1985-06-03, Alexandre Marc à Denis de Rougemont
Le 3 juin 1985
Il y a quelque chose qui ne va pas. Dans ma dernière lettre (la cinquième de celles qui sont restées sans réponse), je t’avais suggéré de m’envoyer un témoignage écrit que je voudrais pouvoir publier, pour mon attitude à l’égard du nazisme, dès le début des années 1930. Je crois que tu es le seul survivant — en tout cas le seul véritable ami — qui puisse produire aujourd’hui un tel témoignage.
Or je ne conçois [p. 2] même pas que vous ayez pu, Nanik et toi, laisser un tel appel sans aucune réponse, tout en me sachant malade et déprimé. Nous finissons par envisager toutes les hypothèses : seriez-vous gravement malades ? — seriez-vous partis… sans faire suivre votre courrier ? — mes lettres ont-elles été interceptées ? — auriez-vous été enlevés par des terroristes ? Enfin, quoi ?… que faut-il en penser ?
Nous vous demandons très amicalement de réagir à cette lettre — sans quoi, il ne nous restera d’autre moyen, pour essayer d’avoir de vos nouvelles, que d’alerter quelqu’un, à Genève, où l’on doit tout de même savoir ce que vous êtes devenus.