La carie dentaire devient une maladie parmi les plus fréquentes et les plus répandues dès le néolithique (7) (8). Elle est favorisée par l'agriculture et le changement de régime alimentaire. Décrite dès l'antiquité où le miel est un aliment apprécié, elle va gagner en importance en Occident. Au XVème siècle, elle est déjà considérée comme un fléau.
Aujourd'hui, la carie dentaire, classée par l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) troisième fléau mondial (7) est une pathologie encore présente en Suisse.
Dès 1962, Keyes a proposé quatre facteurs nécessaires mais non suffisants pour que la carie dentaire se développe. Ces quatre facteurs sont: le facteur substrat (sucres fermentescibles), le facteur microbien, le facteur terrain et le facteur temps (7). Quatre décennies de recherche ont permis de préciser d'avantage l'étiologie (voir annexes A) de la carie dentaire en identifiant des facteurs non nécessaires et non suffisants (7 ;9-14).
L'OMS a défini la carie dentaire comme étant « un processus pathologique localisé, d'origine externe, apparaissant après l'éruption, qui s'accompagne d'un ramollissement des tissus durs et évoluant vers la formation d'une cavité » (15 ;16).
L'OMS a défini la carie clinique aux fins statistiques comme étant « une cavité qui peut-être diagnostiquée au moyen du miroir et de la sonde » tout en soulignant que: « La carie clinique est un stade du processus de carie dentaire. La carie se développe à partir d'une lésion microscopique qui ne peut être diagnostiquée en toute certitude par les méthodes cliniques actuelles. Cette lésion finit par donner une cavité (carie clinique) qui, elle, peut être diagnostiquée à l'examen clinique » (15 ;16).
Imaginé par Klein et Palmer en 1940 (17), l'indice CAO comptabilise le nombre de dents adultes Cariées, Absentes et Obturées d'un individu (15). Lorsque l'unité de mesure est la dent, on parle d'indice CAOD. Chez un adulte ayant 28 dents, le score maximum résultant de la mesure de l'indice CAOD sera donc de 28 (18-20). L'indice co comptabilise le nombre de dents lactéales cariées ou obturées. Les dents lactéales absentes ne sont pas comptabilisées. Il n'est pas possible sur la base d'un simple dépistage de préciser si la dent a été perdue par exfoliation naturelle ou suite à une carie (16). Lorsque l'unité de mesure est la dent, on parle d'indice cod. Chez un enfant ayant 20 dents, le score maximum résultant de la mesure de l'indice cod sera donc de 20 (18-20).
Un individu présente des dents saines lorsque la somme des indices CAOD et cod est nulle.
En plaçant la somme des indices CAOD individuels d'une population donnée au numérateur et en plaçant le nombre d'individus composant cette même population au dénominateur, on obtient l'indice CAOD moyen pour cette population (12). On obtient de la même façon l'indice cod moyen d'une population.
En Suisse comme dans la plupart des pays d'Europe occidentale, l'indice CAOD a diminué ces dernières 25 années (21).
A Zürich en 1964 le CAOD moyen des enfants âgés de 8 ans est de 2.8 et le CAOD moyen des enfants âgés de 10 ans est de 4.8. En 1996, les valeurs ont chuté à 0.28 et 0.58 respectivement (22). Cette tendance se retrouve dans d'autres cantons suisses ainsi que dans les pays développés à économie de marché (21 ;23-26).
En 1962 un comité d'experts de l'hygiène dentaire a rendu un rapport technique (n°242) à l'OMS comprenant une série de recommandations afin de normaliser les relevés et les rapports concernant l'état de santé bucco-dentaire (15). En 1972, 1984 et 1994 d'autres rapports sont parus pour réévaluer et affiner ces directives (16 ;17 ;21).
La Clinique Dentaire de la Jeunesse (CDJ), bien que séparée administrativement de l'école de médecine dentaire, a été très longtemps localisée au même endroit à l'avenue Lombard à Genève. Aujourd'hui, la CDJ compte 13 antennes, généralement localisées dans des écoles primaires. Répartis sur l'ensemble du canton, les nouveaux cabinets sont financés avec l'aide des communes d'accueil.
