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Rénovation de l’enseignement primaire
Groupe de recherche et d’innovation
Lecture comparative des rapports d'activité de juin 1997
à l'intention du groupe de pilotage de la rénovation


 

 

Les écoles en innovation :
entre acquis et nouvelles priorités

 

Genève

Janvier 1998

 


Introduction

Analyse transversale des rapports d'activité des écoles en innovation
pour l'année 1996-1997

Paramètres liés à l'axe 1

Les regroupements d'élèves

La responsabilité collective

Le suivi des élèves

Paramètres liés à l'axe 2

L'équipe et la collaboration étendue

La supervision

L'intervision

Les conseils de classe et d'école

Les parents

Paramètres liés à l'axe 3

L'évaluation

La responsabilisation des élèves face aux apprentissages….

La métacognition

Les situations d'apprentissage

Autres points…

 


Introduction

Dans le bilan paru en novembre 1996, le GRI dressait le bilan de la première année de la phase d’exploration. Ce bilan tentait de mettre en perspective la nécessité de dépasser l’activisme du début de la phase d’exploration en faveur d’une approche plus systématique, encore mieux centrée sur les priorités fixées par le texte d’orientation et moins coûteuse en termes de temps et d’énergies.

L’attitude positive avec laquelle les divers partenaires s’étaient mis à la tâche de rendre compte et de se rendre compte, a sans doute renforcé l’émergence d’une nouvelle culture basée sur la reconnaissance des bienfaits d’une réflexion commune, de l’acceptation des uns et des autres, de la volonté de donner à voir les forces et les faiblesses, avec l’objectif d’y travailler afin d’apprendre ensemble, de faire le point, de situer les priorités, de mettre en évidence les acquis, les facilitateurs, mais également les obstacles que rencontrent les tentatives d’introduire le changement. En même temps, on pouvait s’interroger sur la durée de cette attitude positive, sur l’utilité et sur le danger de demander aux écoles de rédiger un rapport aussi complet chaque année, d’instaurer une routine dont l’efficacité s’amenuiserait au fil des ans.

En se basant sur les observations de la première année de l’exploration intensive, force était cependant de constater qu’on avait peut-être péché par manque de créativité, en adoptant trop rapidement, jusque dans le choix du vocabulaire, l’idée du " bilan ". Des bilans des élèves jusqu’aux bilans des écoles il n’y avait, en effet qu’un petit pas à faire. Le pas suivant devait par conséquent consister à mener une réflexion sur l’efficacité de la démarche elle-même et à introduire les aménagements nécessaires.

Il s’agissait donc de se poser les questions suivantes : " Quelle est la démarche de " rendre compte " qui est efficace tout en faisant avancer la réflexion sur l’autonomie des établissements scolaires ? " " Quelle est la démarche à même d’assurer un contrôle optimal de la qualité des écoles tout en respectant le processus de professionnalisation du métier d’enseignant ? "

Le titre même du premier bilan, " Les écoles en innovation :
passer de l’activisme à la méthode " avait en outre mis en évidence le dilemme auquel étaient confrontés tant les écoles en innovation que les collaborateurs du GRI : face à la complexité de la problématique, face au respect des priorités des divers acteurs, comment éviter le " zapping " thématique, comment se donner une méthode de travail assurant à tous les acteurs une efficacité maximale et satisfaisante, sans tomber dans la complaisance, ou encore dans la prise de pouvoir unilatérale ?

Dans cet objectif, il a été décidé de séparer l’obligation de rendre compte selon trois démarches complémentaires : la production de dossiers collectifs centrés sur des priorités d’exploration définies par le GIP (voir conclusions du bilan de l’an I), la demande de franchises et de ressources et la rédaction de rapports d’activité individuels par chacune des écoles en innovation. Sur cette base, le GIP a adopté le programme de travail suivant :

L’analyse qui suit se réfère uniquement au troisième point que nous venons d’évoquer, dans la mesure où les deux premiers ont été couverts par des documents indépendants , produits durant le printemps 1997. Elle montre que le travail dans les écoles en innovation progresse sur plusieurs plans :

Pour conclure, il nous semble pouvoir affirmer sans trop d’angélisme que les écoles en innovation se portent bien. Certes, plusieurs écoles font état de leur fatigue, de leur sentiment de surcharge, qui se renforcent au fur et à mesure qu’elles prennent conscience de la complexité et de la difficulté de la tâche. Ce qui ne les empêche pas les unes et les autres de mettre en évidence les acquis et de se fixer de nouvelles priorités. Il s’agit donc d’un bilan positif, qui permet d’espérer que l’année scolaire 1997-98 permettra d’avancer de manière satisfaisante pour l’ensemble des partenaires.

 

Analyse transversale
des rapports d’activité des écoles en innovation pour l’année 1996-1997

La lecture des différents rapports d’activité des écoles en innovation pour l’année 1996/1997 fait ressortir une certaine similitude de regard sur le travail accompli. Même si chacune d’entre elles a sa spécificité, son organisation, son ensemble de personnalités d’enseignants qui lui sont propres, même si les équipes sont de tailles différentes, dans des quartiers distincts avec des populations d’élèves particulières, même si elles ont mis sur pied des structures diverses et privilégié des domaines d’investigation spécifiques basés sur des projets de départ divers, bref, au-delà de tout ce qui semble les séparer, elles relèvent les mêmes préoccupations.

C’est ainsi que certains mots-clés ressortent très souvent, aussi bien lorsqu’il s’agit de pointer les côtés positifs que de relever les difficultés, ou de définir les priorités pour l’année à venir.

