Introduction

Les questions fréquentes

L’expérimentation animale suscite des interrogations légitimes au sein de la population. Afin de contribuer à la qualité des débats sur l’utilisation de modèles animaux dans la recherche, les scientifiques apportent des éléments de réponse aux questions les plus fréquentes qui leur sont adressées à ce sujet.

Le pourquoi de l'expérimentation animale

L’expérimentation animale permet de comprendre le fonctionnement des organismes vivants et leur réaction à une modification environnementale externe ou interne. Les méthodes dites alternatives, cultures cellulaires ou organoïdes (in vitro) ou modèles informatiques (in silico), permettent de répondre à certaines questions et sont privilégiées chaque fois que cela est possible, pour des raisons aussi bien éthiques que légales ou économiques. L’expérimentation animale reste indispensable lorsque l’organisme doit être considéré dans son ensemble et avec toute sa complexité (étude du comportement, du métabolisme, du développement embryonnaire, maladies infectieuses ou génétiques, par exemple).

Les animaux sont nécessaires pour les études qui ne peuvent être réalisées directement sur des êtres humains pour des raisons de sécurité, d'éthique et de praticité. La recherche biomédicale a notamment besoin d’animaux de laboratoire pour le développement de médicaments, vaccins et autres traitements. La recherche sur les animaux comprend en outre l’étude de la faune, des animaux domestiques ou de rente, par exemple des animaux d’espèces détenues directement ou indirectement en vue de la production de denrées alimentaires ou pour fournir une autre prestation déterminée, de même que la capture et relâche d’oiseaux ou de sangliers pour le traçage de leur population. Enfin, certaines études de biologie visent à comprendre des phénomènes biologiques fondamentaux qui ne sont pas liés directement aux maladies humaines.

Lorsqu'un nouveau médicament est développé, il passe par une phase clinique: il doit être testé sur des patient-es avant de recevoir l'autorisation de le commercialiser. Ces essais sont fortement réglementés et ne sont autorisés par les autorités que si des données de sécurité préalables ont été obtenues afin de garantir que les sujets humains ne sont pas exposés à des risques majeurs. En outre, il doit être démontré que les bénéfices potentiels de l'essai l'emportent sur les risques associés. Dans le cas du développement des vaccins contre le Covid-19, des études sur les animaux ont été nécessaires avant que les vaccins ne soient testés sur des êtres humains volontaires.

Oui. Tous les animaux vertébrés sont remarquablement similaires sur le plan anatomique et physiologique. C'est la principale raison pour laquelle des animaux tels que les souris, les rats, les poissons et les porcs peuvent être utilisés pour comprendre la physiologie humaine. Le modèle animal n’est pas intégralement fiable comme modèle préclinique des maladies humaines, mais son bilan reste très largement positif. Il a permis le développement des greffes d’organes ou de traitements toujours plus efficaces contre le sida, le cancer, la maladie d’Alzheimer ou le diabète. Dans certains cas, même des modèles d’invertébrés comme la mouche du vinaigre, le ver de terre ou la fausse teigne de la cire s’avèrent utiles pour comprendre la physiologie humaine.

Depuis de nombreuses années, les animaux de laboratoire contribuent au développement de nouvelles thérapies et de nouveaux médicaments. Même lorsque des découvertes médicales sont réalisées sans avoir recours à des animaux de laboratoire, des animaux sont encore nécessaires à un stade ultérieur pour vérifier la sécurité et l'efficacité des médicaments.

Un exemple d'application réussie de l'expérimentation animale est le développement des vaccins Covid-19. L'urgence de la pandémie a nécessité un développement rapide du vaccin. Une fois celui-ci mis au point, il fallait en tester la sécurité et l'efficacité. Cela a été fait sur des animaux avant de le tester sur des humains. Le singe, la souris, le cochon, le lapin, le furet ont été utilisés selon le fabricant. En outre, des modèles de souris ont été utilisés pour étudier les symptômes du Covid-19 et ont beaucoup aidé les scientifiques à comprendre cette maladie.

Sur note page actualités, nous recensons une partie des études de l'UNIGE ayant conduit à des avancées scientifiques majures en utilisant le modèle animal.

Quelles expériences sur quels animaux?

