Journal n°153

De nouveaux outils pour stimuler la démocratie

image-2.jpgLe canton de Genève connaît le taux le plus élevé de résidents étrangers de Suisse avec 41% de la population. 59% d’entre eux vivent depuis au moins huit ans dans le pays et possèdent le droit de vote au niveau communal. Dans les faits, ce droit est peu utilisé et pour les 41% restant il est inexistant. Cette situation interpelle le Bureau cantonal de l’intégration des étrangers (BIE) qui, dans une perspective de vivre-ensemble, souhaite favoriser la participation politique non-conventionnelle, c’est-à-dire qui ne requiert pas de droits politiques. Un mandat d’une année a été donné à l’Institut d’études de la citoyenneté (SdS) pour mener une réflexion sur la mise en place d’un dispositif allant dans ce sens. Le BIE s’engageant ensuite à l’appliquer, en commençant par une phase pilote en ville de Vernier.

Dès février 2017, un travail de documentation théorique autour de l’idée d’un forum délibératif et des prérequis nécessaires a été mené par le professeur Matteo Gianni, avec l’aide de deux doctorants, Victor Sanchez-Mazas et Sarah Fiorelli. Les résultats de cette réflexion, publiés sous forme de rapport, rassemblent plusieurs propositions. Liberté sera ensuite laissée aux communes de retenir celles qui leur semblent les mieux adaptées.
Point de départ de la réflexion:  «si elles veulent stimuler la participation, les autorités doivent avancer des raisons légitimes et morales qui expliquent pourquoi il est bien de participer», expose Matteo Gianni. Les chercheurs ont alors inversé les propositions et considéré le dispositif comme un vecteur d’intégration culturelle et sociale.

L’ensemble du processus devrait permettre de dynamiser la vie politique et de renforcer la cohésion sociale

«Une fois cette approche définie, il nous a semblé essentiel d’inclure les citoyens au processus, car nous ne pouvons pas demander à un groupe de s’intégrer tout seul», poursuit le professeur Gianni. Il insiste également sur l’aspect délibératif du forum. En échangeant, les participants seront amenés à dépasser leur propre intérêt pour prendre des décisions dans l’intérêt de la collectivité. Des formations à la délibération ou des cours de langues devraient être envisagés pour assurer la qualité des débats. Les thèmes seraient proposés par un forum constitutif ou suggérés par la municipalité. Quant à la composition du groupe, de quinze à vingt personnes, elle dépendrait du sujet et devrait inclure des personnes affectées par les décisions.

De l’avis des chercheurs, la municipalité devrait aussi s’engager à tenir compte des recommandations du forum. Enfin, la mise en place d’une carte municipale, qui développerait le sentiment d’appartenance, pourrait être une source complémentaire de motivation. Pour le responsable du projet, l’ensemble du processus devrait permettre de dynamiser la vie politique et de renforcer la cohésion sociale.

La mise en œuvre d’un projet pilote à Vernier commencera début 2019 par une séance d’information. Une assemblée constitutive aura lieu avant l’été et les forums sélectionnés seront agendés à sa suite. Cette phase pilote devrait durer jusqu’en juin 2021. «Il est rare qu’une démarche théorique puisse faire l’objet d’une application», se réjouit Matteo Gianni. —