2023

Une paire de gènes pourrait prédire l’évolution du cancer

Une équipe de l’UNIGE a identifié deux gènes clés dont l’expression influence la progression du cancer.
 

Vue du microenvironnement tumoral. En magenta, les macrophages exprimant CXCL9. En bleu pâle, les macrophages exprimant SPP1. En bleu foncé et jaune, les cellules tumorales. En gris, le stroma. © Mikaël Pittet
 

Tissus, vaisseaux, cellules: les tumeurs se développent dans un écosystème complexe appelé «microenvironnement tumoral». S’il est avéré que cet environnement diffère d’un-e patient-e à l’autre et qu’il peut influer positivement ou négativement sur le cours de la maladie, les règles qui le régissent sont encore mal comprises. Une équipe de l’Université de Genève (UNIGE) est parvenue à décrypter l’une d’entre elles en identifiant une paire de gènes dont l’expression peut accélérer, ou au contraire freiner, la progression du cancer. Ces résultats prometteurs sont à découvrir dans la revue Science.


L’écosystème au sein duquel une tumeur se développe est appelé «microenvironnement tumoral». Composé de vaisseaux sanguins, de cellules immunitaires et d’autres cellules apparemment normales, il interagit en permanence avec les cellules tumorales. Ces composants, qui diffèrent d’un-e patient-e à l’autre, ont une influence cruciale sur l’évolution de la maladie: ils peuvent en accélérer, ou au contraire, en freiner la progression. Les mécanismes qui régissent leurs variations et leurs interactions demeurent cependant mal compris.


«Les manifestations très différentes d’un cancer d’un-e patient-e à l’autre constituent souvent une difficulté majeure dans la recherche sur la maladie. Ici, au contraire, nous avons pu profiter de ces variations entre patient-es pour mettre en évidence les règles qui régissent l’évolution de la maladie», explique Mikaël Pittet, professeur ordinaire à la Faculté de médecine de l’UNIGE, titulaire de la Chaire ISREC en immuno-oncologie, directeur du Centre de recherche translationnelle en onco-hématologie (CRTOH) et membre du Ludwig Institute for Cancer Research (Lausanne).


Deux gènes clés

Jusqu’à présent, la plupart des études portaient sur des populations de cellules provenant d’écosystèmes tumoraux de différent-es patient-es, regroupées et observées indistinctement. Cette méthode permet de classer les microenvironnements tumoraux sur la base de critères généraux, mais pas d’analyser leurs variations d’un individu à l’autre. Pour y remédier, l’équipe dirigée par Mikaël Pittet a examiné isolément 52 tumeurs de la tête et du cou prélevées chez autant de patient-es. Elle est ainsi parvenue à les comparer et à identifier un paramètre clé régissant les tumeurs: l’expression des gènes CXCL9 et SPP1 par des cellules immunitaires appelées «macrophages».


«Au sein des microenvironnements tumoraux, ces deux gènes sont exprimés de manière antagoniste par ce type particulier de cellules», expliquent Ruben Bill, postdoctorant, et Pratyaksha Wirapati, bioinformaticien, tous deux co-premiers auteurs de l’étude et membres du groupe de Mikaël Pittet. «Nous avons ainsi découvert que les patient-es présentant une expression élevée de CXCL9 par rapport à SPP1, dans les macrophages, ont de meilleurs résultats cliniques que ceux et celles présentant la proportion inverse.»


Les macrophages exprimant davantage le premier gène sont impliqués dans des attaques contre les cellules cancéreuses, tandis que ceux qui expriment davantage le second participent à leur croissance. Les macrophages tumoraux sont capables d’engager l’un ou l’autre de ces programmes, en fonction des gènes CXCL9 et SPP1 qu’ils expriment. On parle alors de «polarité» des macrophages.


Implications plus vastes

À leur surprise, les scientifiques ont découvert que cette polarité est liée à tous les composants de l’écosystème tumoral. Ainsi, lorsque le rapport de CXCL9 à SPP1 est élevé dans les macrophages, les activités des autres cellules du microenvironnement tumoral prennent également une orientation antitumorale, et inversement lorsque ce rapport est inversé.


«La simple observation du ratio de cette paire de gènes dans les macrophages permet donc de déduire l’activité globale des cellules qui composent le microenvironnement tumoral. En d’autres termes, les microenvironnements tumoraux semblent être régis par des règles internes cohérentes et relativement simples. Cette étude nous a permis de décrire l’une d’entre elles», se réjouit Mikaël Pittet.


Pour les scientifiques, les prochaines étapes consisteront à déterminer comment interférer thérapeutiquement avec ces réseaux, et comment personnaliser au mieux les traitements en fonction des caractéristiques tumorales de chaque patient-e.

3 août 2023

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