La didactique comparée comme champ de recherche

La didactique comparée se positionne dans le prolongement des didactiques disciplinaires en proposant un espace de questionnement / mise à l'épreuve des théories, concepts et phénomènes construits dans le cadre de l'étude de pratiques didactiques spécifiques des corps de savoirs.  Inscrit dans les sciences de l’éducation et, plus largement, en sciences humaines et sociales, ce champ retravaille les emprunts aux disciplines contributives comme la psychologie, la sociologie, les sciences du langage, l’histoire, l’anthropologie, l’épistémologie, etc. tout en questionnant le rapport aux sciences dont sont issus les savoirs enseignés, objets d’étude de la science didactique. Dans un sens anthropologique large, c’est l’étude des conditions d’accès à des pratiques de savoir qui mobilise le projet de cette science didactique.

En prenant l'action conjointe du professeur et des élèves comme unité première d'analyse, la didactique comparée théorise les conditions d'accès des élèves aux savoirs à travers les différentes disciplines scolaires, mais aussi dans les transitions institutionnelles qui jalonnent leur expérience d'apprenants (articulation préscolaire – primaire – secondaire). Ce champ de recherche se donne ainsi les moyens d'explorer des questions didactiques qui ne peuvent être traitées depuis un seul point de vue disciplinaire, ni depuis des approches transversales de la relation éducative.

Quelques exemples de questions de recherche

- A travers les activités scolaires auxquelles les jeunes élèves prennent part au début de l'école, comment s'établissent les prémisses des disciplines scolaires qui vont organiser les savoirs enseignés tout au long de la scolarité ? Quels sont les objectifs que les enseignants privilégient dans ces activités ? En quoi l'organisation disciplinaire des savoirs dans le curriculum influent-elle sur les décisions des enseignants ? (voir la thèse de Christine Riat)

- Lorsque les élèves passent d'un enseignant généraliste à un enseignant spécialiste d'une ou deux disciplines, quelles différences apparaissent dans la structuration des savoirs, les attentes posés par les enseignants, et celles décodées par les élèves ? (voir la thèse de Laurence Marty pour la transition primaire/secondaire; voir la thèse de Adrián Cordoba pour la transition entre maitre généraliste et maitre spécialiste en EPS au primaire)

- Comment les enseignants généralistes (primaire) structurent-il leurs interventions (construction de la progression temporelle, partition des responsabilités, gestes didactiques) lorsqu'ils enseignent des savoirs qui relèvent de logiques disciplinaires différentes (ex : maths et français) ? Peut-on identifier des manières de faire génériques dans les deux cas ? Quelle est l'influence des plans d'étude, moyens d’enseignement, formations, etc) sur l'épistémologie pratique des enseignants ? (voir la thèse de Mylène Ducrey-Monnier)

- Comment certains objets de savoirs "frontières" peuvent être travaillés selon différentes logiques disciplinaires  (ex : l'énergie en physique et en biologie; la mesure en mathématique et en physique; le texte encyclopédique en français et en sciences, etc)? Comment les enseignants gèrent-ils des enseignements interdisciplinaires ? Quelles conséquences sur la nature des objets de savoirs effectivement enseignés, et sur le sens que ces savoirs prennent pour les élèves ? (voir la thèse d'Alexia Forget)

- Quels processus de transposition sont à l'oeuvre dans différents systèmes éducatifs, à propos d'un objet de savoir donné (ex: la mesure et les opérations arithmétiques en mathématiques; les états de la matière en physique, etc,)? Quels systèmes de valeurs (épistémologiques, sociales, cognitives) sont embarqués dans ces processus ? Qu'est-ce que ces processus nous révèlent sur les déterminants de l'action enseignante dans les classes ? (voir les thèses de Florence Ligozat, de Michèle Couderette et de Laurence Marty)

Constructions méthodologiques

Les méthodes de recherche en didactique comparée articulent des démarches cliniques et des contraintes expérimentales : clinique des acteurs (contrat chercheur-participants) et clinique des systèmes (systèmes de recherche et systèmes didactiques) sont travaillés dans le cadre de dispositifs expérimentaux aptes à prendre en compte la dynamique des institutions didactiques.

Le programme de recherche pour le développement d’une didactique comparée à Genève prend appui sur l’évolution des débats au sein de l’Association pour des Recherches Comparatistes en Didactique (ARCD).

voir quelques références liées au développement du champ de la didactique comparée