21 novembre 2024 - Jacques Erard

 

Événements

Trois siècles de mathématiques à l’UNIGE

Le 27 novembre, la Section de mathématiques célébrera ses 300 ans d’existence en conviant le public à Uni Dufour pour une journée de découvertes et d’interactions en présence de trois lauréats de la Médaille Fields.

 

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Trois lauréats de la Médaille Fields – l’équivalent du Nobel en mathématiques – réunis lors d’un même événement pour célébrer les 300 ans de la chaire permanente de mathématiques à l’UNIGE: à eux seuls, ces trois protagonistes incarnent le chemin parcouru par la «reine des sciences» au sein de l’Université. La création, en 1724, d’un enseignement en mathématiques, le premier donné en français au sein de l’institution, marque une étape décisive dans le développement de l’Académie, jusqu’alors essentiellement dédiée à l’étude de la théologie et de la philosophie. En accueillant une discipline libérée des préjugés religieux, philosophiques ou esthétiques, les autorités académiques valident alors une approche scientifique du savoir, ouvrant la voie aux sciences expérimentales et à la médecine, qui façonneront l’Université moderne.

 

Pour marquer ce tricentenaire, la Section de mathématiques invite le public à une journée ludique et interactive le mercredi 27 novembre, à Uni Dufour. Des ateliers, des spectacles et une conférence jalonneront l’événement. Une occasion unique de (re)découvrir comment cette discipline structure notre quotidien. Mais aussi de se pencher sur les importantes contributions de la Section, des travaux pionniers de ses fondateurs/trices à ses quatre médaillés Fields: Vaughan Jones (médaillé en 1990), Stanislav Smirnov (2010), Martin Hairer (2014) et Hugo Duminil-Copin (2022).

Pour l’actuel président de la Section, Rinat Kashaev, «cet anniversaire est l’occasion de réfléchir à l’histoire de la Section, aux personnes qui y ont travaillé et à leurs travaux de recherche» (lire ci-dessous). «Les mathématiques s’inscrivent dans l’histoire: chaque découverte, chaque chercheur/euse enrichit cette grande épopée intellectuelle, renchérit le professeur Hugo Duminil-Copin. Depuis 300 ans, la Section contribue activement à écrire de nouvelles pages de cette fascinante histoire.»

L’univers mathématique s’est énormément enrichi, depuis les débuts du XVIIIe siècle, parallèlement au développement des sciences expérimentales. Mais les chercheurs et chercheuses d’aujourd’hui partagent avec les scientifiques du passé un même désir de communiquer leur passion. «Gabriel Cramer n’avait que 20 ans quand il a été nommé professeur en 1724 – l’âge auquel nous ne faisons que commencer nos études universitaires aujourd’hui, relève Tatiana Nagnibeda, professeure associée à la Section de mathématiques. Cependant, il y a aussi de nombreux points que nous partageons avec nos prédécesseurs d’antan: tout comme aujourd’hui, ils donnaient des cours, écrivaient et publiaient leurs travaux, dirigeaient des thèses et collaboraient avec des collègues à travers l’Europe. Le tout, animés par la curiosité scientifique, la passion pour la recherche en mathématiques et l’enthousiasme pour le partage des savoirs.»

Le 27 novembre, des spécialistes de la médiation scientifique proposeront différents ateliers pour voyager au pays des maths, visiter des stands et participer à des animations. Puis, la compagnie de théâtre Terraquée présentera deux spectacles: l’un pour tout public, révélant les mystères du nombre PI, l’autre pour adultes et adolescent-es dès 14 ans, les entraînant dans l’univers captivant des statistiques. Entre les deux, Martin Hairer, ancien étudiant de l’UNIGE, donnera une conférence intitulée «Pile ou face? Des atomes aux feux de forêt», abordant différents phénomènes à la croisée des mathématiques et de la physique. Un échange suivra avec Hugo Duminil-Copin et Stanislav Smirnov.

Maths en fête - 300 ans de mathématiques à l’UNIGE
Événement tous publics
Uni Dufour
Mercredi 27 novembre de 14h à 21h30

Les visages des mathématiques à Genève

 

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Gabriel Cramer (1704-1752) partage avec Jean-Louis Calendrini (1703-1758) la chaire de mathématiques de l’Université de Genève à sa création. Cramer est resté célèbre pour son ouvrage Introduction à l’analyse des lignes courbes algébriques (1750), dans lequel il étudie et classe les courbes au moyen de l’algèbre.

 

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Louis Bertrand (1731-1812) est un élève de Leonhard Euler. Son ouvrage le plus connu est le Développement nouveau de la partie élémentaire des mathématiques prise dans toute son étendue, publié en deux volumes à Genève en 1778.

 

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Élève de Louis Bertrand, Simon L’Huilier (1750-1840) gagne le prix de la Section de mathématiques de l’Académie des sciences de Berlin pour un mémoire sur les principes du calcul infinitésimal. Outre le calcul infinitésimal, ses contributions touchent principalement aux probabilités et à la construction des polyèdres.

