19 octobre 2023 - Rachel Richterich

 

Vie de l'UNIGE

Sur les traces des enfants de la migration

Le projet poliScope de la Faculté des sciences de la société inaugure une nouvelle plateforme de vulgarisation illustrée, consacrée à la migration pour et par les enfants.

 

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Le nouveau module du poliScope, spécifiquement développé pour un très jeune public, est accessible aux écoliers dès la 7P. Image: poliScope


Le bruit des bombardements résonne encore dans l’esprit de Daryia quand elle raconte comment elle a fui son pays natal, l’Ukraine, avec ses parents. Parti-es de Syrie, Hana et Issam se souviennent, quant à eux, de leur traversée de la Méditerranée vers un monde inconnu. Il y a aussi ce jeune garçon qui tait son nom, car arrivé clandestinement en Suisse avec sa famille et qui vit son quotidien dans le secret. Ces récits côtoient ceux d’Anna et de Luka, enfants de travailleurs/euses expatrié-es confronté-es à d’autres difficultés d’intégration ou celui de Flavio, issu de la troisième génération d’immigré-es italien-nes.


Ces cinq histoires à première vue très différentes ont en commun de raconter des trajectoires d’enfants migrant-es. Elles sont au cœur du nouveau module de vulgarisation scientifique de la plateforme poliScope de la Faculté des sciences de la société, qui ambitionne de créer un lien entre la Cité – polis en grec – et le monde académique. «La question de la migration concerne beaucoup d’enfants à Genève. On estime que sur une classe de 20 élèves, cinq au moins sont concerné-es par l’une des cinq situations abordées dans ce module», indique Jiri Benovsky, collaborateur scientifique et coordinateur du projet. L’objectif de ce dernier, financé par le Fonds national suisse (FNS), est double. Il s’agit, d’une part, de parler aux plus jeunes des problématiques et des enjeux liés à la migration. Et, d’autre part, de communiquer sur les recherches menées au sein de la Faculté. Il rejoint en cela l’ensemble des modules proposés par le poliScope. Tous ces projets étaient conçus jusqu’à présent sous forme de jeux de rôle et de simulations de débats modérés par un-e chercheur/euse de la Faculté pour un public plus âgé, à savoir des jeunes du cycle d’orientation et du collège, s’insérant dans les plans d’études de géographie. 

 

Effet «animé»

Intitulé «Bandes défilées», ce nouveau module spécifiquement développé pour un très jeune public est accessible aux écoliers dès la 7P. Il s’inspire de la bande dessinée en combinant récit et illustrations. Les élèves – tout comme le grand public – peuvent faire défiler ces histoires sur l’installation multimédia mise à disposition à Uni Mail (sur inscription, 4e étage, salle poliScope n° 4383) ou sur un ordinateur – à condition d’avoir une connexion et un appareil suffisamment puissants. «Nous avons utilisé une technologie de superposition de calques innovante qui rend la navigation très vivante», se réjouit Jiri Benovsky.

Pour sa réalisation, l’équipe du poliScope s’est appuyée sur les travaux du professeur Philippe Wanner, spécialiste des questions de démographie en Suisse (voir encadré). Deux de ses assistant-es ont participé à la rédaction ainsi que deux enseignantes venues du primaire et du post-obligatoire.

Les récits ont ensuite été «traduits» en images par des dessinateurs/trices de la région genevoise, avec la participation d’un graphiste-scénographe. «Les dessins ont tous été faits à la main puis découpés et traités par un logiciel, ce qui leur donne de la profondeur et un effet animé, même s’ils ne le sont pas», se réjouit Jiri Benovsky.

L’inauguration officielle du module Bandes défilées aura lieu le 2 novembre dans le hall central d’Uni Mail en présence de la nouvelle cheffe du Département de l’instruction publique (DIP), Anne Hiltpold.

«Nous avons cherché à voir la migration à travers les yeux des enfants»

Le dernier module de vulgarisation du poliScope destiné aux enfants s’appuie sur les recherches de Philippe Wanner, professeur à l’Institut de démographie et socioéconomie, et de son équipe.

Le Journal: Pourquoi avoir choisi de travailler sur des trajectoires d’enfants migrant-es?
Philippe Wanner:
Nous souhaitions trouver un angle d’approche qui soit accessible aux plus jeunes, raison pour laquelle nous avons choisi de raconter la migration avec des récits d’enfants et à travers des dessins. Il s’agissait aussi de combler une lacune. Les récits de migration sont généralement racontés par des adultes, les enfants n’étant souvent considéré-es que comme des accompagnant-es. Nous avons cherché à voir la migration à travers les yeux des enfants. Nous voulions adopter leur regard et montrer comment ces enfants vivent leur parcours migratoire.

Comment avez-vous procédé?
Nous avons commencé par chercher à identifier les différentes trajectoires, grâce aux chiffres et aux statistiques officiels auxquels nous avons accès. De cette petite enquête, il est ressorti cinq parcours types. Puis, nous nous sommes basé-es sur l’abondante littérature existant sur la migration pour créer les différents scénarios.

Ces investigations seront-elles approfondies?
Elles nous ont permis de soulever des problématiques qui peuvent constituer des axes pour de futurs travaux de recherche. Il subsiste en effet tout un pan de la vie en migration dont on ne sait que peu de choses, notamment quant à la langue qui est parlée à la maison par ces enfants migrant-es ou aux relations qu’elles et ils entretiennent avec les enfants natifs/ives, par exemple.

 

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