Pour faciliter l'application des mesures préventives scolaires ainsi que l'accès aux soins, la CDJ est rattachée comme les écoles urbaines, suburbaines et rurales au Département de l'Instruction Publique (DIP) et dépend du Service Santé Jeunesse (SSJ) dont le mandat est la promotion de la santé de l'enfant dans le cadre de l'Office de la Jeunesse à Genève (27).
Les soins sont accessibles à l'ensemble des enfants domiciliés dans le canton de Genève. Là où il n'y a pas d'antenne, à savoir en zone rurale, des bus scolaires comprenant un cabinet dentaire et que l'on surnomme «les roulottes» permettent de réaliser des soins sur place.
Les honoraires dépendent du salaire brut des parents et le point de facturation est calculé en conséquence. Il existe des catégories de taxation allant de 1 à 5 puis une catégorie plus élevée dite SSO (Société Suisse d'Odontostomatologie).
Plus le revenu est faible, plus le point est bas, le minimum étant à 0.56 francs le point et le maximum étant à 3.10 francs le point.
Depuis septembre 1976 sous l'impulsion du directeur de la CDJ Alexandre Maurizio, chaque année scolaire, les classes enfantines, primaires et spéciales sont systématiquement examinées par des médecins-dentistes exerçant à la CDJ. On réalise des mesures cliniques réparties sur l'année scolaire en cours. Tout d'abord limité à un nombre restreint d'écoles, le dépistage a été offert progressivement à l'ensemble des écoles pour un total de 25'000 à 30'000 enfants examinés par an.
Les parents reçoivent un rapport d'examen de dépistage dentaire leur précisant les mesures éventuellement nécessaires (voir annexes). D'autre part, ces informations sont archivées au secrétariat de la CDJ.
La prévention primaire dans les écoles du canton de Genève se fait selon plusieurs modalités :
a) Modalités collectives lors du dépistage annuel :
On sensibilise les enfants sur l'étiologie de la carie dentaire, son impact sur la santé bucco-dentaire ainsi que les dispositions préventives possibles : exclusion dans la mesure du possible d'aliments cariogènes, consommation de produits non cariogènes voire anti-cariogènes, brossage trois fois par jour, utilisation de dentifrices, d'eau fluorée, application de gelée fluorée ou de laques fluorées; possibilités de réaliser des protections de sillons; nécessité d'un contrôle régulier variable selon que le patient se trouve dans une catégorie à potentiel carieux élevé ou faible (voir Définitions). Quand cela est possible, la technique de brossage est présentée et mise en application. Les moyens mis en oeuvre tiennent compte de l'âge des enfants.
b) Modalités collectives dans les écoles par les prophylaxistes :
Indépendamment des dépistages, des prophylaxistes dentaires (enseignantes spécialisées dans la prévention primaire) se rendent dans chaque école. Elles réalisent dans la classe une instruction et une motivation collective. Elles utilisent des vidéos, des panneaux comportant des illustrations, des textes ainsi que des formulaires que chaque enfant complète. Quand cela est possible, une séance de brossage pour l'ensemble de la classe (20 à 25 élèves) a lieu.
c) Modalités individuelles au cabinet par le médecin-dentiste :
Lors d'un rendez-vous au cabinet, avant ou après les soins, le praticien lorsqu'il le juge utile, peut réaliser une partie ou l'ensemble des mesures de prévention primaire précédemment énumérées (information, démonstration, motivation et application).
Cette étude rétrospective descriptive historique décrit l'évolution de la proportion d'enfants dans le canton de Genève, âgés de 4 à 12 ans avec dents saines, scolarisés et dépistés ces vingt dernières années. Lorsque l'on étudie la population d'enfants âgés de 4 à 12 ans dans son ensemble, on explore aussi à la proportion d'enfants ayant des obturations en ordre (B) ou des caries (C, D, E). Cette démarche présente l'intérêt de faire un bilan de la situation actuelle et d'évaluer la demande potentielle en soins pour mieux cibler l'action.
