2017

Pour étudier l’air, passons par l’eau!

Des scientifiques de l’Université de Genève (UNIGE) ont découvert que l’étude des masses d’eau permet l’analyse des aérosols organiques, qui influencent la formation des nuages.

Les aérosols sont un ensemble de fines particules, biologiques ou autres, en suspension dans un milieu gazeux. Ils jouent un rôle capital dans la formation des nuages, et donc sur les modèles climatiques. Ils sont toutefois extrêmement difficiles à étudier, du fait de la petite taille et de l’immense variété des particules qui les composent. Des chercheurs de l’Université de Genève (UNIGE) ont pourtant réussi à relier la composition des aérosols organiques, et donc leur influence sur le climat, à celle des masses d’eau de l’océan Atlantique lors de l’expédition PlanetSolar Deepwater. Ils ouvrent ainsi la voie à une étude détournée de ces aérosols à travers l’analyse de l’eau. Cette recherche, à lire dans Scientific Reports, permettra d’accroître la précision des modèles climatiques.

Les aérosols sont de fines particules en suspension dans l’air. Au-dessus des océans, certaines d’entre elles contiennent des composés organiques ou biologiques (bactéries, produits de dégradation d’algues microscopiques) qui proviennent des embruns, d’autres sont transportées dans les airs (poussières minérales, fumées). Elles servent de germes pour la formation des nuages et réfléchissent également la lumière. Comprendre leur rôle est ainsi extrêmement important pour la modélisation des nuages, et donc pour le climat en général. Pourtant, de par la petite taille des particules et leur grande quantité, il est difficile de les étudier avec précision. Les chercheurs de l’Université de Genève (UNIGE) se sont alors demandés s’il serait possible de caractériser les aérosols biologiques grâce à la composition de l’eau de laquelle ils émanent.

«Pour répondre à cette question, nous avions besoin de deux outils», explique Jérôme Kasparian, professeur au Département de physique appliquée de la Faculté des sciences de l’UNIGE. «Le premier est un détecteur de fluorescence que nous avons conçu, nommé Biobox, et qui permet d’analyser une par une les particules des aérosols. Le spectre nous donne ainsi des informations sur leur composition et distingue les particules organiques, qui sont fluorescentes, des autres particules. Ensuite, nous avions besoin de PlanetSolar». En effet, cette recherche ne pouvait se faire que sur une longue période et sans perturbation de l’eau ni de l’air. Seul le bateau PlanetSolar, en mer durant trois mois et qui ne produit aucune émission lors de ses déplacements, rendait cette opération possible.

Lors de cette expédition, les scientifiques ont effectué des analyses de la salinité, de la température, de l’oxygène dissout et des micro-algues contenues dans les diverses masses d’eau de l’Atlantique et ils ont comparé ces données à celles obtenues par la Biobox. «Et nous avons trouvé une concordance !», s’exclame Jérôme Kasparian. En effet, les physiciens ont découvert que les aérosols organiques sont liés à la température et à la salinité de la mer. L’eau, en fonction des critères précédents, créée de grandes masses qui ne se mélangent pas entre elles, ce qui permet de les différencier. Ainsi, lorsque les caractéristiques d’une masse d’eau ont été favorables à la reproduction de micro-algues, les chercheurs ont constaté qu’au bout d’un certain laps de temps, les aérosols détectés au-dessus de cette même masse d’eau contenaient davantage de particules organiques. La fraction organique des aérosols est ainsi liée à l’histoire de l’activité biologique des masses d’eau proches de la surface. «Sous réserve que cela soit valable ailleurs que dans l’Atlantique, notre lieu de recherche, ces résultats permettraient d’estimer les aérosols biologiques en étudiant directement les masses d’eau, ce qui simplifierait les mesures et accroitrait la précision des modèles climatiques», ajoute Jérôme Kasparian. Difficiles à étudier directement, les aérosols le sont à présent via la mer qui elle, peut être analysée facilement depuis les satellites.

Contact :

Pour obtenir de plus amples informations, n’hésitez pas à contacter le Professeur Jérôme Kasparian (Tél. +41 22 379 05 12).

31 mars 2017
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