuffisante, des caries secondaires et une halitose.


Améliorer l'aspect esthétique

      L'alvéoloplastie contribue à améliorer l'esthétique :

      De l'arcade alvéolodentaire : par restauration de la continuité de l'arcade dentaire par amélioration de la qualité du tissus gingival

      De la lèvre : bien que les corrections secondaires de la lèvre ne soient pas faites dans le même temps chirurgical, l'alvéoloplastie contribue au soutien de la lèvre

      De la pyramide nasale : l'aile narinaire affaissée doit être soutenue par le greffon, qui est placé au niveau du processus alvéolaire et également au plancher nasal et au seuil de l'ouverture pyriforme.


Considérations psychologiques

      Qu'il s'agisse d'amélioration de l'esthétique du visage, de la fonction alimentaire, respiratoire ou phoniatrique, l'alvéoloplastie permet une meilleure intégration de l'enfant et du jeune adulte porteurs d'une FLMP.


8. Bilan clinique préopératoire

      Cinq points font partie du bilan clinique préopératoire :


1. L'anamnèse précise


2. L'examen clinique


Morphologique 


a) extrabuccal

  • l'asymétrie du visage
  • la cicatrice labiale
  • l'asymétrie et la déformation de la pyramide nasale
  • les hauteurs faciales
  • de profil, la projection maxillaire et mandibulaire
  • l'angle nasolabial
  • le pli labio-mentonnier
  • les orifices pyriformes et la déviation septale antérieure

b) endobuccal

  • la fistule alvéolaire ou palatine et son examen à la sonde boutonnée
  • la qualité des tissus gingival, vestibulaire et palatin
  • la forme de la voûte palatine
  • la décompte et la forme des dents visibles, de leurs malpositions et de leurs défauts de rotation
  • l'articulé dentaire, transversal, sagittal (classe d'Angle) et vertical
  • le positionnement des segments maxillaires et leur mobilité
  • les lignes médianes

Fonctionnel :

  • la compétence labiale
  • la fonction respiratoire, par l'examen de la perméabilité des fosses nasales (miroir de Glatzel)
  • la fonction vélaire
  • l'élocution
  • un examen plus approfondi rhinologique ou otologique sera effectué au besoin par le spécialiste ORL.

3. Les documents radiologiques


4. Les moulages

      en série, ils permettent d'évaluer l'évolution du traitement orthodontique préchirurgical. Avant l'intervention, les moulages sont montés en articulateur et segmentés à la demande si l'alvéoloplastie est associée à une chirurgie orthognathique.Une gouttière acrylique de contention est préparée sur les moulages préopératoires.


5. Les photographies

      

Fig. 8 : Analyse téléradiographique de Sassouni

      

Fig. 9 : Analyse téléradiographique de Sassouni Rétromaxillie chez le porteur d'une FLMP


9. Le greffon osseux : sources disponibles et techniques chirurgicales

      L'os spongieux est le matériel de choix. Ses capacités essentielles en tant que greffon osseux sont caractérisées par :

      Albrektsson (1,3) a repéré les premiers vaisseaux dans le greffon spongieux 5 à 8 jours après une greffe faite de façon atraumatique. Il observe une revascularisation totale et un début d'ostéogénèse à 21 jours.

      Le remaniement par résorbtion trabéculaire et néo-apposition est plus tardif: une trabéculation radiologique devient évidente dès la 6e semaine, et complète vers le

      3e mois (Bergland 1986a-b, Hall & Posnick 1983).

      L'os cortical présente plusieurs désavantages :

      Le développement récent de techniques implantaires en chirurgie des FLMP redonne un nouvel intérêt pour les greffons corticospongieux. On pense en particulier à l'adolescent ayant terminé son éruption dentaire et pouvant bénéficier d'une implantation en lieu et place d'une fermeture orthodontique de la fente ou d'une prothèse fixe traditionnelle.

      Enfin, un fragment d'os cortical peut être fréquemment greffé à moindre risque au dessous du plan nasal, pour créer un néo plancher et un réceptacle aux chips spongieux.


Les différents sites donneurs :


a) Os autologue


Le bassin :

      C'est le site de choix pour la majorité des auteurs.

      L'os spongieux est disponible en grande quantité. Il impose 2 sites opératoires et une certaine rigueur d'aseptie. deux équipes chirurgicales sont nécessaires, évitant de prolonger le temps opératoire.

      L'inconvénient majeur est l'inconfort post-opératoire, plus important chez l'adulte. Cet inconfort peu prolonger l'hospitalisation de quelques jours. Il dépend de la technique chirurgicale.

      Les autres complications sont rares (paresthésie ou anesthésie du nerf cutané fémoral, hématome) ou très rares (troubles de la croissance, infection, hernie abdominale, fracture).

      La cicatrice est minime et masquée par un sous-vêtement. Sa longueur dépend de l'âge et de la corpulence du patient.

      Les complications de la prise de greffe iliaque sont diminuées par le respect de quelques points techniques (Laurie 1984) :

  • l'incision doit être latérale à la crête, au dessus de l'épine iliaque antéro-supérieure. L'incidence de déhiscences, de cicatrices inesthétiques et d'atteintes du nerf cutané fémoral sont moindres par rapport aux incisions internes, sur la crête ou trop basses
  • dissection ou décollement à minima des insertions musculaires et du périoste pour les prises de greffon spongieux uniquement
  • respect du « toit » de la crête pour les prises cortico-spongieuses (« trapdoor technique ») ou au pire de « l'hémi-toit » externe
  • prélévement atraumatique du greffon osseux
  • drain aspiratif
  • infltration d'anesthésique local à longue durée d'action en fin d'intervention.

      Afin de diminuer les inconvénients de la prise de greffe, certains ont proposé l'utilisation d'un trépan après une voie d'abord minimale (Grillon 1984, Caddy 1985, Tilley 1984, Mc Gurk 1993, McCanny 1997). Sur une série de 29 patients, Mc Canny relève une plus faible morbidité au site de prélévement, mais pas de diminution de la durée de séjour.

      Procédure chirurgicale:

      (Crockford 1972, Grillon 1984, Hall 1981, Withaker)

  1. Décubitus dorsal. Une alèze pliée est interposée sous la fesse droite.
  2. Le champage est centré sur la crête iliaque, laissant l'épine iliaque antéro-supérieure (EIAS) visible. Les instruments chirurgicaux sont séparés du matériel utilisé pour la voie endobuccale.
  3. Incision de 3 à 6 cm laréralement au pôle supérieur de la crête. Elle s'arrète à 2-3 cm de l'EIAS (fig 10).
  4. En tirant l'incision cutanée médialement à l'aplomb de la crête, on incise le tissu sous-cutané et le périoste.
  5. Pour une prise spongieuse pure, on peut soit:
    • inciser le périoste en H et le décoller à minima. A l'ostéotome frappé ou à la scie oscillante, les corticales internes et externes sont ouvertes comme un livre. La spongieuse est ensuite curetée (Fig. 11, 12)
    • le périoste peut être décollé du côté interne sur une profondeur d'environ 5 cm. Le toit de la crête est ensuite élevé après ostéotomie horizontale. Il reste ainsi pédiculé. Il sera repositionné et fixé après curetage spongieux.
  6. Pour une prise corticospongieuse:
    • l'élévation du toit de la crête est faite comme précédemment décrit. Un large fragment bicortical peut être prélevé après décollement périosté externe. Le toit sera repositionné en fin de prélévement (fig 13)
    • après dépériostage interne, un large fragment corticospongieux monocortical interne est prélevé en emportant le demi toit crestal interne (fig 14).
  7. Une éponge hémostatique résorbable est comprimée dans le site de prélévement. Le toit de la crête est fixé au fil d'acier de gros diamètre ou au fil d'acier à travers deux trous préalablement forés.
  8. Pour la technique 'en livre', les deux valves sont rapprochées par plusieurs fils résorbables périostés.
  9. Fermeture des plans sous-cutané et cutané sur drain aspiratif.
  10. Infiltration d'un anesthésique à longue durée d'action (carbestésine 0,5%) jusqu'au plan périosté.

      Quelques points à respecter:

      Afin de diminuer le risque de déhiscence, il faut éviter d'inciser sur la crête, mais latéralement à celle-ci.

      Le respect du toit ou de l'hémi-toit crestal permet d'éviter une importante dépression post-opératoire palpable.

      L'ostéotomie peut être effectuée soit à l'ostéotome frappé, soit à la scie oscillante. Cette dernière est moins traumatisante mais une section bicorticale indésirée est plus fréquente qu'avec l'ostéotome, qui lui permet de mieux maîtriser la prise monocorticale.

      

Fig. 10 : Prélèvement iliaque. L'incision cutanée

d'après Converse, Reconstructive Plastic Surgery, Saunders 1977, Vol.1:329

      

Fig. 11 : Prélèvement iliaque. Incision périostée et ostéotomie

d'après Converse, Reconstructive Plastic Surgery, Saunders 1977, Vol.1:329

      

Fig. 12 : Prélèvement de la spongieuse iliaque.

d'après Converse, Reconstructive Plastic Surgery, Saunders 1977, Vol.1:329

      

Fig. 13 : Prélèvement corticospongieux bicortical

d'après Cohen M., Mastery of Plastic & Reconstructive Surgery, Little Brown & Company, Vol1: 105-106

      

Fig. 14 : Curetage spongieux puis prélévement corticospongieux interne

d'après Cohen M., Mastery of Plastic & Reconstructive Surgery, Little Brown & Company, Vol1: 105-106

La côte:

      Fréquemment utilisée dans les années 50 essentiellement par les promoteurs de la greffe primaire, son utilisation est de moins en moins fréquente. On lui reproche essentiellement:

  • sa qualité cortico-spongieuse avec prédominance corticale et pauvreté d'os spongieux
  • son mauvais remaniement et sa mauvaise réponse à un mouvement orthodontique post-opératoire
  • la morbidité plus importante du site donneur, avec risque de pneumothorax, infection ou douleurs tardives plus gênantes que celles de la greffe iliaque (Laurie 1984)
  • double sites opératoires et une cicatrice visible.

      Ces arguments sont réfutés par certaines séries d'auteurs qui continuent à utiliser la côte comme site donneur préférentiel (Witsenburg/Freihofer 1990, Robertson 1983, Rosenstein 1982, Prahl-Andersen 1980).

      Procédure chirurgicale:

  • L'incision est faite sur le relief de la 6e ou 7e côte, de préférence au niveau de la ligne médio-axillaire (ou sous-mammaire chez l'adolescente ou la femme jeune), sur une longueur de 4 à 6 cm.
  • On accède au périoste qui est incisé.
  • Le périoste est élevé totalement en surface et sur une courte distance du côté pleural.
  • L'élévation périostée du côté pleural est terminée au stripper costal.
  • La côte est sectionnée à la longueur désirée au costotome.
  • On contrôle l'intégrité de la plèvre par l'absence de bulles après versement de solution saline.
  • Suture périostée, des plans musculaires, du sous-cutané et de la peau sur un drain aspiratif sous-cutané.