En 2023, 90 équipes de recherche et environ 600 personnes collaboraient à 310 projets scientifiques impliquant des animaux à l’UNIGE. Pour ce qui concerne l’expérimentation animale, ces disciplines sont les suivantes :

  • Neurosciences
  • Oncologie et système immunitaire
  • Métabolisme et physiologie (Diabète, Cardiovasculaire, Néphrologie, Hépatologie, Physiologie, Endocrinologie)
  • Infections
  • Autre (Maladies musculaires, Néonatologie, Ostéologie, Chirurgie plastique, Embryologie, Otologie, Orthodontie, Ophtalmologie, Chirurgie, Formation)
  • Biologie fondamentale (Biologie moléculaire, Génétique, Zoologie, Biologie cellulaire)

Notre  page «actualités» donne des exemples récents de publications dans lesquelles des expériences sur animaux sont décrites. D’autres sont présentés sur la page «Les types de recherche».

La plupart des animaux de laboratoire utilisés à l'UNIGE sont des souris, car il s'agit d’animaux de petite taille se prêtant facilement aux modifications génétiques nécessaires pour modéliser les maladies humaines. Les rats constituent la deuxième espèce animale la plus utilisée. Ces deux espèces représentent environ 96% de tous les animaux de laboratoire utilisés à l’UNIGE en 2023. Les 4% restants sont représentés par d'autres espèces telles que les lapins, les poissons, les porcs, les reptiles et d’autres petits mammifères. Aucun primate, chat ou chien n'est détenu pour la recherche à l'UNIGE. Les expériences menées sur ces différentes espèces peuvent varier énormément: le porc sera plutôt utilisé pour modéliser les procédures chirurgicales, les reptiles et d’autres petits mammifères pour des études observationnelles, la souris et le poisson pour étudier la génétique des maladies humaines. Des recherches sont par ailleurs menées sur des invertébrés. Les espèces les plus couramment utilisées sont la Drosophila melanogaster (la mouche du vinaigre) et le Caenorhabditis elegans (un petit ver de terre).

Lors de la conception d'une étude, les chercheurs et chercheuses doivent prendre en compte et les modèles animaux et les modèles alternatifs. Les animaux ne peuvent être choisis pour une étude que s'il n'existe pas d'alternative appropriée. Pour décider de l'espèce à utiliser, il faut tenir compte de nombreux aspects, tant scientifiques que pratiques. Certains de ces facteurs sont énumérés ci-dessous:

  • Quelle espèce fournit les meilleures données d'un point de vue scientifique?
  • Quelle espèce est la plus semblable à l'homme (pour les études qui visent à transposer leurs résultats en médecine humaine)?
  • D'un point de vue biologique, quelle espèce est la plus adaptée à l'étude?
  • Quelle espèce a déjà été utilisée pour des recherches similaires?
  • Quelle espèce présente le moins de danger pour l’expérimentateur ou l’expérimentatrice?
  • Quelle espèce permet d’utiliser le plus petit nombre d'animaux?
  • Quelle espèce est la plus pratique et la plus économique à acquérir, à utiliser et à héberger?
  • Pour quelle espèce des outils techniques sont disponibles pour obtenir des résultats valables?

La plupart des animaux sont élevés et hébergés dans les animaleries de l’UNIGE. Dans certains cas, ils sont importés d’autres animaleries, privées ou académiques. L'importation d'animaux est documentée et contrôlée.

La plupart des animaux utilisés en recherche ne subissent qu'un inconfort minimal de courte durée. Dans la plupart des situations, cet inconfort est comparable à celui ressenti par une personne lors d'interventions médicales de routine (injection, prise de sang, etc.). Selon les statistiques, en 2023, 9.1% de tous les animaux utilisés ont été classés au degré de gravité 3, la catégorie associée au plus haut niveau de souffrance.

La loi exige que toutes les mesures soient prises pour réduire la contrainte des animaux de laboratoire. Cela peut inclure, sans s'y limiter: l'analgésie, l'anesthésie, le remplacement de procédures invasives par des options moins invasives.

Dans une minorité de cas, les animaux sont soumis à des expériences plus contraignantes. Afin de minimiser les risques pour les humains, la toxicité d'un nouveau médicament peut être par exemple testée en premier lieu sur des animaux de laboratoire. Même dans cette situation, les chercheurs et chercheuses doivent toujours faire de leur mieux pour réduire la durée et la contrainte de l'expérience.

Dans le cas d’expériences qui infligent des souffrances à l’animal, des «critères d’intervention et interruption» doivent être établis à l’avance. Ces critères permettent de suivre certains paramètres – comme le comportement, la consommation de nourriture, le soin accordé par l’animal à son poil – et d’intervenir quand ces paramètres sont anormaux.

