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1949-11-05, Alice de Rougemont à Denis de Rougemont

Mon cher Denis,

J’étais sur le point de te répondre, quand j’ai pensé que tu partais pour Paris. J’espère que ton voyage t’a donné satisfaction et que le mouvement avance. Il faut que j’écrive à l’adresse de « Stéphane » que tu as donnée à Lausanne. Auras-tu encore trouvé Anne-Marie chez toi ? Te voilà seul, en face de ces terribles déterminations à prendre ! — Tâche d’être aussi calme que possible, c’est mieux à tous égards, et c’est plus habile. — Je pense spécialement à toi. — Tant mieux si Simonne peut aller chez sa mère, mais que lui aura-t-elle raconté ? Ainsi qu’à sa sœur. — Il faut avaler toutes ces couleuvres et rester digne, comme tu l’as été jusqu’à présent. — Les pauvres enfants savent-ils quelque chose ? Je comprends que tu tardes le plus possible à leur parler.

Nous avons été dire adieu [p. 2] aux Oncles Louis dimanche soir à la gare de Neuchâtel. Oncle Louis m’a tendu un billet pour mon chauffage au dernier moment. — Pourvu que le rhume de Tante Grace ne s’aggrave pas en route. Ils doivent voguer ces jours-ci. Oncle Henry est à l’hôpital de la Providence et très bien soigné, mais la plaie à la jambe continue à lui faire très mal, et il a de la fièvre. Il est d’une patience exemplaire, à suivre son traitement. Mme Pradel a bien reçu la photo, et tu es en bonne place dans sa librairie.

J’aime à croire que le mazout marche bien chez vous ! C’est urgent ! Ici le central nous chauffe assez bien avec l’aide des poêles.

J’aimerais t’insuffler du courage et te dis toute mon affection. Le bien finira par sortir du mal, j’en suis persuadée.

Bons baisers à vous tous.
Maman