Dre Nolwenn Buhler, Unisanté, centre universitaire de médecine générale et santé publique et Institut des sciences sociales Unil
Entrer en prison: quelle éthique pour la recherche en santé dans une institution carcérale.
Cette présentation se penche sur l’accès à un terrain considéré comme sensible - les prisons - dans le cadre d’un projet interdisciplinaire – épidémiologie et anthropologie médicale – qui a pour objectif d’évaluer la séroprévalence de la population incarcérée et d’explorer les implications et difficultés soulevées par la gestion de la pandémie en prisons en partant des expériences des détenus et professionnel.le.s de santé et sécurité y travaillant. Revenant sur l’expérience d’entrée sur le terrain et l’élaboration du protocole de recherche pour la commission d'éthique, cette présentation permettra d’éclairer certains enjeux soulevés par l’éthique de la recherche, notamment entre éthique procédurale et relationnelle, dans le cadre de projet interdisciplinaires - sciences sociales et sciences médicales. Elle montrera comment au travers de l’élaboration du protocole éthique et des discussions autour d’une convention de recherche, c’est la légitimité de la recherche sur le terrain, les réalités professionnelles qui s’y jouent et les rapports entre les différents acteurs impliqués qui sont négociés. Elle permettra ainsi de réfléchir de façon plus large au rôle que joue l’éthique dans l’accès au terrain et la production de connaissances pour des sciences sociales embarquées en santé publique.
Pre Maria Caiata-Zufferey, University of Applied Sciences and Arts of Southern Switzerland: Manno, Ticino
La recherche sociale dans les lieux de soins : une activité prudentielle.
Les études en sciences sociales dans les lieux de soins s’accompagnent souvent de blocages, voire d’ajustements méthodologiques forcés, faute de mener à terme le travail de recherche initié. Derrière ces blocages se cachent des logiques d’action différentes et parfois contradictoires de la part des acteurs impliqués - d’une manière ou de l’autre - dans le processus de recherche. A partir d’expériences personnelles de blocages lors de projets de recherche dans les lieux de soins, je mettrai en évidence certaines des logiques des acteurs en jeu, ainsi que les stratégies utilisées pour les gérer. Je vais ainsi soutenir la thèse selon laquelle la recherche sociale dans les lieux de soins est une activité prudentielle au sens aristotélicien du terme : évoluant dans une situation d’incertitude, le chercheur doit faire preuve de sagesse pratique, de manière à répondre aux exigences de la situation particulière tout en inscrivant son action dans un cadre de validité reconnue.
Dre Marlyse Debergh, Fonds national suisse de la recherche scientifique, Department of Anthropology, University of Amsterdam et chercheuse associée à Institut de recherches sociologiques, Université de Genève
Les enjeux éthiques et politiques du non-accès à un terrain ethnographique sur les avortements « tardifs ».
Cette communication a pour but d’établir une réflexion sur les enjeux éthiques et politiques du non-accès à un terrain ethnographique portant sur le vécu des femmes ayant un avortement « tardif » en Suisse romande. Dans une perspective sociologique et féministe, j’analyse les (non-)négociations avec le terrain afin de mieux comprendre les problématiques actuelles des enquêtes menées en milieux hospitaliers et de trouver des solutions collectives.
Dr. Benjamin Derbez, Maître de conférence, Université de Paris 8, Chercheur au Centre de recherche sociologiques et politiques de Paris.
Titre : Quelle autonomie pour les sciences sociales sur les terrains hospitaliers ? Réflexions à partir d’expériences de recherche en France.