Le tibia:

      Bien que minoritaire par rapport à la greffe iliaque, la prise de greffon tibial est utilisée par plusieurs centres, notamment scandinaves (Bäckdahl 1961, Breine 1966, Nylen 1966, Lilja 1987, Ilankovan 1998, Besly 1999, Kalaaji 2001). Les avantages soulignés par ces auteurs sont :

  • morbidité inférieure à la prise iliaque (saignement, douleurs, cicatrice)
  • rapidité d'exécution, en particulier avec l'utilisation d'un trépan
  • matériel spongieux en suffisance
  • posibilité d'opérer à deux équipes.

      Suivant les auteurs, la prise de spongieuse est faite sur la tubérosité tibiale, médialement ou latéralement à celle-ci, toujours distalement (min. 2cm) à la ligne épiphisaire proximale. Le prélèvement est effectué par un curettage spongieux après avoir ouvert une lucarne corticale, ou au trépan à buttée.

      Tous les auteurs utilisant cette technique ont montré un pronostic local du greffon au niveau de la fente comparable aux autres sites donneurs.


Le calvarium:

      L'intérêt majeur du greffon de calvarium et des greffons provenant de la région orofaciale découle directement de l'origine embryologique et de la physiologie de l'os membraneux.

      En effet, la plus grande partie du squelette cranio-facial a une origine ectomésenchymateuse et présente une ossification de type membraneux, contrairement au squelette axial qui a une ossification enchondrale.

      Plusieurs auteurs ont démontré un comportement et une physiologie différents entre les deux types d'ossification (Smith 1974, Zins 1983, Kusiak 1985, Fasano 1989, Alberius 1992). L'os membraneux bénéficie:

  • d'une résorbtion moins rapide
  • d'une revascularisation plus rapide
  • d'une régénération plus rapide.

      Parmi les explications à ce phénomène, on retient des différences entre les ostéoblastes de l'os membraneux par rapport à ceux de l'os enchondral, et des différences histochimiques, biochimiques et humorales. (Glowacki 1985, 1990, Eppley 1988, Hardesty 1990, Ermis 1992).

      Tessier (1982) puis Wolfe & Berkowitz (1983) ont utilisé avec succès le calvarium dans la chirurgie secondaire des FLMP. Par une courte incision coronale du côté non dominant, on accède à l'os pariétal. Un fragment de corticale externe est élevé (voir procédure) et la diploë est curetée à volonté. Si l'os spongieux est suffisant, la corticale externe est repositionnée et ostéosynthésée à minima. Si nécessaire, l'os cortical est utilisé en copeaux après passage au moulin à os.

      D'autres auteurs utilisent ce site donneur et soulignent lesavantages (Harsha 1986, Jackson 1982,1986, Denny 1997, Sadove 1990):

  • os membraneux
  • spongieuse en suffisance chez l'enfant
  • même champ opératoire
  • prélévement rapide
  • douleurs post opératoires minimes
  • séjour hospitalier raccourci par rapport à la greffe iliaque
  • cicatrice invisible
  • faible morbidité
  • saignement minime.

      On peut relever toutefois les inconvénients suivants:

  • la proximité des champs opératoires n'autorise pas le travail à 2 équipes et prolonge le temps opératoire
  • spongieuse insuffisante chez l'adulte
  • risque d'hématome sous dural ou de brèche méningée occulte
  • cicatrice visible si alopécie à l'âge adulte
  • dépression palpable au niveau du cuir chevelu.

      Procédure chirurgicale: ( Fig. 15, image 1)

  1. L'incision du cuir chevelu se fait par une voie bitemporale courte de 6 à 7 cm du côté non dominant. Le rasage des cheveux n'est pas requis.
  2. L'hémostase du cuir chevelu est assurée par des clips de Raney.
  3. La galéa et le périoste sont incisés, le périoste décollé.
  4. Un rectangle osseux est dessiné à la fraise boule: l'ostectomie atteint la diploë en profondeur.
  5. Les bords externes de l'ostectomie sont biseautés.
  6. Le fragment corticospongieux de la table externe est élevé à l'ostéotome courbe.
  7. L'os spongieux est cureté.
  8. L'hémostase est assurée par une éponge hémostatique résorbable ou de la cire à os.
  9. Le périoste, la galéa avec le sous-cutané, et la peau sont suturés sur un drain aspiratif.

      Le neurochirurgien peut être sollicité pour prélever un fragment bicortical par une petite crâniotomie pariétale. Cette procédure est simple et rapide en des mains habituées et n'est pas à considérer comme plus traumatique que l'obtention d'un volet externe au ciseau frappé. Les 2 corticales peuvent être séparées sur table: la corticale interne sera utilisée comme greffon et l'externe sera repositionnée précisement et fixée à minima par des miniplaques d'ostéosynthèse, évitant ainsi la dépression du cuir chevelu.

      

Fig. 15 : Greffon de calvarium pariétal droit

      

Image 01 : Prise de greffon de calvarium


Le menton et la région intra-orale:

      Bosker & Van Dijk (1980) utilisent la première fois de l'os symphysaire pour greffer une FLMP secondaire, suivis par plusieurs auteurs (Sindet-Petersen 1988, 1990, Freihofer 1989, 1993, Koole 1989, 1994, Borstlap 1990, Hoppenreijs 1992).Tous s'accordent sur les avantages de ce site de prélévement:

  • accessibilité
  • dans le même champ opératoire
  • résorbtion du greffon plus lente de par son origine
  • membraneuse
  • morbidité minime
  • pas de cicatrice visible.

      Comparant 2 groupes greffés, Borstlap (1990) relève une résorbtion moindre des greffons symphysaires par rapport au greffes de côte. Le même résultat est constaté par Freihofer (1993) en comparant le greffon mentonnier à tous les autres types de greffe (iliaque, côte, calvarium, vomer). Selon Koole (1994), l'os cortical semble plus perméable et mieux revascularisable que le calvarium, plus dense.

      Les désavantages du greffon symphysaire sont:

  • le risque traumatique sur les germes dentaires
  • l'insuffisance d'os spongieux.

      Les complications sur les germes dentaires sont rarement évoquées dans la littérature, souvent par manque de recul.Sur 21 cas, Hoppenreijs (1992) signale 4% d'insensibilité incisive, 12% de traitements radiculaires secondaires, 6% de perturbation de l'éruption canine inférieure. Il suggère de rester à 5mm de toute racine ou des germes canins.

      D'autres sites intra-buccaux ont été utilisés. Les branchesmontantes mandibulaires, la région tubérositaire supérieure (Lisa 1996). La morbidité est très faible mais la quantité de greffon n'est pas toujours suffisante.


b) L'os hétérologue

      Jusqu'au début des années 90, l'os de banque allogénique a été utilisé par plusieurs centres (Kraut 1987, Nique 1987, Maxson 1990, Salyer 1992). L'os allogénique permet d'éviter totalement toute morbidité liée à un site de prélévement autologue. Son remaniement et sa revascularisation est possible comme l'os spongieux autologue. Son immunogenicité est faible et il contient des facteurs telle que la BMP (Bone Morphogeneic Protein) (Marx 1984). Sa résorbtion semble toutefois plus rapide que celle de l'os autologue (Backdahl 1963, Marx 1981).

      Malgré ses avantages, l'efficacité limitée des procédés destérilisation des greffons et le risque de transmission de maladies infectieuses à vecteurs mal connus interdisent à l'heure actuelle l'utilisation de ce matériau pour la chirurgie secondaire des FLMP.


c) La gingivo-périostéoplastie

      Introduite par Skoog en 1965, la gingivo-périostéoplastie (GPP) est basée sur la capacité du périoste à former de l'os. La fente alvéolopalatine est fermée au cours des premiers mois de vie, en assurant l'herméticité des plans nasal, palatin et vestibulaire, mais sans greffe osseuse interposée. Le caillot sanguin dans la fente s'organise et grâce aux propriétés périostées, un os nouveau ponte progressivement la brèche maxillaire.

      Certains centres effectuent la cheiloplastie dans le même temps opératoire, d'autres attendent quelques mois après la fermeture labiale pour procéder à la GPP.

      Ritsila (1972) et Stricker (1977) ont proposé une interposition de périoste tibial, avec des résultats discutés.

      Millard et Latham (1980, 1990) protocolent mieux la procédure en proposant une fermeture maximale orthopédique de la fente avant la GPP. Leur protocole a été contesté par Berkowitz (1990) et Henkel (1997) qui constatent des troubles de la croissance à long terme.

      Brusati (2000) présente une série de 85 patients traités par GPP et montre d'exellents résultats morphologiques (gencive), osseux (aucun cas ne nécessite une greffe secondaire) et une croissance maxillaire peu perturbée. Ces résultats prometteurs n'ont malheureusement un recul que de 5 ans pour un geste chirurgical effectué avant 24 mois de vie.


d) Matériaux synthétiques de substitution

      La littérature ne relève pas encore d'utilisation de substituts osseux synthétiques en chirurgie des FLMP (TriCalciumPhosphate, hydroxyapatite, silices,...).

      Leur emploi croissant en chirurgie préimplantaire permettra peut-être de préciser leurs indications en chirurgie des malformations crânio-faciales.

      Le récent intérêt pour les facteurs de croissance d'origine autologue ou synthétiques ainsi que les techniques parodontales régénératives ouvrent également de nouvelles perspectives chirurgicales.


10. Alvéoloplastie secondaire techniques chirurgicales

      Lors de l'alvéoloplastie, on s'attache à respecter certains points techniques importants qui améliorent le pronostic du geste chirurgical:


a) Techniques de lambeaux de fermeture muqueuse

      En fonction de la morphologie de la fente alvéolaire, la brèche muqueuse est d'importance variable. Pour assurer une couverture étanche du greffon osseux, deux principaux type de lambeaux locaux ont été développés:

      Le lambeau muco-périosté de glissement

      (Bergland 1986a, Cohen 1989, Enemark 1984,1985, Troxell 1982)

      Ce type de lambeau est réalisé par un glissement mésial de la gencive qui recouvre généralement le petit segment. L'incision est décrite plus loin. Le glissement vers la fente est rendu possible grâce à une décharge oblique muco-périostée vestibulaire en région molaire, qui permet une couverture et une suture sans tension sur la fente (figu 16). Le glissement permet le décalage mésial d'une papille. La zone découverte en région molaire est laissée à une granulation secondaire.

