Séminaires

Postdigital 2024-2025: Images génératives

Depuis une vingtaine d’années, un déluge d’images nous submerge — images fixes et animées circulant sur internet, les réseaux sociaux, nos écrans personnels comme ceux des espaces publics. Ce déferlement s’avère sans comparaison avec celui, déjà puissant, de la circulation imprimée et matérielle des images. Comment les sciences humaines doivent-elles l’aborder ? Nous prendrons la question de manière méthodique – en examinant ce qu’est une image numérique, ce qu’on peut en faire, et comment étudier des images en masse, à la lumière des théories déployées jusqu’ici pour penser les images au pluriel. Nous confronterons cette approche à ce que les images elles-mêmes nous disent de leur déluge, notamment dans l’art contemporain. L’année 2024-2025 se penchera aussi plus précisément sur la manière dont le déluge est récupéré et augmenté par les IA génératives. Plusieurs rencontres avec le séminaire de David Zerbib à la HEAD permettront d’aborder directement ces questions avec des artistes.

Ce séminaire s’inscrit dans le projet de recherches Visual Contagions porté à l’UNIGE par la Prof. Béatrice Joyeux-Prunel. Un ordinateur portable sera utile, avec accès internet et droits d’administration sur la machine. La validation se fait par la présentation orale de plusieurs exposés dans le semestre, et par de petits exercices écrits – occasion de progresser dans les compétences transversales de l’expression orale et écrite.

Plans d'études concernés : Humanités numériques, Philosophie, Histoire de l'art, Histoire générale, Recherche, Etudes visuelles (détails)

 

 

 Références :

- Paul Valéry (1871-1945), « La conquête de l’ubiquité » (1928) ; Une édition électronique réalisée à partir du texte de Paul Valéry, « La conquête de l’ubiquité » (1928),  in Œuvres, tome II, Pièces sur l’art,  Nrf, Gallimard, Bibl. de la Pléiade, 1960, 1726 pages, pp. 1283-1287. Paru dans De la musique avant toute chose, éditions du Tambourinaire, 1928.

- Walter Benjamin, "L'oeuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique", 1935. En ligne sur Monoskop.

- Marshal McLuhan, Pour comprendre les médias : les prolongements technologiques de l'homme (Paris, Seuil, coll. Points, 1968, titre original anglais: Understanding Media: The Extensions of Man, McGraw-Hill, New-York, 1964).

 

Lectures à faire pour la séance :

- Marshall McLuhanUnderstanding Media:The Extensions of Man, 1964. Extrait, traduction française: "the Medium is the Message". https://www.philo5.com/Les%20philosophes%20Textes/McLuhan_LeMediumEstLeMessage.htm 

- Chapitre sur le cinéma de Friedrich Kittler, Gramophone, Film, Typewriter https://monoskop.org/images/7/73/Kittler_Friedrich_Gramophone_Film_Typewriter.pdf 

- Réfléchissez à la manière dont ce texte peut être utilisé pour analyser l'oeuvre de l'artiste allemand Mario Klingemann, "https://quasimondo.com/"

- Références mentionnées pendant la séance : 

* "Gaza Trump" (vidéo posée par D. Trump sur Gaza), https://www.instagram.com/reel/DGhfpgHsOg6/?igsh=MXIzd2ZjYzUxOXVmMQ%3D%3D

* Franco Moretti, Atlas du Roman européen. Une recension ici : https://shs.cairn.info/revue-de-litterature-comparee-2003-1-page-XII?lang=fr&tab=texte-integral

 

Cette séance lance la collaboration de la classe avec le séminaire de Prof. David Zerbib à la HEAD, "Critical Videology". 

1/ Lectures à faire  :

2/ utilisez un ou plusieurs outils de génération d'images pour générer "une oeuvre d'art".  Réfléchissez à votre expérience de la chose. (quelques exemples donnés ici : https://zapier.com/blog/ai-art-generator/).

Nous discuterons en classe de ce qu'implique une telle démarche.

 

 

Texte à lire : Vilém Flusser, Pour une philosophie de la photographie (1983)
 → réflexion sur la photographie comme programme technique, et l’image comme code.
 

Oeuvres à commenter :

- Quand l'art était déjà automatique. Jean Tinguely et ses méta-matics.

- Collectif DIsnovation, Predictive Art Bot. 2018. https://predictiveartbot.com/. 