Lorsque l'on s'intéresse à une tranche d'âge ou à une école on n'étudie que l'évolution de la proportion d'enfants scolarisés dépistés avec dents saines. Toutefois, les graphiques explorant les obturations en ordre ainsi que les caries sont à disposition dans les annexes.
Les élèves de chaque classe sont examinés. Le temps moyen consacré à chaque enfant est inférieur à deux minutes. Dès qu'un problème est dépisté par le praticien, l'information est aussitôt notée par l'assistante et l'examen s'interrompt ce qui explique sa brièveté. Le dépistage est réalisé au moyen d'une sonde et d'un miroir sur le fauteuil dentaire. Chaque dent (lactéale ou définitive si elle est présente) est évaluée. On procède à l'examen en suivant les quadrants.
Les catégories relevées sont les suivantes :
Enfin, on évalue si le patient a besoin d'un traitement orthodontique ou si un traitement est déjà en cours.
En fonction des observations réalisées, l'atteinte la plus sévère dépistée chez l'enfant examiné permet de l'inclure dans l'une des catégories (de C à E). Il n'est classé qu'une seule fois et dans la catégorie la plus sévère (28). La fiche de relevé de dépistage est en annexe.
Cette acquisition d'informations ayant été réalisée avec une relative régularité, on dispose donc aujourd'hui de mesures cliniques couvrant l'ensemble de la population enfantine scolarisée âgée de 4 à 12 ans du canton de Genève. Il est possible de suivre séparément les degrés scolaires et des écoles, le tout avec 20 ans de recul de 1978 à 2000.
Ce sont environ 30 médecins-dentistes qui exercent à la CDJ soit à plein temps, soit à temps partiel. Une quinzaine d'entre eux réalise des dépistages. Le protocole de travail est connu de tous (8). Les données ont été saisies et explorées graphiquement avec le logiciel EXCEL 1997. Les tests statistiques khi-carré et régression linéaire ont été effectués avec les logiciels NCSS 97 et EpiInfo 6.04.
Nous avons cherché à nous rapprocher des recommandations de l'OMS en matière d'épidémiologie en séparant quelques catégories d'âge (15).
Les échantillons examinés ont été les suivants:
Afin d'explorer si certaines écoles sont plus à risques que d'autres, un choix subjectif de différents établissements dans différentes communes dont les codes figurent à droite, a été réalisé. Le nombre d'écoles sélectionnées varie en fonction du nombre d'enfants. Il s'agit de :
Écoles | Code |
Anières | 140 |
Champel | 43 |
Franchises | 61 |
Grand-Saconnex | 372-375 |
Lully | 165 |
Onex-Bosson | 323 |
Paquis centre | 102 |
Versoix | 431-434-437-440 |
Les résultats sont présentés sous formes de graphiques (voir annexes B ainsi que le CD-rom) pour Genève, degrés scolaires et écoles en utilisant l'année scolaire comme référence. A titre d'exemple, l'année scolaire 1999-2000, sera comptabilisée comme l'année 2000.
On ne prend pas en compte la catégorie F car son identification est incertaine. Une dent avec obturation provisoire peut encore contenir de la carie qu'il est prévu d'éliminer par la suite. Cette même dent peut être indemne de carie. Dans certains cas, cette dent peut être une dent de lait sur le point de tomber, ce qui dissuade de réaliser une obturation définitive inutile et coûteuse. Cette appréciation peut varier d'un praticien à l'autre.
Les données concernant les huit écoles sélectionnées comprennent différents degrés scolaires qui sont variables d'une école à l'autre et en fonction du temps. Les résultats sont agrégés par périodes de cinq ans pour obtenir un échantillon suffisamment important (voir CD-rom ECOLES). Aucun test statistique n'est envisageable pour ce type de données. Un tableau récapitulatif des valeurs moyennes du nombre d'enfants scolarisés examinés, de la proportion d'enfants avec dents saines entre 1978 et 2000 ainsi du nombre moyen d'enfants appartenant aux catégories C, D ou E entre 1996 et 2000 a été réalisé. Cela permettra de comparer les valeurs moyennes entre les huit écoles étudiées (voir CD-rom).