      Ce type de lambeau a l'avantage d'apporter de la gencive attachée sur le greffon et au collet des dents adjacentes à la fente.

      

Fig. 16: Surgical Correction of Dentofacial Deformities

mod. d'après Bell W.H.,.New Concepts, Saunders 1985,p574-578

      Le lambeau buccal de rotation

      (Burian 1963)

      Egalement connu sous la terminologie de 'lambeau en doigt' ('Finger flap'), cette technique permet un apport de tissu de couverture par rotation d'un lambeau de muqueuse vestibulaire libre à pédicule mésial (fig. 17).

      Il permet une couverture souple et sans tension et évite un dépériostage extensif du petit segment. Son désavantage essentiel est un apport de muqueuse libre sur une zone normalement recouverte par une gencive attachée. Le vestibule doit être suffisamment profond pour éviter une bride trop importante entre le rebord alvéolaire et la lèvre.

      

Fig. 17: Surgical Correction of Dentofacial Deformities

mod. d'après Bell W.H.,.New Concepts, Saunders 1985,p574-578

b) Procédure chirurgicale

      Pour les deux types de lambeaux, l'intervention est faite en anesthésie générale, patient intubé par voie nasale du côté opposé à la fente (fentes unilatérales) ou par voie orale (en particulier pour les fentes bilatérales).

      La région faciale et la cavité orale sont désinfectées par une solution acqueuse (ex : Chlorexidine acqueuse 0,3 %). Le champage n'expose que la cavité orale.

      Une alèze est placée sous la hanche. La crête iliaque est désinfectée largement par une solution alcoolisée (ex : Chlorexidine 0,3% alcoolisée) puis champée après repérage de l'épine iliaque antéro-supérieure.

      Pour des raisons d'aseptie orthopédique, l'instrumentation de l'équipe prélevant le greffon et de celle préparant la région buccale ne sera jamais échangées au long de l'intervention.

      Une solution de Xylocaïne 2% avec Adrénaline est infiltrée sous le périoste au pourtour de la fente, ce qui facilite l'hémostase et la dissection. Un tampon placé au niveau pharyngé prévient un passage exessif de sang dans les voies digestives.


L'incision 

      (Fig. 21, 22)

      Du côté vestibulaire, l'incision est dépendante du type de lambeau de couverture choisi :


Les techniques de glissement muco-périosté :

      au collet dentaire, l'incision est prolongée jusqu'en région molaire du côté du petit segment et jusqu'en région canine du côté du grand segment. Au petit segment, une décharge vestibulaire est effectuée au niveau molaire, qui permet le glissement mésial nécessaire (au maximum d'une papille) pour assurer une couverture du greffon sans tension. Le glissement muco-gingival n'est pas effectué au dépens du grand segment pour conserver une meilleure vascularisation du prémaxillaire et respecter l'esthétique des papilles des incisives centrales.

      L'incision est verticale et le long des marges de la fente jusqu'au fond du vestibule.Le périoste est ensuite élevé, en respectant méticuleusement la fine pellicule osseuse qui recouvre les dents adjacentes à la fente. Il est poursuivit sur toute la hauteur de la fente jusqu'à l'épine nasale antérieure et à l'ouverture pyriforme. La muqueuse nasale est élevée sur tout le pourtour immédiat de la fente (fig 23, 24).


Les techniques de lambeau buccal de rotation :

      Si l'on pense couvrir la fente en intégralité par ce type de lambeau, les collets ne sont incisés qu'au niveau des dents adjacentes à la fente. L'incision dans la fente est identique. Le lambeau en muqueuse libre est pédiculé vestibulairement et son extrémité est distale, généralement du côté du petit segment. Une rotation de 90° sera faite lors du recouvrement du greffon.

      Du côté palatin, l'incision se fait au collet des dents, surtout si l'incision vestibulaire passe également aux collets, évitant ainsi des risques de nécrose papillaire.

      Au niveau palatin, le rebord osseux est estimé par sondage à l'aiguille. En cas de fente étroite l'incision passe par l'équateur des berges (fig 18).

      En cas de fente large, si l'on prévoit un lambeau de rotation palatin, l'incision est déplacée sur le versant « buccal » du palais, préparant ainsi suffisamment de muqueuse pour la fermeture du plan nasal (fig 19, 20).

      

Fig. 18 : Fermeture palatine. Plan nasal et plan palatin. Fente étroite.

      

Fig. 19 : Fermeture palatine. Plan nasal et plan palatin. Fente large. Glissement palatin bilatéral.

      

Fig. 20 : Fermeture palatine. Plan nasal et plan palatin. Fente étroite. Glissement palatin unilatéral.


Le plan nasal

      L'excès de tissus fibreux (en particulier dans les fentes étroites) est réséqué à la demande, comme une éventuelle hypertrophie du cornet inférieur.

      Le plan nasal est reconstruit en réclinant vers la fosse nasale la partie supérieure de la muqueuse de la fente se prolongeant d'un côté par la muqueuse septale et de l'autre par la muqueuse nasale du versant externe. L'étanchéité est assurée par des points séparés inversés (fig 25, 26).


Le greffon osseux

      La quantité d'os nécessaire est évaluée arbitrairement.

      Avant l'insertion du greffon, les lambeaux de fermeture sont préparés pour assumer une suture sans tension dès que le greffon est positionné. Pour ce faire, un sous minage périosté vestibulaire (scarifications périostées) est souvent nécessaire.

      Quelques forages ou édentations délicates au ciseau frappé fin de l'os alvéolaire assurent un saignement de surface améliorant le contact biologique avec le greffon.

      Fréquemment, un fragment cortico-spongieux horizontal permet de recréer le plancher nasal. Il sera légérement surdimensionnée et impacté contre les berges maxillaires.

      Quelques premières sutures au fond du vestibule jusqu'à mi hauteur de l'alvéole ainsi que la suture palatine (fig 18, 19, 20) sont effectuées avant la mise en place de la greffe, formant ainsi, avec le plan nasal, un réceptacle pratique pour recevoir les fragments de spongieuse impactée.

      L'os spongieux est ensuite tassé dans la fente pour obtenir un volume crestal physiologique (fig 27, 28).

      L'aile narinaire, le pilier antérieur et l'épine antérieure sont soutenus au besoin par des fragments d'os supplémentaires.


La couverture muqueuse

      Quelque soit le type de lambeau, la muqueuse est ensuite suturée méticuleusement sans tension par des points séparés au fil résorbable (fig 29, 30).

      Au palais, un lambeau palatin de glissement latéral (lambeau de Langenbeck) assure l'étanchéité (fig 19, 20, ).

      Un soin particulier est apporté à la suture au confluent des quatres lambeaux (vertex du processus alvéolaire), point crucial souvent à l'origine d'une déhiscence.

      Les papilles interdentaires sont suturées entre elles.

      Dans le cas d'un lambeau de glissement, la zone cruantée en région molaire est laissée à une granulation secondaire. L'hémostase est faite au besoin à ce niveau.

      

Fig. 21 et Fig. 22

      

Fig. 23 et Fig. 24

      

Fig. 25 et Fig. 26

      

Fig. 27 et Fig. 28

      

Fig. 29 et Fig. 30


La contention des segments maxillaires

      Afin de limiter les mouvements des deux segments maxillaires, pour permettre une intégration optimale du greffon et minimiser les risques infectieux, nous installons une gouttière dentaire thermoformée (image 2, 3) scellée aux dents pendant 6 semaines.

      Le patient aura été familiarisé à cette gouttière au cours des 10 jours qui précèdent l'intervention.

      

Image 02

      

Image 03


c) Technique de couverture dans les fentes bilatérales

      La procédure est identique à celle d'une fente alvéolaire unilatérale et est applicable un côté après l'autre (fig 31, 32).

      Comme la vascularisation du bourgeon médian est toujours incertaine, son dépériostage doit être minimal pour préserver un apport vasculaire par les gencives palatine et vestibulaire et pour minimiser les risques de nécrose.

      

Fig. 31 : Fente alvéolaire bilatérale. Lambeaux de glissements vestibulaires et palatins bilatéraux

mod d'après Bell W.H., Surgical Correction of Dentofacial Deformities .New Concepts, Saunders 1985,p574-578

      

Fig. 32 : Fente alvéolaire bilatérale. Lambeaux de rotation vestibulaires bilatéraux

mod d'après Bell W.H., Surgical Correction of Dentofacial Deformities .New Concepts, Saunders 1985,p574-578

d) Variantes de la technique de fermeture

      1. L'incision vestibulaire au sommet de la fente peut être prolongée dans le vestibule et la lèvre, pour donner un lambeau triangulaire à base large (Boyne & Sands 1972) (fig 33a).

      

Fig. 33a

mod. d'après Bell W.H., Surgical Correction of Dentofacial Deformities .New Concepts, Saunders 1985,p574-578

      2. Dans de rares cas de brèche palatine très larges, on peut utiliser un lambeau de langue (Guerrero-Santos 1973 Kinnebrew 1983). Il peut-être pédiculé postérieurement ou antérieurement. Il apporte un tissus bien vascularisé. Ses inconvénients majeurs sont l'inconfort post-opératoire et la nécessité d'une seconde intervention après 10 à 15 jours pour le sevrage du lambeau.

      3. Pour favoriser l'étanchéité de la muqueuse, des points utilisant comme poulie les dents adjacentes à la fente permettent de diminuer la tension des sutures et les risques de déhiscence secondaire (Steinberg 1997) (fig 33b, 34).

      

Fig. 33b

      

Fig. 34

      4. Dans le cas d'une fente unilatérale, Demas propose de décaler la suture afin de ne pas la placer sur la greffe (Demas 1988, fig 35), et de diminuer les risques infectieux. Il faut relever que l'auteur utilise un greffon corticospongieux, plus susceptible de s'infecter qu'un greffon spongieux.

      

Fig. 35

      Pour les fentes bilatérales, le même auteur propose d'associer deux lambeaux muco-périostés de glissement à un approfondissement vestibulaire antérieur par la muqueuse du prémaxillaire (Demas 1988, fig 36). La vascularisation du prémaxillaire se fait alors uniquement par la muqueuse palatine et doit être assurée afin d'éviter les risques de nécrose.

      

Fig. 36


11. Chirurgie gingivale parodontale préprothétique

      (Lindhe 1998, Santi 1995, ElDeeb 1986, Witsenburg 1990)

      Chez l'adolescent ou le jeune adulte porteur d'une FLMP ayant bénéficié d'une alvéoloplastie, la réhabilitation finale d'une arcade dentaire harmonieuse, prothétique (pont, implants, amovible) ou non (orthodontique), est fréquemment confrontée à une situation gingivale difficile, due à la malformation elle-même et aux antécédents chirurgicaux itératifs locaux.