 

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Nommé en 1848, Gabriel Oltramare (1816-1906) occupe la chaire de mathématiques supérieures jusqu’en 1900. Spécialisé dans la théorie des nombres et de l’analyse, il se consacre à une théorie qu’il a inventée et nommée le «calcul de généralisation».

 

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Une année avant de succéder à Oltramare, Henri Fehr (1870-1954) fonde, en 1899, avec Charles-Ange Laisant la revue L’Enseignement mathématique (1899) qu’il dirige pendant plus de cinquante ans et qui est aujourd’hui encore éditée à Genève. Fehr est aussi cofondateur de la Société mathématique suisse (1910) et n’a cessé, tout au long de sa carrière, d’œuvrer pour le bien collectif.

 

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Rolin Wavre (1896-1949) soutient sa thèse à l’Université de Genève en 1921 avant d’y être nommé professeur en 1924. Henri Fehr souligne que ses travaux «dénotent une rare profondeur d’esprit et une extraordinaire puissance d’abstraction».

 

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Né en Russie, Dmitry Mirimanoff (1861-1945) s’établit en France à l’âge de 19 ans pour ses études. À Paris, il suit les cours de Picard, Appell, Hermite ou Poincaré. Puis, il décide de venir à Genève, se fait naturaliser Suisse et soutient sa thèse en 1900. Il enseigne à l’Université dès l’année suivante (Genève, Lausanne et Fribourg) et jusqu’en 1936. Ses travaux couvrent un vaste champ: dernier théorème de Fermat, antinomies de la théorie des ensembles, géométrie, calcul des probabilités, etc.

 

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Georges de Rham (1903-1990) est né à Roche, dans le canton de Vaud. Après des études classiques, il songe à se consacrer à la philosophie mais opte pour la chimie, la physique et la biologie qu’il abandonne finalement au profit des mathématiques à l’Université de Lausanne. Les résultats contenus dans sa thèse lui confèrent immédiatement une renommée internationale. Il enseigne à l’Université de Genève à partir de 1936. Ses travaux couvrent la topologie, l’analyse fonctionnelle et la géométrie différentielle.

 

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Né en Serbie, Jovan Karamata (1902-1967) est envoyé par ses parents à Lausanne au début de la Première Guerre mondiale. La guerre finie, il retourne à Belgrade où il obtient son doctorat en 1926, participant à la fondation de l’Institut de mathématiques de l’Académie serbe des sciences. Nommé professeur à l’Université de Genève en 1951, il est l’auteur d’une centaine d’articles et de plusieurs livres consacrés à l’analyse mathématique.

 

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Michel Kervaire (1927-2007) effectue ses études de mathématiques à l’École polytechnique fédérale de Zurich, puis sa thèse sous la direction de Heinz Hopf, qu’il soutient en 1955. Il est nommé professeur à l’UNIGE en 1971. Ses collaborations avec John Milnor, ses résultats en algèbre ou en combinatoire ainsi que l’étude des nœuds de dimensions supérieures dont il est à l'origine font partie des fleurons des mathématiques genevoises.

 

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André Haefliger (1929-2023) étudie les mathématiques à l’Université de Lausanne dans l’idée de devenir enseignant. Il est nommé professeur à l’Université de Genève en 1962. Haefliger contribue de manière considérable à la renommée de la Section de mathématiques par ses travaux et son influence sur de nombreux chercheurs et chercheuses. Spécialiste de topologie et notamment de la théorie des feuilletages, il était aussi violoniste.

 

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Vaughan Jones est né en décembre 1952 à Gisborne en Nouvelle-Zélande. Après un doctorat à la Section de mathématiques de l’Université de Genève sous la direction d’André Haefliger, il reçoit la Médaille Fields en 1990 pour ses recherches dans le domaine de la théorie des nœuds, en particulier grâce à sa découverte du polynôme de Jones, invariant polynomial des nœuds.

 

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Stanislav Smirnov est né en 1970 à Leningrad (Russie). Il est nommé professeur à l’Université de Genève en 2003 et est lauréat de la Médaille Fields en 2010 pour sa preuve de l’invariance conforme du modèle de percolation et du modèle d’Ising en physique statistique.

 

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Martin Hairer est né le 14 novembre 1975 à Genève. Il effectue ses études à l’Université de Genève où il obtient un doctorat sous la direction de Jean-Pierre Eckmann. Il est actuellement professeur à l’Imperial College de Londres et à l’École polytechnique fédérale de Lausanne. En 2014, il reçoit la Médaille Fields pour ses travaux sur les équations différentielles partielles stochastiques ainsi que sur les processus stochastiques ou les processus de Markov.

 

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Hugo Duminil-Copin est né en 1985 à Châtenay-Malabry (France). Il obtient son doctorat à la Section de mathématiques de l’UNIGE sous la direction de Stanislav Smirnov. Il est ensuite engagé à l’Université de Genève comme professeur. Depuis 2016, il est également professeur permanent à l’Institut des hautes études scientifiques de Paris-Saclay. Ses travaux en physique statistique sur le modèle d’Ising lui ont valu la Médaille Fields en 2022.


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