Nous avons essayé, dans cette analyse transversale, de regrouper ces mots-clés récurrents en douze thèmes prioritaires selon les trois axes de la rénovation. Leur ordre, défini au sein de chaque axe, n’a rien à voir avec une hiérarchisation liée au contenu, mais est lié à leur fréquence d’apparition dans les rapports.

La répartition à l’intérieur des axes a été faite a posteriori. Si certains choix ont été évidents et simples à opérer, d’autres ont posé quelques problèmes, en raison des diverses interprétations qui pouvaient leur être attribuées. En effet, certaines thématiques se trouvent parfois à la charnière de deux axes.

C’est ainsi que ce que nous avons appelé " responsabilité collective " se trouve ici faire partie de l’axe 1, alors qu’elle est aussi en lien avec l’axe 2. Il s’agit bien, pour nous, dans ce thème, de l’implication de chaque membre de l’équipe dans la gestion des parcours et de la progression des élèves et non seulement de l’équipe en tant qu’acteur collectif pour tout ce qui touche à l’établissement.

De même, l’évaluation aurait pu, selon le point de vue adopté, se trouver dans l’axe 1, alors que nous avons choisi de le faire figurer dans l’axe 3. Il nous a semblé en effet que cette thématique allait au-delà de l’individualisation des parcours, à laquelle se circonscrit l’axe 1, et qu’elle couvrait plus généralement la progression de l’enfant, s’articulait de plus en plus aux didactiques, et touchait à l’implication de l’enfant dans ses apprentissages, à sa manière de réfléchir sur ses actions et sa façon d’apprendre. En cela, elle nous paraît davantage rejoindre la problématique de la métacognition et participer nettement de la mise de l’enfant au centre des actividés pédagogiques.

C’est donc avec cette part d’" arbitraire " ou de décision subjective que nous entamons une micro-analyse des rapports d’activité des quinze écoles en innovation.

 

Paramètres liés à l’axe 1

Dans cette première partie, consacrée à tout ce qui touche à l’individualisation des parcours de formation, sont regroupés les points suivants : regroupements d’élèves, responsabilité collective et suivi des élèves. Ces trois grands thèmes portent à réfléchir à la variété des modes de regroupements d’élèves et à la nécessaire clarification des objectifs poursuivis, à la coopération au sein d’une équipe enseignante face aux difficultés rencontrées chez les élèves, ainsi qu’au partage de la responsabilité quant au suivi de leur progression. Ce dernier point concerne aussi bien la régulation des nouvelles structures mises en place, que la communication et la visibilisation des parcours des élèves visant à avoir une connaissance plus complète et plus fine de chacun d’eux, au travers, par exemple, des conseils de maîtres.

Les regroupements d’élèves

Les différentes formes de regroupements d'élèves sont bien sûr un élément important des pratiques des écoles, que ce soit sous forme de classes multiâges, de décloisonnements, de groupes de besoin ou de groupes de niveaux. Tous ces regroupements semblent, à des titres divers, apporter plutôt des satisfactions aux enseignants et sont généralement cités comme fonctionnant bien. A signaler toutefois deux écoles qui tempèrent leur engagement pour les classes multiâges en organisant pour l'année prochaine des classes comprenant des élèves de deux tranches d'âge plutôt que trois (sauf pour une classe conservant trois âges différents). Ces deux écoles ne tiennent aucun discours catégorique sur d'éventuels effets négatifs de cette forme d'organisation ; elles se contentent de relever les difficultés de gestion qu'elle occasionne et, en l'absence de résultats positifs incontestablement démontrés, préfèrent investir leur énergie d'une autre manière.

D’une façon générale, les différents regroupements effectués se traduisent très positivement en termes d’interactions entre les élèves, d’autonomisation, d’attribution de sens et de motivation. Mis à part les quelques réserves évoquées précédemment, aucune remarque négative n’est émise quant aux divers regroupements adoptés ici ou là.

Au niveau des priorités pour l’avenir, plus du tiers des écoles disent vouloir privilégier la création de groupes de besoin, alors qu’un tiers également désire mettre sur pied des décloisonnements, souvent pour une école entière et consacrés le plus souvent à des thèmes transdisciplinaires ou à l’élaboration d’un spectacle.

S’il est évidemment impossible de comparer toutes ces formes de regroupements d’élèves et de leur attribuer le même sens ou la même importance, on ne peut que constater que les structures autres que le groupe-classe ou le groupe-degré traditionnels sont des moyens utilisés par tous comme concrétisation visible d’un changement dans la conception de l’enseignement et la construction des apprentissages.

Toutefois, les enseignants semblent de plus en plus sensibles au fait que cette dimension de changement de structure ne se justifie plus par sa seule existence et qu’il convient de s’atteler de façon plus rigoureuse aux objectifs et finalités de chaque regroupement et de pouvoir évaluer précisément leur impact sur les apprentissages des élèves. C’est sans doute paradoxalement ce qui explique l’abandon, peut-être provisoire, des classes multiâges dans les deux écoles précitées. On peut imaginer en effet que, s’estimant peu équipés des moyens didactiques nécessaires pour mettre à profit ce type de dispositif, et refusant de tâtonner et de naviguer à vue, les enseignants concernés préfèrent consolider d’autres pratiques pédagogiques pour lesquelles ils se sentent mieux armés et dont ils maîtrisent mieux les effets.

C’est donc bien vers un affinement et une clarification des objectifs de toute structure ou organisation nouvelles, que s’acheminent clairement l’ensemble des enseignants, ne voulant sans doute plus prendre le risque de devoir justifier après coup la mise en place de tel ou tel regroupement, pour réaliser qu’il a été construit sur des critères trop flous et n’offrant pas toujours les résultats escomptés.

