20 octobre 2022 - Anton Vos

 

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Les «maisons des dragons» d’Eubée sont des vestiges de l’Antiquité

Des fouilles en Grèce ont permis de dater pour la première fois les «drakóspita», de mystérieuses et imposantes bâtisses qui, selon la légende, auraient été érigées dans les montagnes par des «dragons».

 

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Vue de l'intérieur de la maison des dragons de Palli Lakka, situé sur l'île d'Eubée, en Grèce. Image: DR

 

On en trouve sept éparpillées sur les flancs de la montagne, dans le sud de l’île grecque d’Eubée, construites avec des blocs de taille monumentale et couvertes d’une toiture en encorbellement. Ce sont les «maisons des dragons», ou drakóspita, des bâtisses impressionnantes et dont les habitant-es de la région prétendent qu’elles ont été érigées il y a fort longtemps par des «dragons», c’est-à-dire des géants anthropomorphiques à la force surnaturelle. Que les bâtisseurs soient des êtres mythologiques reste à prouver. En revanche, leur ancienneté ne fait désormais plus de doute. Une équipe de l’École suisse d’archéologie en Grèce (ESAG), dont font partie des étudiant-es de l’Université de Genève, a en effet, pour la première fois, pu dater ces vestiges, faisant remonter leur construction à l’Antiquité, selon une communication de l’ESAG publiée le 9 septembre.

 

 

Si les maisons des dragons ont depuis longtemps éveillé la curiosité des archéologues, leur usage est encore entouré d’un épais mystère. Jusqu’à récemment, aucun élément permettant d’appréhender leur origine, leur datation et leurs fonctions n’a pu être mis au jour. Les hypothèses foisonnent donc, entre espaces cultuels, observatoires, tours de guet, maisons de carriers ou encore simples bergeries.

Avancée majeure
Pour en savoir plus et mieux connaître le plan et le mode de construction de ces édifices, les archéologues de l’UNIGE et de l’UNIL, dirigé-es par Angeliki Simosi, directrice de l’Éphorie (circonscription archéologique) des antiquités d’Eubée, et Karl Reber, professeur honoraire à l’Université de Lausanne et à l’ESAG, ont réalisé des sondages dans le drakospito de Palli Lakka, situé au sud de la localité de Styra. La récolte de matériel durant cette opération, dont des tessons de céramique, a permis de faire remonter la datation du monument à l’Antiquité. Malgré cette précision chronologique, qualifiée d’«avancée majeure», la fonction de l’édifice demeure mystérieuse. Réemployée notamment comme bergerie, cette structure s’est prêtée à divers usages pendant près de deux millénaires, ce qui empêche encore les archéologues de percer le mystère de sa fonction originelle.
On connaît aujourd’hui, dans la région de Styra, sept édifices qui correspondent aux critères des drakóspita, à savoir notamment la présence de blocs de taille monumentale et d’un toit à encorbellement (dont les pierres sont positionnées en porte-à-faux les unes par rapport aux autres et permettent de construire une sorte de voûte). Outre les travaux à Palli Lakka, les archéologues ont commencé à documenter ceux de Loumithel, de Kroi-Phtocht, d’Ilkizès et de Makkou. Des relevés topographiques et photogrammétriques ont permis de réaliser des modèles en 3D de ces maisons. À terme, les travaux menés par l’équipe gréco-suisse visent aussi à mettre en valeur ces monuments, qui comptent parmi les plus visités de la région, en proposant des informations à destination des touristes.

 

 

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