Note(s)

[1]  Dans son rapport au deuxième congrès mondial de psychiatrie, tenu à Zürich en 1957 et consacré exclusivement aux schizophrénies, Henri Ey se demande « quelle est la définition de la schizophrénie? Quel est son trouble fondamental? Est-elle une entité clinique, une psychose endogène spécifique, un syndrome ou un mode d'existence pathologique, effet de multiples processus? Quel sens donner au concept de processus schizophrénique? » « Toutes ces questions, ajoute-t-il, depuis Kraepelin et Bleuler ne cessent de hanter l'esprit des psychiatres » (Ey, 1958).

[2]  Marchand, cité in Morselli G. E. (1955).

[3]  « An entire book could be written about the transformations undergone by the concept of schizophrenia » et plus loin: « The history of the concept is a history not of medical discoveries, but of the intellectual models on which the orientation of psychiatry is based » (Janzarik, 1987).

[4]  Bing F., La théorie de la dégénérescence, in Postel et Quetel, 1994.

[5]  Dementia praecox de E. Kraepelin (1896), Psychiatrie, 5ème édition, pages 426-41, Barth, Leipzig.

[6]  Kraepelin, Leçons, p. 45.

[7]  En témoignent les noms de Flechsig, Von Gudden, Hitzig, et surtout Meynert, qui avait l'ambition « de donner à la psychiatrie le caractère d'une discipline scientifique,  grâce à des bases anatomiques » et Wernicke, qui voulait faire de la psychiatrie la science des maladies transcorticales.

[8]  Bleuler écrit souhait.

[9]  « Nous ne connaissons même pas encore avec certitude les symptômes primaires de l'affection cérébrale schizophrénique » (op. cité, p. 447).

[10]  Comptes rendus du Congrès des médecins aliénistes et neurologistes de France et des pays de langue française, Masson, Paris, 1926, p. 93-101.

[11]  « The most carefully elaborated attempt to describe symptoms pathognomonic for schizophrenia was made by Schneider » (Van Praag, 1976).

[12]  « Nous ne sommes cependant pas dans une situation aussi grave qu'il pourrait sembler d'après l'assertion de Kraepelin, qui dit (388, II, p. 271) qu'il n'y a pas un seul symptôme pathologique qui soit déterminant pour le diagnostic. Le trouble des associations décrit plus haut, et sans doute aussi le type des hallucinations, sont caractéristiques et suffisent au diagnostic positif ; un blocage affectif général a également la même valeur » (Bleuler, p. 380). « Il n'existe pas de symptômes pathognomoniques négatifs qui excluraient la présence d'une schizophrénie » (Op. cité, p. 388). (Cf. Ey, p. 643)

[13]  « ... la ligne de démarcation qui sépare les signes primitifs des symptômes psychogènes doit être déplacée au profit des premiers » (Guiraud et Ey, 1926).

[14]  « En 1925, j'entrepris la traduction de ce fameux ouvrage. C'est ainsi que j'appris la psychiatrie ». Et plus loin : « Les travaux du maître de Zürich constituent à mes yeux le chef-d'oeuvre psychiatrique du siècle ». H. Ey, La conception d'Eugen Bleuler, repris dans E. Bleuler, Dementia praecox ou groupe des schizophrénies, p. 640-658.

[15]  Des travaux que Henri Ey a consacrés à la schizophrénie, nous ne mentionnons ici que ceux qui commentent et discutent l'oeuvre de Bleuler.

[16]  Nous verrons plus loin que cette position est restée celle de Guiraud.

[17]  A propos de l'hérédité similaire obéissant aux lois mendéliennes, Ey relève que la « démonstration est d'autant plus facile - et vaine - que les traits schizophréniques sont pour ainsi dire indéfiniment élastiques » (Ey, 1934).

[18]  Ey H. (1940), La conception d'Eugen Bleuler, in Bleuler E. (1993), op. cité, p. 639-658.

[19]  « Dans tous les cas prononcés de schizophrénie on constate des modifications anatomo-pathologiques dans le cerveau ». « L'origine organique de la schizophrénie se laisse aujourd'hui démontrer avec toute l'évidence voulue... » (op. cité, p. 648). « La schizophrénie est une affection physiogène, c'est-à-dire à base organique » (Idem, p. 653).

