[p. 1]

1949-03-30, Alice de Rougemont à Denis de Rougemont

Mon cher Denis,

Merci de ton envoi auquel j’ai été très sensible ! J’ai lu avec émotion l’article, et ce que dit M. Loosli. « Tout penseur est un champ de bataille entre Dieu et le diable, et toute incarnation est un acte héroïque ». — Quelle responsabilité pour un homme en vue ! Que Dieu t’y aide journellement !

Quel éloge sur Nicolas de Flue ! Voilà qui est une bonne récompense !

J’écoute avec grand intérêt tes messages à la radio et admire la variété que tu sais y mettre. Tante Thérèse est une de tes auditrices enthousiastes.

Te voilà enfin un peu tranquille ! À propos, dois-je toujours t’envoyer des lettres à la rue des Granges, ou me donnerais-tu l’adresse de ton bureau ?

J’aimerais bien avoir un mot de Nanette, et repense souvent à son séjour. Merci de votre invitation, mais c’est Anne-Marie qui désire aller chez vous et ce serait une bonne occasion de vous voir, entre « jeunes ». — Ce n’est pas que l’envie me manque de vous revoir, et de revoir ce [p. 2] pays sympathique. Voilà ce qui en est pour moi. Les Oncles Henry annoncent leur retour pour dimanche, avion Alger-Lyon. Ils ont eu froid presque tout le temps. Ils me demandent de rester encore quelques jours avec eux, puis Toinette compte sur moi pour garder Gilles à la maison en son absence. Elle désire avec raison que Max prenne des vacances. Ils iraient en France avec les 3 aînés (François doit revenir la semaine prochaine). Ce serait avant Pâques, car Max est pris le 21 avril. — Je me réjouis d’être au bout de ma … garde. — Les lettres pour les Oncles Henry s’accumulent, etc. Mais ce séjour dans la vieille maison a été une grande joie. — Heureusement que tu y es venu une fois, ainsi que Simonne et Nanette.

J’attends tante Lily de Botzheim — qui a gardé un excellent souvenir de la petite, coup de foudre de part et d’autre !

J’espère avoir Nicolas chez moi, cet été, puisqu’il n’est pas venu ici, et vous aussi du reste.

Vu hier une exposition extraordinaire de Montandon (fils du peintre Delachaux adopté par la dame de ce nom) : sujets bibliques, ou de la guerre d’Espagne, macabres et tragiques, mais il est puissant à sa manière. — Oncle Edmond est en ce moment à Paris chez Pierrette.

[p. 3] Tante Beth se complaît à la clinique grâce à un don de la Caisse de famille. Elle va beaucoup mieux, mais de là à reprendre son ménage, il y a loin.

Nanette a-t-elle recommencé l’école ? Embrasse-la tendrement pour moi, a-t-elle employé son jeu du « Solitaire ». Beaucoup de messages pour tous. Merci bien vivement de ta lettre. Dois-je te renvoyer l’article ?

Ta mère aff.
A. de R.