Journal n°162

Le talent naturel du dragon dans l’art de plier sa collerette

image-4.jpgLe lézard à collerette, ou Chlamydosaurus kingii, doit son nom à un large disque de peau qui repose autour de sa tête et de son cou. L’animal, qui vit dans le nord de l’Australie et au sud de la Nouvelle-Guinée, se sert de cet ornement, qu’il peut déplier subitement, pour effrayer prédateurs et concurrents. Dans un article paru  le 25 juin dans la revue eLife, l’équipe de Michel Milinkovitch, professeur au Département de génétique et évolution (Faculté des sciences) et chef de groupe à l’Institut suisse de bioinformatique, montre que la collerette du dragon ainsi que les os et cartilages qui la soutiennent se développent dans l’œuf à partir des arcs branchiaux. Ces derniers sont une série de bandes de tissu qui, chez les poissons, produisent les supports branchiaux. Chez les vertébrés terrestres, la deuxième arcade branchiale fusionne avec les arcades suivantes et donne naissance à de nombreuses structures situées dans l’oreille et le cou. Dans le cas du dragon, en revanche, cet arc continue de s’étendre, conduisant à la formation de sa collerette. Une forme de recyclage, en somme, d’anciennes structures pour en fabriquer de nouvelles ayant des fonctions totalement différentes.

Les auteurs de l’étude ont aussi mis en évidence que le pliage de cette collerette est le résultat de forces physiques plutôt que d’un programme génétique. Au fur et à mesure que la collerette se développe, la face antérieure de la peau forme en effet trois plis successifs. Les chercheurs montrent que les crêtes et les vallées qui y sont associées ne sont pas issues d’une multiplication cellulaire accrue à ces endroits-là mais au fait que la croissance de la collerette est limitée par son attache au cou. La couche supérieure finit alors par onduler, créant les plis.

Le processus a été simulé dans un modèle informatique qui a permis de recréer virtuellement la manière dont le pliage se développe chez les embryons de lézards.