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Une brèche dans le “modèle standard” de la matière quantique

L'équipe du professeur Dirk van der Marel, du Département de Physique de la Matière Quantique (DQMP) de l'Université de Genève, a récemment découvert un tout nouvel effet dans un matériau magnétique dont la composition chimique est Nd2Ir2O7. Au zéro absolu (-273.15 degrés Celsius), ce matériau est isolant mais en augmentant sa température il devient conducteur électrique. En termes plus précis, le nombre de porteurs de charges électriques, c'est à dire le nombre de particules pouvant véhiculer l'électricité est proportionnel au carré de la température.

Le "modèle standard" de la matière quantique, la théorie de Landau des liquides de Fermi, considère le comportement de l'ensemble des électrons présents dans un solide comme la somme des comportements de chaque électron individuel. Les électrons sont caractérisés entre-autre par leur charge électrique, et par leur énergie qui augmente de façon linéaire avec la température. Ils ont aussi une troisième propriété qui caractérise le nombre d'états accessibles pour une énergie donnée, et que l'on appelle “entropie”[1].

Selon la théorie de Landau, une croissance du nombre de porteurs de charge devrait être accompagnée par une croissance bien précise de l'entropie. Dans le cas du matériau Nd2Ir2O7, nous n'avons pas observé cette relation: le chauffer en fait un meilleur conducteur électrique mais l'effet en terme d'entropie est au moins 10 fois plus petit que la valeur prédite par le “modèle standard” de la matière quantique.

Ces phénomènes inédits observés dans Nd2Ir2O7 présentent un défi majeur pour les scientifiques, nécessitent d'explorer au-delà du modèle de Landau et indiquent une séparation entre le comportement collectif et individuel des électrons. Ces résultats sont publiés dans la revue Nature Physics.

[1] L'entropie a une relation fondamentale avec le concept de temps, elle est au cœur de toute forme de locomotion et de processus biologique. Pour déterminer l’entropie d’un matériau, à l'aide d'une relation fondamentale, les expérimentateurs doivent mesurer sa chaleur spécifique (la quantité de chaleur à apporter au matériau pour que sa température augmente d’un degré). L’entropie est d’autant plus grande que la chaleur spécifique est élevée. Nous savons tous que nous nous brûlons les doigts lorsque nous touchons une casserole chaude, mais que l'on peut toucher sans problème son manche en bois même s'il est chaud. Cela vient du fait qu'un métal, qui est conducteur électrique, transporte la chaleur beaucoup plus facilement qu'un isolant. 

30 juin 2020
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