Observatoire des familles

Les thématiques de recherche de l'Observatoire des familles

 1. Personnes âgées

Les nouvelles formes familiales contribuent à diversifier les structures familiales des individus, y compris celles des plus âgés. De nombreuses études en gérontologie sociale ont questionné des personnes âgées fragilisées sur les membres importants de leur famille. Si les enfants et le/la partenaire sont majoritairement cités, les amis sont mentionnés quasiment aussi fréquemment que les membres de la fratrie. Un certain nombre de personnes, visiblement très isolées, ne cite aucun membre significatif de leur famille, ce qui est une donnée importante vu que le sentiment d’isolement est l’un des facteurs de risque les plus importants pour la santé. Dans ce groupe, il y a une majorité de personnes âgées veuves ou divorcées, sans enfant et disposant de peu de moyens financiers.

2. Liens intergénérationnels

Au sein des familles, étant donné la prévalence des normes d’entraide et de solidarité familiale, les liens intergénérationnels sont une source très importante de soutien. La dépendance du jeune enfant comme de la personne âgée fragilisée crée des attentes à l’égard des autres membres de la famille, qui entrent parfois en conflit avec les aspirations individuelles. Basée sur la réciprocité des échanges intergénérationnels à travers le temps, la solidarité familiale est une des sources principales de soutien, mais aussi un facteur de tensions et d'ambivalence car liée à un ensemble de contraintes.

En 2018, l’Observatoire des familles a réalisé une recherche sur les relations entre proches aidants et personnes dépendantes, qui montre que malgré la présence étendue de l’aide formelle à Genève, la famille n’en demeure pas moins importante dans son rôle de soutien au parent âgé. Les membres de la famille apportent principalement une aide relationnelle et un soutien émotionnel aux personnes âgées, faisant le plus souvent appel aux services formels pour les soins pratiques. La relation entre le proche aidant et la personne aidée peut être si prenante, qu’elle affecte l’ensemble du réseau familial, amical et social du proche aidant.

 3. Garde extrascolaire et extra-familiale

La demande de prise en charge des enfants est fortement corrélée à la conciliation vie familiale vie professionnelle. Avec l'augmentation du travail féminin durant ces dernières décennies, on estime qu’à Genève environ les trois quarts des enfants d'âge préscolaire et scolaire sont concernés par une prise en charge extra-familiale d'au moins une demi-journée par semaine. En Suisse, la demande de prise en charge des enfants a eu tendance à augmenter plus vite que les capacités d'accueil. Même si les cantons urbains, comme Genève, sont comparativement mieux dotés en place d’accueil et structures que les cantons ruraux, leur nombre, leurs horaires et leurs tarifs font que les familles continuent néanmoins à recourir à d’autres types d’aide, notamment familiale.

 4. Vulnérabilités

La complexité de la vulnérabilité des familles à Genève a été soulignée lors des discussions organisées en 2017 par l’Observatoire des familles avec des professionnels. Tous s’accordent sur le fait que la vulnérabilité renvoie à un manque marqué de ressources, qui empêche les individus de s’adapter à de nouvelles situations ou aux événements importants auxquels ils sont confrontés. Les ressources manquantes peuvent être de différents types – psychiques, relationnelles et socio-économiques – faisant de la vulnérabilité une réalité complexe, multidimensionnelle et se situant à plusieurs niveaux. Pour certains, la vulnérabilité psychique, plutôt liée à l’individu, est le principal facteur explicatif de la vulnérabilité, alors que pour d’autres, la vulnérabilité familiale concerne plus particulièrement les catégories de la population caractérisées par une précarité financière chronique. Finalement, pour un certain nombre d’entre eux, l’évolution de la société et des institutions (école, marché du travail, etc.), marquée par l’instabilité et la sélectivité, tendent à vulnérabiliser de plus en plus de familles genevoises. 

L'étude de la vulnérabilité dans les parcours de vie qui se trouve au coeur du Pôle national de recherche LIVES – Surmonter la vulnérabilité: perspective du parcours de vie (PRN LIVES)  propose un cadre théorique utile pour l'analyse de la vulnérabilité des familles vivant dans le canton de Genève. Il souligne l'aspect temporel de la vulnérabilité, l'exposition de la personne ou du groupe à certains risques et le cumul éventuel de ces risques, ainsi que la capacité des membres de la famille, individuelle et collective, à mobiliser des ressources adéquates pour répondre aux risques rencontrés.

