13 mars 2025 - UNIGE

 

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Les cinquante jours qui peuvent sauver du cancer du foie

Dans le cadre du traitement du carcinome hépatocellulaire, une étude a déterminé l’intervalle optimal séparant l’arrêt de l’immunothérapie et la transplantation du foie. Celui-ci permet de réduire le risque de rejet et d’améliorer la survie.

 

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Représentation de cellules cancéreuses du foie attaquées par une immunothérapie. Image: AdobeStock

 

Le carcinome hépatocellulaire représente la troisième cause de décès par cancer dans le monde et la cinquième en Suisse. Le traitement actuel consiste en une immunothérapie dite par «inhibiteurs de points de contrôle immunitaires» suivie d’une transplantation du foie. Leur combinaison pourrait même s’assortir d’une rémission totale pour les personnes éligibles si ce n’est que l’immunothérapie entraîne souvent une augmentation du taux de rejets du greffon. Dans un article paru dans la revue Hepatology, Beat Moeckli, chef de clinique scientifique au Département de chirurgie (Faculté de médecine) et médecin-chef de clinique au Service de chirurgie viscérale des Hôpitaux universitaires de Genève, et ses collègues démontrent qu’un intervalle d’au moins cinquante jours entre l’arrêt de l’immunothérapie et la transplantation de l’organe hépatique réduit significativement ce risque.

 

L’immunothérapie par inhibiteurs de points de contrôle immunitaires stimule le système de défense des patients et patientes afin qu’il attaque les cellules cancéreuses. Les résultats prometteurs de cette approche en ont fait la première ligne thérapeutique contre le carcinome hépatocellulaire avancé. Le problème, c’est que l’arrêt du traitement peut entraîner une récidive du cancer. 


Une solution potentielle consiste à combiner ce traitement avec une transplantation du foie, en vue de débarrasser les patient-es à la fois de leur cancer et des maladies sous-jacentes. Mais cette stratégie se heurte à son tour à un obstacle. L’immunothérapie amène en effet le système immunitaire à reconnaître et à combattre avec plus d’efficacité les corps étrangers, c’est-à-dire non seulement les tumeurs, ce qui est recherché, mais aussi les greffons, ce qui n’est pas souhaitable. Le traitement expose donc les malades à un risque accru de rejet rapide de l’organe greffé.


Pour enrayer cet aléa, il convient donc d’arrêter l’immunothérapie avant la greffe. Encore faut-il déterminer la fenêtre thérapeutique optimale, c’est-à-dire l’intervalle entre les deux opérations. Pour ce faire, les scientifiques ont mené une étude rétrospective impliquant 119 personnes atteintes d’un carcinome hépatocellulaire ayant reçu une immunothérapie avant transplantation hépatique dans 29 centres hospitaliers en Europe, en Asie et en Amérique. L’analyse des données a permis d’évaluer l’incidence du rejet de la greffe, la perte du greffon et la récidive post-transplantation.


Il en ressort que plus l’intervalle entre la dernière prise d’immunothérapie et la greffe est court, plus le risque de rejet est élevé. Un intervalle inférieur à trente jours multiplie le risque de rejet par 21,3. Entre trente et cinquante jours, ce chiffre chute à 9,54. En revanche, un intervalle supérieur à cinquante jours est associé à un taux de rejets nettement réduit. Ce délai est également une limite supérieure puisqu’attendre plus longtemps comporte le risque de voir le cancer progresser de nouveau. Ces résultats vont permettre d’établir de futures recommandations officielles.


Le carcinome hépatocellulaire représente environ 80 à 90% des cas de cancer primaire du foie. À l’échelle mondiale, 905’700 nouveaux cas et 830’200 décès ont été enregistrés en 2020 tandis qu’en Suisse, on répertorie 960 nouveaux cas et 720 décès chaque année.

 

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