L'ordonnance sur l'expérimentation animale classe les contraintes subies par les animaux dans le cadre de l'expérimentation animale en quatre catégories, appelées degrés de gravité.

Degré de gravité 0
Interventions et manipulations d'animaux à des fins expérimentales qui n’occasionnent aux animaux ni douleur, ni dommage, qui ne provoquent pas d’anxiété et ne perturbent pas leur bien-être général. A l'UNIGE, en 2023, 12.0% de tous les animaux utilisés ont fait l'objet de manipulations classées dans le degré de gravité 0.

Degré de gravité 1
Interventions et manipulations d'animaux qui occasionnent aux animaux des douleurs ou des dommages, soit légers et de courte durée, soit qui perturbent légèrement leur bien-être général, comme des injections ou des prélèvements de sang pour des tests. A l'UNIGE, en 2023, 33.8% de tous les animaux utilisés étaient classés dans le degré de gravité 1.

Degré de gravité 2
Interventions qui occasionnent aux animaux des douleurs, des maux ou des dommages, soit de degré moyen et de courte durée, soit légers et de durée moyenne à longue, soit une anxiété moyenne de courte durée, soit une perturbation notable et de courte ou moyenne durée de leur bien-être général. Ce degré de gravité est notamment associé à des injections répétées ou à des infections par des bactéries pathogènes. À l'UNIGE, en 2023, 45.0% de tous les animaux utilisés étaient classés dans le degré de gravité 2.

Degré de gravité 3
Niveau de détresse le plus élevé associé à des interventions provoquant à moyen ou à long terme une douleur/souffrance/maladie/peur modérée ou sévère, tels les modèles de transplantation rénale ou de sclérose en plaques. A l'UNIGE, en 2023, 9.1% de tous les animaux utilisés ont été soumis à des expériences de degré de gravité 3.

34'724 animaux ont été utilisés en expérience en 2023; 92% de ces animaux étaient des souris. 39% étaient génétiquement modifiés; le poisson-zèbre, la souris, le rat, le serpent et le lézard sont les espèces avec des lignées génétiquement modifiées utilisées à l’UNIGE. Ces animaux ont été utilisés par 90 groupes de recherche, détenteurs de 310 autorisations au total. À noter que certaines autorisations actives n’ont pas mené à l’utilisation d’animaux durant l’année.

90'673 animaux ont été élevés ou importés dans les animaleries de l'UNIGE en 2023. Dans le cas de la souris et du rat, ce nombre représente les animaux sevrés 21 jours après la naissance. Dans le cas des poissons, il s’agit d’animaux qui se nourrissent par eux-mêmes (pour le poisson-zèbre, espèce de poissons la plus utilisée en recherche: à partir de 5 jours après fécondation de l’oeuf).

65% des rats, 40% des souris, 2% des poissons élevés ou importés ont été utilisés pour des expériences. Ces différences entre nombre d’animaux utilisés en expérience versus nombre d’animaux élevés s’expliquent principalement par le nombre élevé de lignées génétiquement modifiées de souris et poissons, qui nécessitent un effort d’élevage important. Dans le cas des poissons, le faible rapport s’explique par le fait que la plupart des expériences sont effectuées sur des individus âgés de moins de 5 jours. En effet, en accord avec l’Ordonnance pour la protection des animaux (OPAn), les larves de poissons qui ne se nourrissent pas encore par elles-mêmes peuvent être utilisées sans demander une autorisation aux autorités cantonales, c’est pourquoi elles ne sont pas répertoriées dans les statistiques sur l’expérimentation animale. En revanche, les animaux adultes élevés uniquement pour produire ces larves sont comptabilisés dans les animaux élevés.

Le nombre d’animaux utilisés pour des expériences ou élevés/importés en animalerie a augmenté en 2023 (+6.8%); il reste inférieur à celui de 2021 et similaire à celui de 2019. D’une manière générale, cette augmentation s’observe chez toutes les espèces principalement utilisées à l’UNIGE, notamment chez les souris et les rats qui représentent près de 98% des animaux utilisés (7% de souris et 6% de rats utilisés en plus en 2023 par rapport à 2022). En parallèle, le nombre d’animaux élevés/importés a augmenté de 9.6%.

