C’est sur les conseils de sa codirectrice de thèse Pierrette Bouillon, professeure au sein du Département de traitement informatique multilingue, qu’elle a présenté ses résultats de recherche pour le prix au concours Latsis. «Mon travail explore les effets de la post-édition sur la qualité d’une traduction en contexte d’apprentissage, ainsi que les défis posés par cette nouvelle pratique pour l’enseignement de la traduction», résume-t-elle.
Après avoir mené des expériences contrôlées de traduction de l’anglais vers le français avec des étudiants et étudiantes, Perrine Schumacher a observé un effet nivelant sur la qualité en post-édition. Ainsi, les élèves dont le niveau est plutôt faible en traduction humaine bénéficient davantage de la post-édition, tandis que ceux qui ont de bonnes compétences en traduction humaine produisent des traductions de moindre qualité en utilisant l’aide d’une intelligence artificielle.
Pour elle, aucune crainte de se voir remplacer par la machine de sitôt. Dans ses expériences, les productions humaines se sont révélées plus riches lexicalement et moins proches syntaxiquement des textes sources que les post-éditions. «L’humain demeure au cœur du processus de traduction. Il est essentiel de le savoir et d’en faire prendre conscience», conclut-elle.
Une autre lauréate des prix Latsis universitaires 2024 est Miriam Buiten, professeure de droit et d’économie à l’Université de Saint-Gall, dont les recherches portent sur les défis réglementaires suscités par les plateformes en ligne telles que Facebook, Google, YouTube, TikTok ou Amazon. Elle explore la manière dont la législation devrait façonner leur rôle et leur influence sur la société. Son approche interdisciplinaire plaide en faveur d’une réglementation plus stricte.
Leurs consœurs Yiwen Chu, professeure au Département de physique de l’EPFZ, et Giulia Tagliabue, professeure en génie mécanique à l’EPFL, se sont respectivement intéressées aux propriétés mécaniques quantiques pour le développement des technologies quantiques de demain et aux possibilités offertes par la nanophotonique, soit l’étude de la lumière et de ses interactions avec la matière à des échelles nanométriques, pour produire de l’énergie.
Nos identités, multiples et complexes
Toutes seront honorées jeudi 17 octobre, dans le bâtiment d’Uni Dufour. À cette occasion, un orateur de renom fera le déplacement depuis les États-Unis: Kwame Anthony Appiah, professeur de philosophie à l’Université de New York. «Chaque année, les membres du conseil de la Fondation choisissent un orateur ou une oratrice dont les propos sont jugés pertinents et originaux, peu importe son domaine d’expertise, pour animer une conférence», précise la secrétaire Eva-Maria Martin. Celle-ci est accessible gratuitement et sans inscription, dans la limite des places disponibles. Elle sera animée en anglais.
Pour cette édition, Kwame Anthony Appiah mettra en lumière nos identités multiples, qu’elles soient héritées, innées ou construites et se demandera en quoi elles nous aident à vivre en société ou, au contraire, nous freinent. Le concept d’identité est plutôt récent. «Je pensais que je trouverais des réflexions dans des textes anciens, mais les philosophes et sociologues n’ont réellement creusé ce sujet qu’au XXe siècle», dit-il.
L’identité est une superposition de concepts qui comprend la langue, la race, la religion, les opinions politiques, la situation financière, la nationalité, etc. «Je travaille sur la notion d’identité depuis des décennies et je ne me questionne plus sur «qui je suis» en tant qu’individu, mais sur comment je suis reconnu et accepté par l’autre, ou non», détaille l’auteur de plusieurs ouvrages sur ce sujet.
Ce New-Yorkais de 70 ans est né d’un père ghanéen et d’une mère anglaise. Racisé, il a été élevé dans la religion chrétienne auprès de cousins musulmans et juifs. Il est homosexuel et a eu le privilège de passer la majorité de sa vie dans le milieu universitaire. «Tous ces éléments sont importants et ont construit qui je suis, mais je me suis vite aperçu qu’ils importaient encore plus aux autres pour m’identifier», pointe-t-il.
Kwame Anthony Appiah espère qu’à la fin de sa conférence, les auditeurs et auditrices sauront davantage percevoir ce qui les rapproche les un-es des autres plutôt que ce qui les éloigne.