      Les problèmes muco-gingivaux secondaires rencontrés au niveau de la fente sont essentiellement:

  1. Les brides vestibulaires
  2. Le manque de gencive attachée.

      Ces deux situations rendent difficile l'hygiène locale et la réalisation des restaurations prothétiques d'un point de vue fonctionnel et esthétique. Elles compromettent surtout à long terme le pronostic de la région greffée et des dent adjacentes par un risque accru de poches et de résorbtion osseuse parodontale.

      Tout comme la gencive autour des dents naturelles les cas traités par implant(s) requièrent de préférence un profil d'émergence prothétique en gencive attachée (voir chap. implantologie).

      L'état préprothétique de la muqueuse et de la gencive peut être notablement amélioré par 2 techniques chirurgicales :

  1. Vestibuloplastie (ou approfondissement vestibulaire)
  2. Greffe gingivale libre

      Ces deux gestes sont fréquemment associées dans un même temps chirurgical.

      Ces techniques sont applicables dès le troisième mois après l'alvéoloplastie. Il convient d'effectuer une greffe gingivale libre au moins 2 mois avant la pose d'implants afin d'assurer une revascularisation optimale de celle-ci sans risquer sa nécrose lors de l'incision.

      Si la pose d'implants est faite avant la greffe gingivale, on choisit une technique d'implantation enfouie afin de faciliter la greffe, qui est également effectuée au moins 2 mois avant le découvrement des implants.


Vestibuloplastie

      L'indication classique de cette technique est un comblement vestibulaire ou une bride muqueuse pouvant s'étendre jusqu'au palais (image 4).

      Le but est de recréer un sillon vestibulaire, de libérer la lèvre souvent partiellement retenue par la bride, et de supprimer la muqueuse libre sur la crête alvéolaire au profit d'une gencive attachée.

      

Image 04 : Bride muqueuse et perte de hauteur osseuse après alvéoloplastie

      Technique opératoire :

  1. Infiltration anesthésique locale adrénalinée
  2. Libération de la bride en incisant aux marges de celles-ci et en disséquant dans le plan sus-périosté
  3. Résection d'un éventuel surplus muqueux ou d'un surplus de tissus fibrotique sous-muqueux
  4. Repositionnement apical de la muqueuse et suture de celle-ci au fond du vestibule néo-formé par points résorbables 4.0.

      La surface cruentée de libération de la bride sera laissée à granulation, ou recouverte d'une greffe gingivale (voir ci-dessous). Afin d'éviter des rétractions, un conformateur vestibulaire amovible de type gouttière thermoformée peut être mis en place à la fin de l'intervention.


Greffe gingivale libre

      L'indication est un manque de gencive attachée au niveau de la crête alvéolaire. Le but est l'amélioration des conditions parodontales préprothétiques et de l'esthétique gingivale.

      Technique opératoire :

      1. Infiltration anesthésique locale adrénalinée de la crête et au palais: le site de prélévement palatin est choisi du côté du grand segment maxillaire.

      2. La surface du greffon est estimée sur la crête et dessinée au palais par l'intermédiaire d'un patron (par exemple de papier).Le site de prélévement palatin respecte les artères palatines antérieure et postérieure et une bande de 2-3 mm au collet dentaire (fig 37). Il évite également les zones de fibrose palatine secondaires aux chirurgies primaires de la FLMP.

      

Fig. 37 : La zone de prélévement palatin, entre l'émergence des artères palatines postérieures et antérieure

Tiré de Clinical Periodontology and Implant Dentistry, Lindhe J., chap.21

      3. Préparation du lit receveur en dissection sus-périostée au niveau de la crête. Hémostase méticuleuse. La muqueuse libre est soit excisée, soit plus fréquemment repositionnée apicalement (cf vestibuloplastie).

      4. Prélévement du greffon gingival en technique sus-périostée. Hémostase provisoire du site donneur par compression.

      5. Dégraissage sous-muqueux du greffon sur table qui est toujours gardé humide par une solution physiologique.

      6. Mise en place du greffon et suture minimale de celui-ci par un monofil 5.0 ou 6.0. Application régulière du greffon en le comprimant délicatement afin d'éviter une collection hématique entre celui-ci et le lit receveur. Les marges sont assurées par un dépôt de colle cyano-acrylique (ex : Histoacryl®).

      7. Hémostase et pansement du site de prélévement: une infiltration périphérique suffit souvent à assurer l'hémostase. La plaie est alors recouverte entièrement par une péllicule de colle cyano-acrylique, qui se détachera d'elle-même. La zone cruentée est indolore et se reépithélialise en une dizaine de jours.

      Si le greffon est correctement appliqué, suturé et collé en périphérie, il n'est généralement pas nécessaire d'utiliser sur celui-ci un pansement protecteur. Au besoin, et en fonction de la fiabilité du patient, on peut apposer un pansement parodontal de type CoePack® ou, mieux, prévoir une gouttière acrylique thermoformée amovible qui protège le greffon sans le comprimer.

      Les images 5 à 8 montrent un cas de FLMP unilatérale gauche qui a bénéficié d'une alvéoloplastie, puis d'une greffe de gencive attachée avec approfondissement vestibulaire. L'espace de la FLMP a été conservé et implanté (voir chap.implantologie).

      

Image 05 : FLMP gauche. Etat après alignement orthodontique des arcades, avant alvéoloplastie

      

Image 06 : Etat après l'alvéoloplastie

      

Image 07 : Approfondissement vestibulaire et greffe de gencive attachée

      

Image 08 : Etat 3 mois après vestibuloplastie et greffe gingivale


Conclusion

      La vestibuloplastie et la greffe de gencive libre permettent le plus souvent de gérer les principaux problèmes de muqueuse liés à l'alvéoloplastie. Ces procédures améliorent la situation pré-prothétique et esthétique ainsi que le pronostic parodontal. Elles sont simples et applicables en anesthésie locale à la grande majorité des patients, avec un inconfort mineur.

      Au delà de ces deux techniques principales, le chirurgien a à disposition de nombreuses techniques de chirurgie parodontale permettant de gérer la situation locale : pour exemple, les gingivoplasties à la fraise, au bistouri ou au laser, les greffes conjonctives libres sous-gingivales, les lambeaux conjonctifs palatins, etc... Le détail de ces techniques dépasse le cadre de ce chapitre.


12. Alvéoloplasties et implantologie

      En dentisterie traditionnelle, l'utilisation des premiers implants dentaires métalliques date du début du 20e siècle. Dès les années 40, et jusqu'à la fin des années 70, de nombreuses conceptions de structures ostéo-implantées pouvant recevoir une suprastructure dentaire ont été proposées, avec des succès trés variables (Goldberg 1949, Linkow 1970, Shulman 1991).

      L'ère moderne de l'implantologie a sans nul doute débuté avec Brånemark au début des années 80, qui présente 15 ans de recherche sur un implant en Titane, et impose scientifiquement le concept d'ostéointégration (Zarb 1983). Dès lors, l'implant dentaire devient mieux systématisable et prend un essor considérable. Sa conception actuelle est universelle: en Titane, de forme cylindrique ou conique, vissé. Les variations concernent les traitements de surface et les systèmes de suprastructure proposés par les fabricants.

      Si la fermeture de l'espace dentaire secondaire à la FLMP par des moyens orthodontiques (et en particulier la migration de la canine) nous parait être la solution la plus adéquate d'un point de vue chirurgical, orthodontique, parodontal et esthétique, l'implantologie ouvre néanmoins des perspectives non négligeables.

      En effet, de nombreux cas, souvent déjà adultes, ne peuvent bénéficier d'une greffe alvéolaire avant l'éruption canine. Comme en dentisterie générale, l'édentement intercalé peut alors bénéficier d'une solution implantaire, évitant la taille de plusieurs dents saines (comme le requiert un pont fixe) ou les désagréments d'une solution amovible.

      Verdi (1991) fut le premier à insérer des implants dentaires dans des cas de FLMP greffées, suivit par Harrison (1992) et Lund (1993).

      La mise en place d'implants dentaires après alvéoloplastie secondaire présente 2 difficultés particulières:


Délai entre l'alvéoloplastie et l'implantation

      Plusieurs auteurs ont montré qu'un implant dentaire se comporte essentiellement comme une dent ankylosée et par conséquent ne suit pas ou mal la migration alvéolodentaire imposée par la croissance (Thilander 1992, Perrott 1994, Adell1981, Shapiro 1989). Forts de cette constatation, la grande majorité des implantologues conseillent d'attendre la fin de l'adolescence pour implanter (Lekholm 1993, Perrott 1994).

      En contrepartie, toute greffe osseuse en région alvéolaire présente un certain degré de résorbtion au cours du temps, qu'il s'agisse d'une alvéoloplastie ou d'une greffe préimplantaire sans FLMP. Cette résorbtion verticale et transversale débute le plus souvent 4-6 mois après la greffe (Turvey 1984, Bergland 1986a, Perrott 1994, Cohen M 1989)

      Initialement de 6 mois au minimum, le délai plus récemment proposé entre la greffe et l'implantation dans la plupart des situations de greffe préimplantaire (élévation sinusienne, apposition, sandwich, 'cortical split'...) est de 3 à 6 mois, réalisant ainsi un compromis optimal entre le remaniement du greffon et une résorbtion minimale de celui-ci (Kochi 1993, Perrott 1994, Keller 1994, Kearns 1996...).

      L'âge favorable pour une alvéoloplastie secondaire étant entre 8 et 10 ans (Boyne & Sands 1972, Turvey 1984, Bergland 1986a-b, Sindet-Petersen 1988-1990), le délai entre celle-ci et la fin de la croissance va permettre le plus souvent une résorbtion du greffon dont le volume devient insuffisant pour placer un implant.

      Plusieurs alternatives peuvent être envisagées:

      Si l'espace au niveau de la fente est trop important pour être fermé par la canine (par exemple en cas d'agénésie canine), on peut le maintenir ouvert après l'alvéoloplastie et procéder en fin de croissance à une ostéotomie maxillaire Le Fort I en deux pièces. L'espace est alors fermé chirurgicalement par avancée du petit segment (Posnick 1992). Cette solution peut-être envisagée si, en présence d'une endomaxillie évidente, une chirurgie orthognatique en fin d'adolescence est fortement présumée

      Kearns (1996) propose d'emblée une deuxième greffe vers l'âge de 15-17ans. La persistance d'une partie du greffon de la première alvéoloplastie permet le plus souvent de ne faire qu'une greffe d'appoint préimplantaire, avec le menton comme site donneur. Il ne renonce pas à l'alvéoloplastie secondaire de 8-10 ans, qui présente des bénéfices indéniables (fermeture de la fistule, mécaniques, orthodontiques, gestion des tissus mous et esthétiques, ...)

