A lire
Spéculer à l’ombre de la Torah?
En philosophie, les systèmes de pensée issus de la civilisation grecque antique donnent la mesure. Pourtant, ils reflètent un dynamisme intellectuel particulier, celui d’une période où l’on croyait à la multiplicité des dieux. Qu’advient-il des élaborations philosophiques dans les contextes monothéistes? Comment concilier révélation divine et spéculations rationnelles? Examinant le cas du judaïsme, Maurice-Ruben Hayoun reprend le fil du temps au Moyen Age, au moment où la Méditerranée et, partant, l’Europe se tournent vers un être suprême unique, qu’il s’appelle Yahvé, Dieu ou Allah. A parcourir ce livre, la philosophie semble un bacille puissant: ceux qu’elle frappe, y compris dans un contexte socio-culturel très religieux, demeurent irrésolus face aux mystères du divin, de l’humain, du monde. On voit se dessiner, chez un Moïse Maimonide (1138-1204) notamment, les contours d’une pensée, proprement juive en ceci qu’elle se réclame incessamment des mitswot (préceptes) bibliques. Mais une pensée qui réexamine les questions de justice, d’injustice ou de morale individuelle en vue d’en extraire une sorte de manuel pour le quotidien. Les graines ainsi germées d’une philosophie moderne, c’est-à-dire détachée du légalisme de la Torah, croîtront jusqu’à atteindre parfois des formes étonnantes voire révolutionnaires, comme, au XVe siècle, la métaphysique de Spinoza. Au XIXe siècle, on retiendra les noms de Samson-Raphaël Hirsch et d’Abraham Geiger, qui ont traité de la difficulté du judaïsme à s’appréhender soi-même. Enfin, au XXe siècle, le philosophe Emmanuel Lévinas léguera une éthique originale, fondée sur la relation à l’Autre. SD
«Petite histoire de la philosophie juive», par Maurice-ruben hayoun, Éd ellipses, 2008, 304 p.
La Chine et ses nouveaux voisins du nord-ouest
Avec la chute de l’Union soviétique, en 1991, la Chine s’est retrouvée, presque du jour au lendemain, avec cinq nouveaux voisins à proximité de sa frontière du nord-ouest: le Kazakhstan, la République kirghize, le Tadjikistan et, plus loin, l’Ouzbékistan et le Turkménistan. La brusque émergence de ces pays, dont la population totale est évaluée aujourd’hui à 60 millions d’habitants majoritairement musulmans, est en soi un phénomène géopolitique exceptionnel. Jusqu’alors réduite à l’état d’hinterland amorphe, à cause d’une vision géographique issue de la guerre froide, cette région a exercé une influence non négligeable sur la politique extérieure et intérieure de la Chine au cours de la dernière décennie du XXe siècle. Une influence à laquelle la littérature académique a toutefois accordé peu de place. Cette lacune est désormais comblée avec ce gros livre produit par Thierry Kellner, docteur en relations internationales de l’Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID). Dans son ouvrage, le chercheur genevois décrit la politique étrangère de la Chine à l’endroit de ses nouveaux voisins d’Asie centrale. Son analyse se concentre notamment sur les relations politiques, économiques et énergétiques qui se sont établies. Mais il évoque aussi les changements intérieurs rapides que la République populaire a dû opérer pour éviter, entre autres, que sa région autonome turcophone et musulmane du Xinjiang ne cède aux sirènes de l’indépendance. Thierry Kellner montre ainsi comment la Chine est devenue, entre 1991 et 2001, un acteur international majeur en Asie centrale. A.Vs
«L’Occident et la Chine, Pékin et la nouvelle Asie centrale (1991-2001)», par Thierry Kellner, Éd Puf, 2008, 622 p.
Les plantes pour femmes
Tout ce qui est naturel n’est pas forcément bon. Fort de
cette connaissance et conscient de la tendance toujours plus forte au sein de
la population à vouloir se soigner par les médecines douces, Kurt Hostettmann
poursuit son effort d’éducation du grand public en matière de plantes
médicinales. Après quelques ouvrages consacrés à leurs divers pouvoirs (en tant
que médicaments, poisons, aphrodisiaques ou encore
drogues naturels), ce professeur responsable du Laboratoire de pharmacognosie
et phytochimie de l’Université de Genève a choisi pour son dernier livre de
traiter des affections propres aux femmes. Tout savoir sur les plantes pour la
femme énumère et détaille les vertus et les dangers des végétaux que l’on peut
utiliser pour soigner ou soulager les vaginites, les cystites, les varices
ainsi que les troubles liés à la menstruation, la grossesse, l’accouchement et
l’allaitement. Sans oublier, bien sûr, les plantes aphrodisiaques et celles qui
permettent de «rester belles longtemps». Kurt Hostettmann insiste sur le fait
que son livre n’est pas un traité de gynécologie et que l’usage des plantes,
sans diagnostic sérieux, peut vite s’avérer hasardeux, voire dangereux. Le
pouvoir des plantes est certes immense, mais il a ses limites. Et, pour
paraphraser les sages du début du Moyen Age de l’Ecole de médecine
de Salerne, qui avaient déjà compris cela il y a mille ans, «contre le pouvoir
de la mort, il n’existe pas de médicament dans le jardin». A.Vs
«Tout savoir sur les plantes pour la femme», par Kurt Hostettmann, Éd Favre, 2008, 140 p.