[20]  « En somme, la schizophrénie, telle qu'elle est comprise par Bleuler, par les rédacteurs allemands du tome schizophrénie du traité de Bumke et par beaucoup de psychiatres qui se contentent de ce diagnostic commode, est si l'on veut un mode pathologique de pensée mais ce n'est pas une maladie mentale ». En toute logique, c'est dans la psychopathologie et non dans la classification clinique qu'il faudrait la placer (Guiraud, 1950, p. 33).

[21]  Nous reviendrons en détail sur les conceptions anatomo-physiologiques de Guiraud, ainsi que sur les travaux et les thèses de Baruk concernant la catatonie, dans le chapitre suivant.

[22]  « Là cependant où il s'agit de phénomènes aussi complexes que le sont les psychoses, le mode de transmission héréditaire pourrait bien ne pas se présenter exactement de la même façon. En particulier, les individus hétérozygotes pourraient trahir extérieurement, par un trait particulier quelconque, leur structure germinative. Il ne saurait, certes, être question d'une psychose manifeste, celle-ci étant l'apanage des individus homozygotes. Tout au plus aurait-il pu s'agir de particularités de comportement que nous sommes habitués à désigner, dans la vie courante, du nom de « caractères anormaux ». Ceux-ci, cependant, reposant sur la présence du même germe que la psychose étudiée, devraient nécessairement avoir une affinité assez grande avec celle-ci. Ces considérations d'ordre biologique mènent ainsi de nouveau à l'étude des caractères anormaux, en impliquant tacitement le postulat de leur similitude avec la psychose étudiée ». Op. cité, p. 22-3.

[23]  « Tout en nous écartant de notre maître en ce qui concerne l'interprétation psychologique du trouble initial de la schizophrénie ... ». Op. cité, p. 108. 

[24]  H. Ey, La conception d'Eugen Bleuler, in E. Bleuler, Dementia praecox ou groupe des schizophrénies, p. 650.

[25]  Pour une discussion critique du rôle de la serendipity dans la découverte des traitements physiques et biologiques en psychiatrie, cf. Jeste D.V. et al., 1979. Si la chance a pu jouer un rôle dans certaines de ces découvertes, celui-ci ne fut jamais décisif.

[26]  Sargant, 1952, p.3.

[27]  « It would have been preferable to have been able to trace the cause of the disease first, and then to follow the path by looking for a suitable treatment ». M. Sakel, art. cité, p. 242. Nous verrons plus loin que Sakel adopte en fait une attitude beaucoup plus pragmatique, du moins à l'égard du traitement dont il s'est fait le promoteur.

[28]  Cf. Rapport au Congrès International de Psychiatrie.

[29]  Cf. Rapport au Xème Congrès International de Psychiatrie (1938), 4ème section, p. 30.

[30]  Le premier article décrivant l'utilisation de l'insuline en psychiatrie est dû à Torp H., Mental and neurological changes after hypoglycaemic coma in a case of schizophrenia, Norsk Magasin for Laegeridenskapen xciii (1932), 760-65, english abstract made for I. G. H. Wilson in A Study of Hypoglycaemic Shock Treatment in Schizophrenia (London: H. M. S. O.).

[31]  Cf. Dale, Loewi, etc., découverte de la transmission chimique dans le SNV.

[32]  Cf. Congrès international de psychiatrie, p. 39, citations de l'article de 1933.

[33]  Cf. James F. E., art. cité, p. 225

[34]  Cf. James F. E., art. cité, p. 228

[35]  Sakel, Schizophrenia : most disastrous disease of man : it destroys his mind through sparing his body, Congrès International de Psychiatrie. A noter que R. Abrams, dans son article, ne mentionne pas la contribution de Sakel et attribue à Meduna l'introduction des thérapies du choc dans le traitement de la schizophrénie.

[36]  Nous nous attachons ici aux recherches biologiques et aux hypothèses étiologiques de Baruk, mais ce ne serait pas lui rendre justice que de suggérer, par ce choix, qu'il se cantonnait au traitement médical de la folie. « Toutes ces thérapeutiques biologiques et étiologiques ne doivent pas faire perdre de vue l'extrême importance du traitement moral », écrit-il dans le même ouvrage (p. 244).