      L'implantation avant la fin de la croissance n'est pas exclue totalement mais nécessite encore plus d'expériences cliniques. Takahashi (1997)a implanté dans une greffe alvéolaire chez un enfant de 10 ans, sans constater de troubles de la croissance

      Les techniques de régénération tissulaire (GBR) connaissent un enthousiasme manifeste chez certains (Buser 1990, Alberius 1992, Piette 1995 1-2), mais à notre connaissance elles n'ont jamais encore été appliquées en condition préimplantaire dans le cadre des FLMP.

      D'un point de vue implantaire, le pont osseux après alvéoloplastie reste de qualité 3 à 4 selon la classification de Lekholm (Lekholm & Zarb 1985, Takahashi 1997). Par conséquent, tous les auteurs conseillent l'utilisation d'implants de 10 mm au minimum et un délai de 6 mois entre l'implantation et la charge de l'implant.

      Dans le cas d'une solution implantaire, le chirurgien procédant à l'alvéoloplastie n'hésitera pas à surcorriger le volume du greffon, en prévision d'une résorbtion partielle de celui-ci.


La qualité de la muqueuse en zone implantée

      Bien que certains auteurs pour des overdentures implanto-portées n'aient relevé que peut ou pas d'effets délétaires si l'implant émerge en muqueuse libre (Adell 1988, Apse 1991, Lekholm 1986), il parait hautement préférable d'avoir une gencive dense et kératinisée entourant le col de l'implant (Meffert 1986,1988). Sa résistance mécanique, son étanchéité et ses qualités esthétiques sont supérieures à la muqueuse alvéolaire, qui, par transparence, peut laisser deviner des composants métalliques au collet.

      En fonction du type de lambeau utilisé pour la fermeture de la FLMP, la crête alvéolaire peut être partiellement ou totalement recouverte de muqueuse libre. Il convient alors d'effectuer une greffe de gencive prélevée au palais et apposée sur la crête en technique sus-périostée. Cette greffe est généralement associée à un repositionnement vestibulaire du lambeau muqueux (vestibuloplastie).

      Cette chirurgie peut avoir lieu avant l'implantation (pour un implant transmuqueux) ou entre l'implantation et le découvrement de l'implant (pour un implant en technique enfouie). Dans les deux cas, 2 mois de cicatrisation doivent être respectés entre la greffe de gencive et la réouverture gingivale.

      Finalement, lors de la conception de la (les) couronne(s) définitive(s), des retouches gingivales esthétiques sont souvent nécessaires, sous forme de gingivoplastie, à la fraise diamantée ou au bistouri électrique.


Exemple Clinique

      Les images 9 à 13 montrent un cas d'implantation d'une FLMP gauche après alvéoloplastie. Une première alvéoloplastie est effectuée à l'âge de 15 ans. Une seconde alvéoloplastie à l'âge de 19 ans, suivie d'une greffe de gencive avec vestibuloplastie après 3 mois,et mise en place de 2 implants dentaires après 2 mois supplémentaires. Le cas est cours, avec une restauration provisoire ( image 13) .

      

Image 09 : Situation 2 ans après la première alvéoloplastie.

      

Image 10 : Ablation de matériel d'ostéosynthèse et implantation 5 mois après l'alvéoloplastie et 8 semaines après greffe de gencive libre

      

Image 11 : Mise en place de 2 implants dentaire Nobel-Biocare

      

Image 12 : Radiographies des 2 implants en position 22-23

      

      

Image 13 : Restauration provisoire 6 mois après implantation. Un alignement orthodontique des centrales est prévu avant la retauration définitive.


13. 41 alvéoloplasties secondaires comparaison de deux techniques de couverture casuistique et résultats


Matériel et méthode

      De 1990 à 2001, 70 interventions de chirurgie secondaire des FLMP ont été effectuées dans l'unité de Chirurgie Maxillo-Faciale de l'Hôpital Cantonal de Genève (Professeur M.Richter). Parmi celles-ci, les informations de 41 alvéoloplasties chez 39 patients ont pu être exploitées pour une analyse centrée sur la comparaison entre les deux types de lambeaux utilisés pour la couverture de la greffe: le lambeau muco-périosté de glissement et le lambeau vestibulaire de rotation (ou 'buccal').

      Après présentation des formes cliniques, de l'épidémiologie, du type de lambeau et de greffon utilisé dans ce collectif, 4 paramètres ont été étudiés pour chaque type de lambeau de couverture:

  1. La récidive de la fistule
  2. Les déhiscences post-opératoires
  3. L'éruption canine à travers le greffon et la muqueuse
  4. Les besoins en chirurgie parodontale secondaire.

      Le type de restauration finale sera réabordé dans la discussion.

      L'analyse et la stabilité de la chirurgie orthognatique n'entrent pas dans le cadre de cet exposé.


Formes cliniques et épidémiologie des 41 alvéoloplasties

      a). Types de fente et localisation

      Tous les cas sont des séquelles de fente labio-maxillo-palatines ayant bénéficié d'une chirurgie primaire de la lèvre et du palais dans la première enfance à une ou plusieurs reprises.

      Fentes unilatérales: 66% (27 cas)

      Fentes bilatérales: 34% (14 cas)

      b). Répartition par sexe

      Masculin: 53% (22 cas)

      Féminin: 47% (19 cas)

      c). Recul moyen

      5 ans (4 mois à 11 ans)

      d). Répartition selon l'âge

      Le tableau 4 montre la répartition des âges lors de l'alvéoloplastie secondaire. 3 de ces patients ont bénéficié d'une deuxième alvéoloplastie pour insuffisance de hauteur osseuse au niveau du greffon, totalisant 41 procédures chirurgicales.

      

Tableau 04 : Ages lors de l'alvéoplastie secondaire

      L'âge moyen est de 15.7 ans


Type de greffon utilisé

      Dans 85% des cas un greffon iliaque a été utilisé. Un greffon de septum nasal osseux a été utilisé de façon anecdotique lors d'une procédure de Le Fort I.

      

Tableau 05 : Type de greffon utilisé


Type de lambeau utilisé

      Un nombre sensiblement identique de lambeaux muco-périostés de glissement et de lambeaux vestibulaires de rotation ont été effectués (tableau 6).

      Les lambeaux vestibulaires à base large (voir chap. Techniques Chirurgicales) sont inclus dans le groupe des lambeaux vestibulaires de rotation, puisque, comme eux, ils amènent une couverture de muqueuse libre au dépends du vestibule ou de la lèvre.

      5 cas n'ont pu être classés clairement dans ces deux catégories.

      

Tableau 06 : Types de lambeaux


Récidive de la communication bucco-nasale

      Tous cas confondus, la présence d'une communication bucco-nasale (CBN) avant et après l'alvéoloplastie est schématisée par les figures 38 et 39.

      Une CBN a été considérée comme telle si l'aiguille boutonnée peut pénétrer dans les fosses nasales, même si celle-ci est asymptomatique.

      Le pourcentage global d'échec de fermeture de la CBN est de 11%.

      

Fig. 38 : CBN avant l'alvéoloplastie

      

Fig. 39 : CBN après l'alvéoloplastie

      Les tableaux 7 et 8 montrent 18,5% de récidive de la CBN pour les lambeaux muco-périostés de glissement contre 7,3 % pour les lambeaux vestibulaires de rotation.

      

Tableau 07 : Lambeau muco-périosté de glissement Persistance de la CBN après alvéoloplastie

      

Tableau 08 : Lambeau vestibulaire de rotation Persistance de la CBN après alvéoloplastie


Les déhiscences post-opératoires

      Ont été considérés comme déhiscence tous lâchages de suture, même mineurs, laissant soupconner une mise à nu partielle du greffon, soit visuellement soit à l'examen plus fin par sonde parodontale.

      Les déhiscences ont été considérées jusqu'au 20e jour post-opératoire, au delà duquel aucune désunion n'a été relevée.

      L'incidence globale de déhiscence post-opératoire est de 12/41 cas = 29%.

      Le nombre de déhiscence en fonction du type de lambeau est illustré au tableau 9.

      Le tableau 10 montre la localisation de la déhiscence.

      

Tableau 09 : Déhiscences post opératoires

      

Tableau 10 : Localisation des déhiscences post-opératoires


L'éruption canine à travers le greffon et la muqueuse

      En raison de l'âge des patients greffés, seules 14 alvéoloplasties ont été faites avant l'éruption canine.

      Quel que soit le type de lambeau utilisé, toutes ces canines ont montré une éruption spontanée, sans assistance chirurgicale (tableau 11).

      

Tableau 11 : Eruption canine


Les besoins en chirurgie parodontale secondaire

      La chirurgie parodontale concernée comprend exclusivement les interventions de vestibuloplastie ou de libération de bride muqueuse vestibulaire ainsi que les greffes de gencive libre prises sur la muqueuse attachée palatine.

      Le tableau 12 montre un nombre plus important d'interventions parodontales secondaires pour les cas opérés par lambeau vestibulaire de rotation.

      

Tableau 12 : Chirurgie parodontale secondaire


La restauration prothétique finale

      32 patients ont terminé leur traitement, ou celui-ci est suffisamment avancé pour pouvoir confirmer le type de restauration finale.

      Parmi ces 32 patients, 23 présentent une fente unilatérale (= 23 sites) et 9 une fente bilatérale (=18 sites). Les restaurations finales de ces 41 sites montrent la répartition suivante (fig 40):

      

Fig. 40 : Restauration finale de 41 sites

      22 sites (54%) ont été fermés orthodontiquement. 9 sites (22%) ont bénéficié d'une restauration fixe par pont, dont 1 pont collé de type Maryland chez une patiente porteuse d'une FLMP bilatérale. 4 sites (9%) greffés ont été implantés dont un site avec 2 implants. Finalement, 6 sites (15%) ont été restaurés par prothèse amovible, dont une pour une fente bilatérale.


14. Discussion des résultats et données de la littérature

      Le but de cette étude a été la comparaison de deux techniques chirurgicales de couverture muqueuse lors d'alvéoloplasties secondaires des FLMP : la technique de lambeau vestibulaire (ou buccal) et la technique de de lambeau de glissement muco-périosté.

      4 paramètres ont été étudiés pour comparer chaque type de lambeau :

  1. La récidive de la fistule
  2. Les déhiscences post-opératoires
  3. L'éruption canine à travers le greffon et la muqueuse
  4. Les besoins en chirurgie parodontale secondaire.

