Sociograph - Sociological Research, Study n°8
"Nous, on soigne rien sauf des machines". Le pouvoir insoupçonné des aides-soignants en Anesthésie.
Sous la direction de Mathilde Bourrier
Aristoteles Aguilar, Mathilde Bourrier, Ekaterina Dimitrova, Solène Gouilhers, Marius Lachavanne, Mélinée Schindler, Marc Venturin
Cette enquête menée sur une année universitaire de septembre 2008 à juin 2009 s'est déroulée auprès des aides-soignants en anesthésie aux Hôpitaux Universitaires de Genève (HUG). Elle a mobilisé 6 étudiants du Master en Sociologie de première année de l'Université de Genève.
Notre étude témoigne des trésors de oordination que les aidessoignants doivent développer chaque jour, afin de recueillir les informations indispensables à la réalisation des tâches qui sont de leur ressort. Loin de constituer des isolats au sein des blocs, les aidessoignants, dominés numériquement, socialement et symboliquement par les autres acteurs, sont parvenus, malgré les distances à franchir, à constituer un groupe à la solidarité que nous avons qualifiée de contingente ou d'immédiate. Certes, il y a du "donnant-donnant" (pour reprendre leurs propres termes) dans les actions des aides; certes, l'émergence de leaders informels se fait difficilement, tout comme la revendication assise sur l'expression du groupe dans son entier, au point même que l'on arriverait à douter de l'existence de ce groupe social en tant que tel. Pourtant, ce groupe parvient à dégager des pistes de promotion informelle pour ses membres. Les quelques notions de comptabilité de l'un, la grande maîtrise de la décontamination de certains matériels de l'autre, le goût pour le traitement logistique d'un autre encore, offrent ainsi une diversification des situations au travail, et permettent le développement de carrières informelles et officieuses, "à l'horizontale", dans le secret des sous-sols des blocs. C'est de cette mécanique sociale, usant de beaucoup d'ingéniosité organisationnelle, que le présent rapport cherche à rendre compte.