En 2023, la proportion d’animaux ayant subi des contraintes sévères (degré de gravité 3) est restée stable par rapport à 2022 (9%). Depuis 2018, une hausse progressive du pourcentage des animaux en degré 3 a été observée à l’UNIGE, ainsi qu’au niveau national. Ceci s’explique en partie par l’entrée en vigueur fin 2018 d’une nouvelle classification appliquée depuis à toutes les nouvelles autorisations délivrées; p.ex. des procédures précédemment considérées comme étant de degré 2 sont désormais considérées comme degré 3. Ceci s’applique particulièrement dans le domaine des neurosciences, qui représente une part importante des recherches menées à l’UNIGE et qui toutefois n’a pas vu le nombre d’animaux utilisés dans ce domaine augmenter. Depuis 2022, toutes les autorisations utilisent désormais la nouvelle classification, amenant dès lors à une stabilisation des répartitions par degré de gravité

La quasi-totalité des animaux utilisés en expérience et qui ont subi une contrainte sévère (degré 3) sont utilisés dans le cadre de la recherche médicale, dans des études portant sur des maladies humaines graves. Lorsqu’aucune autre approche n’est possible, il est nécessaire de pouvoir reproduire ces maladies sur les animaux afin de pouvoir en comprendre les mécanismes et/ou développer de nouvelles thérapies. Parmi ces modèles souvent associés avec une contrainte sévère, nous pouvons citer par exemple chez les souris les modèles de sclérose en plaques, certains modèles de cancers agressifs (glioblastome, cancer du côlon ou du foie) ou des modèles de dystrophie musculaire. Certaines procédures chirurgicales complexes, associées avec un risque de mortalité inhérent à la procédure, telle que des chirurgies cardiaques, sont également considérées comme une contrainte sévère. Dans le cadre des études en neurosciences, un degré de sévérité 3 est systématiquement attribué aux études nécessitant de l’imagerie cérébrale durant laquelle les animaux sont immobilisés tout en effectuant une tâche comportementale. Ceci est nécessaire afin de permettre la visualisation de l’activité neuronale, indispensable à la compréhension des circuits cérébraux et des maladies associées.

Ces modèles doivent être précisément décrits dans les demandes d’expériences ainsi que toutes les mesures mises en œuvre pour réduire la contrainte, comme par exemple une surveillance rigoureuse et adaptée au modèle, un accès facilité à la nourriture et à l’eau pour les animaux avec une mobilité réduite, des critères d’interruption d’expérience clairs et précis, ou les critères d’euthanasie lorsque la contrainte est jugée trop lourde. Toutes ces informations sont prises en compte par les autorités qui, dans le cadre de la pesée des intérêts, décideront si ces contraintes sont justifiées ou non par l’importance et l’indispensabilité des connaissances apportées par l’étude. A noter que dans la plupart des cas, seulement une partie des animaux utilisés dans un projet spécifique subit une contrainte sévère de degré 3. A l’UNIGE en 2023, 16% des autorisations approuvées prévoyaient prospectivement une contrainte sévère pour au moins une partie des animaux et ce sont finalement 9% des animaux qui ont été classés rétrospectivement en degré 3.

Ces termes sont utilisés pour identifier la méthodologie de recherche employée pour une étude.

- in vitro désigne les études réalisées avec des cellules ou des molécules en dehors de leur contexte biologique normal. Un exemple est la culture cellulaire: ces cellules proviennent d'organismes vivants, pour être ensuite maintenues et multipliées en laboratoire. Des échantillons humains ou animaux, tels que du sang ou des biopsies, sont utilisés pour établir une culture cellulaire, partagées entre laboratoires et servant à répondre à des questions biologiques ou à tester des traitements. Les modèles in vitro sont souvent considérés comme des «modèles alternatifs», car après l’établissement de la méthode, aucun autre animal n’est utilisé.

- in vivo est utilisé pour les études dans lesquelles les effets des substances chimiques ou biologiques sont testées sur des organismes vivants. Cela inclut les animaux, les humains, les plantes, etc.  Les études in vivo sont privilégiées pour étudier les effets sur l'ensemble du corps d'un organisme ou pour étudier les interactions entre plusieurs types de cellules au sein d'un même organe ou entre plusieurs organes.

- ex vivo signifie «à l'extérieur d'un corps vivant». Contrairement à l'approche in vitro, tissus ou organes vivants sont prélevés, dans ce cas, directement sur un organisme euthanasié ou sous anesthésie. Les expériences se font ensuite sur l’organe ou le tissu prélevé et non sur l’animal vivant. 