Une partie des graphiques obtenus est à disposition dans les annexes. Pour des raisons de pertinence et de clarté, seuls quelques graphiques sont présentés dans ce texte. La majorité des graphiques ne sont pas publiés, car ils n'apportent rien à la réflexion. Ils restent disponibles sur un CD-rom.
La population d'enfants scolarisés de 4 à 12 ans diminue entre 1978 (n= 31'242) et 1986 (n=27'163). A partir de 1991, le nombre d'enfants scolarisés augmente pour atteindre 34'512 enfants en 2000 (voir figure 1).
Entre 1978 et 1985 a lieu la phase de recrutement initiale attribuable à la mise en place du système de « couverture » du dépistage (voir figure 1 et annexes B). On s'intéresse donc par la suite au niveau de couverture stable de 1986 à 2000.
Le nombre d'enfants examinés augmente régulièrement sauf en 1996 (n=25'218) et 1997 (n=26'463) (voir figure 1). Soit la transmission des données ne s'est pas faite, soit des écoles n'ont pas été visitées. En 2000, 29'000 enfants ont été examinés (voir figure 1).
La proportion d'enfants avec dents saines, est passée de 33% en 1986 (IC 95% compris entre 32% et 33%), à 43% (IC 95% compris entre 42% et 44%) en 2000 (voir figure 2).
Une analyse de régression linéaire permet de modéliser une droite. Cette droite permet de prédire de manière fiable et de façon statistiquement significative les données selon une augmentation régulière sur un mode linéaire (voir figure 3).
L'équation de la droite est: Proportions = (-12.7093) + (0.0066) années (voir figure 3, tableau 1). Le khi carré de tendance obtenu est de 66.481 (p = 0.00000).
La proportion d'enfants ayant des obturations satisfaisantes diminue de 18.5% (IC 95% entre 17.5% et 19.5%) en 1986 à 16.0% (IC 95% entre 15.0% et 17.0%) en 2000.
La proportion d'enfants avec caries initiales diminue de 12.0% (IC 95% entre 11.5% et 12.5%) en 1996 à 9.0% (IC 95% entre 8.5% et 9.5%) en 2000.
La proportion d'enfants avec caries profondes est de 30.0% (IC 95% entre 31.0% et 33.0%) en 1986 et de 27.0% (IC 95% entre 26.0% et 28.0%) en 2000 (voir annexes B). La pente de la droite représentant les proportions est stable, exception faite d'une baisse en 1995 avec 22.0%.
La proportion de carie urgente montre une diminution de 4.0% (IC 95% entre 3.0% et 5.0%) en 1996 à 1.5% (IC 95% entre 1.0% et 2.0%) en 2000.
L'accroissement du nombre d'enfants avec dents saines est plus rapide que l'accroissement du nombre d'enfants avec dents cariées dans un rapport de 1 à 10. En 1995 il y a plus d'enfants scolarisés dans le canton de Genève avec des dents saines (10'656) que des dents cariées nécessitant des soins (9'112). Cet événement se reproduit en 1999 et 2000.
Le nombre d'enfant ayant des caries nécessitant des soins est en augmentation, ce qui correspond à 552 enfants supplémentaires (de 11'124 en 1986 à 11'676 en 2000), tout comme l'accroissement du nombre d'enfants ayant des dents saines qui est de 5042 (de 8'149 en 1986 à 13'173 en 2000).
La promotion des dents saines étant le sujet de ce travail, on ne commentera dans ce chapitre que les données relatives aux enfants présentant des dents saines lors du dépistage.
La proportion d'enfants scolarisés examinés et âgés de 4 ans avec dents saines (de 60% à 70%) est plus importante que la proportion d'enfants scolarisés examinés et âgés de 6 ans avec dents saines (de 40% à 50%) (voir figure 6).
La proportion d'enfants scolarisés examinés et âgés de 6 ans avec dents saines (de 40% à 50%) est plus importante que les proportions d'enfants scolarisés examinés et âgés de 9 ans et de 11 ans avec dents saines (de 20% à 30%) (voir figure 6).