      Successivement, la discussion et la comparaison avec les données de la littérature portera sur:

      a) l'épidémiologie

      b) le type de greffe utilisé

      c) le type de lambeau utilisé

      d) la récidive de fistule bucco-nasale

      e) la présence de déhiscence post-opératoire

      f) l'éruption canine

      g) la chirurgie parodontale secondaire.

      Il sera également discuté:

      h) des restaurations prothétiques finales

      i) d'autres complications mineures du traitement orthodontico-chirurgical.


a) Epidémiologie

      Le pourcentage de patients de sexe féminin est sensiblement plus élevé dans notre collectif (41%) que dans les grandes séries de la littérature (~ 33%, cf chap. épidémiologie). Tous nos cas ont présenté une fente labiale associée à la fente maxillo-palatine.

      La FLMP intéresse le côté droit dans 15% des cas, le côté gauche dans 50% et est bilatérale dans 35% des cas. Dans sa forme unilatérale, on constate donc une nette prédominance de l'atteinte gauche, ce qui est superposable aux données de la littérature (cf chap. épidémiologie).

      Le collectif est trop petit pour comparer les origines raciales ou géographiques des patients. Signalons toutefois que 2 patients sont d'origine asiatique et que 11/38 = 29% des patients sont originaires du bassin méditerranéen.

      Nombre de patients nous ont été adressés tardivement, adolescents ou à l'âge adulte, ce qui permet de constater une moyenne d'âge de 15,7 ans lors de l'alvéoloplastie. Bien des centres connaissent la même problématique et ne peuvent procéder à l'alvéoloplastie dans un délai idéal (avant l'éruption canine) que chez les enfants natifs de la région qui ont été pris en charge dès la naissance par une équipe multidisciplinaire.

      Comme détaillé plus bas, le pronostic de la greffe est certainement moins favorable chez le patient plus âgé, notamment en raison de :

      Les 41 interventions ont été effectuées par 7 chirurgiens différents, dont certains en cours de formation: toutefois la présence constante d'un chirurgien expérimenté assistant à l'intervention permet raisonnablement de pouvoir comparer les résultats chirurgicaux. Par ailleurs, sur une série de 40 alvéoloplasties, Witsenburg (Witsenburg 1993) à relevé que le succès et le pronostic radiologique de la greffe n'était pas en relation avec l'expérience du chirurgien.


b) Type de greffe

      La spongieuse iliaque est notre site donneur préféré, de par sa facilité de prélévement, son abondance, et surtout ses propriétés biologiques expliquées au chapitre 9.

      La morbidité liée à la prise de greffe nous paraît suffisamment faible pour considérer la crête iliaque comme site donneur de choix: chez l'enfant, il ne prolonge pas l'hospitalisation au delà de 48h post- opératoires et au contrôle à 10 jours, étant donné le peu de douleurs locales, rares sont les enfants qui ne doivent pas être retenus dans leurs activités quotidiennes ou sportives.

      Chez l'adulte, bien que plus prolongées, les douleurs sont limitées si l'on veille à un dépériostage minimal de la crête et l'on évite le plus possible une désinsertion musculaire.

      Aucune infection de la prise de greffe et aucune hypoesthésie persistante du nerf cutané fémoral n'ont été observées.

      En comparaison avec un site endobuccal, la durée opératoire est diminuée puisqu'une seconde équipe prélève la spongieuse iliaque parallèlemnent à celle qui prépare le site receveur. Dans d'autres centres, certains chirurgiens oraux ne sont pas agréés pour prélever un greffon iliaque: l'obligation d'avoir recours à l'orthopédiste ou au traumatologue peut ainsi leur faire préférer un site donneur endobuccal.

      3 cas ont été greffés par de l'os symphysaire, toujours en deuxième intention. En première intention et notamment chez l'enfant, malgré sa qualité d'os membraneux, le menton comme site donneur ne nous paraît pas adéquat étant donné sa quantité insuffisante, sont caractère cortical, les risques sur les germes dentaires et l'augmentation de la durée opératoire. Il convient par contre parfaitement comme greffon d'appoint, chez l'adolescent ou l'adulte, par exemble à but préimplantaire. Dans cette situation, l'intervention est faite en anesthésie locale.

      Nous n'avons pas l'expérience du tibia comme site donneur.

      Le pronostic radiologique de la greffe osseuse à été fréquemment analysé dans la littérature. Parmi les scores d'évaluation proposés, citons essentiellement:

      1. Evaluation semi-quantitative de la hauteur septale après alvéoloplastie secondaire selon Abyholm (Abyholm-Bergland-Semb 1981) :

Type I: Hauteur approximativement normale

Type II: Hauteur au minimum à ¾ de la hauteurnormale

Type III: Hauteur inférieure aux ¾ de la hauteurnormale

      Echec : absence de pont osseux

      Abyholm (Abyholm 1981) étudie 80 patients entre 8 et 18 ans. Il constate une hauteur osseuse de type I dans 37,7% des cas, de type II dans 43,5 %, de type III dans 7,2% et un échec dans 11,6%. Il confirme que les meilleurs résultats sont obtenus si la greffe est effectuée avant l'éruption canine.

      Bergland (Bergland 1986a-b) étudie 450 sites de greffe chez 378 patients. Il utilise la spongieuse iliaque comme greffon et remarque de meilleurs résultats si la greffe est faite avant l'éruption canine : dans ce groupe, il constate après 1an une hauteur septale de type I dans 64% des cas, de type II dans 32%, de type III dans 3% et 1 % d'échec. Tous âges confondus, les résultats sont inférieurs: 50% type I, 40% type II, 7% type III, 3% de résorbtion totale.

      Amanat (Amanat 1991) étudie 72 greffes de spongieuse iliaque entre 7 et 24 ans. Concernant le groupe ayant la canine en occlusion finale (30 sites) lors de l'évaluation, la hauteur septale est de 63,3% pour le type I, 19,9% type II, 6,6% type III, 10% d'échec. Aucun cas de type III ou d'échec complet n'est relevé si la greffe est faite avant l'éruption canine.

      Witsenburg (Witsenburg 1993) analyse radiologiquement 40 greffes unilatérales au moins un an après la greffe. L'âge moyen de l'alvéololastie est de 13,9 ans. Il note 70% de type I, 22,5% de type II, 7,5% de type III, pas d'échec complet. Les résultats sont meilleurs pour le groupe opéré avant 12 ans. Le greffon mentonnier (14 cas) semble se résorber un peu moins que le greffon iliaque, bien que cela ne soit pas statistiquement significatif.

      Collins (Collins 1998) étudie 143 avéoloplasties avec un âge moyen de 11,59 ans lors de l'alvéoloplastie. A 12 mois il note 46% de type I, 41% de type II, 10,95% de type III et 2,2% d'absence de pont osseux. Il relève un pourcentage d'échec qui augmente avec l'âge de la chirurgie, plus d'échec dans les formes bilatérales et note la stabilité de la hauteur radiologique du greffon à partir du 6e mois.

      2. Enemark (Enemark 1987) propose un score de 1 à 4 très semblable à celui d'Abyholm hormis le score 4 qui définit une hauteur du greffon inférieure à 25% de la hauteur normale ( fig. 41)

      

Fig. 41

      Enemark étudie 224 patients répartis en trois groupes : A) alvéoloplastie avant l'éruption canine, B) après l'éruption canine (vers 13-14ans), C) tardive ( plus de 16 ans). Pour les FLM ou les FLMP uni et bilatérales, le score est inversément proportionnel à l'âge de l'alvéoloplastie. Pour les FLMP unilatérales du groupe A, il note 73% de score 1, 24% de score 2, 4% de score 3 et l'absence de score de 4. Le plus mauvais groupe (FLMP bilat. du groupe C) montre 25% de score 1, 50% de score 2, 4% de score 3 et 21% de score 4.

      Takahashi (Takahashi 1999) examine radiologiquement (radiographie apicale et scanner) 101 greffes iliaques chez 93 patients. Le score est identique à celui de Enemark hormis la numérotation qui est inversée (4=septum normal, 1= résorbtion maximale). Il constate que 80% des greffes ont un score de 4 après 6 mois mais que la proportion de scores 4 chute d'un tiers après 2 ans. Le scanner montre que la résorbtion du greffon est plus importante en épaisseur qu'en hauteur, ce qui est le facteur le plus limitant pour la pose d'implants (voir plus bas).

      Les études utilisant les scores sus-cités ont pour but d'essayer de trouver une méthode quantitative d'évaluation des résultats de l'alvéoloplastie. Toutefois, la comparaison des études entre elles doit être sujette à réflexion, même si un score identique est utilisé : ainsi, des variables comme l'âge du patient, la sévérité ou le type de la fente, le recul, la reproductibilité des examens radiologiques, la prise en charge orthodontique ou parodontale parallèle, le type de greffon (...) ne permettent pas toujours de comparer les résultats d'une étude à l'autre.

      Qualitativement, ces travaux ont néanmoins le mérite de préciser à l'unanimité certains points:

      Dans notre série rétrospective, l'évolution radiologique du greffon n'a malheureusement pas pu être évaluée. En effet, l'examen des dossiers a mis en évidence des bilans radiologiques inconstants, souvent non comparables, mal systématisés, et par conséquent empêchant toute analyse comparative.

      Cette constatation est partiellement expliquée par le cadre chirurgical du bassin lémanique au cours des 15 dernières années et l'hétérogénéicité des cas traités. Ainsi, les 41 alvéoloplasties décrites ont été prises en charge par 14 orthodontistes différents, dont 12 en pratique privée, parfois adhérant peu au concept d'alvéoloplastie secondaire. Dans cette situation, la systématisation des examens radiologiques et parodontaux a été variable. Ce contexte permet également d'expliquer que seules 41 alvéoloplasties sur 70 interventions ont pu être analysées.

      Certains auteurs ont proposé l'utilisation d'un trépan pour la prise de greffe iliaque, impacté ou rotatif, dans le but présumé de faciliter la prise du greffon et de diminuer la morbidité du geste:

      McCanny (McCanny 1997) a comparé un groupe avec une ouverture à ciel ouvert de la crête iliaque (n=13) et un groupe avec prise du greffon par trépan (n=16). Il ne note aucune différence de la durée d'hospitalisation (de 3 à 15 jours), de la hauteur radiologique alvéolaire ou de l'éruption canine à travers la greffe. Il relève par contre une morbidité légérement supérieure dans le groupe « à ciel ouvert » (1 hématome, 2 infections).

      Hardy (Hardy 1999) a comparé une technique de trépan rotatif inséré par une ou plusieurs petites incisions cutanées (n=12) à un groupe avec une prise de greffe conventionnelle (n=15). Il constate des pertes sanguines, une durée d'hospitalisation et les besoins en antalgiques post-opératoires moindres pour le groupe opéré par trépan.