- in silico désigne les expériences réalisées à l'aide d'ordinateurs, telles que les simulations. Elles permettent d'accélérer les découvertes et de réduire le recours à la recherche sur les animaux et les humains. En effet, des simulations peuvent par exemple réduire le nombre de conditions à tester et par conséquent le nombre d’animaux à utiliser.

Les questions scientifiques sont souvent abordées en combinant plusieurs approches, notamment des modèles in vitro, in silico et in vivo.

Les tests sur les animaux sont une petite composante de la recherche. Ils consistent à appliquer l'objet d'une étude (généralement un nouveau médicament ou une nouvelle substance) à des animaux de laboratoire afin d'évaluer ses effets et ses risques. Toutefois, pour qu'un nouveau médicament puisse être testé sur des animaux, il faut d'abord le découvrir. Ce processus de «découverte» correspond à la «recherche»: il représente l'aspect le plus intensif du processus car il se base sur les hypothèses novatrices des scientifiques. Il est difficile, prend du temps et nécessite souvent des animaux de laboratoire. Sans la recherche de base sur les mécanismes fondamentaux de la vie, il n'y aurait pas de nouvelle substance ou de nouveau médicament. En ce qui concerne les tests sur les animaux, des progrès importants ont été réalisés ces dernières années et de nombreuses méthodes d'expérimentation ont été remplacées par des méthodes sans animaux. Par exemple, une start-up de l’Université de Genève a développé des modèles de peau qui peuvent être utilisés sans avoir recours aux animaux; une autre a développé une technologie pour tester in vitro l'efficacité de molécules à potentiel pharmaceutique.

Dans la plupart des études, les animaux sont euthanasiés à la fin des expériences. Divers organes et tissus sont prélevés afin d’effectuer de nombreuses analyses moléculaires ou histologiques dont les résultats sont nécessaires pour compléter les données obtenues sur les animaux vivants. Au-delà de cette nécessité scientifique, ceci est également en ligne avec la règle des 3R qui préconise d’obtenir un maximum de données sur les animaux utilisés et de ne pas garder en vie des animaux souffrants sans que cela n’amène à de nouvelles connaissances. L’euthanasie doit être réalisée en suivant des règles très strictes qui sont définies dans les informations techniques 3.01 sur l’euthanasie des animaux de laboratoire de l’OSAV : le stress, l’anxiété, les douleurs doivent être réduits au maximum, l’animal doit être endormi et le décès doit être confirmé.

La méthode d’euthanasie recommandée et la plus fréquemment utilisée est l’injection de pentobarbital, qui permet une mise à mort rapide et sans douleur ; le pentobarbital est également une des molécules utilisées en Suisse pour le suicide assisté. Dans certaines études, cette méthode ne peut être utilisée pour des raisons scientifiques ou pratiques et est alors remplacée par d’autres techniques autorisées par la loi, telles que l’asphyxie au CO2 ou la dislocation cervicale sous anesthésie. La méthode d’euthanasie doit être décrite et justifiée dans chaque demande d’expériences sur animaux et est prise en compte dans la pesée des intérêts effectuées par les autorités.

Lorsqu’une euthanasie n’est pas nécessaire à la fin d’une expérience, les animaux peuvent être réutilisés dans le cadre de l’élevage, ou dans d’autres expériences. Ceci est toutefois soumis à autorisation de la part des autorités, qui évalueront si les contraintes subies par l’animal permettent une réutilisation ou non de celui-ci. Certaines institutions, telles que l’Université de Zurich ou l’EPFL, ont mis en place des programmes de « Re-homing » qui permettent à des animaux d’expérience ou d’élevage d’être adoptés, sous certaines conditions, par des privés dans le cadre d’une collaboration avec la Société Suisse de Protection des Animaux. Un tel programme n’est pas encore en place à l’UNIGE, cependant certains reptiles utilisés en expérience ou en élevage ont pu être donnés à plusieurs reprises à des parcs animaliers.

L'expérimentation animale et la loi

Selon l'art. 216 de l'Ordonnance sur la protection des animaux (OPAn), les autorités cantonales (SCAV et les membres de la Commission de l'expérimentation animale) sont tenues de contrôler l'exécution correcte des expériences sur les animaux pour au moins un cinquième du nombre d'autorisations en cours. Ils effectuent ainsi régulièrement des inspections pour contrôler que l'exécution des expériences soit conforme aux protocoles approuvés par les autorités.

