UNIVERSITÉ DE GENÈVE

FACULTÉ DES SCIENCES

Département de zoologie et biologie animale

Molecular Basis of Morphogenetic Events in Hydra:

Study of the CREB and Hedgehog Pathways during Budding and Regeneration

Thèse
présentée à la Faculté des sciences de l'Université de Genève
pour obtenir le grade de Docteur ès Sciences,

mention biologique

par

Konstantinos KALOULIS

(de Manolada / Grèce)

sous la direction du
Pr Pierre Spierer

et du
Dr Brigitte Galliot

Jury :
Dr Thomas Holstein
Dr Marc Ballivet

Thèse n° Sc. 3248

Genève, 2000


Abreviations

BR
basic region
bZIP
basic leucin zipper domain
CBP
CREB binding protein
CRE
cAMP Response Element
CREB
cAMP Response Element Binding Protein
Cv wt
Cholorohydra viridissima wild type
Cv mh
Cholorohydra viridissima multiheaded mutant
dpp
decapentaplegic
GKA
gel kinase assay
HA
head activator
Hh
Hedgehog
Hm
Hydra magnipapillata
Ho
Hydra oligactis
Hv
Hydra vulgaris
KID
Kinase Inducible Domain
NE
nuclear extracts
PKA
Protein Kinase A
PKC
Protein Kinase C
SPKA
solid phase kinase assay
WCE
whole cell extracts
wg
wingless

Résumé

      A : L'hydre, un modèle pour comprendre la régénération au cours de l'évolution

      I. Le système de l'Hydre comme modèle

      1. Le phylum des Cnidaires dans le règne animal

      L'Hydre est un animal d'eau douce qui appartient au phylum des Cnidaires. Un des intérêts principaux de l'Hydre comme modèle est sa position dans l'arbre de l'évolution. Les cnidaires sont des animaux diploblastiques et ce phylum peut donc être considérés comme le groupe frère des animaux triploblastiques (Wainright et al., 1993). Les cnidaires représentent une forme très primitive de l'organisation et de la physiologie des métazoaires. Ce phylum est divisé en quatre classes, les Anthozoaires, les Cubozoaires, les Scyphozoaires et les Hydrozoaires, classe à laquelle l'Hydre appartient (Figure 1). Les stratégies génétiques et moléculaires appliquées durant ces deux dernières décennies ont identifié un grand nombre de composants moléculaires que les bilatéraux partagent pour réguler les mécanismes de développement. De ce point de vue, les espèces de Cnidaires offrent évidemment une position intéressante pour rechercher les mécanismes de développement déjà en place dans les ancêtres communs des bilatéraux.

      2. L'anatomie et l'organisation cellulaire de l'Hydre

      Les cnidaires sont parmi les animaux multicellulaires les plus simples, et les premiers dans le rang de la classification munis de cellules nerveuses et musculaires.

      L'Hydre vit exclusisvement sous forme de polype (Figure 2). La longueur de l'axe corporel varie de 0.5 à 1cm et celui-ci est composé de 50000 à 100000 cellules. La partie apicale de l'animal (appelée aussi la région de la tête) est formée de l'hypostome, la région entourant l'ouverture de la bouche, et d'un unique anneau de tentacules. La partie basale de l'animal (ou pied) est faite de cellules ectodermales différentiées produisant du mucus servant à l'adhérence transitoire de l'animal à un substrat.

      3. L'épithélium et les cellules interstitielles de l'Hydre

      Il y a principalement deux lignées cellulaires chez l'Hydre (Figure 2) : les cellules épithéliales et les cellules interstitielles. Chacune des couches cellulaires, l'ectoderme et l'endoderme, est de l'épaisseur d'une couche de cellules et est composée des deux lignées, avec des cellules interstitielles dispersées au seind du feuillet cellulaire épithélial. Ces deux couches sont constantammentrenouvellées et gardées en équilibregrâce à l'activité mitotique des cellules souches de la région centrale du polype et la perte des cellules différentiées aux extrémités. Au total 10 à 212 types cellulaires peuvent être identifiés (Bode, 1996).

