Activités
Audrey Leuba désignée rectrice de l'Université de Genève
Lors de sa séance du 22 novembre 2023, et après consultation du Conseil d’Orientation Stratégique, l’Assemblée de l’Université a désigné la Professeure Audrey Leuba au poste de rectrice de l’Université de Genève. Cette désignation est soumise à nomination par le Conseil d’État, conformément à la loi sur l’Université, pour un mandat de quatre ans, renouvelable. La nouvelle Rectrice doit entrer en fonction au plus tard le 1er avril 2024.
Audrey Leuba est professeure de droit civil à l’Université de Genève et doyenne de la Faculté de droit.
Après des études de droit à l’Université de Neuchâtel, elle obtient son brevet d’avocate puis part effectuer un master (LL.M) à la Harvard Law School (USA) au bénéfice d’une bourse de chercheuse débutante du Fonds national suisse de la Recherche scientifique (FNS). En 1994, elle passe l’examen d’avocate de l’Etat de New York. Elle est l’auteure d’une thèse de doctorat consacrée au partage des tâches entre époux au regard du principe de l’égalité entre homme et femme. Chargée d’enseignement puis chargée de cours aux Universités de Neuchâtel et de Genève (DEA Etudes Genre), Audrey Leuba devient professeure associée à Neuchâtel, puis professeure assistante grâce à une bourse du FNS qu’elle consacre à des recherches sur la situation des personnes âgées en EMS. En 2006, elle devient professeure ordinaire à l’Université de Genève. Elle y enseigne le droit de la famille, la planification du patrimoine et la protection de l’adulte.
Audrey Leuba a siégé dans divers organes au niveau suisse et cantonal. Elle a notamment présidé la Société suisse des juristes. Elle a également été membre de la Commission fédérale extraparlementaire de coordination pour les questions familiales (COFF), membre de plusieurs commissions d’experts constituées par l’Office fédéral de la Justice, membre du Conseil supérieur de la magistrature du canton de Genève, membre du Conseil de fondation de Pro Senectute Suisse, membre de la direction de l’Institut de droit de la santé (UniNE) ou encore membre de la Commission centrale d’éthique de l’Académie suisse des sciences médicales (ASSM).
Vision stratégique et grands axes du programme
En dépit de quelques ombres au tableau (sortie du programme Horizon Europe et finances, notamment), l’Université de Genève se porte globalement bien.
Plusieurs défis l’attendent toutefois et des impulsions fortes sont nécessaires. Je mentionnerai, tout d’abord, la transition socio-écologique. L’Université doit adopter en ce domaine une approche macro tenant compte de l’interdépendance entre les volets social et écologique. Et s’il est nécessaire d’encourager la recherche et de favoriser l’enseignement afin que de nouvelles connaissances soient développées et divulguées, l’Université doit être plus audacieuse et devenir un modèle inspirant pour sa communauté et la Cité: elle peut se donner pour objectif ambitieux de se placer dans les 50 meilleures institutions académiques de l’Impact Ranking du Times Higher Education et/ou d’obtenir la certification ISO14001, comme d’autres universités en Europe.
Deuxième impulsion: l’intelligence artificielle générative. Avec l’arrivée de ces nouveaux outils, le monde vit le début d’une formidable évolution. Afin d’en profiter pleinement, l’Université doit se montrer proactive, agile et créative. Elle doit poursuivre intensivement son suivi étroit des évolutions technologiques, ses réflexions en collaboration avec d’autres institutions et organismes comme la Ligue européenne des universités de recherche (LERU), avec le monde politique et les entreprises, prendre des mesures concrètes pour comprendre et tirer tous les bénéfices possibles de cette évolution, informer et former la communauté, automatiser ce qui peut l’être – tout en protégeant les données et contenus – et poser le cadre critique, éthique et déontologique nécessaire.
Les années Covid ont fondamentalement transformé la manière dont nous concevons le rapport aux études, au travail et dans une certaine mesure à l’autre. Cette transformation a parfois généré de l’isolement au sein de la communauté et contribué à affaiblir le sentiment d’appartenance, ce à un moment où les grands défis de notre temps (transition socio-environnementale, numérisation, santé de la population, etc.) bouleversaient déjà bon nombre de nos certitudes.
Aujourd’hui, nous devons repenser le vivre ensemble et rétablir des liens forts au sein de la communauté. Ce sera ma troisième impulsion. Par une approche participative qui fédère les énergies, je veux explorer l’idée d’un campus «sur plusieurs sites»: un campus de ville, riche en activités stimulantes (conférences inspirantes, activités associatives, sportives et culturelles, etc., autour d’un grand student center) sur le modèle des universités anglo-saxonnes, dans l’idée de (re)donner à chacune et chacun l’envie de participer au «vivre ensemble». Mais pas seulement. Les liens se tissent par d’autres moyens encore, qu’il s’agisse d’un meilleur ajustement aux attentes de la communauté en matière d’égalité (politique en matière de crèches, par exemple), de diversité et d’inclusion (tous les handicaps, le genre, l’origine ethnique ou culturelle, etc.), d’une part, ou de la qualité de l’environnement de travail et du bien-être au quotidien, d’autre part. L’institution doit, en outre, se montrer plus solidaire envers les étudiantes et les étudiants (précarité alimentaire, financière, médicale, de logement, découlant de surendettement ou d’échecs dans le parcours académique), développer des projets étudiant.es avec, à la clef, des crédits d’études dits «citoyens», elle doit être aussi plus solidaire envers les collaboratrices et collaborateurs de l’enseignement et de la recherche (s’agissant tout particulièrement des conditions de travail). Il est, par ailleurs, nécessaire d’attacher une importance accrue aux parcours des individus au sein de l’institution (accueil, information sur les droits, formation continue [pour le personnel], accompagnement de la carrière, etc.), et ce pour tous les corps. L’employabilité doit, enfin, constituer une priorité. L’Université doit renforcer les ponts avec la pratique en tissant des liens avec le formidable écosystème genevois, et au-delà de la Versoix aussi. L’ensemble de ces mesures viendra consolider la stabilité de notre institution, en harmonie avec les objectifs du Conseil d’Etat, tels que présentés lors du discours de St-Pierre.
Last but not least, notre université doit viser l’excellence. La superbe 49e place au classement de Shangaï doit nous motiver à défendre plus ardemment encore les ressources nécessaires à une recherche de pointe, disciplinaire et interdisciplinaire. L’excellence doit aussi nous guider dans l’enseignement, où il est nécessaire d’introduire dans les formations de base des compétences transversales, devenues indispensables dans un monde où les carrières ne sont plus linéaires. L’Université doit, enfin, viser l’excellence démocratique s’agissant de sa gouvernance. Ce thème a occupé l’Assemblée en 2019 et est le marqueur de l’année présidentielle du Conseil d’Etat et du Grand Conseil genevois. Débattre, échanger, participer, les trois axes développés au niveau cantonal valent également au niveau de l’institution. La participation, c’est le fondement de la démocratie, c’est aussi ce qui contribue au sentiment d’appartenance. Elle doit être renforcée au sein de notre institution. L’Assemblée en particulier doit être plus largement impliquée dans les décisions institutionnelles.
Accompagner les transitions, repenser le vivre ensemble et viser l’excellence doivent être les marqueurs de l’Université de Genève de demain.
Novembre 2023