En 2023, le Service de la consommation et des affaires vétérinaires (SCAV) a procédé dans le Canton de Genève à 68 contrôles d'expérience in vivo afin de vérifier si les conditions d'expériences décrites dans les demandes correspondaient à la réalité. Au total, 3 manquements ont été découverts lors de ces inspections. Il peut s'agir de manquements administratifs ou de non-respect du contenu de l'autorisation. Voir le rapport complet du SCAV pour l'année 2023.

À Genève, la Commission cantonale pour les expériences sur les animaux comprend une majorité de membres représentant la cause animale. Les associations de défense des animaux ainsi que des représentants d'organisations/entreprises proposant des méthodes alternatives figurent également au sein de la Commission fédérale pour les expériences sur animaux.

Composition de la CCEA (février 2024 à janvier 2029):

  • 1 représentante de la société genevoise des vétérinaires: Anneli Muser Leyvraz
  • 2 représentant-es des associations de protection des animaux dont le siège est à Genève: Marcel Gyger et Cristina Diamantini Trugenberger
  • 1 représentante de l’Université de Genève: Gaby Palmer-Lourenço
  • 1 représentante des laboratoires privés: Ebeline Cacquevel-Bihel (Bracco)
  • 1 spécialiste des méthodes alternatives: Jérémie Gafner
  • 1 bioéthicienne: Samia Hurst

L'expérimentation animale ne peut être pratiquée que par des professionnel-les ayant reçu la formation requise par la loi. En Suisse, le cours appelé Module 1 est obligatoire et enseigne aux scientifiques comment travailler avec des animaux et comment respecter la législation et les droits des animaux. Pour les scientifiques qui dirigent des expériences, un cours supplémentaire est requis (Module 2).

En outre, les chercheurs et chercheuses qui travaillent avec des animaux de laboratoire doivent suivre des cours de formation continue. Cela leur permet d'être au courant des dernières avancées sur l'expérimentation animale, facilitant ainsi la mise en œuvre du principe des 3R. Une personne qui n’est pas à jour dans sa formation continue ne peut être impliquée dans des protocoles utilisant des animaux, même si elle a suivi la formation de base.

La Suisse est, de notoriété, le seul pays au monde qui reconnaît et protège la dignité des animaux dans sa constitution. Ils sont protégés par la loi contre la souffrance, l'humiliation et les abus. Toute personne qui ne respecte pas les droits et la dignité d'un animal s’expose à subir des conséquences juridiques. Ce cadre légal s'applique à la recherche sur les animaux. Selon l'art. 4 de la Loi fédérale sur la protection des animaux: «Personne ne doit de façon injustifiée causer à des animaux des douleurs, des maux ou des dommages, les mettre dans un état d’anxiété ou porter atteinte à leur dignité d’une autre manière. Il est interdit de maltraiter les animaux, de les négliger ou de les surmener inutilement».

Tous les animaux utilisés pour la recherche à l’UNIGE sont hébergés dans des installations spécialement conçues pour respecter les exigences de la loi. L'environnement (température, humidité, lumière) est contrôlé pour répondre aux besoins de chaque espèce. Ces installations doivent être autorisées par les autorités cantonales avant toute utilisation. Elles sont contrôlées au moins une fois par an. Tout le personnel s'occupant des animaux reçoit une formation spécifique. Les conditions d'hébergement sont conçues en tenant compte du comportement et des particularités de chaque espèce. Les souris sont par exemple logées en groupe car ce sont des animaux sociaux. Les cages sont enrichies d'objets tels que des planches de repos, des objets en bois ou des matériaux de nidification. Ce dispositif réduit le stress des animaux et leur permet d'adopter des comportements similaires à ceux qu'ils manifestent dans la nature. Toutes les cages de même que les litières sont régulièrement nettoyées et désinfectées pour garantir un environnement propre.

Les chercheurs et chercheuses reçoivent un salaire de l'UNIGE, qu'ils ou elles travaillent ou non avec des animaux, ou grâce à des financements externes, ceux notamment du Fonds national suisse de la recherche scientifique. Dans certains cas, la recherche universitaire peut conduire à la création d'une entreprise privée pour développer et commercialiser un médicament, un test diagnostique, un instrument médical. Les personnes qui ont participé à la découverte ou invention peuvent devenir copropriétaires d'une entreprise, comme c’est le cas pour toutes les autres activités de recherches menées à l’UNIGE.

