Lueurs stériles

 

Ibrahim Abloua

 

Dans cette chambre aseptisée – une boîte de blanc uniforme, ponctuée par endroits de touches pastel des dessins d’enfants accrochés au mur de ce décor stérile (bien que l’astre solaire se levât déjà, dessinant de timides rayons à travers les rideaux tirés, révélant l’essence laborieuse des premières heures du jour, pénétrant le cocon paisible de mon inconscience, dévoilant un espace encore inconnu) – aux contours familiers mais à l’ambiance teintée d’étrangeté, dans ce lit à l’enveloppe inconnue où le sommeil m’avait suspendu, véritable vaisseau médical (tombeau ? radeau ? lit ? long fleuve continu dont le cours nous amène à notre destin, qui, quoi qu’on y fasse, reprend éternellement l’image du souvenir qu’on lui a associé ? santé de fer ou santé d’or ?), ce lit aux draps d’une blancheur éblouissante (rappelant l’éclat d’une lumière radieuse déjà rencontrée auparavant), percevant les bruits (de machines distantes, des oiseaux du matin, murmures sourds et réguliers, présence constante de chaleur ou de vie) qui, sans m’agacer ni réchauffer l’ambiance, chuchotaient à mes oreilles un langage énigmatique, éprouvant une sensation de faiblesse, d’engourdissement résiduel (comparable à celle de l’animal qui hiberne et qui, après un long moment sans avoir bougé, semble devoir s’étirer doucement à la redécouverte de la fonction de ses membres ou au rituel du sommeil qui emporte notre corps vers un repos sensoriel presque infini), pensant – malgré ces câbles qui m’enlaçaient et me gênaient – sans le vouloir (comme si c’était plus fort que moi, ce besoin de réfléchir dans une situation où mon corps ne demandait qu’à être laissé tranquille, besoin irrationnel mais qui – peut-être – était un signe de vie, un signe d’un besoin vital qui surpasse tous les autres, un éclair de lucidité – ou de folie – qui domine l’esprit au point de ne même plus s’en rendre compte), me remémorant soudain l’intervention nocturne (au cours de cette nuit qui n’avait rien d’une nuit habituelle, sans repos, éternelle, porteuse d’un sombre présage, seul compagnon d’un voyage aux portes de la souffrance), et percevant les vagues lumières qui surgissent encore de l’esprit obscurci, souvenirs épars et brouillés, je me réveillai brutalement dans une chambre d’hôpital.

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Photo : © CDD20

Pastiche

Comment raconter un souvenir (réel ou fictif), à la manière de tel-le ou tel-e écrivain-e ? Comment repérer et imiter les caractéristiques qui font la cohérence d'un style ?

Lueurs stériles
Ibrahim Abloua

Tracés d'enfance
Angela Allemand

Nuits d’été albanaises
Tina Haziri

« … -uille ouille ouille ! »
Amelia Ligabue