10 juin 2021 - Jacques Erard

 

Événements

Avraham Burg présente sa solution fédéraliste au conflit israélo-palestinien

Ancien président de la Knesset, le Parlement israélien, Avraham Burg donnera une conférence le 22 juin à l’invitation du Global Studies Institute de l’UNIGE (GSI). Il y présentera ses idées sur le fédéralisme dans la perspective israélienne.

 

Avrum-J.jpg

Avraham Burg. Photo: Keystone/AP Photo /Geert Vanden Vinjgaert

 

Rien ne le prédisposait à soutenir des positions insolites, si ce n’est son opiniâtreté à défendre une vision laïque de l’État d’Israël. Né en 1955 au sein d’une famille aristocratique proche du mouvement religieux sioniste, Avraham Burg commence sa carrière politique dans les années 1980 en tant que conseiller du premier ministre Shimon Peres, avant d’être élu à la Knesset sur une liste du Parti travailliste. En 1995, il prend les rênes de l’Agence juive, une organisation sioniste chargée de l’immigration juive en Israël, puis retourne au Parlement dont il assume la présidence de 1999 à 2003. Il occupera à ce titre la fonction de président ad interim de l’État hébreu en 2000.

 

S’il fait aujourd’hui figure de franc-tireur dans le paysage politique israélien, c’est donc essentiellement parce que ses convictions sur la nécessité d’une paix avec les Palestinien-nes, fondée sur l’équité et le principe de laïcité, ont été marginalisées sous la poussée de la droite religieuse qui considère Israël comme l’État-nation du peuple juif. Cette notion, entérinée sous forme de loi en juillet 2018 par la Knesset, a d’ailleurs incité Avraham Burg à entamer des démarches en vue d’être démis de sa «nationalité juive», telle qu’elle est définie dans ce texte. «Cette loi touche à mon identité existentielle, or je ne peux plus en mon âme et conscience me reconnaître comme membre d’une nation qui implique d’appartenir à un groupe dominateur, expliquait-il dans les colonnes du quotidien israélien Haaretz en janvier dernier. La signification de cette loi est qu’un citoyen israélien non juif se verra assigner un statut inférieur, similaire à celui dont ont souffert d’innombrables générations de juifs.»

À l’instar de nombreux commentateurs politiques et d’une partie de plus en plus importante de l’électorat israélien, Avraham Burg estime que la solution à deux États est aujourd’hui morte. À cela deux principales raisons. D’une part, le processus de colonisation à l’œuvre sous les mandats du premier ministre Benyamin Netanyahou ont rendu la viabilité d’un État palestinien pratiquement impossible. D’autre part, cette solution ne ferait qu’entériner une vision religieuse et exclusive d’Israël, ce qu’il estime contraire aux aspirations des fondateurs de l’État hébreu.

La seule manière, selon lui, de contrer cette tendance au sein de la société israélienne – et le risque qu’Israël soit perçu comme un État ségrégationniste – est donc d’envisager une solution à un seul État sous une forme fédérale, laissant une large autonomie aux deux entités, israélienne et palestinienne. C’est cette thèse qu’il présentera lors de sa conférence organisée par le Global Studies Institute de l’UNIGE (GSI).

 

Le modèle suisse, source d'inspiration?

Chercheur au GSI et directeur du Bachelor en relations internationales, Frédéric Esposito estime que le modèle fédéraliste suisse, dans sa version antérieure à 1848, pourrait être une source d’inspiration à défaut d’être un exemple: «Dans cette configuration, des entités avec des compétences fortes, comme l’armée et la fiscalité, cohabiteraient sous la tutelle d’un seul État souverain. Cela permettrait de mutualiser certaines compétences, tout en accordant une large autonomie à des cantons. Cette solution offrirait aussi l’avantage de contourner le problème de la division de Jérusalem qui resterait unie en tant que capitale fédérale.»

Ce modèle à un État demeure toutefois très périphérique dans le débat politique israélien. Avraham Burg adopte la position du sage qui essaie de réfléchir hors de l’équation et des rapports de force habituels. Et cette position d’outsider n’est pas pour le déranger: «L’occupation dure depuis cinquante-trois ans. On peut bien s’accorder un autre demi-siècle pour parvenir à une relation viable entre les deux parties.»

«The Federal Idea in the Israeli Perspective»
Conférence d'Avraham Burg
Mardi 22 juin | 18h30 | Événement en ligne sur inscription


Événements