En sciences sociales, l’intérêt porté aux questions de santé semble poser inévitablement la question l’autonomie de nos disciplines. Si l’on a longtemps pu faire fond, par exemple, sur le caractère heuristique de la distinction entre une sociologie « sur » la médecine et une sociologie « dans » la médecine, force est de constater que ce dualisme ne résiste guère à l’épreuve de l’accès aux lieux de soins. Les dispositifs d’enquête et les configurations de recherche négociées avec les acteurs de terrain constituent en effet autant de manières de situer notre travail par rapport à des représentations qui tendent à l’assigner soit à une fonction « critique », soit à un rôle d’« auxiliaire ». Ces négociations, nécessaires pour accéder aux terrains hospitaliers, signent-elles cependant une perte d’autonomie pour les sciences sociales ? En m’appuyant sur les travaux de terrain que j’ai menés en France ces dernières années, je montrerai comment l’éthique de la recherche constitue l’un des lieux privilégiés où se joue aujourd’hui la réponse à cette question en santé.
Pre Rose-Anna Foley, Professeure associée, HESAV, HES-SO, et Coresponsable de la Plateforme de Recherche Qualitative, secteur sciences sociales (DESS), Unisanté, Lausanne.
Entre activités mandatées par des services de soins et production de recherche en sciences sociales : retour sur quelques modalités d’entrée sur le terrain et implications pour les professionnel.le.s de santé.
Cette communication revient sur différentes modalités d’entrée sur le terrain dans le cadre de recherches ethnographiques et d’activités mandatées par des services de soins pour aborder les opportunités et limites d’une posture anthropologique « impliquée » prenant compte des questions et de savoirs des professionnel.le.s sur leur propre pratique. Une telle approche requiert, d’une part, de mettre au jour les implicites quant aux retombées cliniques et, d’autre part, de mettre en dialogue des résultats envisageant les pratiques soignantes et expériences subjectives dans une perspective sociétale plus large, souvent à l’aune de théories de transformation et de justice sociale.
Pre Irène Maffi, Faculté des sciences sociales et politiques, Université de Lausanne
Faire de l’ethnographie à l’hôpital en Suisse : Entre bureaucratie de l’éthique, pouvoirs institutionnels et relations personnelles.
Dans cette communication, j’entends réfléchir sur mes expériences ethnographiques au sein de deux hôpitaux suisses au cours de dix dernières années afin de mettre en avant tant les obstacles que les éléments qui ont facilité mon travail de recherche. Bien que je n’aie jamais été confrontée à un refus de terrain, j’ai rencontré plusieurs difficultés liées moins à des barrières institutionnelles qu’à des logiques de fonctionnement internes aux institutions qui parfois ont créé de la méfiance ou de l’hostilité auprès des professionnel.le.s de santé. Les relations personnelles avec les soignant.e.s jouent un rôle central dans la possibilité de mener à bien une recherche dans la mesure où elles permettent d’accéder à des espaces et à des interactions autrement fermées à l’anthropologue ou sociologue. Dans mon expérience, la réussite de la collaboration avec les soignant.e.s passe par la construction d’un véritable projet commun incluant des retours aux équipes et des échanges qui peuvent donner lieu à des publications communes ou à des réunions scientifiques.
Pre Patricia Perrenoud, Haute Ecole de Santé Vaud (HESAV), HES-SO Haute école spécialisée de Suisse occidentale, Clara Blanc, Haute Ecole de Santé Vaud (HESAV), HES-SO Haute école spécialisée de Suisse occidentale et Institut des études genre, Université de Genève, Dre Solène Gouilhers, Institut des études genre, Université de Genève.
De « nos portes vous sont ouvertes » à « on n’a pas besoin de vous » : accueil, freinages et blocage dans l’accès au terrain hospitalier
Sur la base d’expériences de négociation d’enquête dans différents lieux de soin, cette présentation vise à interroger les tensions entre les enjeux de la recherche en sciences sociales et ceux de la formalisation des terrains d’enquête. Il s’agit de saisir les rapports de pouvoir, y compris entre les professionnel.le.s de l’hôpital, ainsi que les conceptions de la recherche qui se jouent dans les négociations d’accès au terrain. La multiplication des acteurs et les contraintes temporelles seront également discutées.