Le mercure perturbe les gènes des algues vertes
Même à de faibles doses, le mercure perturbe le métabolisme et le fonctionnement des gènes des tout premiers micro-organismes aquatiques qui le prélèvent de l’environnement et l’absorbent. C’est ce qui ressort d’une recherche parue le 14 août dans la revue Scientific Reports et réalisée par l’équipe de Vera Slaveykova, professeure au Département F.-A. Forel des sciences de l’environnement et de l’eau (Faculté des sciences).
Menée sur des microalgues vertes de l’espèce Chlamydomonas reinhardtii, l’étude montre que le méthylmercure (la forme «organique» du mercure, beaucoup plus biocompatible que l’élément isolé) affecte spécifiquement le fonctionnement de près de 5500 gènes. Cette algue verte est une représentante des producteurs primaires du cycle aquatique, tout en bas de la chaîne alimentaire. Son génome, qui compte environ 15 000 gènes, a été entièrement séquencé.
Les chercheuses ont soumis ces organismes à des doses modestes de mercure et de méthylmercure, proches des normes environnementales européennes. Elles ont ensuite analysé le transcriptome de Chlamydomonas reinhardtii, c’est-à-dire l’ensemble de son ARN qui est à la fois le produit et le pilote de l’expression des gènes.
Ce polluant est associé à des effets néfastes sur l’écosystème et la santé humaine, en particulier le système nerveux
Il en ressort que le mercure perturbe des gènes impliqués dans les processus cellulaires tels que le métabolisme énergétique, le transport d’éléments essentiels à la vie tels que le zinc, le fer ou le cuivre, la photosynthèse ou encore les réactions de réduction-oxydation. Des gènes jouant un rôle dans la motilité (Chlamydomonas reinhardtii possède deux flagelles pour se mouvoir), la nutrition et le métabolisme des acides aminés sont eux aussi dérégulés par la présence de l’élément métallique, même à de faibles doses.
Contrairement à la réponse génétique forte de l’algue verte, la réponse physiologique mesurée par les chercheuses est, en général, nettement moins prononcée. Cette observation suggère que le micro-organisme est capable de gérer les doses de mercure qui lui ont été soumises, du moins sur une brève période de temps.
Plus de la moitié du mercure présent dans la nature provient de l’activité humaine. Ce polluant est associé à des effets néfastes sur l’écosystème et la santé humaine, en particulier le système nerveux, comme l’a montré la contamination massive au mercure des pêcheurs de Minamata au Japon dans la première moitié du XXe siècle. Des études récentes ont également montré l’existence possible d’effets de l’exposition à de faibles doses de mercure sur la croissance du fœtus et de l’enfant durant ses deux premières années.