La Fondation Egon Naef pour la Recherche in Vitro décerne son prix 2019 à la professeure Carole Bourquin
Carole Bourquin reçoit le Prix 2019 de la Fondation Egon Naef pour la Recherche in Vitro. La chercheuse a mis au point une nouvelle technique in vitro qui permet de réduire de 20% le nombre de souris nécessaires à la recherche sur les nanoparticules en immunothérapie.
Figure 1: Des cellules au secours des souris: pour étudier les nanomédecines un test in vitro développé à l’Université de Genève permet de réduire le recours à l’expérimentation animale. © UNIGE – Carole Bourquin.
Les nanoparticules permettent de transporter des médicaments jusqu’à des sites choisis dans notre corps. En visant les ganglions lymphatiques, il est ainsi possible de stimuler spécifiquement le système immunitaire, une approche prometteuse pour combattre le cancer. Pour choisir des nanoparticules adéquates, les chercheurs testent leur comportement dans des animaux. Une équipe de l’Université de Genève (UNIGE) a mis au point une technique in vitro qui permet d’effectuer un premier tri des nanoparticules testées. Seules les plus performantes sont testées chez des animaux. Cette méthode, récompensée par le Prix 2019 de la Fondation Egon Naef pour la Recherche in Vitro, permet une réduction de 20% du nombre de souris utilisées dans la recherche sur les nanoparticules.
La recherche en immunothérapie vise à stimuler le système immunitaire pour que celui-ci reconnaisse les cellules cancéreuses et les détruise. Les nanoparticules peuvent améliorer l’efficacité des traitements en transportant dans le corps humain le médicament là où il déclenchera la réponse immunitaire, dans les ganglions lymphatiques. « C’est à cet endroit que les cellules immunitaires se rencontrent, communiquent et prolifèrent pour combattre ensuite les cellules cancéreuses », explique Carole Bourquin, professeure aux facultés de médecine et des sciences de l’UNIGE.
Un strict cahier des charges
Il reste à découvrir les nanoparticules les plus efficaces pour transporter et libérer des médicaments dans les ganglions lymphatiques. Elles doivent être captées par les cellules immunitaires pour être transportées jusqu’aux ganglions lymphatiques. Elles ne doivent pas être toxiques pour les cellules. Et enfin elles ne doivent pas activer le système immunitaire contre elles-mêmes. Jusqu’à présent, les nanoparticules étaient systématiquement testées sur des souris, afin de vérifier qu’elles répondaient bien à ces trois critères. « Mais nous avons cherché un moyen standardisé d’effectuer un premier tri de nanoparticules, sans devoir recourir directement au modèle animal », précise Carole Bourquin.
Son équipe a incubé les nanoparticules avec des cellules immunitaires cultivées en laboratoire (Figure 1). Ensuite, les pharmacologues ont analysé les cellules en les passant dans un cytomètre de flux qui mesure la viabilité des cellules et permet d’observer si elles ont capté des nanoparticules. En même temps ils ont déterminé si les cellules étaient activées. « Ce test nous permet de tester rapidement la qualité des nanoparticules, poursuit Carole Bourquin. En revanche pour mesurer le transport vers les ganglions lymphatiques, nous n’avons pas encore de méthode alternative à la souris, qui seule nous permet d’avoir accès à un système immunitaire complet et fonctionnel. » Toutefois, la standardisation de ce triage de nanoparticules permet d’ores et déjà de réduire de 20% le nombre de souris nécessaires pour ces recherches en immunothérapie ! C’est ce résultat qui a retenu l’attention de la Fondation Egon Naef pour la Recherche in Vitro qui a accordé sont Prix 2019 à la chercheuse. « Notre objectif est de stimuler le développement de ces méthodes alternatives. C’est un travail de fond, qui est essentiel pour diminuer à terme le recours à l’expérimentation animale », déclare Marcel Naef, président de la fondation.
Une méthode standardisée et facile à reproduire
L’équipe de Carole Bourquin utilise cette méthode de triage in vitro depuis plusieurs années et les recherches effectuées depuis ont démontré son efficacité. « Nous avons publié et rendu accessible cette technique comme si elle était une « recette de cuisine », facile à reproduire étape par étape, afin que tout chercheur ou chercheuse puisse l’utiliser, explique la scientifique genevoise. Ce prix vient récompenser notre travail et le mettre en lumière, ce qui nous rend très fiers et nous encourage à poursuivre dans cette voie. »
Bien que la souris soit encore nécessaire pour la recherche en immunothérapie, l’équipe de recherche continue à développer de nouvelles techniques de remplacement, notamment en travaillant sur des cellules humaines isolées à partir du sang des patients. Carole Bourquin développe également cette méthode pour l’étendre à d’autres utilisations et à d’autres cellules du système immunitaire. « En plus des considérations éthiques, l’expérimentation animale coûte cher et est soumise à des demandes d’autorisation très strictes, c’est pourquoi nous cherchons sans cesse à remplacer le modèle animal par des méthodes alternatives. Mais cela demande du temps », conclut Carole Bourquin.
22 nov. 2019