La responsabilité collective

La notion de responsabilité collective d’une équipe face à la totalité des élèves ou d’une partie d’entre eux, notamment dans le cas d’organisation par filières, traverse la majorité des rapports d’activité. Dans quelques écoles, cette notion semble déjà solidement ancrée et fait partie intégrante du fonctionnement de l’équipe ; elle semble convenir aux attentes et être vécue très positivement.

Dans plusieurs écoles, on met l’accent sur cette priorité pour l’année à venir, souvent sous forme de constitution d’un conseil des maîtres destiné plus particulièrement à gérer les cas d’élèves en difficulté. Ce type de conseil, destiné à créer ou renforcer cette notion de responsabilité collective de l’équipe existe déjà dans trois écoles.

Ailleurs, cette priorité s’exprime en termes de travail par filières ou cycles, à instaurer ou à améliorer.

On voit bien en tout cas que l’idée du titulaire, en tant qu’unique responsable de son groupe-classe tend à s’atténuer et que le travail d’équipe n’a pas pour seule mission d’établir des options pédagogiques et des structures communes. Il aboutit aussi à gérer les apprentissages et la progression des élèves de manière collective. Certes, le titulaire conserve une responsabilité particulière face à ses élèves, mais les préoccupations qu’il peut rencontrer face à tel ou tel enfant, aussi bien que face à des difficultés de gestion ou d’enseignement ne sont plus seulement les siennes, mais deviennent celles de l’équipe toute entière. Cette tendance démontre sans doute, outre la solidarité et un désir d’efficacité, une volonté de neutraliser les données trop subjectives qui peuvent parfois limiter l’action et la réflexion d’un enseignant, en prise directe avec les problèmes qu’il rencontre en classe. C’est un partage des dispositifs, des difficultés, voire des émotions qui leur sont liées, de la réflexion et des décisions. C’est l’occasion d’accéder à de nouvelles représentations communes. Personne n’est dessaisi de sa part de responsabilité, et personne ne l’assume seul. C’est d’ailleurs dans cette optique de responsabilisation collective de l’équipe que l’intervision prend davantage de sens.

Le désir des enseignants de faire face collectivement aux enfants en difficulté et aux dispositions à prendre envers eux peut être plus globalement appliqué à la progression des élèves en général. En effet, toute décision relative à la progression d’un élève, qu’il soit ou non en difficulté, ne pourra que bénéficier, à un moment ou à un autre, d’une appropriation collective. Tous les enseignants connaissant l’enfant, que ce soit par le groupe-classe, les décloisonnements, les groupes de besoin, les activités artistiques ou sportives, ont le droit de faire valoir leur perception de l’élève, leurs observations, leurs questionnements, leurs hypothèses. La mise en commun de toutes ces informations ne pourra qu’aider à dresser un portrait plus complet de l’élève en question et à objectiver les éléments d’une décision relative à sa progression. Elle permettra également la mise en place plus large de nouveaux dispositifs et une éventuelle modification des représentations des acteurs.

Le suivi des élèves

On sent, en lien direct avec la responsabilité collective des enseignants face aux élèves, et au travers des préoccupations face à l’individualisation des parcours, percer le souci d’un meilleur suivi de la progression de chacun, ce pour tous les élèves en général et plus particulièrement par rapport aux enfants en difficulté. Le suivi des élèves apparaît explicitement comme meilleur pour une bonne partie des écoles, qui pratiquent les systèmes de plan de travail ou de contrat, au travers desquels sont développés des dispositifs de différenciation et d’autonomisation, ainsi qu’une évaluation formative et des remédiations. Tous les outils d’évaluation, tels que portfolio, passeports d’objectifs et autres nouveaux moyens sont autant d’éléments permettant une meilleure visibilisation et un meilleur suivi des élèves.

Pour les enseignants, demeurent néanmoins les problèmes liés aux élèves en grande difficulté, face auxquels ils se sentent démunis, et pour lesquels les moyens mis en place dans un but de plus grande autonomisation et responsabilisation ne portent pas toujours leurs fruits. C’est pourquoi l’on sent dans une grande partie des équipes qu’une des priorités reste la recherche de nouvelles stratégies pour une approche plus pointue de la progression. Cette recherche de solution passe par des projets de groupes de besoin liés aux différents apprentissages, au tutorat, ou, plus globalement, par un travail souhaité en collaboration avec le SMP, ainsi que par une collaboration plus étroite avec les collègues de la division spécialisée, dans les écoles où cette division est présente.

Le travail effectué au GIP sur le dossier " progression " a provoqué une réflexion sur ce sujet dans toutes les écoles, plus ou moins bien ressentie au début, en raison de son caractère obligatoire et contraignant. Toutefois, le bilan semble être plutôt positif à la fin de l’année, dans la mesure où les enseignants disent en avoir tiré des bénéfices sur le plan théorique et avoir pu utiliser certains aspects du dossier pour avancer dans leurs réflexions.

On voit donc que le thème de la progression et du suivi des élèves a été, tout au long de l’année, un des éléments prioritaires de réflexion, que ce soit par le biais du GIP que par celui plus concret du vécu des enseignants face à certains élèves en difficulté, ou encore à la thématique toujours présente du redoublement.

 

Paramètres liés à l’axe 2

Ce chapitre, relatif au fait de travailler ensemble, regroupe les thèmes de : l’équipe et de la collaboration étendue à tous les partenaires, de la supervision, de l’intervision, des conseils - de classe et d’école - et des parents.