      4. Les cellules épithéliales

      Les cellules épithéliales de la région centrale du polype sont continuellement en phase de mitose (Campbell, 1967a). Le cycle cellulaire moyen est de trois jours (David et Campbell, 1972) et la masse de tissu double en trois-quatre jours. Les cellules épithéliales sont organisées le long de l'axe corporel en régions bien définies : d'abord selon leur appartenance à une couche cellulaire, les cellules épithéliales de l'ectoderme et de l'endoderme sont différentes (Takano et Sugiyama, 1984) , ensuite selon leurs stades du cycle mitotique et leurs stades de différentiation (Holstein et al., 1991).

      En effet, les cellules épithéliales qui migrent le long de l'axe corporel vers les deux extrémités suivent une stratégie particulière. Une cartographie des stades mitotiques et de marqueurs spécifiques exprimés par les cellules épithéliales aident à définir des territoires fonctionnels le long de l'axe corporel. Dans la région apicale, la plupart des cellules épithéliales qui viennent de la colonne et atteignent la zone des tentacules, migrent vers le bout des tentacules et arrêtent de proliférer, alors que très peu d'entre elles vont vers l'hypostome. Dans l'hypostome, la plupart des cellules épithéliales dérivent de l'hypostome externe où elles prolifèrent alors que les cellules localisées autour de l'ouverture de la bouche (l'hypostome interne) restent en phase G2 (Dübel, 1989 ; Holstein et al., 1991). Par contre, dans l'endoderme, la plupart des cellules épthéliales de la région de la tête viennent d'une lignée épithéliale de la colonne corporelle. Elles migrent soit vers les tentacules soit vers l'apex de l'hypostome où elles arrêtent de se diviser.

      Les cellules épithéliales jouent un rôle crucial dans plusieurs fonctions physiologiques : la protection et maintenance de la régulation osmotique pour les cellules de l'ectoderme, la digestion pour les cellules de l'endoderme et la contraction musculaire dans les deux couches cellulaires (Prusch et al., 1976). De plus, les cellules épithéliales jouent des rôles morphogénétiques, surtout pour maintenir la forme corporelle et pour distribuer l'information morphogénétique le long de l'axe corporel (Takano et Sugiyama, 1984). Pendant le bourgeonnement, les cellules épithéliales de l'ectoderme s'évaginent et se différentient ensuite en une nouvelle région de la tête avec des cellules épithéliales spécifiques de cette région et forment des frontières de migration comme décrites pour le polype adulte. La région apicale se différencie de façon similaire lors de la régénération.

      5. Les cellules interstitielles

      Les cellules qui sont distribuées le long de l'axe corporel parmi les cellules épithéliales de l'ectoderme et de l'endoderme appartiennent à la lignée des cellules intersticielles. Selon leur stade de différentiation, ces cellules sont classées en différents groupes: cellules souches, cellules précurseurs et cellules différenciées. Lescellules multipotentes non-différentiées donneront naissance à trois classes différentes de cellules somatiques intermédiaires dans le processus de différentiation, précurseurs soit des cellules nerveuses, soit des cellules sécrétrices, soit des nematocytes. En se divisant, ces cellules vont finalement se différencier en cellules glandulaires et les cellules à mucus (les cellules sécrétrices), en cellules nerveuses sensorielles et ganglionnaires ou donner les quatre types de nematocytes, les desmonèmes, les atriches, les isorhizes et les stenotèles. Le dernier groupe issu des cellules intersticielles est représenté par les gamètes, un type cellulaire intérmédiaire unipotent (David, 1974 ; Bode, 1987 ; Teragawa, 1990, 1995).

      Les processus de différentiation et de migration des cellules intersticielles sont continuels et fortement liés aux processus similaires effectués par les cellules épithéliales.

      Ce fin équilibre soutient les structures de l'animal adulte et guide les événements morphogénétiques de base de l'animal.

      II. Les processus morphogénétiques chez l'Hydre

      En plus de la maintenance active de la forme générale du polype adulte, des processus morphogénétiques s'enclenchent dans d'autres situations comme le bourgeonnement, la régénération de la tête et du pied après une amputation ou une désaggrégation, et le développement sexuel (Figure 3).

