1939-03-28, Henry Corbin à Denis de Rougemont
Excuse-moi d’avoir laissé passer tous ces longs jours avant de répondre à ta lettre. Nous comptions monter à la Celle dimanche dernier, mais ça n’a pas marché. Naturellement oui, toujours entendu pour le projet Fayard. Mais il faut parler ensemble, faire quelque chose de neuf, ne pas recommencer toujours les mêmes vieilles histoires. Nous avions émis déjà quelques idées.
Écoute, voulez-vous venir dîner vendredi prochain 31 mars ? On vous attendra à 19 h ½ (= 7 h 30). On ne sera que tous les quatre, pour bavarder dans tous les sens et vous laisser toute liberté pour votre train. — On parlera de ton livre plein de verve. Je me réjouis du malheur des « histôriens », et ce ne sont pas tes démonstrations historiques qui à leur tour me gênent. Seulement, c’est très net. Je suis alors un cathare, un manichéen, etc. Quant à Tristan, mon vieux, non ! Je n’ai jamais douté de lui, et quant à en rapprocher tous nos agités, nerveux et faux passionnés, non plus ! Mais c’est trop compliqué à écrire sur ce bout de carton postal !
[p. 2] Il est presque sûr que nous irons à Athènes et « Byzance » en septembre et octobre, si le monde ne croule pas d’ici là, ce pour quoi il n’y aurait d’ailleurs aucune « raison suffisante ». — Puissiez-vous donc venir vendredi, que nous parlions de mille choses. On ne s’est pas vu depuis début janvier.