Le cerveau est capable de couper l’envie de se venger
Dans un article publié le 12 juillet par la revue Scientific Reports, Olga Klimecki-Lenz, chercheuse au Centre interfacultaire des sciences affectives (CISA), et ses collègues ont réussi à mettre en évidence les aires cérébrales activées sous le coup de l’injustice et de la colère ainsi que celle impliquée dans le désir de vengeance. Cette dernière a été localisée dans le cortex dorsolatéral préfrontal (DLPFC). Plus elle est activée chez un individu au moment où il subit des provocations, moins celui-ci aura tendance à se venger par la suite. Pour parvenir à un tel résultat, Olga Klimecki-Lenz a mis au point un jeu économique spécial, l’Inequality Game, capable de déclencher chez les joueurs le sentiment d’injustice, puis de colère avant d’offrir la possibilité de se venger.
Vingt-cinq volontaires ont participé à l’expérience. Chacun d’entre eux interagit avec deux autres joueurs qui, sans qu’il le sache, obéissent à un logiciel informatique. L’un de ces joueurs factices est aimable, ne propose que des interactions financières profitables pour tous et envoie des messages sympathiques. L’autre fait en sorte de multiplier ses propres gains, de léser le participant et de lui envoyer des messages agaçants.
Durant la partie, le volontaire est installé dans un appareil d’imagerie par résonance magnétique (IRM) afin de mesurer son activité cérébrale. Il n’est confronté qu’aux photographies des autres joueurs et à leurs messages et transactions financières. Au début, c’est lui qui est aux commandes et choisit quels gains il distribue à qui.
Dans une deuxième phase, le joueur subit les décisions des deux autres et les provocations et injustices du «méchant». Celles-ci induisent un sentiment de colère évalué sur une échelle allant de 0 à 10. L’émotion est visualisée par l’IRM sous la forme d’une activité du lobe temporal supérieur ainsi que de l’amygdale, connue pour son rôle dans le sentiment de peur et dans la pertinence des émotions. Plus le degré de colère est élevé, plus l’activité des deux zones est forte.
Maître du jeu
Lors de la dernière phase, le participant redevient maître du jeu et peut choisir de se venger en pénalisant les deux autres joueurs. La plupart d’entre eux ont choisi de faire payer son comportement à l’adversaire injuste. Onze d’entre eux ont décidé de n’en rien faire.
D’après les mesures de l’IRM, plus l’activité du DLPFC est importante durant la phase de provocation, moins l’état de vengeance perdure et est violent. Au contraire, une faible activité du DLPFC est liée à une vengeance plus prononcée. Les auteurs observent également que le DLPFC est coordonné avec le cortex moteur qui dirige la main faisant le choix du comportement vengeur. Selon eux, il y a donc une corrélation directe entre l’activité du DLPFC, connu pour la régulation émotionnelle, et le comportement envers le joueur injuste. Ce qui les amène à l’hypothèse, qui reste encore à vérifier, selon laquelle une augmentation de l’activité du DLPFC, par une stimulation transmagnétique, permettrait de diminuer les actes de vengeance, voire de les supprimer. —