Voici un exemple d'entreprise créé par des scientifiques de l'UNIGE sur la base d'études sur animaux:

Diatheris - Solutions thérapeutiques pour le diabète.

Les méthodes alternatives

Les alternatives les plus connues à la recherche animale sont les cultures cellulaires, les organoïdes, les tissus humains, les modèles informatiques, les études sur des volontaires humains. Au sens de la loi, remplacer un modèle vertébré comme la souris par un modèle invertébré comme la mouche du vinaigre est aussi une méthode alternative. Ces méthodes sont toujours le premier choix des chercheurs et des chercheuses.

Toutefois, il n'est pas toujours possible de remplacer les animaux dans la recherche. Voici quelques exemples pour illustrer ce point:

  • Les cultures cellulaires et les organoïdes ne permettent pas d'étudier les interactions entre les organes ou entre les différentes parties du corps. Pour cette raison, les cultures cellulaires ne peuvent être utilisées que pour l'étude de concepts scientifiques fondamentaux ou pour des tests préliminaires.
  • La modélisation informatique est un outil très utile qui a beaucoup évolué ces dernières années. Cependant, les ordinateurs ne sont pas encore capables de modéliser parfaitement un organisme, pas même une seule cellule. Les algorithmes se basent en effet sur les connaissances déjà acquises par la communauté scientifique et doivent être continuellement enrichis avec de nouvelles connaissances pour rendre leurs prévisions de plus en plus correctes. Par conséquent, ces modèles sont surtout utilisés en complément de la recherche sur les animaux, ce qui permet de réduire le nombre d'animaux utilisés.

Le remplacement de la recherche sur les animaux par des méthodes alternatives est fortement soutenu par l'UNIGE et par la législation suisse. La loi n'autorise pas la recherche sur les animaux si le but expérimental peut être atteint par des méthodes alternatives. Le développement de méthodes qui ne nécessitent pas d’animaux progresse rapidement, mais à des vitesses différntes selon le type de recherche. Les scientifiques utilisent couramment des méthodes comme les cultures cellulaires, les organoïdes, les biopsies humaines, les simulations informatiques ou les volontaires humains. Ces nouvelles innovations permettent de remplacer une partie des expériences sur les animaux.

La recherche enregistre des progrès constants dans ce domaine. On sait désormais reproduire in vitro certaines tumeurs en trois dimensions pour tester les meilleures combinaisons de traitement. Le développement d’organoïdes est appelé à remplacer le modèle animal pour de nombreuses recherches. Paradoxalement, ces progrès ne seraient pas possibles sans la recherche animale: la révolution des organoïdes est née des analyses faites sur des animaux et c’est chez la souris que l’on a compris comment cultiver des morceaux d’intestin qui peuvent ensuite, pour certaines expériences, remplacer l’expérimentation animale.

En 2018, le Centre de Compétence 3R a été créé pour promouvoir la recherche de méthodes alternatives et moins contraignantes pour l'animal; l'UNIGE est membre fondatrice de ce résaux national. En 2022, le Fonds National Suisse a lancé le programme national de recherche «Advancing 3R – Animaux, recherche et société» (PNR 79) afin d'étudier comment faire progresser les 3R - remplacer, réduire et raffiner - de manière efficace, en identifiant et en abordant le potentiel, les défis et les limites de l'approche 3R.

 

Et l'éthique dans tout ça?

Les 3R sont un ensemble de principes qui guident l'expérimentation animale. Les 3R signifient Replace (Remplacer), Reduce (Réduire), Refine (Raffiner). Leur objectif est de garantir une utilisation éthique des animaux dans la recherche.

Remplacer: les méthodes qui ne nécessitent pas de recourir à l'expérimentation animale doivent toujours être utilisées si elles sont disponibles. En Suisse, cette règle est strictement appliquée. Les scientifiques ne sont autorisés à pratiquer l'expérimentation animale que s'ils/elles peuvent justifier qu'aucune méthode alternative n'existe pour répondre à leur question expérimentale. En outre, le développement de méthodes alternatives est encouragé et soutenu.

Réduire: ce principe stipule que les méthodes et les approches qui minimisent le nombre d'animaux utilisés pour une étude doivent être privilégiées. Cela est possible en optimisant le plan expérimental ou en analysant les données de manière plus efficace. Les études robustes et reproductibles entraînent une réduction du nombre d'animaux.

