Fondements
Le LIESS regroupe des formatrices et formateurs, des chercheures et chercheurs de l’Université de Genève et souhaite également intégrer des enseignantes et enseignants du canton de Genève pour constituer un collectif scientifique interdisciplinaire dans le domaine des éducations à la soutenabilité.
Pourquoi un laboratoire Interdisciplinaire ?
Les problématiques auxquelles nos sociétés sont confrontées comportent toutes les caractéristiques de la complexité. Elles ne peuvent être abordées que par des regards croisés sur le monde et des expertises issues de plusieurs disciplines. Ainsi les solutions envisagées répondront aux caractéristiques d'une société soutenable. Selon Diemer (2014, p. 65), « il s’agit en quelque sorte de mettre en dialogue les savoirs écologiques, économiques, sociaux, culturels pour aborder des problématiques complexes et impliquer le sujet dans tout schéma de pensée ». À cela s'ajoutent bien évidemment les connaissances pédagogiques, didactiques et épistémologiques convoquées dans les différentes disciplines.
Pourquoi privilégier le terme "EducationS" ?
Les approches pédagogiques visant à initier les élèves à la durabilité/soutenabilité de nos sociétés sont multiples. Elles peuvent différer notamment concernant leurs visées (entre « prescription » et « émancipation »), leurs filiations (« éducation à l'environnement, « éducation à la santé », etc.) et leurs modalités de mise en œuvre (entre « action » et « réflexion », entre « enseignement en classe » et « à l'extérieur », etc.).
Par le terme "EducationS" au pluriel, nous souhaitons donc considérer dans nos réflexions les diverses approches pédagogiques et didactiques ainsi, que de manière plus générale, les apports des sciences de l'apprendre et des sciences de l'éducation. Il évoque ainsi l'ensemble des processus d'apprentissage et notamment les aspects de production et de médiation des savoirs, ainsi que, « une entrée par la complexité (qui renvoie à l’analyse systémique), une approche [inter] transdisciplinaire (qui associe rigueur, ouverture et tolérance) et une pédagogie critique (qui favorise l’émergence d’une capacité de résistance réflexive) » (Diemer, 2014, p.115).
Inhérent à ces questions, le terme "EducationS" renvoie également aux rôles et aux missions de l'École, ainsi qu'aux politiques éducatives mises en place.
Pourquoi choisir le terme "Soutenabilité" ?
Nous entendons par soutenabilité une évolution (au sens non téléologique du terme) et/ou une transformation vers des sociétés humaines viables, vivables et durables (Purvis et al, 2018). C'est-à-dire des sociétés qui visent l'équité et la justice sociale, tout en tenant compte des limites tant planétaires du Système Terre, que des autres systèmes (sociaux-culturels, économiques, etc.) (Raworth, 2012). Dans une perspective de soutenabilité, les liens d'interdépendances et la co-évolution entre systèmes ou entre éléments des systèmes sont des enjeux centraux, tout comme le maintien de la fonctionnalité des systèmes.
Nous sommes conscient-e-s que le terme de Développement Durable (DD), pourtant largement connu et diffusé, fait débat. Ceci par son flou sémantique, ses compréhensions plurivoques ou restreintes, ainsi que son instrumentalisation politique (Aubertin et Vivien, 2006 ; Carbonnier et Grinevald, 2011 ; Vivien, 2005). En effet, la notion de développement peut être associée (voire synonyme) à la croissance économique, l'industrialisation ou l'accumulation de capital, sans tenir compte des limites planétaires, de la justice sociale ou de toutes autres questions relatives à la répartition des richesses entre les générations et à l'intérieur de chacune des générations, comme le souligne pourtant la définition donnée dans le rapport Brundtland (CMED, 1987). En outre, le qualificatif durable renvoie uniquement à la durée du phénomène « (...) comme si le problème se résumait à vouloir faire durer le développement » (Vivien, 2005).
Aussi, le LIESS choisit le terme de « soutenable » afin d'inscrire ses réflexions dans une approche résolument globale et systémique, et pour se départir des ambiguïtés liées au terme de DD. Également, le LIESS souhaite s'aligner sur le choix originel du rapport Brundtland qui est sustainable et non durable (le terme existe pourtant aussi en anglais), ainsi que sur la deuxième édition francophone du rapport (1988) ; édition qui a notamment remplacé « développement durable » par « développement soutenable » afin de répondre à la demande de la Commission, pourtant déjà exprimée dans la préface de l'édition anglaise de 1987 et écrite par Grom Harlem Brundtland.
Références
Aubertin C. et Vivien F.-D. (2006), Le développement durable. Enjeux politiques, economiques et sociaux, IRD, La documentation Française, Paris.
Carbonnier G. et Grinevald J. (2011), « Energie et développement », International Development Policy |Revue internationale de politique de développement [En ligne], 2 | 2011, mis en ligne le 10 mai 2011,consulté le 27 juillet 2017. URL : http://poldev.revues.org/687
Commission mondiale sur l’environnement et le développement - CMED (1987), Our Common Future, Organisation des Nations Unies.
Diemer A., « L’éducation systémique, une réponse aux défis posés par le développement durable », Éducation relative à l'environnement [En ligne], Volume 11 | 2014, mis en ligne le 20 décembre 2013, consulté le 21 février 2020. URL : http://journals.openedition.org/ere/805 ; DOI : 10.4000/ere.805
Diemer A., (2014), L’EDD, une initiation à la complexité, la transdisciplinarité et la pédagogie critique. In Diemer, A. et MArquat, C., Education au développement durable, enjeux et controverses. Louvain-la-neuve : De Boeck.
Pellaud, F. (2011). Pour une éducation au développement durable, Editions Quaé, Versailles.
Purvis B., Mao Y. et Robinson D. (2018), « Three pillars of sustainability: in search of conceptual origins », Sustainability Science, vol. 14, 3 septembre 2018, p. 681-695.
Raworth K. (2012), A Safe and Just Space for Humanity, London: Random Hause, 309 p.
Vivien F.-D. (2005), Le développement soutenable, ed. La Découverte, Paris.