Un franc investi dans la prévention permet d’économiser 40 fois plus
Le tabagisme reste le problème majeur de santé publique à Genève, selon Jacques-André Romand, le médecin cantonal, dont le service rassemble les activités de prévention et de promotion dans ce domaine
A Genève, la quantité de fumeurs adultes se situe dans la moyenne nationale, soit environ 27 à 28% de la population. Ce sont principalement les jeunes qui commencent à fumer et les plus âgés qui arrêtent. Et, comme pour l’obésité, plus le niveau d’éducation est faible, plus le nombre de fumeurs augmente.
«Le tabagisme reste le problème majeur de santé publique à Genève. Il est d’ailleurs le principal pourvoyeur de maladies pulmonaires et de cancers», constate Jacques-André Romand, le médecin cantonal, également professeur titulaire au Département de santé et médecine communautaires (Faculté de médecine). Et pourtant, le canton figure parmi les pionniers du combat antitabac.
Premier en Suisse à éliminer la publicité pour les cigarettes sur les panneaux d’affichage publics, il a aussi banni la publicité pour le tabac au cinéma et introduit, bien avant la Confédération, l’interdiction de fumer dans les lieux publics.
Jacques-André Romand, qui dirige le Service du médecin cantonal, est responsable des questions médicales concernant la santé publique. Son service rassemble notamment les activités de prévention et de promotion dans ce domaine. Concernant le tabac, la politique menée à Genève poursuit trois objectifs: diminuer l’initiation au tabagisme des jeunes, protéger la population de l’exposition passive à la fumée et promouvoir le sevrage d’un maximum de fumeurs.
Protéger les jeunes
Comme le tabac tue la moitié de ses consommateurs, les cigarettiers doivent constamment trouver de nouveaux consommateurs. Pour éviter que les jeunes ne commencent à fumer, les efforts en matière de prévention visent à écorner l’image du fumeur: «Les campagnes de sensibilisation ont, petit à petit, contribué à changer la norme. Selon certains experts, fumer n’est plus considéré comme remarquable par les jeunes, observe Fabienne Sastre Duret, conseillère scientifique au Service du médecin cantonal. Nous cherchons aussi, avec nos partenaires, à développer des outils pertinents pour toucher les jeunes, comme la diffusion de films sur YouTube ou des campagnes Facebook.»
Légiférer
Concernant la fumée passive, l’interdiction de fumer dans les lieux publics a déjà montré ses effets. Une évaluation de l’impact sur la santé de la nouvelle loi a été réalisée 14 mois après son entrée en vigueur. L’étude a démontré que cette interdiction est associée à une diminution de 7% des hospitalisations pour syndrome coronarien aigu et à une réduction de 19% des hospitalisations pour broncho-pneumopathie obstructive chronique et pneumonie. Ainsi, l’étude estime que l’interdiction permet d’éviter plus de 1800 journées d’hospitalisation par an.
Aider au sevrage
Pour aider les fumeurs à arrêter, un lieu de parole et d’écoute a été mis en place – «Les mardis du CIPRET» – qui propose soutien, conseil et orientation. Des actions spécifiques sont aussi réalisées auprès des populations vulnérables, comme les détenus ou les communautés migrantes, au sein desquelles les habitudes de consommation ne sont pas les mêmes.
Pour Jacques-André Romand, «la lutte contre le tabagisme, c’est David contre Goliath. Il est difficile de contrer le marketing très inventif de l’industrie du tabac. Une étude de l’UNINE a montré que les coûts liés au tabagisme s’élèvent à 10 milliards de francs par an en Suisse, pour des bénéfices trois fois moindres. Malgré cela, le système est toujours orienté «soin», alors qu’un franc investi dans la prévention du tabagisme permet à la société d’en épargner 40 fois plus. Il faudrait donc développer les activités dans ce domaine.»
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