Les proportions d'enfants scolarisés examinés et âgés de 9 ans et de 11 ans avec dents saines sont toutes les deux comprises entre 20% à 30% (voir figure 6).
On constate que les effectifs sont stables entre 1978 et 1990 à raison de 3'100 élèves scolarisés chaque année (voir figure 7). A partir de 1991, ce chiffre augmente de façon progressive jusqu'en 2000 pour atteindre un total 4'200 élèves.
Dès 1978, 80% des enfants scolarisés âgés de 4 ans sont couverts par le programme de dépistage et cela contrairement aux autres tranches d'âge (voir figure 7 et annexes B). Pour les enfants âgés de 4 ans, on peut donc explorer les données dès 1978.
La proportion d'enfants couverts par le dépistage n'atteint jamais les 90% (voir figure 8 et annexes B). L'explication est la suivante : à cet âge, les écoliers sont plus fréquemment absents de l'école que leurs aînés le jour du dépistage. Il est donc plus difficile de dépister une classe dans sa totalité le jour du dépistage.
La proportion d'enfants avec des dents saines est comprise entre 60% et 70% (IC 95% de 3%) avec une amplitude de 10% qui varie en fonction du temps (voir figure 8).
On ne peut pas conclure à une amélioration de la proportion d'enfants avec dents saines âgés de 4 ans entre 1978 et 2000.
La mise en place de la couverture de dépistage s'achève en 1986 où 88% des enfants scolarisés à Genève et âgés de 6 ans bénéficient du dépistage offert. Pour cette raison, on ne commentera les valeurs obtenues qu'à partir de 1986 (voir figure 9).
La proportion d'enfants scolarisés avec des dents saines âgés de 6 ans augmente de façon progressive entre 1986 et 2000 (IC 95% de 3%) de 40% à 50% (voir figure 10). Cet accroissement sur 14 ans, correspond à 671 enfants supplémentaires ayant des dents saines (voir annexes B).
La mise en place de la couverture de dépistage s'achève en 1986 où 90% des enfants scolarisés à Genève et âgés de 9 ans bénéficient du dépistage offert (voir figure 11 et annexes B). On commentera les valeurs obtenues dès 1986.
La proportion d'enfants scolarisés âgés de 9 ans avec des dents saines augmente de façon progressive entre 1986 et 2000 (IC 95% de 3%) où elle est de 22% à 30% (voir figure 12). Cela correspond à un accroissement de 442 enfants (voir annexes B).
La mise en place de la couverture de dépistage s'achève en 1984 et non en 1986 comme pour les tranches d'âge 6 ans et 9 ans. On commentera donc les valeurs obtenues dès 1984 où 93% des enfants scolarisés à Genève et âgés de 11 ans bénéficient du dépistage offert (voir figure 13). Cette couverture chute à 79% et 78% en 1997 et 1999 respectivement (voir annexes B).
La proportion d'enfants scolarisés âgés de 11 ans avec des dents saines, augmente progressivement entre 1984 et 2000 (voir figure 14) où elle est de 19% à 31% (IC 95% de 3%). Cela correspond à un accroissement de 361 enfants avec dents saines (voir annexes B).
Le nombre d'enfants scolarisés examinés est compris entre un minimum de 300 enfants pour 1978-1979-1980 à Champel et atteint un plafond de 3'330 enfants scolarisés examinés aux Pâquis pour les années 1986-1987-1988-1989-1990.
Entre ces deux extrêmes, on rencontre toutes les valeurs intermédiaires comme le montrent les graphiques correspondants (voir CD-rom DONNÉES ÉCOLES).
La proportion d'enfants examinés par rapport au nombre d'enfants inscrits est supérieure dans chaque école à 90% ce qui correspond à un bon taux de couverture de la population ciblée.
Dans chaque école étudiée, la proportion d'enfants examinés avec des dents saines ne varie pas de façon suffisamment importante en fonction du temps pour en tirer une conclusion.
Dans une étude classique utilisant l'indice CAO, un échantillon représentatif de 500 à 1'000 individus est examiné.