On trouvera ici un éclairage sur le climat régnant dans les équipes, ainsi qu’une analyse de l’évolution des projets concernant la dynamique de la coopération entre professionnels. La supervision et l’intervision auront ici leur place, en tant que moyens espérés pour faire face à certaines des difficultés ou impasses pouvant apparaître ici ou là, ainsi que moyens de développer des compétences pédagogiques et relationnelles chez les enseignants. Au niveau des élèves, les conseils, de classe ou d’école, outils régulateurs des apprentissages chez les enfants, ainsi que de multiples dysfonctionnements, font partie intégrante de cette dimension de gestion collective. Quant aux parents, leur importance est fortement relevée dans les différents rapports des écoles, chaque établissement cherchant à instaurer des relations privilégiées, de confiance et d’estime réciproque, entre l’école et la famille.

L’équipe et la collaboration étendue

Le bilan de la première année des écoles en innovation avait vu l’équipe au centre des préoccupations, puisque le lancement de la rénovation demandait à toutes les écoles engagées la construction ou la consolidation du fonctionnement d’équipe pour pouvoir mener à bien leur projet. En effet, pour instaurer les innovations, pour réfléchir et décider de toutes les nouvelles pratiques et/ou de nouvelles structures, en cohérence avec les trois axes de la rénovation, il était indispensable de pouvoir compter sur une équipe solide et solidaire, efficace dans sa réflexion et dans ses décisions. C’est pourquoi cette première année avait donc été naturellement consacrée à la recherche de moyens pour rendre les équipes cohérentes dans la prise en charge de leurs élèves.

Or, dans les rapports d’activité de cette deuxième année, on retrouve de façon unanime l’équipe au sein des préoccupations des différentes écoles, et ce, dans deux directions apparemment opposées.

En effet, la quasi-totalité des écoles relève la qualité des échanges au sein de l’équipe, le bon climat qui y a régné tout au long de l’année, les notions de respect, d’écoute mutuelle et de convivialité qui ont présidé à leur fonctionnement. Plusieurs font également état d’une grande amélioration dans la gestion, l’organisation, les compétences d’animation des uns et des autres.

Dans le même temps, de nombreuses écoles, souvent les mêmes que précédemment, insistent sur l’état alarmant de fatigue de l’équipe, en fin, voire même en cours d’année. Certaines d’entre elles mettent l’accent, sans nier les qualités personnelles de chacun et les capacités d’écoute et de tolérance, sur des tensions autour du rôle des uns et des autres, de l’adhésion pas toujours évidente de tous au projet ou à telle ou telle pratique, ainsi que de la difficulté à lier de façon harmonieuse les échanges théoriques et la mise en pratique de certaines options.

Pour cette deuxième année, on aurait pu imaginer que le plus gros du travail était fait, que les équipes avaient atteint, sans bien sûr avoir réglé tous les problèmes, une certaine vitesse de croisière et de bonnes bases de fonctionnement, pour pouvoir mieux régler les problèmes pédagogiques de fond. D’où la douloureuse surprise de se voir rattrapés par toutes les difficultés non résolues, venant s’ajouter aux sujets pédagogiques prioritaires, tels que les enfants en difficulté, de nouvelles formes de regroupements d’élèves, de nouvelles formes d’apprentissage, la progression des élèves, etc.

Le traitement frontal de ces deux types de problèmes (continuer à veiller aux dispositifs mis en place, tout en gérant les turbulences d’une vie d’équipe) a engendré un important phénomène de fatigue, de ras-le-bol, voire parfois de découragement face au travail entrepris.

Il est pourtant significatif de constater que tous les rapports mentionnant cet état de fatigue par honnêteté face au bilan demandé, le font toutefois de façon positive, se montrant capables de l’utiliser pour repuiser de l’énergie et pouvoir repartir du bon pied l’année suivante. C’est plus une sorte de signal d’alarme, amenant chacun à réfléchir à des régulations pour l’avenir, qu’un appel de détresse concrétisant un état de non-retour.

Ceci se confirme d’ailleurs lorsqu’on se penche sur les priorités des uns et des autres pour l’année à venir, dont beaucoup concernent un réajustement du fonctionnement de l’équipe, par, entre autres, une redistribution des rôles, une meilleure définition des priorités, une meilleure organisation et utilisation du temps, un partage des tâches, etc... Toutes ces mesures sont envisagées dans le but d’optimaliser les séances et le fonctionnement de l’équipe en diminuant parallèlement la surcharge qu’elles peuvent entraîner et donc la trop grande fatigue qui pourrait en découler.

Cependant, outre les aménagements touchant à l’organisation, il ne faut pas minimiser les problèmes de fond, liés à des désaccords, ou tout au moins à un manque de consensus sur certaines options pédagogiques plus ou moins fondamentales selon les cas, semblant mener quelques équipes à une forme d’incertitude quant à divers points du projet. Il semblerait indispensable que de telles contradictions puissent être mises en évidences et discutées clairement afin de permettre aux différentes équipes de continuer à avancer. La discussion et la confrontation des différents points de vue, toujours ramenés à leur cohérence nécessaire et indispensable avec le projet initial et les trois axes de la rénovation, pourront amener à définir de nouveaux consensus ou compromis face à certains points chauds, qui auront le mérite d’être à nouveau le fruit d’une décision collective et un nouveau point de départ concret explicité pour tous, à défaut d’être partagé pleinement par tous.

Est-il encore nécessaire d’ajouter à quel point le fonctionnement de l’équipe fait partie intégrante de tout le processus de rénovation dans les écoles ? Le difficile équilibre à trouver entre l’individuel et le collectif n’est pas une chose mise sur pied une fois pour toutes. Le cadre structurel, dans lequel s’inscrivent toutes les actions entreprises, demande à être constamment pensé, réajusté, ménagé et aménagé, dans une logique participative.

