8 octobre 2020 - UNIGE

 

Événements

Covid 19: prévoir l’imprévisible

Quel rôle peuvent jouer les aéroports dans la lutte contre la propagation des épidémies?
La table ronde organisée le 13 octobre apportera des éléments de réponse tirés des biomathématiques, une discipline utilisée pour modéliser, comprendre et prévoir à court terme la diffusion des épidémies.

 

 

 

Depuis quelques mois, le monde entier vit au rythme du COVID-19. Le trafic aérien n’a pas été épargné, touché de plein fouet par cette pandémie. Mais cette crise sanitaire rappelle avant tout que les épidémies ont toujours utilisé les routes commerciales pour se propager. Les autorités sanitaires mondiales ont d’ailleurs fortement réglementé les voyages et les échanges commerciaux internationaux.

Cette table ronde, organisée par l’Université de Genève, en collaboration avec Genève Aéroport, réunira des scientifiques et des experts de l’aviation. Ils répondront, entre autres, aux questions suivantes: Quel est le rôle du RSI dans la gestion de la pandémie aujourd’hui ? Quels organismes collaborent et avec quels résultats ? Comment Genève Aéroport a-t-il fait face à la crise du Covid-19 et comment a-t-il travaillé avec les autorités sanitaires ? Comment les passagers peuvent-ils se comporter aujourd’hui et que doivent-ils savoir?

 

Depuis 1985, on sait que les biomathématiques permettent de reconstituer avec une grande précision la diffusion d’une épidémie de grippe. En recourant à cette technique, le professeur Antoine Flahault, directeur de l’Institut de Santé Globale (ISG), est, pour sa part, parvenu à suggérer que le manque de connections aériennes entre l’Afrique et l’Asie avait retardé l’arrivée du VIH en Thaïlande et au Japon notamment. Il a également pu soutenir qu’en raison de la longue période de latence du VIH, sa diffusion silencieuse était déjà trop large au milieu des années 80 pour qu’un contrôle sanitaire aux frontières suffise à l’enrayer.  

Début 2020, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a recommandé aux pays de ne pas fermer leurs frontières, et en particulier leurs liaisons aériennes, pour lutter contre la Covid-19. En effet, ses experts ont estimé alors que les bénéfices épidémiologiques attendus d’une telle mesure ne pèseraient pas assez lourd en regard des effets économiques et sociaux qui en découleraient. «En réalité, explique Antoine Flahault, nous avions montré qu’il fallait clouer au sol plus de 90% des avions pour qu’une telle mesure soit efficace sur le plan épidémiologique. Avant cette pandémie, une application aussi drastique de cette mesure semblait impensable à tous. L’OMS ne l’a donc pas préconisée. Pourtant, en violation flagrante de sa recommandation et du Règlement sanitaire international dans le cadre duquel elle était émise, c’est ce que la plupart des pays ont fait. La fermeture des frontières a très probablement fonctionné pour les pays qui l’ont mise en place très tôt, comme Taïwan, Singapour ou la Nouvelle-Zélande mais au moment où cette mesure a été appliquée globalement, il était visiblement trop tard vu la rapidité de l’éclosion des foyers partout dans le monde.» 

Le souvenir du syndrome aigu respiratoire sévère (SARS) de 2003, dû lui aussi à un coronavirus et qui s’était répandu rapidement dans 25 pays pour finir par s’éteindre, était encore vif et, au début janvier de cette année, la situation pouvait sembler analogue. Les spécialistes se sont cependant petit à petit rendu compte que le scénario pour la Covid-19 était différent. «Le SARS n’est pas devenu une pandémie parce que dans 95% des cas les patients développaient une forme sévère nécessitant une hospitalisation, avec 10 à 15% de décès. On comprend alors que la diffusion silencieuse dans le cas du SARS était beaucoup plus limitée, les cas presque tous très fébriles pouvaient être interceptés avant leur embarquement ou dès leur descente d’avion, contrairement à la plupart des cas de Covid-19, comme on a pu le vérifier par la suite.» 

 

La théorie mathématique au service de l’épidémiologie 

Mise au point dans les années 1920 pour expliquer l’extinction de la grippe espagnole, la théorie mathématique des épidémies se déploie aujourd’hui selon deux techniques, l’une est la formulation déterministe de ces modèles et l’autre, dite stochastique, qui introduit un degré d’incertitude. «Ce second type de modèles génère des intervalles d’incertitude alors que le premier donne un résultat invariable pour des conditions initiales données. En intégrant mieux le caractère aléatoire des sciences de la vie, les formulations stochastiques reflètent ainsi un peu plus fidèlement la réalité qu’elles simplifient, explique le professeur Flahault. Ces modèles se sont beaucoup affinés ces dernières années. Les équipes de l’Institut de santé globale, par exemple, s’efforcent de prendre en compte non pas uniquement de l’incertitude statistique mais également des paramètres sociologiques de comportements, lorsque ces données sont disponibles.» Les équipes de l’ISG travaillent ainsi dans le contexte actuel à produire différents scénarios (depuis les optimistes jusqu’aux pessimistes) qui puissent servir de bases de travail pour éclairer l’action politique.