[37]  « ... the first specific biochemical hypothesis of the etiology of schizophrenia ». Op. cité, p. 12. Le rapprochement n'implique pas que ces auteurs aient eu mutuellement connaissance de leurs travaux, mais vise à souligner la coexistence temporelle de deux paradigmes de la recherche sur la schizophrénie. Le Précis de Baruk clôt une époque « bernardienne », Smythies inaugure l'ère de la biochimie et de la biologie moléculaire.

[38]  « The work carried out before 1950 lacked the benefit of any hypothesis and its course was determined largely by the biochemical techniques that were available at the time... ».

[39]  Studies in Schizophrenia (1954), A Multidisciplinary Approach to Mind-Brain Relationships, by the Tulane Department of Psychiatry and Neurology, Harvard University Press, Cambridge, Massachusetts

[40]  Baruk H., Précis de Psychiatrie, p. XVIII

[41]  Op. cité, p. 133

[42]  Op. cité, p. 135

[43]  Sa conception (et sa terminologie) ne sont guère fixées: la catatonie est tantôt un syndrome spécial (p. 149), tantôt une maladie (p. 150).

[44]  Op. cité, p. 183

[45]  Op. cité, p. 188

Op. cité p. 221.

[46]  

[47]  On pense ici aux travaux récents sur le sommeil et les muramyl-polypeptides, produits bactériens, ou encore aux récepteurs aux benzodiazépines chez les bactéries.

[48]  Op. cité, p. 243

[49]  De Jong, Rapports du premier congrès mondial de psychiatrie (1950), p. 255.

[50]  De Giacomo, Rapports du premier congrès mondial de psychiatrie (1950), p. 241.

[51]  Cf. chapitre IV, discussion critique de cette stratégie de recherche par S. Kety.

[52]  Studies in Schizophrenia (1954).

[53]  A la même époque fleurissait, dans les milieux psychanalytiques, le rapprochement (l'analogie) entre l'enfant, le primitif et le fou.

[54]  « Les travaux de l'école de Goldstein caractérisant la pensée des schizophrènes par la perte de la faculté d'abstraire, ne paraissent pas très convaincants. Cliniquement, en effet, rien n'est plus abstrait que la pensée du schizophrène, mais une chose peut-être la caractérise mieux, c'est que cette abstraction s'exprime dans un symbolisme très concret, une imagerie sensorielle hallucinatoire ». (Follin , 1998, p. 88). La complexité de la clinique se révèle bien ici, et combien, pour en abstraire des dimensions propres à l'investigation biologique, il faut lui faire violence.

[55]  « J'écris souvent «maladie mentale» pour simplifier mais il faudrait écrire «maladie à symptômes mentaux prédominants». Bien des gens croient peut-être encore qu'il peut y avoir des maladies mentales en ce sens que le psychisme est directement et exclusivement atteint. Je considère avec méfiance la tendance qui consiste à caractériser une «maladie mentale» telle que la psychose maniaque dépressive ou la schizophrénie par un «trouble générateur» unique d'ordre psychique d'où dériveraient tous les symptômes sans exception ». Op. cité, p. 8.

[56]  « Toute psychiatrie qui s'interdit de poser les questions fondamentales sous prétexte qu'elles sont du domaine de la métaphysique reste superficielle ». Op. cité, p. 10.

[57]  « Cette classification génétique des symptômes constitue une découverte d'importance capitale qui doit devenir un des principes directeurs de la psychiatrie moderne ». Op. cité, p. 11.

[58]  Cité in Morselli, 1955, p. 647.

[59]  «The biochemical hypotheses which have been applied to schizophrenia, by virtue of the relative ease with which they may be developed and evaluated, if they have done nothing more, have made us aware of certain epistemological and technical pitfalls which attend the demonstration of etiological significance », op. cité, p. 39.

[60]  L'expression vise à faire contraste avec l'épithète « néo-kraepelien ».

[61]  « Encore que l'individualisation de ce concept soit provisoire, dans la mesure où il faudra le dissoudre par la suite (à peu près dans le sens où la bactériologie a scindé la pneumonie en différentes infections), nous considérons pourtant le progrès qu'elle a permis comme encore plus grand que la découverte de la paralysie générale ». Bleuler, op. cité, p. 40.