En ce qui concerne la collaboration étendue à tous les partenaires, de nombreux rapports en font état. Un des points qui revient assez fréquemment a trait au désir d’une redéfinition du rôle de GNT, que ce soit dans le sens d’une plus grande implication dans le travail avec les élèves en difficulté dans ou hors de la classe, ou d’une plus grande participation à la prise en charge du suivi des élèves et de leur progression.

Il peut aussi s’agir d’un lien à renforcer ou qui l’a déjà été d’une division ordinaire à l’autre (élémentaire et moyenne), d’un travail plus ciblé avec la division spécialisée, d’une meilleure intégration des maîtres de discipline spéciale au sein des projets lorsque ce n’est pas encore le cas, ainsi que, là où existe cet état de fait, de ponts à créer, de dialogue à entretenir entre les parties d’école " partante " et " non-partante " dans la rénovation.

On note également, ici ou là, un désir d’une collaboration plus concrète avec le CO.

On voit donc bien que c’est un souci de réflexion et de responsabilité très globale qui anime la quasi-totalité des écoles. Le souhait d’une certaine cohérence et, par là, d’une efficacité maximale, passe par l’implication de tous les acteurs en présence, par la définition de leurs rôles respectifs dans leur spécificité et leur complémentarité. Reste néanmoins ouvert le statut des enseignants qui ne souhaitent pas rejoindre les projets d’innovation et qui, pourtant, doivent y collaborer ponctuellement.

La supervision

C’est en lien direct avec ce qui précède au sujet des équipes que l’on peut comprendre le souhait de quelques-unes d’entre elles de pouvoir bénéficier d’une supervision, démontrant par là leur désir de se donner le maximum de garanties quant au travail entrepris.

Outre certains problèmes de résolution ou d’évitement de conflit, potentiel ou déclaré, la supervision peut permettre aux enseignants de mieux réussir le mariage souvent difficile de la théorie et de la pratique en alimentant des séances à partir de données concrètes, d’observations issues directement de leurs pratiques, pour pouvoir ensuite réinjecter directement dans leurs classes la réflexion théorique qui en aura découlé. On se rend effectivement compte, à la lecture des bilans, que ce décalage réel ou ressenti comme tel, entre théorie et pratique est une source de préoccupation pour plusieurs équipes, tout au moins pour certains de leurs membres. C’est d’ailleurs ce qui génére les doutes ou les remises en question face à certaines options pédagogiques, pour lesquelles d’aucuns se demandent comment elles résisteront à la mise en pratique, comment elles pourront être compatibles avec certaines contingences ou échéances existantes. C’est donc bien là le rôle de la supervision que de rendre possible ces allers et retours entre théorie et pratique, en veillant à leur cohérence et à leurs effets réciproques.

L’intervision

Quelques bilans d’activité évoquent également le désir des enseignants de pouvoir pratiquer entre eux l’intervision. La réflexion des enseignants autour de la responsabilité collective et leurs préoccupations relatives à un suivi toujours meilleur et cohérent de leurs élèves semble en amener certains à souhaiter pouvoir établir entre eux ce type de démarche. En effet, c’est une chose, bien admise et courante maintenant de réfléchir en équipe, de mettre à plat ses préoccupations et d’en débattre, de suivre des formations, des temps de réflexion et de travail en commun, de discuter de ses pratiques, mais c’en est une autre de montrer ces dernières, de les rendre visibles concrètement et non plus seulement par le discours, dans la salle des maîtres.

L’intervision implique par les uns et les autres l’acceptation du regard de ses collègues, dans l’environnement naturel et encore souvent fortement individualisé de la classe. Il ne s’agit pas ici de décloisonnements ou de groupes de besoin, décidés et organisés collectivement, où la présence et le rôle de plusieurs enseignants sont déterminés et voulus en fonction de ces regroupements. Il s’agit plus simplement, et paradoxalement plus difficilement, d’accepter entre pairs le regard de l’autre dans le quotidien de sa classe, bien entendu dans un contrat de réciprocité. Aller chez l’autre chercher de nouvelles idées, de nouveaux modes de fonctionnement, remettre en cause ses propres pratiques en observant celles d’un collègue, se donner le droit et la possibilité de parler ensuite de ses pratiques et de celles de l’autre, tout ceci n’est possible que si, à son tour, on accepte de recevoir un autre regard. Ce ne sont que cette interaction et ces échanges qui peuvent valider et enrichir une telle démarche et qui pourront modifier et faire évoluer la dynamique des personnes d’abord, et de l’équipe entière ensuite. Chacun, à tour de rôle, doit donc pouvoir se décentrer, observer, développer un sens critique, communiquer, entendre, accepter, se remettre en cause. Tout ceci demande en préalable, outre une préparation de l’observation prévue, un minimum de cohésion au sein de l’équipe et une grande confiance réciproque, aussi bien personnelle que professionnelle. Il va de soi qu’il semble difficile de pouvoir tabler sur l’intervision dans des équipes où subsiste une certaine méfiance et dans lesquelles un minimum de consensus au sujet des pratiques et des options pédagogiques ne serait pas atteint. Dans un tel cas, on risquerait d’obtenir des résultats inverses à ceux recherchés, dans la mesure où pourraient ressortir, amplifiés, certaines divergences ou malentendus, qui déboucheraient davantage sur l’explicitation de désaccords personnels, sur des jugements de valeur ou des clivages que sur un réel enrichissement de la réflexion. C’est pourquoi on peut souhaiter que, dans les cas où la cohésion autour du projet serait encore fragile, cette intervision soit accompagnée d’un travail sur l’équipe, afin de ne pas cristalliser des dysfonctionnements ou aggraver des conflits d’opinion plus ou moins explicites.