Ce travail présente l'avantage de couvrir dès 1986, 90% de l'ensemble de la population scolarisée entre 4 et 12 ans (n = 30'000 en moyenne pour le total des différentes tranches d'âge et n = 4'000 en moyenne par tranche d'âge).
L'indice CAOD donne une information quantitative de l'état bucco-dentaire des patients. La seule information qualitative concerne l'absence totale de caries dentaires.
Cette étude donne des informations qualitatives. Il est aussi possible de préciser la proportion d'atteinte dentaire, à savoir obturations saines, caries par ordre de sévérité (initiale, profonde, urgent) en gardant en tête que dans un groupe donné l'atteinte décrite masque des atteintes moins sévères.
Les objectifs du dépistage sur lequel repose cette étude sont de rendre service aux patients en les informant à propos d'éventuels problèmes dentaires, de les informer et de les conseiller à ce sujet et non de comparer les résultats avec d'autres études.
Dans une étude utilisant l'indice CAOD et étudiant toujours les mêmes écoles, l'encadrement dont bénéficiaient les écoliers biaise les résultats en accentuant la pression prophylactique sur les classes concernées. Cela influence de façon positive l'augmentation des dents saines (3), mais diminue sa représentativité par rapport à la population totale. Dans le travail présenté ici, 90% des enfants scolarisés bénéficient de la même prévention primaire et secondaire. Dans la recherche littéraire préliminaire à ce travail, aucune étude présentant cet avantage n'a été trouvée.
On observe une amélioration de la proportion d'enfants avec dents saines de 10% en 15 ans des enfants âgés de 4 à 12 ans scolarisés à Genève.
Le nombre d'enfants scolarisés âgés de 4 à 12 ans nécessitant des soins est de 11'676 en 2000. Cette même année, 9'000 enfants ont été soignés à la CDJ (3). En pratiquant des soins dentaires à la CDJ, on constate qu'il faut un à deux mois d'attente pour trouver une place disponible pour une première consultation. Ce temps de latence augmente au fur et à mesure qu'on se rapproche des vacances d'été. En mai, trouver une place disponible avant septembre est très difficile. Ceci suggère que les effectifs ou les infrastructures à disposition sont insuffisantes pour répondre à la demande.
L'oscillation observée de la proportion d'enfants âgés de 4 ans avec dents saines, comprise entre 60% et 70% de 1978 à 2000 ne permet pas de conclure à une amélioration de la santé bucco-dentaire dans cette tranche d'âge ces vingt dernières années. En revanche, pour les enfants âgés de 6 ans, l'amélioration de 10% de la proportion d'enfants avec dents saines entre 1986 et 2000 représente un progrès.
Pour les enfants âgés de 9 ans, l'amélioration de 10% de la proportion d'enfants avec dents saines entre 1986 et 2000 représente un progrès.
Les deux groupes concernant les enfants âgés de 9 à 11 ans suivent une évolution très similaire l'un par rapport à l'autre qui autorise à discuter les résultats en une seule fois.
Entre 1986 et 2000 on observe une amélioration de la proportion d'enfants avec dents saines qui augmente pour ces deux tranches d'âge (de 10%) ce qui représente un progrès. Contrairement aux tranches d'âge de 4 ans et de 6 ans, la proportion d'enfants avec dents saines est plus faible que la proportion d'enfants avec dents cariées (voir annexes B).
Néanmoins, on constate qu'en 2000 la proportion d'enfants avec dents saines est de 70% chez les enfants de 4 ans, 50% chez les 6 ans et 30% chez les 9 et 11 ans. Ces différences entre les groupes d'âge 4 ans et 6 ans ainsi que 6 ans et 9 ans suggèrent de renforcer la prévention primaire entre 4 et 9 ans.
L'augmentation de la proportion d'enfants avec dents saines et du nombre d'enfants dans le canton de Genève entre 1978 et 2000 a pour conséquence positive une augmentation du nombre d'enfants avec dents saines (voir annexes B).
L'analyse par école est présentée à titre indicatif uniquement. Aucune généralisation ne peut être tirée pour les raisons suivantes :
Sur la base de ces résultats, rien ne permet de conclure qu'une école nécessite davantage de moyens pour promouvoir la dent saine. Cette démarche serait d'autant plus dangereuse qu'elle présenterait un risque potentiel de discrimination des écoliers ce qui serait éthiquement et légalement inacceptable (27 ;29 ;30).