      Dans notre activité, compte tenu d'une morbidité, d'un temps et risques opératoires faibles par une prise de greffe iliaque conventionnelle, nous n'utilisons pas le trépan, qui à notre sens, n'assure pas une amélioration obligatoire de ces trois paramètres.

      Finalement, plusieurs auteurs ont souligné il y a plusieurs années déjà l'importance de l'étanchéité du plan nasal pour l'intégration du greffon (Epstein 1970, Broude & Waite 1974, Troxell 1982): la spongieuse peut s'échapper macroscopiquement en cas de brêche large et le milieu contaminé des fosses nasales peut contribuer à une infection de la greffe et à sa résorbtion secondaire.


c) Type de lambeau utilisé

      Le nombre de lambeaux de glissement (n=17) est sensiblement identique au nombre de lambeaux vestibulaires (n=19).

      Le choix du lambeau utilisé à été essentiellement dicté par l'aspect clinique. Le lambeau vestibulaire a été préférentiellement choisi en présence d'une muqueuse vestibulaire abondante et lorsque la largeur de la fente et le manque de gencive attachée laissait craindre une tension trop importante pour un lambeau de glissement.


d) Récidive de communication bucco-nasale (CBN)

      Dans notre collectif, 2/3 (68%) des patients avaient une CBN avant l'alvéoloplastie et 92,7 % n'avaient pas de CBN après celle-ci. Le pourcentage d'échec de fermeture de la CBN est de 11%.

      Dans la littérature, les récidives de CBN après alvéoloplastie sont de :

16% Jackson(1982)

07% Troxell (1982)

02% Hall&Posnick(1983)

17% Turvey (1984)

00,2% Bergland (1986)

00% Demas (1988)

15% Blanchard-Moreau(1989)

12% Witsenburg (1990)

03% Amanat (1991)

09,7% Witsenburg (1993)

      Dans notre série, on note plus de récidives de CBN lorsqu'on utilise le lambeau de glissement (18,5%) que pour le lambeau vestibulaire (7,3%). Nous n'avons pas d'explication à cette constatation, étant donné qu'il existe un nombre inférieur de déhiscence précoce pour ce type de lambeau contrairement à ce que l'on pouvait imaginer (voir ci-dessous). Par ailleurs seules 3/12 (=25%) des déhiscences post- opératoires ont eu une récidive de CBN.

      Trois facteurs pourraient expliquer les récidives: la présence d'une fente large, l'âge plus élevé des patients et l'hygiène déplorable. Ces trois critères ont été retrouvés chez 2 des 3 patients ayant montré une fistule post-opératoire (N°32 et 55).

      Dans la littérature l'élément essentiel contribuant à un taux élevé de fistules post-opératoires semble être une greffe effectuée après l'éruption canine. Cela a été le cas pour les trois récidives de notre série.


e) Déhiscence post-opératoire

      Nous relevons une incidence de 29% de déhiscences post-opératoires. Ce chiffre assez élevé n'est pas obligatoirement comparable avec la littérature, certains auteurs considérant une petite déhiscence comme un événement post-opératoire mineur et non relevé.

      Trois auteurs ont signalé l'incidence de déhiscence suivante :

02-26% Paulin(1988)

16% Cohen (1993)

00% Collins(1998)

      La majorité des petites déhiscences ne nécessite généralement aucune mesure particulière, ou tout au plus un avivement délicat à la curette des berges et du greffon permettant ainsi une granulation muqueuse rapide.

      Nous ne déplorons qu'un seul cas d'infection importante avec nécessité d'un drainage d'abcès et antibiothérapie intraveineuse (dossier 6).

      Les avis sont partagés quant à l'influence des déhiscences sur la résorbtion du greffon : certains auteurs pensent que celles-ci ne contribuent pas à une perte de hauteur osseuse (Freihofer 1973, Johansson 1974, Freitag 1984, Witsenburg 1990), et d'autres, dont nous faisons partie, estiment qu'un lâchage de suture est délétaire pour le greffon, en particulier s'il y a une perte macroscopique de fragments osseux ou par contamination bactérienne (Lilja1987, Amanat 1991).

      Notre série a montré plus de déhiscences après un lambeau vestibulaire (36%) qu'avec un lambeau de glissement (29%). On peut penser que la suture en muqueuse libre est plus fragile qu'en gencive attachée, bien que la suture du lambeau vestibulaire soit sans tension, il est probable qu'il y ait des tractions post-opératoires au niveau du vestibule liées aux mouvements de la lèvre supérieure et des joues.

      La grande majorité des déhiscences (91,3%) s'est produite du côté palatin, au confluent des 4 lambeaux. Préventivement, rappelons l'importance d'une suture méticuleuse à ce niveau et impérativement sans tension, obtenue par des décharges périostées et vestibulaires. Un point d'amarrage proposé par Steinberg (Steinberg 1997, voir chap 10) peut être utile.

      Commes certains auteurs (Abyholm 1981, Bergland 1986), nous utilisons une gouttière acrylique rigide thermoformée de contention dans tous les cas ou une fausse mobilité des segments maxillaires ou une absence de pont osseux radiologique sont constatés avant l'intervention (voir chapitre 10). La gouttière est scellée pendant 6 semaines sur les dents.

      Bien que l'hygiène locale devienne plus difficile, il nous paraît que cette contention, comme un pansement parodontal, contribue à une protection physique des sutures notamment chez l'enfant.

      Tout comme les échecs globaux, les déhiscences post-opératoires sont plus fréquentes plus l'âge du patient augmente (Abyholm 1981, Hall & Posnick 1983, Pederson 1985, Waite 1987, Paulin 1988) et si l'alvéoloplastie est faite après l'éruption canine: Paulin (Paulin 1988) relève 2% de déhiscence pour les cas greffés avant l'éruption et 26% de déhiscence pour les cas greffés après l'éruption canine. Dans notre série, nous notons respectivement 7% et 41% de déhiscence si la greffe est faite avant ou après l'éruption canine.

      L'hygiène bucco-dentaire est un facteur reconnu qui joue un rôle majeur sur la survenue de déhiscences post-opératoires (Bergland 1986, Abyholm 1981 Amanat 1991), chez l'adulte en particulier, où l'on peut ajouter le tabac comme facteur de risque. Collins (Collins 1998) a remarqué 83% d'échecs dans une série de 143 sites greffés dont l' hygiène était mauvaise. Dans notre série, tous les cas présentant une hygiène déficiente ont développé une déhiscence. Ainsi, l'assainissement préopératoire et un suivi parodontal post-opératoire par un spécialiste nous paraissent indispensables.


f) Eruption canine

      14 alvéoloplasties ont été effectuées avant l'éruption de la canine. Le recul est suffisant pour pouvoir affirmer que l'éruption de cette dent s'est faite à travers la greffe.

      Pour ces 14 cas, quel que soit le type de lambeau utilisé, toutes les canines ont fait une éruption spontanée, sans assistance chirurgicale secondaire.

      Dans la littérature, le pourcentage de canines retenues nécessitant une assistance chirurgicale pour faire leur éruption après alvéoloplastie est de :

25% Waite (1980)

56% El Deeb (1982)

50% Hinrichs (1984)

21% Enemark (1985)

59% El Deeb (1986)

15% Bergland (1986a)

10,2% Bergland (1986b)

30% Enemark (1987)

10% Paulin (1988)

02,1% Amanat (1991)

07% McCanny (1998)

      Toutes ces études concernent des alvéoloplasties secondaires par greffe iliaque spongieuse autologue. La plupart des auteurs utilisant de la spongieuse sans corticale s'accordent à dire que l'éruption dentaire à travers un greffon corticospongieux est moins aisée. Demas (Demas 1988, 48 sites) et Braun (Braun 1981, 6 sites) utilisent une greffe corticospongieuse mais ne donnent malheureusement pas de précisions quant à l'éruption canine.

      L'éruption dentaire normale est soumise à différents facteurs, essentiellement dépendants du ligament parodontal (Kardos 1979, Perera 1981) et de l'environnement histo-chimique péricoronaire (Di Biase 1970). Steedle a émis l'hypothèse d'une interaction 'permissive' entre la gencive attachée et la dent sous-jacente lors du phénomène d'éruption (Steedle & Proffit 1984). Basé surtout sur des impressions cliniques, ce fait n'a jamais été objectivé par des preuves histologiques ou bio-chimiques à notre connaissance.

      Dans notre série, une canine a montré une éruption en muqueuse libre.

      Finalement, tous les auteurs reconnaissent l'importance de la technique chirurgicale comme un facteur essentiel pour diminuer le risque d'une rétention canine: abord atraumatique des berges osseuses du maxillaire et respect absolu de l'intégrité du sac péricoronaire de la canine.


g) Chirurgie parodontale secondaire

      Notre série a démontré la nécessité d'une chirurgie parodontale secondaire pour 24% des cas opérés par un lambeau de glissement muco-périosté et de 53% pour ceux opérés par un lambeau vestibulaire.

      Les indications motivant cette chirurgie ont été essentiellement un manque de gencive attachée et, plus rarement, une profondeur insuffisante du vestibule supérieur.

      Comme il s'agissait d'une prise en charge parodontale non systématique, il est probable que les besoins en chirurgie parodontale pour les cas opérés par lambeau vestibulaire soient sous-estimés.

      L'importance de la gencive attachée a été abordée au chapitre « chirurgie gingivale ». Bien qu'un revêtement de muqueuse libre soit tout de même compatible avec un parodonte sain, un « anneau » minimal de quelques millimètres de gencive kératinisée autour de la couronne dentaire est important (El Deeb 1986, Witsenburg 1990).

      A l'évidence, un manque de gencive attachée est fréquemment constaté après fermeture par lambeau vestibulaire :

      Une question importante concerne l'influence éventuelle du type de lambeau sur la résorbtion de la greffe.

      Bien que nous ne puissions apporter de preuves radiologiques, nous avons l'impression clinique que le lambeau vestibulaire a plus fréquemment contribué à une perte de la hauteur osseuse.

      Sans qu'une interaction biologique entre la muqueuse libre et la greffe sous-jacente n'ait été objectivée dans la littérature, nous pensons que la traction mécanique par une bride muqueuse peut augmenter la résorbtion osseuse. Ceci semble particulièrement évident si la bride est mise sous tension lors des mouvements de la lèvre et du vestibule.

      L'absence de périoste dans la plupart des lambeaux vestibulaires joue certainement un rôle favorisant la résorbtion.

      Dans cette idée, les cas opérés avec un lambeau vestibulaire dans l'étude de Witsenburg (3/17cas) ont également montré des résorbtions plus importantes du greffon (Witsenburg 1990).

