Tentative d’assainissement ratée

 

Amel Debbah

 

En pyjama ou chemise de nuit, enfants âgés de quatre et six ans, exaspérés par les odeurs et fumées de la cigarette paternelle, excités à l’idée de leur exploit à venir. La petite, franche et impertinente, menée comme souvent par son grand frère, déterminée, avec, plein les mains, des images dessinées interdisant la consommation de tabac dans la demeure familiale, destinées à être collées sur tous les murs.

Tout sourire, la mère amusée par le tour que veulent jouer ses bambins, elle-même indisposée par la puanteur ambiante sans cesse renouvelée. L’atmosphère – dans tous les sens du terme – tendue, l’air familial âcre et lourd, légèrement améliorés la journée par l’absence du mari et de ses mégots répugnants, au bureau.  

L’après-midi ensoleillée et chaude les poussant à traverser la rue et se poser sur le sable jaune et brûlant  – un des avantages à la vie en bord de mer… Les enfants heureux comme toujours à la vue de l’eau méditerranéenne, songeant déjà au rafraîchissement instantané apporté par le premier saut dans les vagues, yeux et bouches fermés pour se protéger de l’eau salée qui pique.

La mère et la voisine les accompagnant en cette occasion, posées sur des serviettes de bain à discuter de la chaleur et des pénuries d’eau : l’eau salée abondait à perte de vue, certes, mais l’eau potable courante retenue était limitée des heures, voire des jours, durant…

Retour du père en début de soirée, éreinté après sa journée de travail dans un immense bureau de directeur, sa vie gérée par une assistante méticuleuse mais exigeante, un dragon envers les étrangers, y compris les membres de la famille du patron. Yeux fatigués, tête pleine de demandes et problèmes en tout genre des Japonais, des Saoudiens, des compatriotes corrompus ; on le prend par la main et on le guide vers la salle à manger. Passage par le salon, par la cuisine, les murs couverts d’images de cigarettes barrées de rouge, interdiction affichée et visible.

Fierté des uns, amusement des autres, mais surtout indifférence du principal concerné. Le repas servi, les enfants dans l’expectative posés à ses côtés, sa femme aimante débarrassant la table, la cigarette venue comme par enchantement, volutes nauséabondes et opaques réapparaissant et polluant à nouveau. Essai raté.

 

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Photo : © Foundry

Pastiche

Comment raconter un souvenir (réel ou fictif), à la manière de tel-le ou tel-e écrivain-e ? Comment repérer et imiter les caractéristiques qui font la cohérence d'un style ?