Les conseils de classe et d’école

Dans la quasi-totalité des écoles, ont été mis en place des conseils de classe et souvent un conseil d’école, ou conseil des élèves, regroupant des délégués de toutes les classes. Les enseignants s’en déclarent dans l’ensemble satisfaits. Dans les priorités apparaissent partout le souhait de renforcer tel conseil, de le systématiser, d’en améliorer le fonctionnement, ou de créer tel autre qui n’a pas encore été mis en place.

Les conseils, tels qu’ils sont conçus dans les rapports d’activité, sont surtout perçus comme facilitateurs de dialogue, moyen d’apprentissage de la démocratie, du respect mutuel, de la tolérance, et par conséquent outil pour la résolution de conflits ou de problèmes de violence.

On pourrait peut-être regretter que les différentes formes de conseil ne soient que rarement orientées sur les apprentissages des élèves. Il est vrai que, dans tous les cas, ils n’ont pas véritablement été créés dans ce but et qu’ils répondent donc pour l’instant aux finalités qui étaient explicitement les leurs.

On peut pourtant ajouter que tous les éléments cités contribuent à accroître la qualité des conditions favorables aux apprentissages. De plus, certaines écoles intègrent au sein des conseils l’élaboration de projets avec les élèves. D’autres ont conscience qu’ils sont aussi un lieu d’apprentissage quant à la prise de notes, la capacité de synthèse, l’expression orale, l’argumentation, etc.

En cela, et bien que ce type d’objectifs d’apprentissage ne soient pas toujours réellement explicités, on peut dire que les conseils leur sont indirectement liés.

Les parents

La plupart des écoles relèvent une amélioration ou consolidation des relations avec les parents, dans la mesure où la relation de confiance est de plus en plus établie. Les enseignants ont moins de retenue pour faire part de leurs nouvelles pratiques et de l’état de leur réflexion, pour amener les parents à écouter, à discuter. De leur côté, les parents semblent répondre à cette ouverture par une confiance et une volonté d’être partie prenante de ce qui se passe dans l’école. De plus, plusieurs écoles relèvent le degré de satisfaction et l’appréciation positive de la plupart des parents face aux innovations entreprises.

Bien évidemment, il reste quelques ombres au tableau. Quelques écoles regrettent le peu d’implication des parents de leur quartier, ou les manifestations d’inquiétude de certains d’entre eux face à la rénovation et aux conséquences négatives qu’elle pourrait avoir sur les apprentissages de leurs enfants. Pour l’une d’elles, améliorer les relations avec les parents reste une des priorités pour l’année prochaine.

Il demeure dans l’ensemble assez réconfortant de voir que, dans la plupart des cas, les relations entre enseignants et parents se sont, soit consolidées dans les écoles où il y avait déjà une bonne culture de collaboration et de confiance, soit, dans d’autres, mises en route dans de bonnes conditions.

Il n’en demeure pas moins que l’on sent encore parfois en filigrane, au-delà des bilans d’activité, dans l’approche plus personnelle des écoles, une certaine retenue des enseignants vis-à-vis des parents. En effet, les enseignants ne sont pas toujours prêts à justifier toutes leurs pratiques et réflexions auprès des parents, et, s’il leur reconnaissent toujours le droit d’être informés, ne sont pas prêts à accepter forcément un droit de regard, voire le désir de contrôle qu’ils ressentent parfois. Ceci soulève la question pertinente de l’équilibre à trouver entre d’une part la nécessité de rendre compte et une transparence nécessaire amenant à une collaboration et à des échanges forcément enrichissants et profitables à tous, à commencer par les élèves, et la dérive qui consisterait à donner aux parents un réel pouvoir de contestation et d’ingérence dans les pratiques pédagogiques, voire même dans les options générales de l’enseignement. C’est cette dernière éventualité dont certains enseignants ont peur, et qui pourrait les amener à hésiter à jouer réellement le jeu de la transparence, par souci et volonté de préserver ce qu’ils estiment être du ressort de leur professionnalisme.

 

Paramètres liés à l’axe 3

Ce chapitre consacré à la centration sur l’enfant regroupe des thèmes tels que : l’évaluation, la responsabilité des élèves face à leurs apprentissages, la métacognition et les situations d’apprentissage. C’est ainsi que seront mis en évidence de nouveaux outils procurant des données formatives pour l’élève et l’enseignant, et permettant une meilleure transmission de l’évaluation aux familles, comme alternative aux notes. Seront abordées les pratiques pédagogiques autour de la prise de conscience par les élèves de leurs stratégies d’apprentissage, et du développement de l’auto-évaluation et des approches métacognitives. Enfin sera évoqué l’intérêt croissant des différentes équipes pour les situations larges d’apprentissage se traduisant par un besoin de formation pour pouvoir les mettre sur pied et les maîtriser.

L’évaluation

L’évaluation, en tant que remaniement des pratiques évaluatives tendant vers une évaluation formative et mise en place de nouveaux moyens de transmission de l’évaluation aux parents a constitué un des sujets principaux de réflexion ou d’action dans la plupart des écoles. Cette réflexion autour de nouvelles pratiques évaluatives englobe le plus souvent une clarification de leurs buts réels, de leur utilité, leur intégration dans les apprentissages des élèves, leur explicitation à ces derniers, ainsi que leur infléchissement inéluctable vers l’auto-évaluation et la co-évaluation. Quant aux nouveaux modes de transmission aux parents, ils ont souvent débouché sur un remplacement du carnet avec notes par un autre livret fait de commentaires, de recueils d’évaluations, (dossiers d’élèves, portfolios, etc.), tout cela accompagné d’entretiens. Certaines écoles étaient déjà en possession de ces nouveaux outils depuis une année ou plus, d’autres ont commencé à les opérationnaliser au cours de celle-ci, alors que d’autres encore ne faisaient que s’atteler à la réflexion autour d’un projet de changement de ce type. Pour un certain nombre d’écoles, l’évaluation a d’ailleurs constitué un des domaines de formation continue pour tout ou partie de l’équipe. On retrouve ce thème comme priorité pour l’année prochaine, soit en termes de mise en place d’une évaluation alternative, soit sous forme de consolidation d’outils déjà pratiqués, d’amélioration de ceux-ci, dans tous les cas comme sujet important de réflexion et de travail.