      1. Le bourgeonnement

      Plusieurs hydrozoaires, l'Hydre incluse, peuvent se reproduire de façon asexuée par bourgeonnement de nouveaux polypes qui se détachent de l'animal parent (Figure 5). Chez l'Hydre, le bourgeonnement commence avec l'évagination des deux feuillets cellulaires dans une région basse du corps dont la position exacte varie d'espèce en espèce. Chez l'Hydra vulgaris, le bourgeonnement commence environ au deux tiers de la longueur totale à partir de l'apex. Le processus entier a été subdivisé en dix étapes différentes (Otto et Campbell, 1977) se déroulant sur trois jours, la différentiation du pied incluse.

      Le processus commence avec la mobilisation des cellules intersticielles en cellules neurales (Berking, 1980). Cet engagement cellulaire se passe dans le tissu du bourgeon présomptif un jour avant que tout changement ne soit visible de façon macroscopique. En parallèle, pendant le premier jour, au moins 800 cellules épithéliales des deux feuillets parentaux sont recrutées, et ce nombre atteint 5000 en 24 heures (Graf et Gierer, 1980). Les neuroblastes migrent ensuite dans le tissu du bourgeon émergent où ils commencent à proliférer et à se différentier en cellules neurales et ganglionnaires (Berking, 1980). Le marquage des cellules parentales au moment du bourgeonnement a montré que la migration du corps parental vers le bourgeon est quantitativement très importante pendant 24 heures jusqu'au stade 6. A ce stade, le premièr tentacule apparaît, la bouche s'ouvre et la migration de cellules parentales vers le bourgeon cesse (Otto et Campbell, 1977).Dés lors, le nouveau bourgeon, encore attaché à son parent, peut se nourrir. Au stade 9, 15 heures plus tard, le pied va se former et le nouvel animal peut finalement se détacher après trois jours.

      2. La régénération

      Les processus de régénération sont observés dans un grand nombre d'espèces animales (Sánchez-Alvarado, 2000). Selon leur contexte biologique, ces processus sont classifiés soit en régénération tissulaire soit en régénération des appendices. Le premier type n'a pas besoin de formation de novo de structures tridimensionnelles et ne sera pas discuté dans ce travail. Par contre le second type concerne des mécanismes similaires à des événements du développement embryonnaire mais se déroulant chez un animal adulte. Il est divisé en deux catégories selon des critères cellulaires : la régénération épimorphique et la régénération morphallactique.

      3. La régénération épimorphique

      Le terme épimorphose a été proposé par Morgan (Morgan, 1905). C'est un mode de régénération dû à la prolifération cellulaire qui va former un blastème (Figure 6). Le blastème est fait de deux compartiments, le feuillet externe formé de cellules d'origine épithéliale qui couvrent tout le bout du bourgeon et le feuillet interne sous-jacent d'origine mésenchymateuse. Les interactions entre ces deux feuillets vont induire la différentiation des structures manquantes. Ce type de régénération est commune aux planaires, aux gastropodes, aux échinodermes, aux urochordés, et à la régénération de la patte ou de la queue chez les vertébrés (Sánchez Alvarado, 2000).

      4. La régénération morphallactique

      Le deuxième mode de régénération est la morphallaxie. Elle implique la recréation de parts corporelles manquantes en absence de prolifération cellulaire, ce qui est principalement le cas chez l'Hydre (Cummings et Bode, 1984 ; Holstein et al., 1991 ; Park et al., 1970). Au moins pendant le premier jour, le seul processus en action est la différentiation de cellules préexistantes dans la région de la blessure. Immédiatement après amputation, les cellules des extrémités de la blessure migrent et s'étendent pour la couvrir (phase de cicatrisation). Des expériences de greffe ont montré qu'après une période d'inhibition post-coupure de quelques heures, l'extrémité cicatrisante est capable d'induire la formation d'une nouvelle tête chez l'hôte greffé (Berking, 1979 ; Mac Williams, 1983b ; Webster et Wolpert, 1966). Le bout greffé est alors la région d'une activité organisatrice qui se met en place progressivement. Cette activité atteint un plateau après environ dix heures suivant la section et reste exclusivement active à l'extrémité pendant quinze heures (Mac Willams, 1983b).

