2023

Décrypter le «code de la route» de nos cellules

Une équipe de l’UNIGE a identifié un mécanisme clé de la régulation des microtubules, les voies de communication internes de nos cellules.
 


À gauche, une cellule surexprimant la protéine CLIP-170. À droite, des condensats - liquides obtenus par condensation de leur propre vapeur - de la protéine CLIP-170 in vitro. © Charlotte Aumeier


Cancers, maladies dégénératives: la dérégulation des voies de communication internes de nos cellules est à l’origine de nombreuses pathologies. Les microtubules, filaments protéiques microscopiques, jouent un rôle crucial dans le contrôle de ces échanges. Leurs mécanismes demeurent toutefois mal compris. Une équipe de l’Université de Genève (UNIGE) a identifié un nouveau processus, impliquant deux protéines, qui régit leur croissance. La découverte de ce mécanisme ouvre des perspectives inédites pour le développement de nouveaux traitements capables d’agir au cœur même des cellules. Ces résultats sont à découvrir dans les Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS).


Tout comme une ville a besoin de réseaux de transport fluides pour ses échanges et son développement, les cellules ont besoin de «routes» microscopiques internes pour assurer leur approvisionnement, leur croissance et leur division. Ces «routes» sont appelées «microtubules». Elles prennent la forme de longs filaments protéiques qui constituent le squelette de la cellule. Des problèmes de régulation des microtubules peuvent être à l’origine de maladies telles que le cancer et certains troubles neurodégénératifs.


Par conséquent, la compréhension de leur fonctionnement – notamment les mécanismes qui contrôlent et régulent leur croissance –  est cruciale. Bien que des avancées significatives aient été faites dans ce domaine ces quarante dernières années, la complexité de ce système suscite toujours un intense effort de recherche.


Deux protéines clés

Les derniers travaux de Charlotte Aumeier, professeure assistante au Département de biochimie de la Faculté des sciences de l’UNIGE, fournissent de nouveaux éléments pour éclairer son fonctionnement. Ils démontrent comment deux protéines spécifiques, CLIP-170 et EB3, subissent une séparation de phase liquide-liquide au niveau de la pointe du microtubule au cours de sa croissance. En d’autres termes, ces deux protéines se séparent du milieu liquide cellulaire pour former une seconde phase liquide à l’extrémité des microtubules, à l’image d’une goutte d’huile dans de l’eau.


Les microtubules sont des structures dynamiques qui se construisent et se défont continuellement. «Ce phénomène de séparation de phase, au niveau du microtubule, augmente la concentration de protéines, y compris de la tubuline, et stimule de manière significative la vitesse de croissance des microtubules tout en réduisant les événements de dépolymérisation, c’est à dire les événements de décroissance du microtubule» explique Charlotte Aumeier, dernière auteure de l’étude. Ce mécanisme semble ainsi contrôler de manière très concrète la dynamique des microtubules cellulaires.


Une action concertée

Julie Miesch, doctorante au sein du laboratoire de Charlotte Aumeier et première auteure de l’étude, précise que «c’est la synergie entre CLIP-170 et EB3 qui garantit la régulation de la croissance des microtubules, grâce à un mécanisme de séparation de phase liquide-liquide». En effet, prise individuellement, CLIP-170 ne présente aucune interaction avec la tubuline. Quant à EB3, bien qu’elle soit capable d’interagir avec la tubuline, elle ne forme que de minuscules agrégats en surface. La conjonction de ces deux protéines permet de réguler localement la vitesse de croissance du microtubule.


Le rôle de ces deux protéines a pu être observé sur des mesures in vitro puis in cellulo à l’aide d’une combinaison de deux méthodes, la microscopie de fluorescence par réflexion totale interne et la microscopie confocale à haut débit, disponible à l’UNIGE au sein de la plateforme ACCESS GENEVA.


Ces résultats mettent en évidence un nouveau niveau de régulation dans le contrôle de la dynamique des microtubules. Ce dernier permet d’imaginer de nouvelles cibles dans le développement de nouvelles thérapies anticancéreuse. Cette avancée promet d’élargir encore davantage notre compréhension et notre capacité à agir au cœur même des processus cellulaires.

5 sept. 2023

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