Raffiner: ce principe consiste à utiliser des méthodes qui améliorent le bien-être des animaux et minimisent leur souffrance. Le raffinement s'applique à tous les aspects de la recherche animale, des procédures expérimentales à l'hébergement et au choix des espèces modèles. Par exemple, les cages dans lesquelles les souris sont hébergées sont enrichies de différents objets, tels que des matériaux de nidification ou des objets en bois, afin de stimuler les animaux et de leur permettre de se comporter comme ils le feraient dans la nature. Autre exemple: lorsqu'une substance doit être administrée dans le cadre d'une expérience, elle peut dans certains cas être livrée dissoute dans une solution sucrée. L'animal l'accepte ainsi plus volontiers et cette action remplace l'injection ou d'autres options invasives.

Les chercheuses et chercheurs de l’UNIGE et des HUG sont activement engagé-es dans une politique 3R (Réduire, Raffiner, Remplacer) qui vise entre autres à réduire le nombre d’animaux utilisés. Cela est possible en utilisant des analyses statistiques qui permettent de calculer le nombre minimal d’animaux nécessaires pour obtenir des résultats significatifs. La combinaison de plusieurs expériences sur le même animal peut dans certains cas être acceptée pour réduire le nombre total d’animaux utilisés, surtout quand l’expérience ne nécessite que des analyses post-mortem. Le nombre d’animaux peut être aussi réduit en présélectionnant les conditions à tester sur l’animal à l’aide de modèles informatiques dits in silico ou des cultures cellulaires in vitro.

Les considérations éthiques sont le facteur le plus important qui empêche l'expérimentation directe sur les êtres humains. Les essais cliniques, c'est-à-dire l'expérimentation sur des patient-es et des volontaires, ne sont possibles que si les problèmes de sécurité ont été résolus. C'est pourquoi la recherche sur les animaux est nécessaire avant de tester des sujets humains. Une autre raison tient au fait que, dans la recherche, les variables environnementales (température, lumière, humidité, alimentation, etc.) doivent souvent être contrôlées afin d'isoler les effets du produit testé (par exemple, un nouveau médicament). Ceci n'est pas facilement applicable aux êtres humains. En revanche, il est possible de contrôler ces variables pour les animaux vivant dans une animalerie.

Pour se forger sa propre opinion

Il existe différents points de vue sur la recherche sur les animaux: l’éthique de la recherche, la protection des animaux, le rôle de l’espèce humaine dans la nature, l’importance du progrès humain sont des points de réflexions importants. Afin de se faire une opinion, il est important d’évaluer soigneusement toutes les parties et de pondérer les divers arguments. Afin de faciliter cette démarche, voici une liste de liens vers différentes organisations impliquées dans la recherche sur les animaux:

Fonds National Suisse, projets "éthique et société" du Programme National de Recherche n°79

Centre de Compétence 3R Suisse – encourage les principes 3R en Suisse.

Understanding Animal Research, UK – une organisation à but non lucratif qui explique pourquoi les animaux sont utilisés dans la recherche médicale/scientifique.

Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaire vétérinaires – l'autorité fédérale qui contrôle la recherche sur les animaux en Suisse.

Société suisse pour l'étude des animaux de laboratoire (SSEAL / SGV) – promeut les 3R, agissant en tant que partenaire des autorités, des scientifiques et du public.

Animal Research Tomorrow (ART) - une ONG internationale qui promeut une recherche animale éthiquement responsable et à la pointe de la technologie, ainsi qu'une communication scientifique proactive.

Association pour l'égalité animale – une association qui vise à mettre fin au spécisme et souhaite une société égale pour tous les animaux.

Recherche pour la vie - vise à informer le public sur les objectifs, l'importance et les derniers résultats de la recherche biomédicale.

Animal-free research – une fondation qui encourage la recherche sans animaux.

Ligue Suisse contre l’expérimentation animale et pour les droits des animaux (LSCV) - fondée à Genève en 1883, dans le mouvement antivivisectionniste né en Angleterre dans les années 1870.

Animal Protection Index – un site web qui classe les pays en fonction de leurs normes en matière de bien-être animal.

Un documentaire sur la recherche animale utilisant les primates, produit par l'Ernst Strüngmann Institute (ESI) pour les neurosciences.