      Enemark en 1987 a constaté que sur 62 patients présentant un manque de gencive attachée, ceux qui ont bénéficié d'une gingivoplastie (n=32) dans les 3 à 6 mois après l'alvéoloplastie ont montré une résorbtion du greffon moindre que ceux qui n'ont pas eu de chirurgie gingivale secondaire (n=30).

      Le lambeau de glissement muco-gingival semble par conséquent le plus adapté aux exigences parodontales après alvéoloplastie.

      Toutefois, les séquelles cicatricielles de la chirurgie primaire et la configuration anatomique de la FLMP impose parfois l'utilisation d'un lambeau vestibulaire de rotation: dans ce cas, il convient d'effectuer une gingivoplastie rapidement après l'alvéoloplastie (de 3 à 6 mois) afin d'assurer le meilleur pronostic parodontal possible.


h) Restauration prothétique finale

      S'agissant généralement de patients jeunes ou enfants, le choix d'une restauration finale par prothèse amovible doit être à notre avis exeptionnel. Dans notre série, les 5 patients traités par prothèse amovible étaient adultes lors de l'alvéoloplastie. Ce choix a été le plus souvent dicté par des considérations financières personnelles ou par une décision du médecin dentiste prudent face à un pronostic parodontal incertain chez des patients avec une hygiène insuffisante. Dans certains cas, il nous paraît préférable de choisir une restauration collée provisoire à la place d'une prothèse amovible qui risque d'accélérer le processus pathologique parodontal lorqu'elle est mal adaptée.

      En présence d'une FLMP étroite, stable et sans fistule clinique, certains médecins dentistes ont restauré autrefois l'arcade par un pont fixe sans alvéoloplastie préalable. De nombreux échecs ont été ainsi constatés avec descellements prothétiques itératifs. Ceux-ci s'expliquent par la persistance de micro-mouvements entre les segments maxillaires. Ainsi, Stenström a mesuré la disparition de ces micro-mouvements après greffe iliaque consolidée en applicant des forces jusqu'à 450gm dans différents plans (Stenström 1963).

      Etant donné l'obligation de tailler des dents saines pour confectionner les couronnes, la restauration par pont fixe n'est actuellement justifiée que dans le cadre d'une fente large avec des piliers à bon pronostic dans les cas qui ne peuvent être traités par implantologie ou chirurgie orthognatique (limitations économiques ou personnelles). Ce traitement n'est plus adéquat pour les fentes étroites traitables par fermeture orthodontique de l'espace interdentaire.

      Notre série montre que plus de la moitié des cas à bénéficié d'une fermeture orthodontique de la FLMP.

      Comme discuté au chapitre 6, la fermeture orthodontique de la FLMP après alvéoloplastie est notre traitement de choix, en particulier dans les cas idéaux où la greffe est faite avant l'éruption canine. Le bénéfice incomparable de la migration canine à travers la greffe avec son support parodontal a déjà été longuement discuté. L'aspect esthétique de la couronne canine prenant la place de l'incisive latérale ne pose aucun problème pour la dentisterie esthétique moderne. Enfin, la fermeture orthodontique évite les désavantages des solutions prothétiques traditionnelles.

      La stabilité des résultats orthodontiques dépasse le cadre de cet exposé.

      Le choix de ce type de traitement final nécessite la collaboration avec un orthodontiste à haut niveau de compétence, connaissant parfaitement les problèmes spécifiques aux FLMP qui peuvent être parmis les plus difficiles de sa spécialité. Ses connaissances des traitements combinés avec la chirurgie orthognatique doivent être également du meilleur niveau.

      L'implantologie apporte des solutions supplémentaires aux traitements précités. Ses avantages sont:

      En présence d'une canine inutilisable ou absente, l'implantologie rivalise avec la fermeture orthodontique des fentes étroites. Pour les fentes plus larges dépassant les possibilités orthodontiques et, lorsque la canine ou plusieurs dents font défaut, l'implantologie prend tout son intérêt: si la projection maxillaire est suffisante, elle permet d'éviter une ostéotomie d'avancement du petit segment.

      Plusieurs contraintes compliquent néanmoins les plans de traitement par implants chez les patients porteurs d'une FLMP :

      1. Un volume osseux important est prérequis pour pouvoir insérer un implant dentaire, contrairement à la fermeture orthodontique qui amène le support parodontal avec la migration dentaire.

      2. Les délais entre l'alvéoloplastie secondaire et l'implantation sont longs: il est préférable de poser les implants dentaires après la fin de la croissance maxillaire, ce qui signifie un délai de plusieurs années si l'alvéoloplastie secondaire est effectuée avant l'éruption canine. On est alors confronté à la résorbtion du greffon qui débute déjà dès le 4-6e mois après la greffe (Turvey 1984, Bergland 1986a, Perrott 1994, Cohen M. 1989).

      Plus optimiste dans son étude scanographique sur 101 sites greffés, Takahashi constate que 90% des sites sont implantables après 6 mois et que les premiers sites non implantables apparaissent nettement après 2 ans en raison non pas d'un manque de hauteur osseuse mais d'une épaisseur insuffisante. Après 5 ans, seuls 40% des sites demeurent implantables (Takahashi 1999).

      Dans ces conditions, certains auteurs annoncent d'emblée lors de l'alvéoloplastie secondaire qu'une greffe supplémentaire sera vraisemblablement nécessaire en fin d'adolescence (Kearns 1996). Il s'agit le plus souvent d'une greffe d'appoint préimplantaire faite en anesthésie locale.

      3. Influence de la chirurgie orthognathique : lorsque l'on prévoit en fin de croissance une chirurgie orthognathique souvent en plusieurs segments, il nous paraît préférable pour l'ostéointégration et l'emplacement des implants d'insérer ceux-ci après les ostéotomies.

      4. Contraintes parodontales : quelle que soit la technique de lambeau utilisée pour l'alvéoloplastie, la gencive est fréquemment remaniée et cicatricielle au site implantaire. La gestion de celle-ci au profil d'émergeance de la couronne, toujours en zone esthétiquement sensible, est souvent difficile.

      En cas de bride muqueuse sur le site greffé, nous conseillons une greffe de gencive attachée rapidement après l'alvéoloplastie (3-6mois). Comme signalé plus haut, elle améliore le pronostic du greffon osseux (Enemark 1987). Même chez l'enfant, elle peut être effectuée en anesthésie locale.

      Les implants dentaires font donc actuellement partie intégrante des possibilités de traitements des FLMP, malgré des difficultés qui restent encore à résoudre . Des implantations précoces (chez l'enfant) et les techniques de régénération osseuse guidée améneront peut-être certaines solutions mais sont encore à évaluer dans le cadre des FLMP.


i) Autres complications mineures

      Parmis les complications dentaires mineures et peu fréquentes liées à l'alvéoloplastie, citons les résorbtions radiculaires cervicales ou apicales.

      Différents auteurs ont relevé la prévalence de cette complication :

03% Enemark 1985

05% Bergland 1986a

02% Bergland 1986b

03,3% Amanat 1991

02% Tan 1995

03,6% Collins 1998.

      Les étiologies reconnues pouvant expliquer ces résorbtions sont :

      1. Traumatisme des tissus périradiculaires lors de l'intervention chirurgicale

      Les cellules épithéliales et endothéliales de la fine membrane périradiculaire produisent des inhibiteurs des protéases et protègent la racine contre les agressions enzymatiques des ostéoclastes de l'os alvéolaire (Lindskog & Hammarstrom 1980).

      Une technique chirurgicale délicate et atraumatique est donc de rigueur pour prévenir cette complication.

      2. Capacité ostéoclastique du greffon

      La greffe autologue présente lors de son remaniement des capacités ostéoclastiques pouvant initier une lyse radiculaire ( Dragoo 1973, Ellegaard 1976).

      3. Mobilisation orthodontique

      Comme toute dent mobilisée orthodontiquement, les dents traitées dans le cadre d'une FLMP peuvent souffrir d'une résorbtion radiculaire indésirable. Il s'agit alors généralement d'une résorbtion apicale (Curyk 1984).

      Afin de diminuer le risque de résorbtion radiculaire, Enemark (1985) et Ellegaard (1976) ont proposé, en cas d'exposition d'une surface radiculaire, d'interposer entre celle ci et la greffe autologue une petite quantité d'os lyophylisé, plus neutre biologiquement. Le bénéfice de cette technique n'a toutefois jamais été objectivé.

      Pour prévenir ces problèmes, il va de soi que la mobilisation des dents contigües à la fente, souvent mal soutenues parodontalement, doit être faite avec des forces orthodontiques minimales et prudentes.

      Enfin, en plus des résorbtions radiculaires externes, Collins (1998) a signalé 1,4% de résorbtions internes, nécessitant généralement une obturation canalaire.


Conclusion

      S'appuyant sur l'expérience chirurgicale des cinquantes dernières années, on peut affirmer que l'alvéoloplastie secondaire a supplanté l'alvéoloplastie primaire pour le traitement des séquelles de fente labio-maxillo-palatine, notamment en diminuant les troubles de la croissance faciale liés à l'acte chirurgical.

      L'alvéoloplastie secondaire est réalisée idéalement vers 8 et 12 ans, avant l'éruption canine.

      Le greffon osseux le plus favorable est l'autogreffe de spongieuse iliaque.

      Les objectifs de cette chirurgie sont fonctionnels, morphologiques, esthétiques et psychologiques, avec notamment:

      Deux types de lambeau de couverture du greffon osseux ont été étudiés:

      Sur la base de 41 alvéoloplasties opérées dans le service de chirurgie maxillo-faciale de l'Hôpital Cantonal Universitaire de Genève, la comparaison de ces deux types de lambeaux a mis en évidence:

      L'étude est limitée par son caractère rétrospectif, le nombre de dossiers examinés et le manque d'éléments radiologiques permettant d'objectiver le pronostique à long terme du greffon osseux.

      A la lumière de nos constatations et en s'appuyant sur les données de la littérature, l'usage du lambeau muco-gingival de glissement peut être recommandé: il nous paraît un tissu périosté et gingival physiologiquement plus adapté à la couverture de la greffe osseuse. Sa qualité permet de diminuer la nécessité d'une chirurgie parodontale secondaire et d'apporter des conditions favorables aux traitements orthodontiques ou prothétiques ultérieurs. Notre impression clinique et les publications concernées suggèrent qu'il améliore le pronostic du greffon.

      Le lambeau de rotation vestibulaire demeure toutefois une technique à disposition du chirurgien, notamment dans des situations où le remaniement cicatriciel est important et où le manque de gencive attachée ne permet pas d'assurer la couverture et l'étanchéité par un lambeau muquo-gingival de glissement.

      Enfin, notre collectif a révélé un excellent taux de migration canine à travers la greffe iliaque.


[Précédent] [Suivant]