Cette étude est limitée par un certain nombre de biais. Il faut donc faire preuve de prudence quant à l'interprétation des résultats observés.
Le dépistage systématique parmi les enfants scolarisés âgés de 4 à 12 ans dans le canton de Genève montre :
Une augmentation de la proportion d'enfants avec dents saines qui est passée de 33% en 1986 n=27'163 à 43% en 2000 n=34'512.
En explorant certaines tranches d'âge, on observe que cette tendance se retrouve chez les enfants âgés de 6, 9 et 11 ans mais pas chez les enfants âgés de 4 ans.
Par ailleurs, en 2000 la proportion d'enfants avec dents saines est de 70% chez les enfants de 4 ans, 50% chez les 6 ans et 30% chez les 9 et 11 ans. Les différences entre les groupes d'âge 4 ans et 6 ans ainsi que 6 ans et 9 ans suggèrent de renforcer la prévention primaire entre 4 et 9 ans.
Aucune conclusion particulière ne peut être tirée lorsque l'on s'intéresse aux écoles (voir échantillon d'établissements, tableau paragraphe).
L'amélioration générale de la santé bucco-dentaire masque une augmentation de la demande en soins dentaires. Depuis 1990, on constate à Genève une augmentation du nombre d'enfants scolarisés qui explique l'augmentation du nombre d'enfants nécessitant des soins. A long terme la gestion de cette augmentation peut poser un problème. Il est souhaitable de surveiller l'évolution de la situation de façon à pouvoir répondre à toute augmentation de demande en soins.
L' « Evidence-based Medicine » a émergée dans les années 80 à l'école de Médecine de Mc Master dans l'Ontario. Abrégée « EBM » cette approche médicale « fondée sur des faits prouvés » ou encore « sur les meilleures preuves disponibles » a pour ambition selon David Sackett et ses collaborateurs de pouvoir faire « une utilisation consciencieuse, explicite et judicieuse des meilleures preuves scientifiques disponibles dans le processus de décision médicale relatif à un patient » (1 ;34).
Cela concerne autant l'apprentissage que la pratique de la médecine et touche les étudiants de médecine, les professionnels en formation continue ou les praticiens dans le cadre de leur activité quotidienne.
Le médecin est défini comme étant
« un clinicien compétent, capable d'intégrer au processus diagnostique les éléments suivants : l'expertise nécessaire pour recueillir les données de l'anamnèse et pour mener à bien l'examen physique, la connaissance du patient, la capacité d'évaluer ses croyances et les particularités de son environnement en relation avec son problème de santé.
Il doit également avoir une attitude et des habiletés qui favorisent une relation chaleureuse avec ses patients. Sans compétence clinique ni humanité, la médecine deviendrait une application systématique d'interventions virtuellement efficaces, mais ne convenant pas nécessairement à une personne en particulier.
Par ailleurs, si une discipline n'intègre pas les nouvelles données scientifiques dans les activités quotidiennes qu'elle chapeaute, elle devient dogmatique et la qualité des soins se dégrade » (35).
L''EBM se propose :
Cette approche s'appuie sur la démarche épidémiologique selon le diagramme suivant : (Leon Gordis (14)) :
L' Evidence-based Medicine peut être appliquée aux différentes spécialités médicales dont la médecine dentaire. Elle devient alors l' Evidence-based Dentistry qui est encore peu développée car plus récente (36-44).
Le but de ce travail n'est pas de réaliser une recherche de littérature systématique. Dans le cas général, on cherche à identifier par une démarche structurée (étapes 1,2 et 3 Gordis paragraphe 3.1) des recommandations pour la pratique clinique et à explorer une grille de lecture critique. On tente de répondre à une question que soulève l'exploration des données de la première partie à savoir : « Chez les enfants de moins de 12 ans, quelles mesures utiles et efficaces existent pour améliorer la santé bucco-dentaire ? »
Une stratégie de recherche a été utilisée pour interroger la base de donnée électronique disponible sur Internet : MEDLINE. Le logiciel de gestion de références bibliographique REFERENCE MANAGER 10 à permis d'obtenir une base de donnée de références bibliographiques (856 références). Une sélection et une lecture systématique de tous les articles obtenus dépassait le cadre de ce travail elle a donc été abandonnée.