Les écoles ayant déjà une expérience dans l’utilisation de ces moyens d’évaluation les questionnent en permanence, tentent de les améliorer, les amender, les optimaliser. Il s’agit en effet de tendre vers une évaluation qui soit la plus satisfaisante possible sur le plan des informations données aux parents, des données formatives pour l’enseignant et l’élève pouvant amener aux régulations nécessaires. Il faut néanmoins rester conscient, malgré la nécessité de mieux visibiliser les objectifs, du piège que constitue le découpage trop fastidieux en micro-objectifs, qui ne fait que surcharger les enseignants tout en leur faisant souvent perdre la vision globale de l’enfant et du processus évaluatif pousuivi.

Par ailleurs, on souligne dans les différents rapports l’intérêt, voire le soutien, des parents face à ces nouveaux modes d’évaluation.

A citer comme réserve une école, parmi celles n’ayant pas encore supprimé les notes, qui s’interroge sur le bien-fondé d’une telle mesure, tous les enseignants n’étant pas persuadés de sa pertinence. Toutefois, même dans cette école, l’évaluation est bel et bien un sujet de réflexion et de remise en cause théorique et pratique.

Il est positif de voir combien ce thème est mobilisateur et génère toutes sortes d’initiatives et une grande volonté d’aboutir à des pratiques efficaces et satisfaisantes pour tous, enfants, parents et enseignants. Il s’agit bien sûr d’un chantier ouvert, faisant l’objet d’une exploration continue depuis de nombreuses années et toujours en quête de nouvelles modalités. C’est à chaque équipe de trouver, en fonction de son contexte, de son histoire et de ses pratiques, les modifications, ajustements et idées nouvelles pour une constante amélioration de ses propres instruments. C’est pourquoi, si on ne peut nier l’importance des échanges et de la mise en réseau autour d’un tel thème, il paraît toutefois difficile pour une équipe de s’approprier un ou plusieurs outils construits ailleurs. Les enseignants s’inspirent certes des réflexions menées ici ou là, mais leur appropriation de moyens passe avant tout par une part de création ou de re-création personnelle, en adéquation avec leur propre avancement théorique et pratique.

On voit, en tout cas, au vu de ce qui se passe dans les écoles que la réflexion autour de l’évaluation constitue un des piliers de l’innovation.

On pourrait par ailleurs peut-être penser que la modification des pratiques évaluatives, si elle a été dans un premier temps une des manières de rendre visible un nouveau modèle pédagogique encouragé par la rénovation, pourrait devenir, par effet " boule de neige " un révélateur plus large démontrant la nécessité de changer d’autres pratiques.

La responsabilisation des élèves face aux apprentissages….

Outre la responsabilisation croissante des élèves face à l’école, telle qu’elle se manifeste dans les conseils, au sein desquels les élèves apprennent à gérer des conflits, des discussions, à prendre en compte le respect de l’opinion d’autrui et de son droit à la parole, aussi bien que la solidarité, la citoyenneté ou la notion de justice, ce phénomène de responsabilisation concerne aussi, d’après plusieurs équipes, les apprentissages, dans lesquels les enfants se montrent plus actifs et plus impliqués. Cette implication est certainement développée parallèlement aux dispositifs de différenciation et d’évaluation mis en place dans de nombreuses écoles. Les divers plans de travail, contrats, cahiers d’objectifs sont là pour que l’enfant puisse se prendre en main et s’organiser. Cette tendance est encore renforcée par toute la réflexion entreprise autour de l’évaluation, par laquelle, là encore, les enseignants travaillent à ce que l’enfant soit partie prenante de ses apprentissages, puisqu’il prend connaissance de leurs objectifs, leurs modalités et leurs conséquences. On a par ailleurs vu dans le paragraphe consacré à l’évaluation que la tendance, dans beaucoup d’écoles, est à la co-évaluation et à l’auto-évaluation, ce qui, bien sûr, ne peut que renforcer ce processus de responsabilisation.

Il semblerait donc bien, à en croire nombre des rapports, que les enfants soient en train de développer une prise de conscience croissante du sens de leurs apprentissages. Que l’on parle de motivation, de sens de l’école, d’intérêts ou de mise en contexte, il apparaît que la tendance visant à impliquer réellement l’enfant dans tout processus d’apprentissage et à l’y rendre actif, commence à porter ses fruits, et, en tout cas aux yeux de certaines équipes, commence à avoir des effets observables. Dans la plupart des rapports où cette composante n’apparaît pas encore dans les points positifs déjà constatés, elle se retrouve dans les priorités à développer.

Par une plus grande implication dans ces différentes dimensions, il paraît à peu près certain que l’élève puisse trouver une plus grande motivation à apprendre et un plaisir à découvrir.

Ce phénomène, lié directement au postulat de l’axe 3 en est une composante, au même titre que la réflexion sur la métacognition, dont de nombreux rapports font mention et sur laquelle nous allons revenir. Il semble en effet logique que, pour pouvoir espérer faire comprendre aux enfants les mécanismes de leur pensée, et de leur façon d’apprendre, les questions qu’ils se posent ou doivent se poser, les stratégies à employer et leur explicitation, ou tout autre processus métacognitif, il est indispensable qu’ils puissent donner du sens à leur présence à l’école, au fait d’apprendre et aux contenus des apprentissages.