 

 

Route des Franchises 2. Rendez-vous en bas de l"escalier, dans le hall d'entrée, dès 10h00 (fin à 11h45 précises)

Texte à lire avant la séance (sur la nouvelle révolution dans la création des contenus vidéo) - un point de vue interne : Doug Shapiro, "How Far Will AI Video Go? Mapping Out the Scenarios", 14 février 2025, https://dougshapiro.substack.com/p/how-far-will-ai-video-go

 

Texte à lire pour préparer la séance : Philip Galanter, "What is Generative Ar? ", https://www.philipgalanter.com/downloads/ga2003_paper.pdf

Les contenus générés par l’intelligence artificielle (IA) modifient fondamentalement notre monde de la vie. Cette transformation ne fait que commencer. Les bouleversements technologiques à venir et la manière dont ils vont modifier notre utilisation des médias et notre société font partie des questions les plus urgentes de notre époque. Le débat sur l’IA générative (GenAI) est toutefois marqué par des récits qui font obstacle à une discussion productive. L’idée d’une singularité imminente et d’une “IA toute puissante” manque par exemple de fondement technique et sert souvent plus de publicité que d’avertissement. Parallèlement, l’IA est  anthropomorphisée. Des termes comme “halluciner” la psychologisent et masquent ses processus algorithmiques. Une perspective critique peut déconstruire
ces récits et souligner la différence entre l’IA et la conscience humaine. Dans ma conférence invitée, j’aimerais mettre l’accent sur la générativité et en discuter dans le cadre d’une philosophie du numérique, afin de mieux comprendre les interactions problématiques entre les structures numériques et notre monde vécu. Du point de vue des sciences des médias, la générativité est particulièrement pertinente pour deux raisons : Premièrement, nous avons affaire à une boîte noire (blackbox) non seulement sur le plan technique, mais aussi sur les plans culturel et herméneutique : Les concepts, les mythes et les récits véhiculés de manière irréfléchie cachent une logique  algorithmique et stochastique.
L’humanisation de la GenAI devient ainsi un obstacle épistémique. Comment intégrer une générativité basée sur le non-savoir dans les pratiques de connaissance ? Quels accès ouvrent les sciences des médias, la philosophie, l’art et l’esthétique ?  Deuxièmement, la générativité” est l’une des thèses fondatrices des sciences des médias, car elle souligne le caractère générateur des médias. Après McLuhan et Kittler, la théorie des médias a souligné depuis le milieu des années 1980 au plus tard que les médias contribuent de manière décisive au processus de transmission. Bien que la générativité soit toujours présupposée, c’est le saut technologique basé sur l’IA qui met en lumière le phénomène lui-même, qui n’a pas été élaboré de manière systématique, que ce soit en tant que concept, théorie ou méthode. Je propose une approche philosophique des médias à la générativité, qui n’intègre pas seulement les formes de savoir dans l’art et les médias, mais qui donne aussi une orientation éthique tenant compte de la situation et de ses dépendances hétéronormatives. Je donne des exemples tirés de la recherche récente sur les plateformes et de l’art génératif, et je montre le rôle que jouent ici l’esthétique et la politique de la communauté.

Johannes Bennke est chercheur post-doctoral au Program for Hermeneutics and Cultural Studies de l’université Bar-Ilan (Tel Aviv), où il mène actuellement un projet de recherche sur l’avenir des archives sur le web3. Il mène également des recherches sur “l’esthétique de la générativité” et sur “les médias de la confiance”. Auparavant, il a été postdoctorant de la fondation Minerva de la société Max-Planck au Dpt. of Communication and Journalism de la Hebrew University of Jerusalem avec un projet sur les “médias de la vérification”. Doctorat à l’université Bauhaus de Weimar sur la philosophie des médias et l’esthétique selon Emmanuel Levinas. Domaines de recherche principaux : Philosophie de l’image et des médias, esthétique, philosophie du numérique, éthique et (post)phénoménologie. Publications : Levinas und die Künste (avec Dieter Mersch ; transcript, 2024) ; éditeur invité communication +1, “Media of Verification” (Vol. 10, 2023) ; Obliteration. Für eine partikulare Medienphilosophie nach Emmanuel Levinas (transcript, 2023). International Yearbook for Media Philosophy. Mediality/Theology/Religion (avec Virgil Brower ; de Gruyter, 2021). Avec Markus Rautzenberg et Mirjam Schaub, il publiera au printemps 2025 la revue navigationen sur le thème : “Media Cultures of Value ? Economy, Politics and Art in Web3”.

Presentation à venir.

 

Texte de référenceJacques RancièreLe partage du sensible.Partie 1: "Du partage du sensible et des rapports
qu’il établit entre politique et esthétique" (voir fichier pdf ci-dessous)

Oeuvre à analyser : Trevor Paglen et Kate CrawfordImageNet Roulette (2019). https://paglen.studio/2020/04/29/imagenet-roulette/

→ Une perspective critique sur l’intelligence artificielle et l’impact des systèmes génératifs.

Objectif: Analyser comment les algorithmes participent à une politique des images en sélectionnant certaines formes de représentation

 

Article à lire : David Hesmondhalgh, "The Infrastructural Turn in Media and Internet Research",in Paul McDonald (ed.), The Routledge Companion to Media Industries, New York, Routledge, 2021, p. 132-142. Accessible en ligne en Open Access.

Oeuvre à interroger: Grégory Chatonsky, Framing. Portrait of Technology in Nature. Oeuvres génératives, 2022. https://chatonsky.net/farming/