Séminaire 13
RRENAB 2010 / Samedi 12 juin de 14h30-16h00. Salle 2120.
Titre : Relectures en discontinuité : rétractation, « caviardiage » et subversion
Animation : Yvan Bourquin et Andreas Dettwiler
Thème : « A parler beaucoup, on ne saurait éviter de pécher » – Augustin puise dans la sagesse des anciens (Pr 10,19) pour légitimer ses Rétractations, entreprise qui consiste à soumettre ses propres écrits à une relecture critique et en corriger les plus graves erreurs. D’où notre questionnement : y a-t-il des phénomènes analogues dans le NT ? des relectures à caractère critique – autographes ou allographes, silencieuses ou explicites – qui ont pour fonction non pas de maintenir et d’approfondir la tradition, mais de corriger, subvertir, travestir ou carrément faire disparaître l’ancien ? Nous ferons des sondages dans plusieurs champs textuels : épistolaire (Paul s’est-il rétracté ?), évangélique (Mt a-t-il caviardé Mc ?) et apocalyptique (comment l’Ap subvertit-elle des récits de commencements ?).
Les exposés :
Yvan Bourquin (Université de Lausanne)
« Faut-il caviarder Matthieu quand il trahit Marc ? »
« I would like to construct a grid for reading Matthew that blocks out Matthew and allows only Mark’s Gospel to be seen as it was before Matthew came along. » Le désir exprimé dans ces termes par R.M. Fowler (Let the Reader Understand, p. 266) traduit une réaction certes excessive, mais qui pose néanmoins une double question : 1) Quel type de lecture Matthieu fait-il du récit de son prédécesseur ? La discontinuité est-elle suffisamment importante pour que l’on puisse parler de censure, voire de trahison ? 2) Sans retenir sérieusement la proposition de sanctionner Matthieu par un « caviardage », on peut se demander quelle est la part de l’appauvrissement et de l’enrichissement dans le cas de ce type de « lecture forte » qui relègue un peu dans l’ombre un récit antérieur.
Jacques Descreux (Lyon)
« Apocalypse 12 ou de l’art d’accommoder les mythes » « La condition de l’eschatologie, écrit P. Beauchamp, ou orientation de l’attente sur le cap d’un terme radical, est que le commencement soit présent à l’expérience actuelle de cette attente qui autrement ne serait pas celle d’une fin, mais d’une suite » (L’Un et l’autre Testament, vol. 1, p. 209). Dans l’Apocalypse de Jean, lorsque sonne la dernière trompette, celle qui doit voir l’accomplissement du mystère de Dieu, l’histoire biblique des commencements est reprise : la Femme et l’antique Serpent se rencontrent à nouveau (Ap 12). Cependant, cette rencontre convoque un autre récit de commencements : le mythe hellénistique de l’affrontement de Python, Léto et Apollon qui légitime le pouvoir des empereurs romains. Nous chercherons à voir comment Ap 12 utilise l’un et l’autre de ces récits pour actualiser l’attente de la fin.