1er septembre 2022 - UNIGE

 

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Un petit sucre révèle le diabète avant les premiers symptômes

Un faible taux d’une molécule dans le sang permet de déterminer si un diabète est en cours de développement. Une découverte qui ouvre les portes à un diagnostic de la maladie avant l’apparition des premiers symptômes.

 

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Légende: Lorsque le diabète commence à se développer mais qu’aucun symptôme n’est encore décelable, une partie des cellules bêta du pancréas (en vert) disparaît (image de droite) en comparaison d’un individu sain (image de gauche). Cette diminution jusque-là impossible à détecter avec des examens non invasifs pourrait être repérée en mesurant le taux de 1,5-anhydroglucitol dans le sang. Image: UNIGE

 

Un faible taux dans le sang du 1,5-anhydroglucitol, une molécule de sucre de petite taille, est associé à une perte de cellules bêta du pancréas, celles-là mêmes qui produisent l’insuline et dont la destruction ou le dysfonctionnement provoque le diabète. La mesure de ce composé, facile à identifier par prise de sang, permettrait ainsi de repérer chez les personnes à risque la maladie alors qu’elle est encore en cours de développement et avant que la situation ne soit irréversible, selon un article paru le 22 juillet dans le Journal of Clinical Endocrinology & Metabolism. Ces résultats, obtenus par Pierre Maechler, professeur au Département de physiologie cellulaire et métabolisme et au Centre facultaire du diabète (Faculté de médecine), et ses collègues ouvrent de nouvelles pistes pour la prévention de ce trouble métabolique qui touche près de 500 000 personnes en Suisse.

 

Le diabète est en effet une maladie sévère en constante augmentation sous l’effet conjoint d’un manque d’activité physique et d’une alimentation déséquilibrée. Si elle est repérée en amont, son évolution vers un diabète établi peut être contrecarrée en adoptant une hygiène de vie appropriée. Au moment du diagnostic, un tiers de la patientèle présente cependant déjà des complications cardiovasculaires, rénales ou neuronales et voit ainsi son espérance de vie altérée.

 

Stratégie alternative

«Identifier le basculement du prédiabète vers un diabète est complexe, estime Pierre Maechler. Il est en effet impossible d’évaluer quantitativement par des examens non invasifs l’état des cellules bêta qui sont dispersées en très petites quantités au cœur du pancréas, un organe situé sous le foie. C’est pourquoi nous avons opté, il y a plusieurs années déjà, pour une stratégie alternative consistant à trouver une molécule dont le taux dans le sang serait lié à la masse fonctionnelle de ces cellules bêta afin de détecter indirectement leur altération avant l’apparition de tout symptôme.»
Dans un premier temps, les scientifiques ont passé au crible des milliers de molécules chez des souris saines, prédiabétiques et diabétiques à l’aide de méthodes de biologie moléculaire et d’un système d’apprentissage automatique (intelligence artificielle). Ils ont ainsi pu identifier le 1,5-anhydroglucitol comme étant le plus à même de détecter une perte de cellules bêta au stade prédiabétique.
Passant de l’animal à l’humain, l’équipe a ensuite comparé les taux de 1,5-anhydroglucitol de personnes diabétiques et non diabétiques et trouvé des valeurs plus basses chez les premières que chez les secondes. Une diminution observable quels que soient les symptômes et même avant l’apparition d’un diabète.

 

Indicateur fiable

Enfin, le diabète étant une maladie complexe dans laquelle de nombreux changements métaboliques entrent en jeu en parallèle, il a également fallu tester la pertinence de ce marqueur chez des personnes qui subiraient une perte brutale de leurs cellules bêta sans trouble métabolique. «C’est en étudiant le taux de 1,5-anhydroglucitol chez des individus dont la moitié du pancréas a été chirurgicalement supprimée que nous avons pu véritablement démontrer qu’il est un indicateur sanguin fiable de la quantité fonctionnelle des cellules bêta du pancréas», précise Cecilia Jiménez-Sánchez, postdoctorante au Département de physiologie cellulaire et métabolisme et première auteure de l’étude.
Cette découverte ouvre de nouvelles pistes pour la prévention du diabète, en particulier chez les personnes à risque. Une simple prise de sang suivie d’un test spécifique peu onéreux permettrait en effet d’identifier chez elles un potentiel diabète en cours de développement et de prendre des mesures avant que la situation ne soit irréversible. Les scientifiques prévoient encore de tester la pertinence du 1,5-anhydroglucitol chez différents types de patients et de patientes et à différentes échelles de temps.

 

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