La métacognition

Ce mot revient dans de nombreux rapports, sans qu’il soit réellement explicité, et que l’on puisse donc être sûr qu’il revêt pour tous un sens analogue.

Pour la plupart des enseignants qui l’emploient, il est probablement lié à l’analyse de l’erreur, et à la prise de conscience par l’élève de ses stratégies et modes de pensée, tout ceci dans un but de régulation des apprentissages, plus particulièrement pour les enfants en difficulté.

D’ailleurs, pour aller dans ce sens, quelques rapports relèvent les progrès constatés dans les apprentissages des élèves, souvent liés à la manière de les aborder (prise de conscience par l’élève du sens à leur donner, des objectifs visés, de l’anticipation à mettre en oeuvre, etc.).

Si l’idée générale que sous-tend ce concept de métacognition est certainement comprise globalement, il serait sans doute utile de pouvoir le clarifier et l’expliciter de façon plus systématique, pour pouvoir le concrétiser avec les élèves. C’est sans doute ce qui pourra être réalisé, entre autres, lors de l’année scolaire à venir, dans le cadre des modules de formation-recherche élaborés par les services de formation en lien avec le GIP.

Il n’en demeure pas moins que l’intérêt des enseignants pour ce domaine confirme leur volonté d’aller toujours plus loin dans leur compréhension des stratégies et des phénomènes d’apprentissage de leurs élèves, dans un souci de cohérence, d’efficacité et de réussite pour le plus grand nombre. Il est d’autre part incontestable que la grande variété des processus cognitifs individuels est directement liée à la problématique de la différenciation, ce qui rend d’autant plus indispensable la mise au jour de ces processus et surtout la prise de conscience que pourront en faire les enfants eux-mêmes, pour pouvoir choisir et utiliser à bon escient leurs potentiel et capacités particulières.

Les situations d’apprentissage

Ce thème traverse largement tous les rapports d’activité, presque exclusivement parmi les priorités à réaliser, puisque seules deux écoles mentionnent le fait d’avoir déjà mis sur pied cette année ce type de situations. Il devient ainsi le domaine auquel les enseignants, dans leur quasi-totalité, désirent se consacrer l’année prochaine. C’est d’ailleurs un des dossiers de travail du GIP pour 1997/1998. Les enseignants se disent tous conscients de leurs lacunes en la matière. La maîtrise de telles situations dites " larges ", " problème " ou " porteuses de régulations ", tant au niveau de leurs objectifs, de leur structure, de leur mise en place et de leurs régulations leur semble un but à atteindre absolument.

De telles compétences devraient également leur permettre, outre de développer des mécanismes d’apprentissage plus efficaces pour les élèves, de donner un sens aux divers regroupements d’élèves qu’ils désirent poursuivre ou mettre en place, en les aidant à répondre à quelques interrogations qui se posent par rapport à la gestion des apprentissages dans les classes multiâges, les décloisonnements ou autres types de regroupements.

Il est fort probable que les difficultés encore liées à l’hétérogénéité des élèves constituant ces divers groupes seraient considérablement diminuées par l’exploitation de situations larges cohérentes et bien construites.

Ceci permet de remettre dans l’ordre les priorités qui sont bien d’effectuer avant tout des regroupements qui puissent être au service des apprentissages des élèves, avec des contenus et des finalités pré-établis, plutôt que de considérer les regroupements comme prioritaires, en déterminant par la suite les objectifs qui les justifieront.

Par son intérêt pour ce thème, la grande majorité des enseignants démontre bien qu’elle est sensibilisée à cette alerte.

 

Autres points…

On trouve ponctuellement encore quelques autres préoccupations qui traversent les rapports d’activité.

Il s’agit, pour ce qui concerne les points positifs, de l’accroissement des compétences des enseignants, souligné par certains, en lien avec certaines sessions de formation ou avec le travail de réflexion mené au sein de l’équipe ou du GIP, dans l’optique d’une plus grande cohérence entre théorie et pratique.

En ce qui concerne les priorités, on retrouve chez plusieurs écoles le souci de réfléchir aux objectifs-noyaux, en termes d’objectifs d’apprentissage essentiels, mais aussi de balises intermédiaires, afin de mieux gérer la progression des élèves, par une visibilisation plus claire des buts poursuivis. Quelques apprentissages spécifiques sont également mis en avant, comme les préoccupations autour des difficultés d’apprentissage de la lecture, qui reste un domaine prioritaire et sensible, particulièrement pour la division élémentaire.

Enfin, un travail de réflexion sur les cycles d’apprentissage est souhaité explicitement par une école, et traverse implicitement quelques autres bilans.

On trouve, également, ici ou là, outre les points déjà évoqués, quelques ombres au tableau, très spécifiques à telle ou telle école. Citons, à titre d’exemples le temps d’adaptation à un nouveau membre du GRI, des difficultés quant à la gestion d’un dispositif mis en place (module), etc.

Un type de préoccupations plus globales, liées à la rénovation, apparaît également et ne doit pas être négligé. Il s’agit de questionnements autour du rôle de l’institution et de la direction, d’inquiétudes quant aux possibilités de généralisation et aux implications de cette dernière, de soucis quant au danger d’une " école à deux vitesses ", ainsi que d’alertes relatives au respect de la sphère non-professionnelle des enseignants.

Tous ces paramètres gravitent autour des projets d’équipe en influant sur eux, selon les moments et les personnes et peuvent potentiellement prendre une importance plus grande dans des périodes plus difficiles ou tendues. C’est pourquoi il est sans doute bon de les garder à l’esprit et de ne pas les minimiser.