2012

Un pas de plus vers le graal de la supraconductivité

La mise au point d’un matériau supraconducteur à température ambiante continue d’être l’objectif de nombre de physiciens autour du monde. Cette avancée majeure permettrait notamment le transport d’électricité sur d’immenses distances sans résistance et donc sans aucune perte d’énergie. Un objectif qui reste à ce jour assez éloigné. Ce qui n’empêche pas les progrès de s’accumuler. Comme le prouve une recherche qui implique l’Université de Genève (UNIGE) et le pôle de recherche national Materials with New Electronic Properties (MaNEP). Publiée dans la revue Science, elle décrit un nouveau dispositif expérimental mis au point par une équipe de l’Université de Brescia qui permet de mesurer un phénomène découvert par les physiciens genevois. Ce phénomène explique les mécanismes qui caractérisent certains matériaux supraconducteurs à haute température.

Depuis la découverte de la supraconductivité, les physiciens cherchent non seulement à modéliser ce phénomène qui voit les électrons circuler sans aucune résistance, mais également à mettre au point des matériaux capables de développer cette qualité à des températures toujours plus élevées jusqu’à ce qu’un jour, un solide se révèle supraconducteur à température ambiante. Avant d’en arriver là, il est essentiel de comprendre la physique de la supraconductivité, ce qui n’est pas une entreprise de tout repos. Comme le rappelle Dirk van der Marel, professeur en physique des matériaux à l’UNIGE et membre du PRN MaNEP: «On connaît à ce jour deux types de mécanisme qui permettent d’obtenir l’état supraconducteur. Le premier rend la supraconductivité possible jusqu’à -240°C, le second permet l’état supraconducteur à des températures avoisinant les -120°C. Ces deux types de mécanisme se manifestent dans des classes de matériaux distincts. Il s’agit de différences importantes et il nous faut les comprendre.»

Mariés par le magnétisme

Le point commun qui caractérise tous les supraconducteurs est la formation de couples d’électrons. D’ordinaire ces porteurs de charge qui convoient l’électricité ne supportent pas la promiscuité et s’éloignent autant que possible les uns des autres, ce qui explique en partie la résistance et la perte d’énergie dans les conducteurs classiques. Mais, dans l’état supraconducteur, les électrons acceptent de se mettre par paire (paire de Cooper) et d’avancer dans la même direction, éliminant la résistance. Pour autant, la force qui pousse les électrons à se donner ainsi la main diffère selon qu’il s’agit de matériaux supraconducteurs à basse ou haute température. Chez les premiers, ce sont des ondes de pression traversant le solide, comme des ondes sonores en somme, qui poussent les paires de Cooper à se former. Dans les matériaux étudiés par l’équipe du professeur Dirk van der Marel, des cuprates (composition chimique basée sur le cuivre et l’oxygène), les couples se forment autrement. Dans ces solides supraconducteurs à haute température (-113°C au maximum), c’est une autre force, se transmettant bien plus rapidement que les ondes de pression, qui permet la formation des paires d’électrons. Les physiciens de Genève privilégiaient l’hypothèse d’une force de nature magnétique. Cela restait à confirmer par l’expérience.

C’est là qu’interviennent les physiciens de l’Université de Brescia qui ont réussi à cerner cette force dans un cuprate supraconducteur. Et leurs résultats ne laissent plus guère de doute sur sa nature: il s’agit de fluctuations magnétiques, ce qui explique la vitesse élevée avec laquelle cette force «couple» les électrons dans ces supraconducteurs. Une spécificité que les cuprates doivent sans doute au fait que dans ces matériaux le magnétisme se laisse induire facilement par un champ magnétique externe.

«Ces travaux sont importants car ils apportent une pièce supplémentaire au puzzle qui doit nous permettre d’aboutir à une théorie de la supraconductivité à haute température, explique Dirk van der Marel. Grâce à elle, nous serons capables, un jour, de construire «pièce par pièce», ou plutôt atome par atome, un supraconducteur à température ambiante qui révolutionnera le transport de l’énergie électrique et bien d’autres domaines.»

Contact

Dirk van der Marel, tél. 022 379 62 34

30 mars 2012

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