Une autre stratégie de recherche a alors été réalisée à partir du site Internet Google.ch avec comme mots clefs Dentistry Guidelines et Prophylaxie dentaire. 17 sites Internet ou publications en anglais, en français et en allemand ont été trouvés (voir annexes C). 8 de ces RPC ont été sélectionnés car ils permettaient de répondre à la question posée. Ils ont été traités au moyen de la grille de lecture critique ANAES (45-47) voir annexes.
La Société Suisse d'Odonto-stomatologie en Suisse (48), l'Union Française pour la Santé Bucco-Dentaire en France (12) et la Deutsche Gesellschaft für Zahn-, Mund- und Kieferheikunde en Allemagne (49) sont les organismes nationaux qui émettent des recommandations pour les professionnels de la santé comme pour les particuliers. En Nouvelle-Zélande c'est le ministère de la santé qui remplit ce rôle (9).
Aux Etats-Unis (50), au Canada (11), en Angleterre (13) et en Australie (10), différentes organisations souvent indépendantes (dont la Task Force) remplissent ce rôle.
Un premier ensemble concerne les recommandations émises par la SSO, l'UFSBD, la DGZMK et le ministère de la santé néo-zélandais. Ce regroupement se justifie par le fait que ces quatre organismes font appel à des avis d'experts et ne proposent pas de méthodologie standardisée pour traiter le sujet. Des comparaisons sont réalisées entres ces quatre organismes en utilisant une grille de lecture ANAES (45-47).
Le deuxième ensemble se compose de quatre groupes, ayant en commun l'utilisation des protocoles d'études. Un score est proposé pour le niveau de preuves ainsi que pour les recommandations faites (voir paragraphe 3.4. et annexes C).
Des comparaisons sont réalisées entres ces quatre organismes en utilisant une grille de lecture ANAES (45-47).
Certaines références de la base d'articles RPC sont écartées car elles ne permettent pas de répondre à la question traitée.
L'utilisation d'une grille de comparaisons des recommandations permet de lire de façon systématique les travaux étudiés.
On compare la méthodologie de chaque groupe, ce qui renseigne sur la fiabilité des résultats obtenus.
Pour répondre à la question posée : « Chez les enfants de moins de 12 ans, quelles mesures utiles et efficaces existent pour améliorer la santé bucco-dentaire ? », des RPC basées sur une revue de la littérature proposent des solutions basées sur des niveaux de preuves élevés.
Il apparaît clairement que certains programmes de prévention primaire chez les enfants sont utiles et efficaces pour promouvoir la santé bucco-dentaire. Il n'est pas toujours possible de tenir précisément compte de la limite d'âge.
Le tableau ci-dessous permet de récapituler les résultats les plus évidents et les propositions associées avec le niveau de preuves quand cela est possible (voir annexes).
Type d'intervention démontrée efficace | Qualité de preuves de l'efficacité de l'intervention (Canada, USA, Ecosse, Australie) |
Recommandations (Canada, USA, Ecosse, Australie) |
Brossage régulier avec du dentifrice fluoré | I, I, Ib et I | A, A, A et 1 |
Scellements de fissures dans les mois suivant l'éruption dentaire | I, ?, Ia et I | A, ?, A et 1 |
Rinçage avec de l'eau fluorée | I, I, ? et I | A, A, ? et 1 |
Gels et vernis fluorés | I, I, Ib, IIb et I | A, A, B et 1 |
En utilisant une approche Evidence-based, on a pu obtenir rapidement des propositions jugées utiles et efficaces pour améliorer la santé bucco-dentaire. Cette démarche permet de présenter un rapport clair et bien argumenté en s'appuyant sur des niveaux de preuves et de recommandations nationales. Ceci est un moyen de communiquer plus facilement avec les responsables politiques et la population.