2024

Des bandes puis des taches, les secrets de la robe du gecko léopard

Deux biologistes de l’UNIGE ont déterminé comment s’établissent les motifs en bandes, puis en taches, sur la peau du gecko léopard.
 

Les premiers mois de sa vie, le gecko léopard arbore des motifs en bandes. Une fois adulte, elles laissent place à des taches noires, rappelant le pelage du léopard. © LANEVOL


Si les motifs et les couleurs de la robe des lézards fascinent, les mécanismes qui en sont à l’origine sont en grande partie inconnus. Une équipe de l’Université de Genève (UNIGE) s’est intéressée au gecko léopard, un lézard populaire, pour comprendre comment les bandes sur la peau des juvéniles se transforment en taches à l’âge adulte. Ces travaux révèlent que cette transition est orchestrée par des interactions entre différentes cellules pigmentaires, offrant ainsi de nouvelles perspectives sur la biologie de la pigmentation chez les reptiles. Ces résultats sont à lire dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS).


Les couleurs et les motifs à la surface de la peau des reptiles sont d’une étonnante diversité, générée par les interactions entre trois types de cellules colorées, les chromatophores. Les mélanophores sont responsables des couleurs noire et brune; les xanthophores de la coloration rouge/jaune et les iridophores, remplis de cristaux qui réfléchissent la lumière, renvoient des couleurs métallisées. Selon la répartition de ces chromatophores dans la peau, différents motifs de coloration apparaissent. Pour la plupart des espèces, le motif de coloration est défini au cours du développement embryonnaire et reste stable tout au long de la vie de l’animal


Transition à l’âge adulte

Il existe cependant des exceptions. C’est le cas pour le gecko léopard (Eublepharis macularius), bien connu des terrariophiles et originaire de l’Inde ou du Pakistan. Ce lézard, d’une vingtaine de centimètres à l’âge adulte, arbore pendant les premiers mois de sa vie une bande blanche au niveau de la nuque et plusieurs bandes transversales jaunes et noires sur son dos. Une fois l’âge adulte atteint, sa robe, au fond clair et uniforme, est recouverte de taches noires rappelant le pelage du léopard. Le groupe d’Athanasia Tzika, chercheuse au Département de génétique et évolution de la Faculté des sciences de l’UNIGE, s’est intéressé aux phénomènes permettant cette transition des bandes vers des taches chez le gecko léopard, pour mieux comprendre la formation de motifs de coloration chez les reptiles.


Les biologistes ont analysé la distribution des cellules colorées dans la peau des lézards à différentes étapes de leur vie. «Lors de nos observations des prélèvements de peau, nous avons constaté que si les trois types de chromatophores sont bien présents chez les juvéniles, les iridophores disparaissent après quelques mois et cette période coïncide avec la transition des bandes vers les taches», explique Asier Ullate-Agote, ancien doctorant au Département de génétique et évolution de la Faculté des sciences de l’UNIGE, et premier auteur de l’étude.
 

Le gecko léopard présente par ailleurs la particularité de pouvoir régénérer sa queue si celle-ci est sectionnée à la suite d’une agression physique par un prédateur. Quel que soit l’âge du lézard, cette nouvelle queue repousse toujours couverte de taches, et jamais de bandes. Les scientifiques ont ainsi analysé la peau de ces repousses et ont observé qu’elle est dépourvue d’iridophores. Ces observations corrèlent à nouveau la présence de taches avec l’absence des chromatophores iridescents.


Un gecko mutant pour confirmer ces résultats

«Ces observations nous ont conduits à analyser la peau d’un animal particulier qui apparaît parfois naturellement au sein de nos élevages: le gecko léopard ‘‘Mack Super Snow’’. Cet animal, porteur d’une mutation spontanée, naît avec une peau noire sans bandes, mais arbore une peau tachetée à l’âge adulte, comme les autres lézards sans mutation. Nous avons constaté que la peau des juvéniles montre la présence uniquement de mélanophores, mais pas d’iridophores ou de xanthophores», décrit Athanasia Tzika.


Les analyses génétiques de ces individus ont permis d’identifier la mutation dans le gène PAX7. Ce gène est normalement exprimé dans les iridophores et les xanthophores, suggérant qu’il joue un rôle clé dans la différenciation de ces deux chromatophores, dont la présence n’est pas nécessaire pour la formation des taches.


«Nous pensons donc que ce sont les interactions entre les mélanophores et les iridophores qui sont à l’origine du motif en bandes des juvéniles et que les mélanophores peuvent former les taches, sans l’aide d’autres chromatophores. Notre étude permet de mieux comprendre les mécanismes de régulation qui régissent la pigmentation de la peau chez les geckos léopards et, plus généralement, la formation des motifs de couleur chez les reptiles», conclut Athanasia Tzika.

10 juil. 2024

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