«Plus que le réalisme, c’est le message véhiculé qui importe»
Les artistes de la période baroque avaient de l’Antiquité une connaissance très lacunaire. «Les découvertes d’art antique au XVIIe siècle se limitaient, à quelques exceptions près, à Rome, relève Lorenz Baumer, professeur au Département des sciences de l’Antiquité. Pompéi et Herculanum, qui ont livré de nombreuses fresques romaines, des œuvres d’art et un vaste matériel archéologique lié à la vie quotidienne, n’ont été trouvées qu’au début du XVIIIe siècle.» Quant à la Grèce antique, elle est pratiquement inexistante dans les représentations de l’âge baroque, les premières fouilles archéologiques en Grèce et en Asie mineure datant de la fin du XIXe siècle.
Mis à part les moulages et les gravures, qui ont joué un rôle central pour la diffusion des modèles antiques, l’essentiel des sources étaient par conséquent littéraires. Mais comment traduire en images des récits antiques qui laissaient une large place à l’imaginaire? Quelle forme avait la tente de Scipion l’Africain, et quels habits portaient les Carthaginois? Pour les artistes du XVIIe siècle, ces questions renvoient essentiellement à des préoccupations d’ordre esthétique et moral: «Plus qu’au réalisme, on s’intéresse au message véhiculé par tel ou tel épisode héroïque et à sa traduction dans le contexte du XVIIe, explique Lorenz Baumer. Constantin est glorifié pour son ralliement au christianisme, au moment où l’Eglise catholique cherche à contrer les élans réformateurs, Scipion l’Africain sert de modèle de courage et de magnanimité, dans le but d’illustrer ce que doit être un bon roi et un bon général. Ce sont là les véritables questions qui guident les artistes dans leur création.»
L’époque classique n’affichait pas pour autant un total désintérêt pour les témoignages de l’Antiquité. Dès le XVIe siècle, alors que d’importants travaux d’urbanisme ont lieu à Rome, le Saint-Siège ordonne ainsi de protéger les monuments et les vestiges antiques. De nombreuses collections commencent dès lors à voir le jour, comme celle des Farnèse ou des Médicis en Italie. «En France, François Ier développe un intérêt particulier pour la sculpture antique. D’une part, pour enrichir les collections royales, assez faibles dans ce prestigieux domaine, d’autre part, pour décorer le château de Fontainebleau», ajoute Lorenz Baumer.
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