La reconstruction sera examinée sous l’angle académique lors de la table ronde qui réunira un chercheur et une chercheuse réfugié-es de l’UNIGE – l’Ukrainienne Iryna Sotnyk, économiste spécialisée dans les questions énergétiques et environnementales, et le Turc Serkan Seker, politologue s’intéressant à la corruption politique – ainsi qu’un professeur en sciences appliquées, Thomas Rohner du Département architecture, bois et génie civil de la Haute École spécialisée de Berne. Ce dernier est à l’origine du Certificate of Advanced Studies (CAS) «Reconstruire l’Ukraine» qui permet aux participant-es – en majorité des femmes ukrainiennes réfugiées – d’apprendre à évaluer, à co-concevoir et à diriger des projets de réparation dans leur pays.

La parole sera également donnée à deux ancien-nes ministres, la Tunisienne Sihem Badi, opposante de Ben Ali, qui trouve une première fois refuge en France en 1992, où elle obtient son diplôme de docteure en médecine, avant de rejoindre son pays d’origine pour intégrer le gouvernement du président Marzouki en tant que ministre des Affaires des femmes. Quelques années plus tard, elle quitte à nouveau la Tunisie à la suite d'un changement de gouvernement. Quant à Wahid Majrooh, ancien ministre de la Santé en Afghanistan, il est aujourd’hui réfugié en Suisse. Il collabore régulièrement avec le programme InZone de l’UNIGE qui développe l’enseignement supérieur dans les communautés touchées par les conflits et les crises humanitaires. Ce même programme, InZone, a lancé un atelier de réalisation de podcasts dans le camp d’Azraq en Jordanie. À l’occasion du forum, les directeur et directeur exécutif d’InZone présenteront ce travail innovant et donneront la parole aux participant-es du camp, qui témoigneront de leur expérience d'apprentissage au travers d’une vidéo et d’un podcast.

Mesure d'intégration
Uni4Refugees vise à favoriser l’intégration des réfugié-es souhaitant étudier dans l’enseignement supérieur. Plusieurs établissements d’enseignement supérieur suisses et des acteurs/trices du domaine de l’asile et de l’intégration collaborent au projet qui est conduit par les équipes des programmes START! Study de l’Université de Zurich et Horizon académique de l’UNIGE. Invitée à prendre part au forum, Regula Mader, du Secrétariat d’État aux migrations, soulignera l’impact que ces programmes d’intégration peuvent avoir à l’échelle nationale.

Plus qu’une simple passerelle vers les études, Horizon académique est en effet une mesure de l’Agenda intégration Suisse ainsi que du Programme d’intégration cantonal. «Nous avons un mandat fédéral et cantonal pour accompagner des personnes hautement qualifiées dans leur intégration professionnelle en Suisse, explique Stefanie Gonzalez, déléguée à l’intégration à l’UNIGE. À ce titre, nous collaborons avec le Bureau de l’intégration et de la citoyenneté ainsi qu’avec l’Office pour l’orientation, la formation professionnelle et continue qui détectent les personnes issues de l’asile présentant des profils adaptés. Horizon académique les accompagne durant plusieurs années, de leur apprentissage du français à leur intégration sur le marché de l’emploi, en passant par les études dans l’une des hautes écoles genevoises.»

Alors qu’Horizon académique comptait 35 étudiant-es en 2016, il en compte aujourd’hui près de 500, avec autant d’hommes que de femmes, pour une moyenne d’âge de 33-34 ans. Depuis cette année, une association des alumni permet aux ancien-nes non seulement de rester en lien, mais aussi de participer au comité stratégique du programme. C’est en tant qu’alumnus d’Horizon académique qu’Abdelaziz Mohammad Obaid témoignera lors du forum. Ce Soudanais, qui a fui la guerre au Darfour à l’âge de 19 ans, a été détenu durant six ans sur l’île prison de Manus, au large de l’Australie, dont il a dénoncé les conditions de vie à l’aide d’un téléphone portable. En 2019, il a reçu à Genève le prix Martin Ennals pour la défense des droits humains. Depuis, le jeune homme a obtenu l’asile en Suisse et entamé des études en relations internationales à l’UNIGE.

Des personnes qui se battent pour leurs droits, le programme Horizon académique en recense un grand nombre. Comme ce Palestinien déterminé, travailleur social dans son pays, qui souhaitait poursuivre dans cette voie en Suisse. «À l’époque, Horizon académique ne se déroulait qu’à l’UNIGE, explique Stefanie Gonzalez. Ce cas m’a forcée à pousser les portes de la Haute École spécialisée (HES) et à engager un partenariat. Par la suite, cet étudiant a dû apprendre le français et faire le nécessaire pour entrer dans la filière, ce qui s’est avéré très difficile, mais il a persévéré et a obtenu son diplôme cette année. À peine deux mois plus tard, il a rejoint le Service de protection des mineurs de l’État de Genève. C’est grâce à des gens comme lui que le programme Horizon académique est ce qu’il est aujourd’hui.»