5. Garde parentale après séparation

Dans la législation suisse, même si le modèle d’un partage égalitaire de la garde des enfants et de l’autorité parentale a la faveur du législateur, il n’est pas prescrit comme modèle unique. Dans la pratique, on admet avoir affaire à une garde alternée à partir d’une prise en charge d’au moins 30% de l’enfant par un des parents.

La garde alternée favorise l’approfondissement du lien entre l’enfant et ses deux parents, ce qui est positif pour le développement psychique de l’enfant. Néanmoins un certain nombre de critères s’avèrent nécessaires pour qu’elle soit pratiquée dans de bonnes conditions pour l’enfant, qui sont : une bonne coparentalité et un mode de gestion efficace des conflits ; une capacité éducative suffisante chez les deux parents ; une maturité affective et cognitive chez l’enfant pour la gestion des transitions d’un lieu de vie à l’autre ; des ressources financières suffisantes des deux parents.

La garde alternée ou partagée s’inscrit dans une tendance législative qui se retrouve à l’échelle européenne et qui reflète l’évolution des pratiques familiales dans le sens d’une plus grande équité dans la répartition des tâches éducatives et domestiques au sein des foyers.

6. Covid-19 et familles

La pandémie de Covid-19 a bouleversé les équilibres familiaux en contraignant les familles à partager dans le même lieu – le domicile - des activités qui auparavant se déroulaient à l’extérieur (travail avec le télétravail, école avec l’enseignement à distance, gymnastique en visioconférence,…) tout en réduisant drastiquement les liens avec les personnes de la famille vivant dans d’autres foyers, comme les grands-parents, par exemple. Les familles ont également été éloignées du réseau amical, ce qui s’est révélé source de frustrations particulièrement chez les jeunes au fur et à mesure que la crise sanitaire s’est prolongée. Cette crise sanitaire a rapidement eu des conséquences sur la situation économique à travers toute l'Europe avec la disparition d’emplois temporaires et la fermeture de larges pans de l’économie, notamment celui de la restauration et du divertissement. Depuis le printemps 2020, les sources de stress se sont donc multipliées pour les individus tandis que les Etats ont, dans l’urgence, tentés d’apporter un soutien aux entreprises et aux personnes en difficulté.

A travers l’analyse de la presse de 7 pays européens (Allemagne, Angleterre, France, Pays-Bas, Russie, Suède et Suisse), l’Observatoire des familles a réalisé une étude exploratoire des liens entre l’Etat, les associations et les familles dans différents contextes de confinement et dans différentes représentations du rôle des pouvoirs publics à travers plusieurs thèmes qui sont apparus constants dans la presse européenne (scolarisation des enfants à domicile, situation financière des familles, inégalités de genre, nouvelles formes familiales, violences domestiques et personnes âgées).

  • Widmer, E.D, de Bel, V., Ganjour, O., Girardin, M., Zufferey, M.-E. (2020). Dynamiques familiales et covid-19 : réactions à la période de confinement. In Covid-19, le regard des sciences sociales. Gamba, F., Nardone, M., Ricciardi, T., Cattacin, S., Editions Seismo, pp. 159-177.

7. Décrochage scolaire

Le canton de Genève s’inscrivant dans une économie tertiaire, la demande pour des employés hautement qualifiés est forte. Dans ce contexte, rester sans formation ou sans emploi pendant plus d’une année à la fin de la scolarité obligatoire multiplie le risque de disqualification sur le marché de l’emploi tout au long du parcours de vie. La lutte contre le décrochage scolaire est devenue une préoccupation majeure des institutions en charge de l’instruction publique, notamment dans le canton de Genève dont une loi prévoit l’obligation de proposer des offres de formation pré-qualifiantes jusqu’à la majorité (FO18 – Loi sur l’instruction publique 11470). Agir lors du décrochage, mais aussi agir en amont car le décrochage est un processus qui débute souvent dès les premières années d’école primaire, est, selon les professionnels, nécessaire pour éviter que les jeunes s’éloignent de leur parcours de formation et se désinsèrent socialement. Etant donné qu’il reste largement une conséquence des inégalités sociales, il interpelle aussi l’institution scolaire en tant que facteur d’égalité des chances.

Quel rôle jouent les familles dans ce processus de décrochage et quelles ressources peuvent-elles activer pour en sortir ? Est-ce que certains modes de fonctionnements familiaux favorisent ce processus ? Comment les milieux associatifs, le département de l’instruction publique et les familles peuvent collaborer pour aider le jeune à retrouver rapidement un parcours de formation ?

Après plus d’une année de recherche sur le sujet, l’Observatoire des familles a présenté ses résultats lors des Assises 2021 et en a publié la synthèse dans un Sociograph.