      5. La réaggrégation

      L'Hydre peut être dissociée en cellules isolées pouvant être centrifugées pour former un culot capable de réorganiser un animal entier (Gierer et al., 1972). Les amas de cellules dissociées subissent d'abord une longue période de reconstitution spontanée. Ils se développent en monstres à plusieurs têtes qui, après une à quatre semaines, se séparent en un ou plusieurs animaux selon la taille initiale de l'aggrégat. Des expériences classiques avec ces aggrégats montrent aussi que les capacités d'auto-organisation des cellules ne sont pas équivalentes (Gierer et al., 1972). Il s'opère immédiatement un tri entre les cellules de l'ectoderme et de l'endoderme (Sato-Maeda et al., 1994 ; Technau et Holstein, 1992). La différentiation terminale se passe avant l'établissement de la polarité du nouvel animal (Dubel, 1990). Des centres organisateurs pour la région de la tête, distribués au hasard, sont détectés après 24 heures. Certains formeront une tête et d'autres disparaîtront par inhibition latérale (Lee et Javois, 1993).

      6. La reproduction sexuelle

      Elle se produit spontanément et dépend directement des conditions environnementales et de l'espèce. Les polypes sont capables de en produire des gonades mâles et femelles. On observe parfois les deux types sur le même polype. L'embryon atteint le stade de morula et se détache du parent. Il achève son développement durant l'hiver et un éclot à l'état adulte au printemps (Tardent, 1968). Il n'y a ni planula nageuse ni stade méduse parmi les différentes espèces d'Hydre.

      III. Les voies moléculaires conservées au cours de l'évolution

      Seules les voies de développement conservées au cours de l'évolution qui concernent notre travail seront discutées ici.

      1. Le facteur de transcription CREB

      L'identification de CREB est due aux études de la régulation de l'AMPc en réponse à des stimulus hormonaux (pour revue voir Shaywitz et Greenberg, 1999). Le glucagon ou l'épinephrine provoquent une augmentation de l'AMPc intracellulaire qui à son tour stimule la transcription des gènes de la somatostatine et d'autres neuropeptides (Goodman, 1990 ; Montminy et al., 1986). L'analyse systématique par délétion de la région promotrice du gène de la somatostatine a révélé le rôle fonctionnel du CRE (cAMP response element) dans cette réponse. Le CRE, un palindrome de 8 paires de base (pb) 5 « -TGACGTCA-3 », est un élément crucial dans les cascades moléculaires impliquant l'AMPc. La chromatographie par affinité a permis d'isoler la protéine CREB de 43kD (cAMP response element binding protein) à partir d'extraits totaux de cellules PC12 (Montminy et Bilezikjian, 1987). Le gène CREB humain a été isolé, il code pour une protéine de 327 acides aminés (Gonzalez et al., 1989). Depuis lors, ce gène a été cloné chez des espèces éloignées comme Aplysia, Drosophila et chez l'Hydre. L'attachement à l'ADN de cette protéine se fait en dimère par un domaine basique riche en lysine et arginine suivi d'un motif « leucine zipper » permettant la dimerisation (Habener et al., 1990).

      2. La voie de CREB chez l'Hydre

      Il est connu depuis de nombreuses années que le traitement de l'Hydre avec de l'AMPc peut affecter la régénération (Wolpert et al., 1974). Il a été montré de plus que l'AMPc pouvait imiter le rôle joué par le nueropeptide head activator (HA)durant la différentiation des cellules nerveuses (Fenger et al., 1994 ; Holstein et al., 1986). En testant l'activité de liaison à l'ADN d'extraits nucléaires d'hydres (Hydre vulgaris) préparés à différents moments pendant la régénération, il a été observé une modulation significative de l'activité de liaison sur le CRE durant le début de la régénération (Galliot et al., 1995). Cette analyse de liaison à l'ADN « band-shift » a aussi été effectuée sur une espèce déficiente pour la régénération du pied, Hydra oligactis, et aucune modulation de liaison au CRE n'a été observée en l'absence de régénération (Figure 9). Il semble donc que ces modulations ne sont pas liées à la cicatrisation mais induites spécifiquement au moment de l'enclenchement de la régénération. Ces résultats suggèrent que le facteur de transcription potentiel CREB chez l'Hydre est impliqué dans la régulation de la régénération (Galliot et al., 1995). Des banques d'ADN complémentaire ont alors été criblées avec un oligonucléotide dégénéré correspondant à la région basique conservée. Deux gènes CREB uniques, l'un provenant d'Hydra vulgaris, l'autre de Chlorohydra viridissima, ont été trouvés montrant des domaines bZIP et KID très conservés (Figure 7).

