Université de Genève - Faculté de psychologie et des sciences de l'éducation - Sciences de l'éducation

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Laboratoire de recherche Innovation-Formation-Éducation

 Livres à (re)lire

 

 

Philippe Meirieu
Faire l'École, faire la classe
Paris : ESF, 2004
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Peut-être exista-t-il, un temps où les enfants, en entrant en classe, se transformaient miraculeusement en élèves et où les maîtres " faisaient École " spontanément ? De toute évidence, ce temps n'est plus : les enseignants constatent aujourd'hui, au quotidien, qu'il. ne suffit pas qu'il, soit inscrit " ÉCOLE " sur le fronton. d'un bâtiment pour qu'il y ait " de l'École " dans l'école : les comportements qui ont cours ici peuvent être du registre familial ou clanique ; on peut interpeller le professeur comme le membre d'une bande rivale ou exiger de la maîtresse qu'elle remplace votre mère. On peut aussi se croire sur un plateau de télévision et considérer que la règle du jeu est bien d'éliminer " le maillon faible "!

Il est inutile, pourtant, de traiter ces questions sur le registre de la plainte ou de céder à la nostalgie : l'École d'hier est morte...Vive l'École d'aujourd'hui

Profitons-en pour nous recentrer sur les principes susceptibles de fonder une École pour demain ! Ne regardons pas indéfiniment en arrière, mais travaillons à " faire de l'École " maintenant. Et c'est parce que nous aurons la volonté d'" instituer de l'École " que nous saurons, alors, comment " faire la classe ".

Véritable manuel de pédagogie pour l'École d'aujourd'hui, ce livre permettra à ses lecteurs, tout à la fois, de comprendre tes enjeux fondamentaux de l'institution scolaire, d'entrer dans les tensions et les contradictions qui structurent L'entreprise éducative et de décider lucidement de ce qu'ils doivent faire au quotidien dans tes situations les plus imprévues.

Construit en brefs chapitres qui peuvent être lus séparément, comportant une multitude d'exercices et d'outils à utiliser en formation et dans la classe, il permet à Philippe Meirieu de livrer une synthèse qui sera utile aussi bien au professeur débutant qu'à l'expert chevronné, aux formateurs qu'aux cadres éducatifs et aux chercheurs.

Philippe Meirieu, auteur de nombreux ouvrages traduits dans le monde entier, a enseigné à tous les échelons de l'institution scolaire. Il a mené de nombreuses recherches sur l'École et participé, à plusieurs reprises, à des chantiers importants (la création du Conseil national des Programmes, des Instituts universitaires de formation des maîtres, la réforme des lycées de 1998 et la réforme des collèges de 2001). II se consacre spécifiquement, depuis trois ans, à la formation initiale et continue des enseignants et livre, dans cet ouvrage, les résultats de ce travail.

 

Table des matières

Introduction : Le temps de la synthèse

Première partie : L'École : principes pour une institution

Principe n°1 : L'École n'est pas seulement un service, c'est aussi une institution.

Principe n°2 : Dans une démocratie, les principes fondateurs de l'École ne peuvent être trouvés que dans les conditions de possibilité elles-mêmes de l'exercice démocratique.

Principe n°3 : L'institution scolaire n'existe, aujourd'hui, que si ses acteurs incarnent au quotidien les principes qui l'inspirent.

Principe n°4 : La mission fondatrice de l'École est de transmettre aux jeunes générations les moyens d'assurer, tout à la fois, leur avenir et l'avenir du monde.

Principe n°5 : La spécificité de la transmission scolaire est de s'effectuer de manière obligatoire progressive et exhaustive.

Principe n°6 : L'histoire de l'École et de la pédagogie témoignent de l'ambition des hommes de n'exclure personne du processus de transmission.

Principe n°7 : Dès lors qu'elle est portée par un objectif d'universalité, l'École se définit non comme un espace privé, mais comme un espace public.

Principe n°8 : Dès lors qu'elle est portée par un objectif d'universalité, l'École n'est pas compatible avec la recherche d'une quelconque homogénéité, qu'elle soit idéologique, sociologique, psychologique ou intellectuelle.

Principe n°9 : Pour faire exister un espace public dévolu à la transmission des connaissances, l'École doit suspendre la violence et la séduction pour placer l'exigence de justesse, de précision et de vérité au cœur de son fonctionnement.

Principe n°10 : Pour faire exister un espace public dévolu à la transmission des connaissances, l'École doit suspendre les contraintes de la production et considérer qu'il est toujours plus important de " comprendre " que de " réussir ".

Principe n°11 : Parce que " comprendre " est plus important que " réussir ", l'École est un lieu où l'on doit pouvoir se tromper sans risque.

Principe n°12 : L'École doit être à elle-même son propre recours.

Principe n°13 : Laïque, l'École contribue à délivrer ceux qui la fréquentent de toutes les formes d'emprise sur les esprits.

Principe n°14 : École de la République, formant les citoyens d'un État démocratique pour un monde solidaire, l'institution scolaire doit conjuguer intégration, émancipation et promotion de l'humanité dans l'homme.

Deuxième partie : Le maître : tensions pour un métier

Tension n°1 : Entre éducabilité et liberté, entre toute-puissance de l'adulte et impuissance du maître, créer obstinément les meilleures conditions possibles pour que l'élève mobilise sa liberté d'apprendre.

Tension n°2 : Entre transmission d'un savoir figé et libre découverte de ses propres connaissances, entre obligation d'apprendre et respect de l'intérêt de l'élève, faire émerger les questions et retrouver la genèse des connaissances humaines.