Si la théorie mathématique des épidémies permet d’effectuer quotidiennement des prévisions à sept jours de la diffusion de la Covid-19 dans 209 pays sans erreur majeure, le chercheur souligne cependant que le virus ne se comporte pas tout à fait de la même manière que celui de la grippe. Les modèles mathématiques aujourd’hui ne sont ainsi que partiellement efficaces pour les prédictions à long et même moyen terme. «L’épidémie actuelle présente notamment des caractéristiques d’hétérogénéité fortes, c’est-à-dire que sa diffusion est inégale au sein de la population. Dans la vie réelle, les individus interagissent en effet par réseaux (âge, caractéristiques socio-économiques, origines, etc.). Or, explique le professeur Flahault, la plupart des modèles simples ne prennent en compte à ce jour qu’imparfaitement cette hétérogénéité.» Ce dernier espère que les limites des théories actuelles stimuleront des talents, venant peut-être d’autres disciplines, qui développeront de nouveaux axes théoriques mathématiques pour les épidémies. Des approches interdisciplinaires innovantes lui semblent, en ce sens, particulièrement prometteuses. 

 

Les applications concrètes des modèles de biomathématiques 

Capables de modéliser la diffusion des virus, les modèles mathématiques peuvent également simuler sur ordinateur l’efficacité des mesures de santé publique et en évaluer in silico leurs résultats. «Avant que l’on fasse des études cliniques de séroprévalence, par exemple, ce sont des modèles mathématiques qui ont estimé le nombre de personnes infectées en Europe, et ils l’ont fait avec pas mal de précision», relève le chercheur. Ce sont ces mêmes théories mathématiques qui permettent de calculer la valeur du R, dont on entend souvent parler dans la presse et qui correspond au taux de reproduction de l’épidémie. «Ce chiffre, dans un modèle simple, est le produit de trois paramètres, explique le professeur Flahault, la probabilité de transmission du virus entre deux personnes, le nombre de contacts à risque et l’intervalle de génération, c’est-à-dire la durée de la période contagieuse. L’objectif est de maintenir le R en dessous de 1 pour juguler l’épidémie. Les mesures proposées pour la Covid-19, que ce soient les masques, le lavage des mains ou les mesures de confinement, visaient à réduire les valeurs des deux premiers facteurs. Tant qu’il n’y a pas d’antiviraux efficaces disponibles, il n’est pas possible d’influencer le troisième facteur. Ces mesures ne sont pas tombées du ciel, elles trouvent une base solide dans la théorie mathématique des épidémies. » 

 Flahault_photo_3.jpg

 Prof. Antoine Flahault

Les équipes de l’Institut de santé globale sont impliquées dans plusieurs efforts de lutte contre la pandémie actuelle. Outre les études sur la séroprévalence, l’ISG de l’Université de Genève travaille en collaboration étroite avec le Swiss Data Science Center, une initiative commune des écoles polytechniques fédérales de Lausanne et de Zurich, dans la production de prévisions quotidiennes à sept jours et de cartes de risque relatives à la circulation de la Covid-19. Par ailleurs, alors que le professeur Flahault et la professeure Olivia Keiser, directrice de la division des maladies infectieuses et de la modélisation mathématique de l’ISG, sont membres de la Task Force de la Confédération, cette dernière, avec son équipe, a été chargée par l’OFSP de la surveillance hospitalière de la Covid-19 dans toute la Suisse.

Cette table ronde, organisée par l’Université de Genève, en collaboration avec Genève Aéroport, réunira des scientifiques et des experts de l’aviation. Ils répondront, entre autres, aux questions suivantes: Quel est le rôle du Règlement sanitaire international (RSI), qui fixe les mesures particulières à mettre en application dans les ports et les aéroports, dans la gestion de la pandémie aujourd’hui ? Quels organismes collaborent et avec quels résultats ? Comment Genève Aéroport a-t-il fait face à la crise du Covid-19 et comment a-t-il travaillé avec les autorités sanitaires ? Comment les passagers peuvent-ils se comporter aujourd’hui et que doivent-ils savoir?

Cet événement s'inscrit dans le cadre d'un cycle de conférences et de débats organisé par l'Université de Genève et Genève Aéroport, à l'occasion du centenaire de ce dernier. 

 

Pandémies: comment les aéroports contribuent-ils à la lutte contre la propagation des maladies?


eTable ronde avec la participation de:






André Schneider, directeur général, Genève Aéroport


Virginie Masserey Spicher, cheffe de la section Contrôle de l'infection, Office fédéral de la santé publique (OFSP)


Didier Pittet, prof. à l’UNIGE, médecin des frontières, responsable du programme de l’OMS «Clean Care is Safer Care»


Antoine Flahault, prof. et directeur de l'Institut de santé globale, UNIGE




Modératrice:


Romaine Jean, journaliste

 

INFORMATIONS PRATIQUES

Mardi 13 octobre | 19h | Uni Dufour.
Rue du Général-Dufour 24, 1204 Genève

Entrée libre sur inscription
Également en direct sur cette page

 

À TÉLÉCHARGER

L'affiche A3 au format pdf
Le flyer A5 au format pdf


ORGANISATION

Aurélie Lara
Service de communication

 

En raison de la situation sanitaire:

  • Le port du masque est obligatoire dès l’entrée dans les bâtiments universitaires et pendant toute la durée de l’événement.
  • Des distributeurs de solution hydroalcoolique sont disposés à l’entrée.
  • La propreté des lieux est assurée conformément au plan de protection de l’UNIGE.