tiré du numéro : 13
date : 01/09/2007
auteur : Yoann Boget
résumé de l'article : Utilisation de "l'abus" dans le discours politique: justification de la loi genevoise sur l'aide sociale
L’obligation morale de travailler admet quelques exemptions. Les exclus du marché de l’emploi, pour obtenir ce droit, doivent prouver qu’ils font tout leur possible afin de réintégrer le monde du travail. Dès lors, « l’abus » en matière d’aide sociale peut prendre deux significations. Il peut s’interpréter comme une infraction à la loi représentée par la figure du tricheur ou comme une violation de la morale symbolisée par l’image du profiteur. L’arme discursive de « l’abus » joue sur l’ambiguïté du terme, mais ce n’est que lorsqu’il s’attaque au profiteur que ce concept prend toute sa force politique. En effet, lutter contre le tricheur ne nécessite que des mesures administratives en vue de l’application de la loi. Au contraire, la lutte contre le profiteur requiert une modification législative car cette forme « d’abus » ne peut exister que dans le décalage qui existe entre la morale et la législation. « L’abus » tire sa force politique de cet écart. Les débats parlementaires genevois qui ont accompagné l’élaboration de la loi sur l’aide sociale individuelle illustrent une telle utilisation de « l’abus ». L’importance des modifications apportées à la loi montre la puissance justificatrice du concept.