Tension n°3 : Entre formalisation encyclopédique et soumission au désir d'apprendre, entre primat du programme et primat du projet, proposer des situations-problèmes diversifiées.

Tension n°4 : Entre appui sur ce que l'élève sait faire et rupture avec le donné, entre utilisation du " déjà-là " et découverte d'autres univers, ménager des ouvertures et ouvrir le champ des possibles.

Tension n°5 : Entre obéissance à un ordre figé et pratique de la démocratie à l'École, entre respect scrupuleux de l'ordre scolaire et autogestion pédagogique, former progressivement et systématiquement à la conscience citoyenne.

Tension n° 6 : Entre cadre structuré et liberté d'initiative, entre accompagnement rigoureux et émancipation nécessaire, mettre en place un processus d'autonomisation en articulant, sur chaque objectif, étayage et désétayage.

Tension n°7 : Entre prise de risque nécessaire et sursis critique indispensable, entre inhibition et passage à l'acte, apprendre à passer le désir au crible de la conscience.

Tension n°8 : Entre groupes homogènes et groupes hétérogènes, entre adaptation aux besoins de chacun et enrichissement par les différences, croiser en permanence les modes de regroupements.

Tension n°9 : Entre planification nécessaire et décision impromptue, apprendre exercer son jugement pédagogique et à agir avec discernement.

Tension n°10 : Entre obligation de résultats et obligation de moyens, se donner collectivement des indicateurs de réussite.

Tension n°11 : Spécialiste des savoirs à enseigner et expert en pédagogie, l'enseignant enrichit en permanence son potentiel d'action par l'interaction étroite entre ces deux domaines.

Troisième partie : La classe : repères pour une pratique

Repère n°1 : Afin de permettre à chacun d'apprendre, la classe est organisée comme un " espace hors menace ".

Repère n°2 : Dans la classe, les temps et les lieux sont spécifiés et correspondent, à la fois, à des activités à mettre en œuvre et à des comportements attendus clairement identifiés.

Repère n°3 : L'articulation des temps et des lieux fait l'objet de rituels qui permettent de faire émerger les postures mentales exigées des élèves.

Repère n°4 : Les postures mentales exigées des élèves sont déterminées à partir du travail qui leur est demandé.

Repère n°5 : Le travail, dans la classe, s'effectue sur des objets. Un objet est " objet de savoir " dans la mesure où il résiste à la toute-puissance de l'imaginaire, se constitue comme une réalité extérieure au sujet et lui permet de s'exprimer " à son propos ".

Repère n°6 : La présence et l'arbitrage des objets permettent de dépsychologiser la relation pédagogique ; ils lestent les conflits d'opinions et confèrent à la parole du maître sa véritable autorité.

Repère n°7 : La classe est un lieu où le statut d'une parole n'est pas relatif au statut de celui qui l'énonce.

Repère n°8 : La vie de la classe est en permanence référée aux apprentissages et ces derniers préparés et organisés par le maître.

Repère n°9 : Le travail demandé est explicité par des consignes dont la clarté et la précision conditionnent la réussite des apprentissages proposés.

Repère n°10 : Les consignes renvoient toujours, d'une part, à la représentation de la tâche à accomplir et, d'autre part, aux activités intellectuelles requises pour l'effectuer.

Repère n°11 : La tâche permet de mettre l'élève en projet. Elle doit être comprise et utilisée en tant que telle.

Repère n°12 : La tâche à réaliser n'est pas, en elle-même, l'objectif à atteindre. C'est l'objectif qui doit être évalué à travers la tâche.

Repère n°13 : Le réinvestissement dans une tâche nouvelle permet, à la fois, de mobiliser l'élève et de vérifier une acquisition.

Repère n°14 : L'évaluation individuelle reste la pierre de touche de l'efficacité des activités scolaires. Elle n'est pas conçue pour mettre chaque élève en rivalité avec les autres mais lui permettre de se donner des défis à lui-même et les surmonter.

Repère n°15 : Le travail par petits groupes doit être régulé par l'organisation d'intergroupes afin de garantir la participation de chacun dans les groupes initiaux et de favoriser la vérification et la mutualisation des acquis.

Repère n°16 : L'exigence de qualité dans l'exécution du travail doit traverser l'ensemble des activités scolaires. Elle doit être intégrée par chacun comme un moyen de dépassement et d'accès au plein épanouissement de soi.

Repère n°17 : Afin de l'aider à progresser, le maître prend chaque élève là où il est, mais fait alliance avec lui pour l'aider à se dépasser.

Repère n°18 : La différenciation pédagogique consiste à diversifier les activités de telle manière que chacun soit, tout à la fois, guidé dans ses apprentissages et accompagné dans l'accession à son autonomie.

Repère n°19 : La classe, dans l'ensemble de ses activités, est apprentissage de la démocratie. Elle doit permettre, aux élèves d'apprendre à se construire comme un collectif, d'identifier les objets sur lesquels ils peuvent légiférer légitimement, de définir les règles incarnant " le bien commun ", de les appliquer dans la durée.

Repère n°20 : Les sanctions contribuent non à exclure de la classe mais à y intégrer : elles reconnaissent à l'élève la responsabilité de ses actes et, en même temps, lui permettent de revenir dans le collectif dont il s'est lui-même exclu.

Conclusion : Cinq chantiers pour l'École.


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Coordinatrice : Monica Gather Thurler 

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