      3. La voie de signalisation de Hedgehog (Hh) au cours de l'évolution

      Les gènes Hedgehog (Hh) forment une famille de molécules signal impliquées dans une variété de processus du développement chez les vertébrés et chez les invertébrés (Hammerschmidt et al., 1997). Chez la drosophile, le gène Hh définit les segments, l'aile, la patte, les disques imaginaux des yeux et des régions du cerveau. Ceci se fait directement ou indirectement par le recrutement d'autres molécules signal comme decapentaplegic (Dpp) et Wingless (Wg) (Figure 10). Au contraire de la drosophile qui ne possède qu'un seul gène Hh, les mammifères en ont trois copies : Sonic Hedgehog (Shh), Indian Hedgehog (Ihh), Desert Hedgehog (Dhh) ce dernier représentant probablement le plus ancien des gènes Hh chez les mammifères (Kumar et al., 1996 ; Zardoya et al., 1996).

      B. Buts de ce travail

      Ce travail a tenté de répondre aux questions suivantes :

      Quelles sont les modulations moléculaires précoces pendant la régénération et le bourgeonnement ?

      Les résultats observés au niveau moléculaire sont-ils compatibles avec le modèle des gradients extracellulaires responsables de la formation de l'Hydre ?

      Des données tendent à confirmer le rôle potentiel de la voie de signalisation CREB pendant la régénération (Galliot et al., 1995). Nous avons alors décidé d'étudier plus en détail la régulation de CREB au niveau de la transcription et de la post-traduction. La conservation des gènes Hh entre les arthropodes et les vertébrés implique que ce gène était présent chez leur ancêtre commun. Ce fait suggère qu'une voie de signalisation correspondante peut avoir une histoire phylogénétique ancienne. De plus, les polypes de l'Hydre sont bien connus pour leur capacité à régénérer et pour la présence d'événements morphogénétiques. Pour ces raisons, nous avons cherché un gène Hh dans le génome de l'Hydre ainsi que le facteur de transcription conservé Gli/Ci, qui médie la signalisation par Hh chez les vertébrés et chez les arthropodes. Au cours de ce travail, nous avons également isolé par hasard un gène contenant une séquence répétée de type Kazal, Iolaos, qui a des similarités avec la famille des gènes Agrin/Follistatin. La régulation de ces gènes a été étudiée au niveau du bourgeonnement et de la régénération. Pour effectuer ce travail nous avons donc utilisé des techniques avancées de biochimie et de biologie moléculaire: RT-PCR, Southern, hybridation des ARNm sur animal entier in situ, immuno-détection sur animal entier, production in vitro de protéines, analyse par Western, expériences de phosphorylation en gel, expériences de phosphorylation sur phase solide.

      C. Discussion des résultats obtenus

      1. La signalisation de CREB durant la régénération précoce de l'Hydre

      La régénération de l'Hydre est une transition majeure du développement pendant laquelle la voie de CREB est activée juste après section de l'animal. Nous avons analysé les activités des kinases détectées parmi les protéines liant CREB. L'une d'entre elles, la kinase p80, montrevingt minutes après la section mi-gastrique, une activité qui augmente dans le bout régénérant la tête mais diminue dans le bout de régénérant le pied. Cette régulation n'a cependant pas été observée chez le mutant reg-16 qui n'est pas capable de régénérer la tête. De plus, quand cette régénération est ralentie par la haute concentration de facteurs relâchés après la section, la régulation de p80 est inversée. Cette régulation précoce et opposée de l'activité de kination de p80 dans les bouts régénérant la tête et le pied implique que ces bouts régénérants répondent de façon différente aux facteurs relargués dans le milieu. Ainsi une polarité s'établirait très précocément dans le bout régénérant, bien plus tôt que ce que les expériences de transplantation ou l'expression de gènes spécifiques de l'apex et de la base nous laissait supposer. Ces résultats suggèrent qu'une régulation précoce et prolongée de quelques heures de p80 est nécessaire pour l'établissement d'une activité organisatrice durant la régénération de l'Hydre.

