• La Faculté autrement

Recherche en télémédecine: deux étudiantes au Cameroun

Cet été, Noémie Bria et Céline Carron, étudiantes en 5e année de médecine humaine, ont passé 3 semaines au Centre de santé de Bafoussam, à l’ouest du Cameroun. Sous la supervision du Pr Patrick Petignat, médecin-chef du Service de gynécologie des HUG et directeur du Département académique de pédiatrie, gynécologie et obstétrique, elles participaient à un projet de recherche sur le dépistage du cancer du col de l’utérus. Une expérience dont elles reviennent transformées.

Numéro 51 - décembre 2024

Image_Cameroun_.jpg

© Noémie Bria et Céline Carron. L’équipe de soins du centre de santé de Bafoussam

Le cancer du col de l’utérus, un cancer à bas bruit, est le cancer le plus mortel pour les femmes des pays à bas revenus tels que le Cameroun. Or, pris à temps, les premières lésions pré-cancéreuses sont facilement traitables. La clé? Renforcer le dépistage précoce. Depuis plusieurs années, la Faculté de médecine et les HUG ont un partenariat de recherche au Cameroun. «Depuis 1997, le programme de coopération «prévention du cancer du col utérin» réunit le Ministère de la santé du Cameroun, la Faculté de médecine de l’UNIGE et les HUG», relate le Pr Patrick Petignat, directeur du Département académique de pédiatrie, gynécologie et obstétrique et médecin-chef du Service de gynécologie des HUG. «Près de 40 médecins, plus de 40 étudiants et étudiantes, et plus de 50 sage-femmes et infirmières de Suisse et du Cameroun ont participé aux différentes campagnes de prévention, permettant à plus de 10'000 femmes d’être dépistées. Le travail de Noémie et Céline s’inscrit dans ce programme déjà presque trentenaire.»

La télémédecine pour favoriser un dépistage rapide

«Dans la région de Bafoussam, les barrières qui limitent l’accès au dépistage du cancer du col de l’utérus sont multiples: distance entre les villages et l’hôpital, coûts, ou encore méconnaissances dans la population», explique Noémie Bria. «L’une des manières de faciliter le dépistage serait d’avoir accès, dans la même journée, à un dépistage rapide et, en cas de test positif, à une prise en charge immédiate sans avoir besoin de revenir à l’hôpital. Notre projet s’inscrit dans cette logique.» Les deux étudiantes veulent comparer la précision diagnostique d’une analyse des prélèvements par microscopie optique – qui implique l’envoi physique des frottis à un laboratoire centralisé — à une analyse effectuée à distance, après la numérisation des prélèvements et envoi des images par internet. 

«Si nous parvenons à la même fiabilité de diagnostic, cela faciliterait la prise en charge et permettrait de soigner un plus grand nombre de femmes, y compris celles qui aujourd’hui ne reviennent pas toujours à l’hôpital pour recevoir leur diagnostic et éventuel traitement», ajoute Céline Carron. Détectées précocement, les lésions pré-cancéreuses du col de l’utérus peuvent en effet être enlevées par chirurgie locale ambulatoire.

Plongée dans un contexte médical inconnu

Une fois sur place, les deux étudiantes se sont immergées dans la vie quotidienne du centre de santé de Bafoussam. «Nous avons ainsi pu participer à tous les aspects de notre projet de recherche clinique, mais aussi dans de nombreuses autres activités, administratives, cliniques, tout où nous pouvions être utiles», détaille Céline Carron. «Nous avons même pu accompagner les équipes de sage-femmes dans les villages, lors de leurs tournées de prévention et d’éducation communautaire», ajoute Noémie Bria. «Une immersion dans une réalité bien différente de la nôtre!» 

Ces «causeries éducatives» étaient en effet l’occasion d’ouvrir le dialogue avec l’ensemble des communautés, répondre aux inquiétudes et également identifier les barrières qui pourraient empêcher les femmes de se faire dépister. «Une croyance courante associe ainsi le dépistage au risque, pour les femmes, de se faire ensorceler. Il nous a fallu prendre en compte ce cadre culturel d’interprétation des maladies, cela force à une ouverture d’esprit, et cela nous a enseigné que pour pratiquer la médecine, il ne faut pas se limiter au biologique.»

«Nous avons préparé l’arrivée de Noémie et Céline afin qu’elles puissent s’intégrer rapidement aux projets en cours», explique Loïc Djommo, responsable de la gestion des données de recherche à Bafoussam. «Elles ont tout de suite fait partie de l’équipe, avec leur envie d’apprendre et d’échanger, sur des sujets médicaux mais aussi sur leur expérience de stage.»

Un accueil exceptionnel

Ce stage a offert aux étudiantes un regard unique sur les défis et les réalités de la médecine dans un environnement aux ressources limitées, tout en les confrontant à leurs propres préconceptions et en les poussant à développer une approche ouverte et empathique de leur future pratique médicale. «Nous nous intéressons à la gynécologie depuis longtemps, et ce stage nous a vraiment confortées dans ce choix de spécialisation. Et nous aimerions aussi souligner la bienveillance et la chaleur avec lesquelles nous avons été accueillies. Le sentiment de solidarité et de collectivité que nous avons rencontré constitue une belle leçon de vie.»

Noémie Bria 
étudiante en 5e année de médecine humaine

Céline Carron
étudiante en 5e année de médecine humaine

Dans le même numéro

S'abonner à la newsletter

S'abonner