Jean Kaempfer & Filippo Zanghi, © 2003
Section de Français – Université de Lausanne
On peut ainsi définir trois sources du récit, aux fonctions très différentes: l'auteur biographique, l'auteur-écrivain, le narrateur. Le premier n'est pas l'objet de la narratologie. Il peut être intéressant de consulter son Journal ou sa Correspondance, de connaître ses prises de position, mais en aucun cas cette recherche ne pourra se substituer à l'analyse des textes eux-mêmes. En effet, ceux-ci ne sont pas des messages ou des déclarations émanant de l'auteur biographique, mais le résultat d'un travail esthétique complexe, celui de l'auteur-écrivain. Ce travail consiste dans la création d'un dispositif narratif d'ensemble, dont fait partie le narrateur: intrigue, personnages, thèmes, style, aussi bien que le choix d'un narrateur effacé ou particulièrement bavard, se ramènent à une stratégie, à une intention qui est celle de l'auteur pris en ce sens restreint. Certains l'appellent auteur impliqué
, d'autresauteur fictif
ou encorefigure textuelle de l'auteur
, l'essentiel est que son intention ne soit confondue a priori ni avec les opinions de l'auteur biographique, ni avec tel ou tel jugement péremptoire du narrateur. Ainsi compris, l'auteur peut être considéré comme une sorte de point de fuite de l'interprétation, comme l'horizon dernier de la lecture et de l'analyse (Compagnon, 11e leçon).
Edition: Ambroise Barras, 2003-2004