      2. La régulation transcriptionnelle de CREB

      L'analyse de l'expression du gène CREB montre au moins trois modes de régulation distincts et spécifiques. Nous avons observé une régulation spécifique de CREB au niveau de la tête dans l'hypostome du polype adulte, une régulation précoce lors du bourgeonnement et de la régénération, et finalement une régulation tardive lors de la formation de la tête. Il semble donc qu'une régulation appropriée du gène CREB soit nécessaire pour i) maintenir la structure de la tête chez l'adulte, ii) pour initier des processus morphogénétiques précoces dans la régénération de la tête et du pied ou dans le bourgeonnement, iii) pour la différentiation finale de la tête.

      3. La régulation post-transcriptionnelle de CREB et le cycle de la lumière

      Dans cette étude, nous avons pu montrer l'influence de la lumière sur les événements morphogénétiques. En effet, le taux de bourgeonnement et de régénération augmentent en absence de lumière. De plus, nous apportons des données préliminaires qui suggèrent que CREB est régulé de façon post-transcriptionnelle par la lumière chez l'Hydre. Ces résultats impliquent la possibilité d'une existence de photorécepteurs chez l'Hydre. En fait, certains cnidaires (les cubozoaires) développent des yeux et des structures nerveuses périphériques leur permettant de réagir à la lumière. Récemment, trois gènes du cristallin ont été clonés chez la méduse, et il a été montré que leur régulation dépendait du récepteur nucléaire à l'acide rétinoïque X comme c'est le cas chez les animaux bilatéraux (Kostrouch et al., 1998). A ce jour, la caractérisation des photorécepteurs de l'Hydre n'a pas encore été décrite, mais sa réaction à la lumière a été intensivement étudiée au niveau comportementemental et électro-physiologique (Passano et Mc Cullough, 1962 ; Passano et Mc Cullough, 1964 ; Tardent et Frei, 1969).

      4. Les étapes moléculaires du bourgeonnement de l'Hydre

      Les résultats de l'analyse des modes dexpression des gènes Tcf, b-catenine (Hobmayer et al., 2000), Hh, Iolaos (ce travail) d'une part et de ceux de CREB (ce travail) et prdl-a (Gauchat et al., 1998) d'autre part, impliquent qu'il y a au moins deux programmes génétiques distincts et successifs avant l'émergence du bourgeon, avant que le bourgeon devienne observable au niveau macroscopique.

      5. La frontière d'expression de Hedgehog pourrait être une région organisatrice

      Nous avons effectué des greffes pour découvrir le rôle potentiel du tissu exprimant Hh pour le bourgeonnement. Ceci a montré qu'une petite région exprimant Hh est capable d'induire la formation d'un nouveau pied. Ce pied ectopique semble provoquer la formation d'une nouvelle frontière dans la colonne corporelle entre les cellules exprimant et n'exprimant pas Hh. De plus, ce pied est capable d'induire un bourgeonnement ectopique complet dans de nombreux cas. Des expériences de marquage à la fluorescence montrent que ce pied est capable de recruter des cellules du tissu adjacent. Ces résultats suggèrent donc que la région exprimant Hh, en créant une frontière d'expression, peut agir comme un « organisateur morphogénétique ». La définition classique d'un organisateur est la suivante : c'est une population cellulaire capable i) de sécréter des molécules inductrices actives sur les cellules adjacentes, ii) de guider les cellules adjacentes vers des événements morphogénétiques spécifiques, iii) d'échanger des cellules avec les tissus adjacents, iiii) de se différentier en une structure spécifique. La région exprimant Hh semble remplir toutes ces conditions.


Acknowledgements

All the members of my family who were always close to me.

Brigitte Galliot for supporting me during the five years of my thesis.

Natalia Giovannini for being my partner in life.

Dr. Pierre Spierer for being member of my committee.

Dr. Thomas Holstein for being member of my committee

Dr. Marc Ballivet for being member of my committee

Dr. Takashi Kondo for his valuable help during the last 3 years of my thesis

Dr. Seb Shimeld Gli/Zic alignment

Dr. Juan Carlos Ispizua-Belmonte for providing us with the sequences of the consensus Hh primers


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