Université de Genève - Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation - Sciences de l'éducation

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Laboratoire de recherche Innovation-Formation-Éducation

 Livres à (re)lire

 

Christiane Gohier (dir.)
Les finalités de l'éducation,
Éducation et francophonie (Québec), n° XXX (1), 2002.

Les articles qui composent ce numéro thématique sont issus des travaux du Réseau international de chercheurs francophones en éducation (REF) et ont été discutés lors du colloque du REF qui a eu lieu à l'Université du Québec à Montréal au mois d'avril 2001. Le thème des finalités de l'éducation, bien qu'il paraisse éculé, doit être revu en fonction du contexte social dans lequel nous vivons, à l'aube du XXIe siËcle, et la place des réflexions sur ce thème dans le cadre des réformes éducatives, repensée, voire réhabilitée.

La mouvance actuelle de l'éducation et les crises qu'elle suscite (dont un des indicateurs est le changement de paradigme adopté dans de nombreux pays pour la construction des curricula d'études dans leurs écoles) nécessite un meilleur arrimage de la recherche en éducation à la définition des politiques éducatives. Dans un contexte de réformes éducatives, la détermination des finalités de l'éducation apparaît comme une étape non seulement nécessaire, mais prioritaire, puisqu'il s'agit d'établir les fondations sur lesquelles seront construits les curricula. Or, ces fondements, qui devraient apparaître en amont de tout changement important dans les orientations d'un systËme éducatif, sont trop souvent formulés en aval, servant, à rebours, les fins de réformes curriculaires soumises à des impératifs économiques, politiques, bureaucratiques, ou encore aux diktats de modes qui n'ont de théorique que le nom.

Deux ordres de questions découlent de ce constat : dans le contexte sociétal actuel, quelles devraient être les finalités de l'éducation et quelle(s) voie(s) la recherche en éducation devrait-elle emprunter pour développer une réflexion visant à instrumenter les innovations éducatives ? Ces questions appellent plusieurs ordres de réflexion. Les réformes actuelles en éducation s'inscrivent en effet dans un contexte sociétal en mutation, caractérisé principalement par la globalisation, au plan économique, et par les changements technologiques, particulièrement au plan de l'information et des communications. Mondialisation et TIC apparaissent comme les deux agents de transformation d'une société désormais partiellement virtuelle, dans laquelle le savoir acquiert une place de premier plan, d'aucuns parlant d'une économie du savoir, d'autres, comme Delors, d'une société éducative.

La question des finalités de l'éducation, si elle n'est pas nouvelle, doit être revue à l'aune de cette nouvelle donne sociale et peut prendre plusieurs formes. L'éducation doit certes former une personne apte à fonctionner dans cette société. Mais pour ce faire, doit-elle viser la formation de l'individu en fonction de son ajustement aux impératifs d'une société paradoxalement caractérisée par le changement ? Le savoir devrait-il alors être instrumental, et servir d'autres fins que lui-même, en étant utile à son détenteur aussi bien qu'à la société pour laquelle il devient une ressource nécessaire ? Devrait-il au contraire être " fondamental " et transmettre un patrimoine culturel qui se situe au-delà de contingences par trop mouvantes et inscrire l'individu dans une tradition pour qu'il puisse inventer un futur ancré dans le passé ?

Ou encore devrait-il être centré sur la personne et son plein épanouissement par le développement de toutes ses potentialités, comme le veut l'humanisme contemporain ? Pour en faire un être libre ? En faisant de l'éducation une finalité en soi, comme le souhaitait Reboul, et à cette condition seulement au service de la personne ? De quelle liberté s'agit-il ? D'une liberté engagée, consciente de ses devoirs et de son ancrage dans le savoir patrimonial ou d'une liberté qui cherche à s'affranchir de toute agence du pouvoir ?

L'éducation devrait-elle avoir comme but ultime la construction d'une " bonne vie ", comme le réclame Hirst ? Dans ce cas, devrait-elle souscrire à la vision rationaliste de l'être humain, mû par l'universelle raison, ou encore à une vision utilitariste qui accorde le primat à la satisfaction des besoins et des désirs dans un monde étroitement lié au contexte social ? Ou encore doit-on alors accorder priorité aux connaissances directement reliées aux pratiques sociales ?

Est-ce une vision individualiste de la personne que l'on doit défendre pour qu'elle soit adaptée à l'individualisme dominant ou, au contraire, pense-t-on devoir le contrer en favorisant une vision plus sociale de son ancrage dans le monde, avec les autres hommes ? Si l'on veut former un citoyen adapté au " village global ", doit-on viser la formation d'un citoyen du monde, au-delà des particularismes culturels, ou doit-on favoriser le développement d'une identité prenant racine dans une communauté culturelle ?

Ce ne sont là que quelques exemples parmi les nombreuses interrogations que suscite le débat, toujours ouvert, sur les finalités de l'éducation. Elles se résument en fait à des questions dont l'apparente et intemporelle simplicité masque le haut degré de complexité, bien incarné dans des contingences sociales que l'histoire se plaît à remodeler : En éducation, qui veut-on former ? Pourquoi ? À quoi ? La recherche en éducation peut-elle nous aider à répondre à ces questions ?

Des professeurs chercheurs du Canada, de France, de Belgique et de Suisse se sont rencontrés pour échanger leurs réflexions sur ces questions. En puisant aux sources de la philosophie, de la psychanalyse ou encore de l'histoire et de la sociologie de l'édcation, les uns se sont attachés à interroger la mission éducative de l'école et la place de l'enseignant, alors que d'autres se sont penchés sur l'apport de la pédagogie ou encore sur la dimension éthique de l'enseignement. Les réflexions ont porté sur divers contextes éducatifs, en milieu scolaire, incluant l'université et l'éducation aux adultes, aussi bien que hors scolaire. En conclusion, la pertinence même du questionnement sur les finalités a été abordée.

Christiane Gohier.

N.B. La revue Éducation et francophonie est une revue électronique, tous les articles
sont accessibles en ligne. SIte :
http://www.acelf.ca/revue/

 

Table des matières

L'homme fragmenté : à la recherche du sens perdu - Éduquer à la compréhension et à la relation - Christiane Gohier

Peut-on encore parler de mission éducative de l'école ? - Georges A. Legault, France Jutras et Marie-Paule Desaulniers

Les controverses françaises sur l'école : la schizophrénie républicaine - Michel Fabre

"Éduquer au mieux" - Une finalité qui appelle la contribution de la recherche pédagogique - Etiennette Vellas

Le pouvoir de la question - Savoir, rapport au savoir et mission de l'école - Olivier Maulini

La dimension éthique de la fonction d'éducateur - Guy de Villers Grand-Champs

Crise de l'autorité et enseignement - Denis Jeffrey

À l'université révolutionnée, le Newspeak de la performance - Aline Giroux

La formation des adultes en entreprise: entre compétences et assignation identitaire - Mokhtar Kaddouri

Les centres de vacances : la fin des finalités - Jean Houssaye

Et s'il fallait faire le deuil des finalités... - Pour un débat permanent sur les visées en matière d'éducation et de formation - Guy Bourgeault


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