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1931-03-12, Denis de Rougemont à Antoinette Petitpierre

Chère Toinette,

Merci de me donner des nouvelles de Papa.

 

Voilà une lettre qui a tourné court ! Mais le papier est tiré… J’arrive vendredi matin 27, pour assister au mariage civil, l’après-midi. Et je compte fermement rester jusqu’au lundi de Pâques — inclus. C’est un peu un coup de tête de ma part, mais ma santé chancelante m’y oblige, j’ai, je crois, mauvaise mine, et je me sens assez affaibli.

[p. 2] Merci de m’héberger du 28 au 29, je comptais bien te le demander, je l’avoue ! Mais c’est toujours agréable d’être prévenu dans ses désirs.

J’essaierai de me laver de tes reproches virulents. Et nous dirons le mal qu’ils méritent des Neuchâtelois qui ne vont pas aux conférences de Max. Je serais censé faire un petit discours au banquet nuptial, mais la présence de la famille genevoise de Roland m’en retiendra sûrement. Ce sont des gens qui me détestent et que je n’estime guère : ma verve en serait quelque peu refroidie. Je dois aussi faire des couplets : j’ai, à ce jour, écrit 2 strophes ½.

[p. 3] Un autre que moi deviendrait fou : comme je le suis déjà, ce n’est pas grave.

Je refuse ce soir : une loge à l’Opéra puis un bal. Je demande un « bon témoignage de satisfaction ». Également refusé des choses pour samedi, dimanche, lundi passés. Je suis un type !!

Me réjouis tant et plus de cette semaine à Areuse et vous embrasse en famille.
D.

 

P.-S. Tu serais gentille de tél. Areuse 34.02 pour dire que j’arrive. Merci !

[p. 4] 2e P.-S. Le bruit court à Paris que Titine était très mignonne à je ne sais plus quelle noce. Il ne faut pas le lui dire !